Dans quel siècle sommes-nous ? vaudeville en un acte, de Jouy, Longchamps et Dieulafoy. 25 pluviôse an 8 [14 février 1800].
Théâtre du Vaudeville
Almanach des Muses 1801
Le 18e siècle est-il fini, ne l'est-il pas ? Cette question agitée souvent et long-temps dans les journaux, a donné l'idée de cette jolie bagatelle, dans laquelle M. Précis hésite à unir sa fille à celui qu'elle aime, parce qu'il ne devait la marier qu'à la fin de 1800. Cependant le mariage se conclut, parce que les deux amans sont pressés, et que la question étant soumise à un astronome, le jeune homme le force ou de se battre ou de se décider au gré de son amour. L'astronome prend ce dernier parti.
Sur la page de titre de la brochure, Paris, chez le Libraire au Théâtre du Vaudeville, an VIII :
Dans quel siècle sommes-nous ? Vaudeville en un acte. Par les citoyens Dieulafoy, Jouy et Longchamps. Représenté, pour la première fois, sur le théâtre du Vaudeville, le 25 nivose, an 8.
La date donnée par la brochure ne correspond pas avec la date de la création donnée par le Courrier des spectacles, qui est le 25 pluviôse an 8 [14 février 1800].
Courrier des spectacles, n° 1078 du 26 pluviôse an 8 [15 février 1800], p. 2 :
[Le nom des « trois aimables auteurs du Vaudeville » n'est pas cité, ni ce jour, ni le lendemain.]
Théâtre du Vaudeville.
La fameuse question : le Siècle est-il fini ? agitée naguères dans tous les journaux, a fourni à trois aimables auteurs du Vaudeville le sujet d’une bluette intitulée : Dans quel Siècle sommes-nous ? qui a réussi. A demain l’analyse.
Courrier des spectacles, n° 1079 du 27 pluviôse an 8 [16 février 1800], p. 2 :
[Pièce de circonstance : en 1800, on se demande si le siècle commence en 1800 ou en 1801. C'est l'occasion de produire une petite pièce jouant de ce grave problème à partir d'une intrigue convenue (encore une histoire de mariage soumis à une condition absurde). Le mariage a finalement lieu, et le critique se contente de citer quelques couplets qu'il juge saillants, autour de l'idée du siècle nouveau. Il signale que la pièce a fait naître des réactions négatives, que les auteurs devront corriger (on aime bien donner l'illusion que le public est souverain...). Il cite ensuite les interprètes qui n'ont pas démérité. Mais il se pose la question de savoir si le personnage de M. Précis « est bien dans la nature », et répond plutôt par la négative.]
Théâtre du Vaudeville.
Voici l’analyse de la pièce donnée avant-hier à ce théâtre sous le titre de : Dans quel Siècle sommes-nous ?
M. Précis ne veut marier sa fille que le premier jour du siècle nouveau, suivant en cela la coutume de son père. Or, il s’agit de savoir si le siècle est fini, ou non, au premier janvier 1800. Surville et Elysa, fille de M. Précis, sont pour l’affirmative, parce qu’ils brûlent d’être unis. Le père est presque de leur avis, mais Belval, oncle de Surville, et Mlle Antivieux, sœur de Précis, sont d’un avis contraire, l’un parce qu’il doit à Précis 35,000, et l’autre parce que ce calcul offense son amour-propre en la vieillissant d’une année. Mlle Antivieux promet à l’Etoile, astronome, son cœur et sa main, s’il décide que le siècle n’est pas fini ; mais Surville lui propose, de son côté, un duel, et l’Etoile cède à la crainte ; il déclare donc que le siècle est fini. Le père, joyeux, signe le contrat, et lorsque Belval revient avec une assertion contraire, et la preuve clairement démontrée, le père ne peut plus revenir sur sa signature, et les amans sont unis.
— Voici deux couplets qui ont paru assez saillans :
Belval.
Voici ce que prédit l’Almanach de Liège :
En France , au siècle dix.neuvième,
Plaisirs naissent de toutes parts :
On boit, on chante, on lit, on s’aime,
Le luxe ramène les arts ;
L’Etat, par un bras tutélaire,
Au premier rang est replacé.
Précis.
Vraiment , il pourroit bien se faire
Que le siecle fût commencé.
Belval.
Avec le siècle doivent naître
Les grands talens, les bonnes mœurs ;
L’intrigue u’ose plus paroître,
La franchise est dans tous les cœurs.
Dans ce siècle point de libelles,
Oubli généreux du passé,
Tendres époux, femmes fidells.
Mlle d’Antivieux (rejettant le journal où elle vient
de lire l'article opposé à son opinion)
Le siècle n’est pas commencé.
On a remarqué dans ce vaudeville quelques taches que les murmures du public ont indiquées aux auteurs, et que ceux-ci s’empresseront sans doute de faire disparoître. Le rôle de M. Précis est joué avec beaucoup de vérité par le cit. Vertpré, mais ce personnage est-il bien dans la nature ? Aimer mieux payer 300 francs que 283, et cela pour arrondir tous les comptes et ne point déroger à la coutume de sa famille ! Le cit. Carpentier a été comique dans celui de l’Etoile, et les cit. Duchaume, Julien, Lenoble, et la cit. Henry ont contribué par leur jeu au succès de l’ouvrage.
G ***.
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