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Duval, ou Une erreur de jeunesse

Duval, ou Une erreur de jeunesse, opéra en un acte, d'André-Joseph Grétry neveu, musique de P. L. Marini, 14 prairial an 8 [3 juin 1800].

Théâtre de l'Ambigu Comique

Almanach des Muses 1801

Sur la page de titre de la brochure, Paris, chez Roullet, an Dix (1803) :

Duval, ou une erreur de jeunesse, comédie en un acte, en prose, mêlée de chants. Représentée pour la première fois sur le Théâtre de l'Ambigu-Comique, le 14 Prairial an 8. Par A. Grétry, Neveu. Musique de P. L. Marini.

La pièce est précédée d'un « Avertissement » :

Avertissement.

Une historiette de Rétif-de-la-Bretonne, ayant pour titre Le père valet, m’a fourni le sujet de cette petite pièce qui, dans l'origine auroit été jouée au Théâtre de la rue de Louvois, si une mauvaise administration n’avoit causé la clôture subite de ce Spectacle, où brilloit alors le talent rare et précieux de Mademoiselle Rouxellois.

Rétif-de-la-Bretonne a sans doute beaucoup écrit, mais Le père valet est peut-être la seule de ses anecdotes qui soit susceptible d'un effet théâtral : une morale pure, un bon ton, voilà, d’ailleurs, ce qu’on rencontre dans cet écrit, que n'assaisonne aucune personnalité outrageante ; et si cet infatigable écrivain avait toujours suivi cette marche, il n’aurait pas eu besoin de cuirasser si souvent ses épaules.

Une « personnalité outrageante », c’est une allusion personnelle dont la victime pourrait avoir à se plaindre. Ce genre de mise en cause est sévèrement jugé.

Courrier des spectacles, n° 1187 du 15 prairial an 8 [4 juin 1800], p. 2 :

[Le compte rendu s’ouvre d’emblée sur le résumé de l’intrigue, plutôt conventionnelle (le père parti au loin, le fils qui se marie à son retour, néglige sa femme, ce qui ne l’empêche pas de la soupçonner, mais qui revient à elle quand elle lui révèle que celui qu’il a pris comme intendant est son père : intrigue d’une « comédie mêlée de chants », selon la brochure...). Le jugement porté par le critique est positif, il y retrouve les éléments nécessaires à une bonne pièce : de l’intérêt, des situations dramatiques, une excellent morale. L’auteur a été nommé. Quant à la musique, elle est riche en beautés « vivement senties » par le public. Mais on ne nous dit pas de qui elle est.]

Théâtre de l' Ambigu-Comique.

Duval, en partant pour l'Amérique, avoit laissé à Paris un orphelin au berceau. Après plusieurs années d’absence, il est revenu chez ce fils, nommé Valsain : il s’est dit ami de Duval, et à ce titre a été reçu par le jeune homme en d’intendant. Il exerce cette charge, jouissant de la confiance de Valsain, qui depuis un an, et d’après ses conseils, a épousé Sophie. Mais Valsain est jeune, les mauvaises compagnies l'entrainent et lui font oublier sa femme. Duval se permet des remontrances que Valsain écoute avec peine Un valet flatteur pousse la patience du prétendu intendant, qui veut le forcer de sortir. Le jeune homme irrité chasse Duval lui-même. Une lettre que celui-ci écrit à Sophie, pour l’engager à fuir un époux infidèle, tombe entre les mains de Valsain, qui se croit trahi par son épouse. Bientôt il surprend Duval conseillant, et même ordonnant à Sophie de le suivre. Emporté par la rage et par la jalousie, il va le percer de son épée, lorsque Sophie s'écrie : Il est ton père. Valsain désarmé reconnoît son erreur, chasse son indigne conseiller, et reprend les sentimens d’un bon fils et d 'un tendre époux.

Tel est le fonds de Duval, opéra en 1 acte, donné hier à ce théâtre. On a beaucoup applaudi cet ouvrage qui offre de l'intérêt, des situations dramatiques, et sur-tout une morale sévère. Il fait honneur à la plume du cit. Grétry neveu, qui a été demandé, et qui a paru au milieu des marques générales d’approbation. La musique, dont chaque morceau est parfaitement exécuté par l'orchestre, renferme des beautés qui ont été vivement senties. F. J. B. P. G***.

Courrier des spectacles, n° 1187 du 19 prairial an 8 [8 juin 1800], p. 2 :

[Courrier des lecteurs : l’auteur de la lettre est assez d’accord avec le jugement que le journal a porté sur la pièce, à deux réserves près. Il critique assez vigoureusement les interprètes : un acteur trop jeune pour son rôle, et trop ardent, une actrice qui n’est pas dans le ton. Comme chaque fois qu’on trouve ce genre de critique, le rédacteur souligne qu’il n’a pour but que d’améliorer le jeu des acteurs. L’autre critique porte sur le remplacement d’un couplet par un autre, détestable. Prière aux acteurs de le rétablir ! On ne sait pas comment le couplet supprimé est arrivé entre les mains de l’auteur de la lettre.]

AU RÉDACTEUR.

Je suis, à quelque chose près, de votre avis, citoyen , à l'égard de la petite pièce dont vous avez rendu compte dans un de vos précédens numéros (Duval, ou une Erreur de jeunesse). Il y a dans cette production un peu froide quelques scènes bien écrites, un excellent ton, une meilleure encore ; mais ne pensez-vous pas que le jeu des acteurs a souvent nui aux effets des situations les plus dramatiques ? Celui qui remplit le rôle de père paroît trop jeune, et prend trop souvent le ton de la fureur pour celui de la sévérité. L 'actrice qui joue le rôle de Mme Valsain ne dit pas avec assez d 'art : C’est votre père ! mot qui détermine le dénouement. Elle chante trop lentement sa jolie romance, etc. Ne connoissant pas même de nom ces artistes, je ne puis leur donner de vive voix mes conseils dictés par l'intérêt que je prends aux auteurs, mais je vous regarde comme l'interprête de tous les amis des arts, et je vous prie de me donner une petite place dans votre estimable journal.

Parmi les couplets qui ont été applaudis dans cette pièce , vous avez pu remarquer celui- ci qui est dans la bouche du valet, et dont la musique est charmante :

Entre nous deux en vérité
La partie est trop inégale ;
Je charmerai par ma gaité ;
Il ennuyera par sa morale ;
C 'est donc alors qu 'il faut choisir,
Et c'est alors que je l'emporte.
Toujours pour garder le plaisir
On met la raison (bis) à la porte.

Mais ce que vous n 'avez pas remarqué, c 'est qu'au lieu du couplet qui suivoit celui-là, on en a chanté un détestable. J'ai bonne mémoire, et je me rappelle celui qui a été rayé par je ne sais qui , et je ne sais pourquoi.

Une fois maitre du terrein,
Ah ! combien je le fertilise !
Je serai fripon, j'en convien ;
Mais probité n 'est que sottise.
C 'est le fripon que maintenant
Pour ses vertus chacun renommes,
Je vais voler et tant et tant
Qu'enfin j'aurai l'air (bis) honnête homme.

J’engage les artistes du théâtre où se joue la pièce à rétablir, s' ils le peuvent, le couplet retranché.

Salut et considération,

F . LEMOYNE .

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