La Destruction de Jérusalem, opéra italien en deux actes, musique de Zingarelli, 4 mai 1811.
Odéon. Opera Buffa.
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Titre :
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Destruction de Jérusalem
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Genre
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opéra
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Nombre d'actes :
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2
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Vers / prose
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vers (en italien)
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Musique :
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oui
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Date de création :
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4 mai 1811
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Théâtre :
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Odéon, Opera Buffa
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Auteur(s) des paroles :
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Compositeur(s) :
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M. Zingarelli
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Sur la page de titre de la brochure (bilingue), à Paris, au Théâtre de l’Impératrice, 1811 :
La Distruzione di Gerusalemme, dramma per musica, in due atti.
La Destruction de Jérusalem, opéra en deux actes, Représenté pour la première fois sur le Théâtre de S. M. l’Impératrice, à l’Odéon, le 4 mai 1811.
Le nom du compositeur figure sous la liste des personnages.
Magasin encyclopédique, ou Journal des sciences, des lettres et des arts, 16e année, 1811, tome III, p. 157-158 :
ODÉON. OPERA BUFFA.
La Destruction de Jérusalem, opéra seria en deux actes , joué le 4 mai.
Le sujet de cette pièce est la destruction du Temple de Jérusalem par Titus. La ville est défendue par Manasse, fils de Giscala. Un ambassadeur des Romains vient proposer des conditions honteuses aux assiégés ; Manasse le renvoye, et marche contre Titus, mais le sort des armes trahit son courage ; il tombe entre les mains du vainqueur, qui lui permet de revoir sa femme et son fils, et d'amener les Israélites à la paix. S'il échoue dans sa mission, sa mort
est certaine. Le premier il s'oppose à toute soumission indigne du peuple qu'il commande, et marche à la mort. Bientôt les Romains entrent dans la ville, et le temple est livré aux flammes.
Le début de M. Tacchinardi, dans cette pièce, a été brillant. On ne peut pas chanter avec plus d'ame et de talent. Madame Barilli a bien secondé le débutant qui a été redemandé ainsi qu'elle après la représentation.
Journal de l’Empire, mardi 7 mai 1811, p. 3-4 :
De l’opera comique, passons à l'opéra sérieux, et prenons garde que le sérieux ne nous mène à l'ennui.
THEATRE DE L’IMPERATRICE.
Première représentation de la Distruzione di Gerusalemme (la Destruction de Jérusalem), opéra en deux actes.
C'est un oratorio, c’est-à-dire un opéra de carême, dont nous ferions bien notre carnaval, nous qui jeûnons si souvent de bonne musique. J'observe que dans ce moment Jérusalem, une des villes les plus tristes du monde, contribue beaucoup aux plaisirs de Paris. On vient de nous offrir la Destruction de Jérusalem en musique ; on nous promet, chez Franconi. les Chevaliers de Jérusalem , en pantomime, et nous lisons l’Itinéraire de Paris à Jérusalem, en elle prose : non pas dans l'intention de faire le voyage, mais pour jouir de la brillante imagination du voyageur.
Cet oratorio. établi en huit jours, ne s'est point trop ressenti de cette précipitation extraordinaire : combien d'ouvrages préparés pendant deux mois n'ont pas eu un sort si heureux. La musique a a excité les plus vifs transports ; elle est d'un virtuose nomme Zingarelli. que je ne connoissois encore que par des ariettes banales, que les chanteurs et cantatrices colportent sous son nom dans les concerts : on dit qu'il est très vieux, et que par conséquent son enfance remonte jusqu'à l'époque fortunée de la mélodie et du chant. Son ouvrage est d'un compositeur plus savant dans l'art de plaire et d'attacher, que certains musiciens qui passent pour des dieux dans leur parti.
Le premier acte est plein et nourri d'un bout à l'autre de beautés du premier ordre. Le trio, le duo, te chœur final, sont particulièrement des chefs d'œuvre, où l’on trouve la grâce réunie à la force et la simplicité à la magnificence partout du beau chant : rien de confus, rien de charge ; une expression naturelle et vraie. Ce style est nouveau pour ceux à qui notre grand opéra avoit persuadé qu'il n'y a point de majesté sans pesanteur, point de pathétique sans cris, point d’harmonie sans bruit, sans confusion. Au second acte, la prière des jeunes Israélites, le quatuor et la dernière scène sout encore des morceaux du plus grand effet. Il y a peu d'action : tant mieux ; il n'en faut pas davantage pour la musique.
Le temple de Jérusalem est prêt à succomber sous les efforts de l'armée romaine, commandée par Titus Ce prince généreux envoie Flavius Josephe proposer aux assiégés de se rendre, pour épargner le sang. L'orgueil de Jean de Giscala et de son fils Manasse rejette toute proposition. Manasse. général des troupes de son père, est vaincu et fait prisonnier. Titus l'envoie pour négocier la paix : sa vie doit être le prix du succès de sa négociation. Le père dénaturé renvoie son fils à la mort, et s'obstine à la guerre. Manasse fait ses adieux à ce père inhumain, à sa tendre épouse Marianne, et à son fils Eléazar. qui n'est encore qu'un enfant. Les Juifs font une tentative malheureuse pour rompre ses fers. Manasse reçoit un coup mortel de ses gardes, et vient expirer sur la scène : sa mort est suivie de l'embrasement du temple.
La voix angélique de Mad. Barilli, qui joue le rote de Marianne, a beaucoup contribué à exciter l'enthousiasme : on ne peut entendre des sons plus mélodieux et plus touchans. L'expression de cette cantatrice n'est point dans les gestes et dans les mouvement extérieurs ; elle est dans l'accent juste et vrai qui anime son chant. Sa voix se marie très-bien avec celle de Tachinardi, qui est ferme, pleine et sonore. Ce chanteur a obtenu le plus brillant succès ; il a de l'ame, de l'énergie et du sentiment ; il est acteur : sa voix est assez belle, assez fraiche pour n'avoir pas besoin de quelques ornemens superflus. Il faut laisser cette ressource aux vieilles voix, aux organes usés qui brodent la note qu'ils ne peuvent soutenir. Ce petit sacrifice que Tachinardi fait à la mode n'empêche pas que, dans les momens pathétiques, il ne revienne au style simple et naturel. Barilli joue le rote de Jean de Giscala : sa taille est avantageuse, sa figure noble, sa voix pleine ; il chante avec rondeur et simplicité, et rien ne lui manque de ce qui est nécessaire pour bien rendre son rôle. Mais les spectateurs ont trop de mémoire ; ils ne veulent pas oublier qu'ils l'ont vu faire des lazzis et se souviennent mal à propos du bouffon quand ils ne doivent songer qu'au héros.
La Destruction de Jérusalem me paroît faite pour occuper long-temps la scène avec honneur : ses ruines serviront à élever un temple à l’Opera-Seria. Le directeur n'oublie rien de ce qui peut attirer les amateurs ; il a rassemble à grands frais les meilleurs sujets de l'Europe : deux excellens tenores, deux femmes incomparables rendent sa troupe la première qu'il y ait dans le monde : quand la disette des talens est partout, l'abondance est sur son théâtre. Il est digne de la métropole des arts et de la première ville de l’univers d’avoir le plus beau théâtre de musique. GEOFFROY.
L’Ambigu, ou Variétés littéraires et politiques, volume XXXIII (Londres, 1811), n° CCXCIII (20 mai 1811), p. 383-384 :
La première représentation de la Destruction de Jérusalem, opéra séria, musique de Zingarelli, avait attiré hier au théâtre de l'Impératrice une affluence considérable d'amateurs. Le poëme a le défaut ordinaire des pièces italiennes, le décousu et le manque d'intérêt. Celui-ci y joint de plus une lenteur fatigante ; mais la musique animée, pittoresque et gracieuse, fait oublier ces défauts. La manière dont cet ouvrage a été exécuté a puissamment contribué au succès brillant qu'il a obtenu. Tacchinardi, attendu avec une sorte d'impatience, y a déployé le plus beau talent comme chanteur et même comme acteur ; beauté d'organe, pureté de sons, étendue, douceur, flexibilité, telles sont les qualités de sa voix, qui fait oublier ce que son physique a de défavorable. Il chante avec une méthode parfaite, avec une expression tantôt touchante et gracieuse, tantôt pleine de vigueur et d'énergie ; partout il déploie une grande intelligence musicale et scénique.
Madame Barilli qui paraissait pour la première fois dans l'opéra séria, a enlevé tous les suffrages par le charme, la légèreté, l'extrême justesse de ses sons, et l'art admirable avec lequel elle les dirige. Elle a excité le plus vif enthousiasme, particulièrement dans un duo délicieux qu'elle a chanté avec Tacchinardi au premier acte, et dans un grand air du second.
Un autre débutant a paru dans cette pièce ; il se nomme Benelli; c'est un tenore. Sa voix a peu de timbre, mais il chante très-agréablement et n'a point paru déplacé à côté de ces grands talents.
La représentation de cet ouvrage a de l'éclat par les décorations, par les chœurs et par les costumes.
Tacchinardi et Madame Barilli ont été demandés après la représentation ; et ont paru au milieu des plus vives acclamations.
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