Les Créanciers, comédie en quatre actes et en prose par M. Beaunoir, 19 germinal an 12 [9 avril 1804].
Théâtre Louvois
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Titre :
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Créanciers (les)
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Genre
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comédie
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Nombre d'actes :
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4
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Vers / prose
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en prose
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Musique :
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non
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Date de création :
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19 germinal an 12 [9 avril 1804]
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Théâtre :
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Théâtre Louvois
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Auteur(s) des paroles :
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Beaunoir
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Almanach des Muses 1805 (qui ne donne que trois actes à la pièce).
Les acteurs sont restés débiteurs de la moitié de la pièce envers les spectateurs.
Courrier des spectacles, n° 2600 du 20 germinal an 12 [10 avril 1804], p. 2 :
[Ce compte rendu est un magnifique récit de chute pour une pièce qui n'a pu être achevée. Motif essentiel : la pièce est immorale, et il a fallu remplacer au pied levé la fin de la pièce par une autre pièce pour laquelle il n'y avait même pas d'interprète : un des acteurs s'est transformé en lecteur.]
Théâtre Louvois.
Première Représentation des Créanciers.
Jamais créanciers ne furent plus mal reçus ; jamais aussi piece ne tomba avec plus de justice : elle auroit pu être jugée dès le premier acte, mais le public trop indulgent, et peut-être encore plus curieux, attendit jusqu’au second acte pour faire usage du sifflet. Au troisième c’étoit un chorus universel ; cependant le quatrième étoit commencé lorsque les acteurs, qu’on n’écoutoit plus depuis long-terns, se virent obligés de se retirer. Pour remplir la durée ordinaire du spectacle , on a donné M. Musard, pièce que le public a demandée, quoiqu’elle fût à sa cinquante deuxieme représentation. En l’absence de M. Barbier, Valcour a rempli le rôle du jeune homme le livre à la main.
Au sujet le plus ridicule, traité sans aucune espece de goût ni de raison, se joint dans cet ouvrage l’immoralité la plus condamnable. Il y paroît un grand nombre de personnages, et peut-être auroit-on de la peine à en trouver un qui ne fût un escroc.
Dorville a épousé sans dot Cécile, niece de Mondor, homme fort riche ; comptant sur la fortune de son propre oncle, le jeune époux a monté sa maison sur un haut ton, et il se trouve fort endetté, lorsqu’il apprend la mort de cet oncle II se propose alors de payer tous ses créanciers. Le premier qui se présente est madame Bénard, propriétaire de la maison où il demeure ; il lui est du dix mille écus, et elle en a le plus grand besoin pour acquérir une métairie. Dorville offre de lui vendre une terre dépendante de la succession de son oncle. Le prix en est de trois cents mille liv. ; mais en donnant sa maison de Paris et soixante mille livres de retour, madame Bénard possédera la baronie des Illettes. Marché conclu et signé. M. Brillant, bijoutier, succede à madame Bénard ; il lui est dû une somme assez forte, mais pour le contenter, Dorville lui vend la maison qu’il vient d’acheter, et reçoit pour arrhes un diamant de six mille livres. Madame Dupoint, marchande de dentelle, se présente : il ne lui est dû que trois mille livres ; elle acceple en payement le diamant qu’elle prend pour cinq mille livres, et donne pour les deux mille livres d’excédent, un fort beau voile. Ce dernier passe à son tour dans les mains de Mad. Dugout, marchande de modes, à qui il est dû deux mille livres, et qui est forcée de l'emporter quoiqu’elle préféroit six cents livres comptant. Les affaires en sont à-peu-près-là quand l'imprudent Dorville apprend par son ami Dorante que son oncle n’est point mort, et qu’il arrive.
Dans une position aussi embarassante, ce neveu si habile à succéder, prie son ami de lui prêter six mille livres Tandis que celui-ci est allé les chercher arrive Floricourt, frere de Cécile. Cet aimable jeune homme est ivre, il a voulu, dit il, se consoler de la perte de sa maîtresse qui l’a menacé de passer bail avec un autre amant, s’il ne lui donnait pas deux mille écus. Ici l’indignation a éclaté. Dorville ne peut prêter ce qu’il n’a pas, mais Dorante apportant celle somme, Floricourt se dégrise, saute dessus et court encore. Nous n’avons point de termes pour qualifier de pareils traits ; à compter de ce moment le dégoût et le bruit continuel nous ont empêché de suivre le fil de cet inconcevable ouvrage qui, ainsi que nous l’avons dit, n’a point été achevé.
Magasin encyclopédique, ou journal des sciences, des lettres et des arts, 9e année, 1804, tome V, p. 402 :
[De ce très court compte rendu, on retient trois mots : folies, immorales, ennuyeuses. Le théâtre, lieu où l’on s’amuse, mais sans immoralité, et sans folies (pas de folle gaîté).]
Les Créanciers.
Chute complète, la pièce n’a pas été achevée ; c’étoit un tissu de folies aussi immorales qu’ennuyeuses.
Le Nouvel Esprit des journaux français et étrangers, tome huitième, floréal an XII [avril 1804], p. 268-269 :
[Le critique ne sait comment exprimer son indignation devant le spectacle qu’on a prétendu infliger aux nombreux spectateurs du Théâtre Louvois : on a osé mettre sur la scène « un mauvais lieu de la plus mauvaise espèce », un « prodigue imbécille » et une « canaille ». Le dialogue était de surcroît rempli de « platitudes grossières et triviales », au point qu’on se demandait comment Picard, dont on connaît le talent pour dénicher des talents avait pu choisir une telle pièce. La pièce n’a pas été achevée, et le public a demandé une pièce de Picard, Monsieur Musard.]
THÉATRE LOUVOIS.
Les Créanciers, comédie en quatre actes.
On a dit que Louvois était la petite maison de Thalie; mais le jour qu'on y donna les Créanciers, il ressemblait à un mauvais lieu de la plus mauvaise espèce, et à un coupe-gorge. On y voyait un prodigue imbécille se ruinant de sang-froid pour ne pas détromper sa femme, qui le croyait riche actuellement, quoiqu'il ne le fût qu'en perspective II faisait des affaires, donnait une obligation de dix mille francs pour cent louis qu'on lui comptait en or, et cinquante qu'on lui promettait en méchantes nippes- Quelquefois le théâtre se trouvait rempli de canaille : à la lettre ! On peut ranger dans cette catégorie un frère de la femme du prodigue, qui se présentait ivre, et emportait, sans le consentement de son beau-frère, deux mille écus que celui-ci venait d'emprunter, dont il avait le plus grand besoin, et qui se trouvaient sur sa table. Le motif ds l'emprunt forcé fait par ce jeune fou, c'est que sa maîtresse devait passer bail avec un autre, dans le jour, s'il ne lui fournissait justement cette somme de six mille francs. Enfin, un valet disait des injures au prodigue, qui ne lui payait pas ses gages, Un benêt d'oncle arrivait pour dire que « c'est une bonne chose qu'une bonne femme. » Tout était à peu près de cette force. Avant la fin du quatrième acte, l'indignation du public a fait baisser la toile ; on a demandé Musard, afin de prouver au directeur de Lonvois qu'on voulait bien lui pardonner d'avoir assemblé une si nombreuse compagnie pour entendre des platitudes grossières et triviales ; cependant on répétait de tous côtés : « Comment se peut-il que Picard reçoive de telles pièces ? » La sienne a fait oublier l'autre ; et l'auteur a ainsi réparé l'échec qu'avait éprouvé le directeur.
L'Opinion du parterre, Germinal an XIII, p. 269 :
19 Germinal.
Première représentation des Créanciers, comédie en quatre actes, en prose, de Beaunoir. Chute complète.
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