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Le Dénoûment impromptu

Le Dénoûment impromptu, vaudeville en un acte à l'occasion de la paix, de M. Le Craig, 8 janvier 1806.

Théâtre de la Porte Saint-Martin.

Le Mémorial dramatique pour 1807, p. 166 donne comme date le 4 janvier 1806, mais le Courrier des spectacles précise bien que la première a eu lieu le 8.

Almanach des Muses 1807.

Titre :

Dénouement impromptu (le)

Genre

vaudeville à l’occasion de la paix

Nombre d'actes :

1

Vers ou prose ,

en prose, avec des couplets en vers

Musique :

vaudevilles

Date de création :

8 janvier 1806

Théâtre :

Théâtre de la Porte Saint-Marin

Auteur(s) des paroles :

Le Craig

Courrier des spectacles, n° 3266 du 9 janvier 1806, p. 2-3 :

[Un bien long article sur une pièce de circonstances. Mais il s’agit de rendre hommage à l’empereur vainqueur de la coalition de quatre rois. Pour célébrer la paix que la victoire apporte, l’auteur utilise les ressources du théâtre dans le théâtre : deux poètes, l’un optimiste, l’autre pessimiste, travaillent côte à côte. Et celui qui écrit une comédie la montre à tous. Cette pièce est une intrigue sentimentale, une jeune fille amoureuse d’un prisonnier allemand, situation que vient magiquement débloquer l’annonce de la victoire française et la signature de la paix. Les ennemis d’hier deviennent des amis. Pour célébrer la joie générale, un divertissement clôt la pièce, et célèbre la grandeur de Napoléon. Après avoir cité des couplets patriotiques, le critique souligne que la « représentation n’a pas été sans orages », entre sifflets et applaudissements, les allusions à l’armée et à l’empereur étant saluées. Les acteurs de la Porte Saint-Martin ne sont pas des chanteurs, mais leur prestation a été satisfaisante, une des actrices étant particulièrement louée.]

Théâtre de la Porte St-Martin.

Le Dénouement impromptu, vaudeville à l’occasion de la paix.

C’est sur-tout au courage de nos armées et au génie du héros qui les commande qu'il appartient de donner des dénouemens impromptu aux plus grands événemens de l’Europe. Qui l’eût prévu, quand tout le continent sembloit s’armer contre les destinées de la France, que trois mois suffiroient pour dissiper cette ligue, détruire les plus formidables armées, et faire succéder les hymnes de paix aux chants guerriers de la victoire ?

C’est à ces prodiges de la valeur et du génie que l'auteur de la pièce nouvelle a voulu consacrer un léger tribut d’admiration et de reconnoissance. D’autres théâtres pourront offrir des conceptions plus fortes, des chants plus héroïques, mais M. Le Craig aura au moins l’avantage d’avoir précédé ses rivaux et chanté le retour de la paix dans un ouvrage agréable dont voici le sujet :

Deux poètes de caractère fort différent, sont dans l’habitude de se réunir chez M Fricoteau, restaurateur de guinguette, pour y travailler à leurs poèmes. L’un toujours prêt à rire, compose pour les théâtres ; l’antre, toujours prêt à pleurer, s’est voué au genre élégiaque. Le premier se nomme Jovial; le second s’appelle Larmoyant ; c’est le médecin Tant-pis et le médecin Tant-mieux. Jovial ne voit partout que sujets de plaisir et d’espérance ; Larmoyant ne voit jamais que des sujets de désolation. La coalition sur-tout lui porte le désordre dans les idées. Il ne rêve que les quatre Rois conjurés, les Cosaques, les Houlans, les batailles, les revers et les défaites.

Dans l'espoir de nous subjuguer,
Je vois quatre Rois se liguer,
        C'est ce qui me désole.

Jovial ne voit que le bras du héros qui commande nos armées :

Pour nous je vois un conquérant ;
S'ils sont quatre, il en vaut bien cent,
        C’est ce qui me console.

Les deux poëtes se mettent à composer ; Jovial s’occupe d’une comédte dont toutes les scènes sont prêtes, excepté le dénouement ; Larmoyant déclame une ode A la guerre.

Au milieu de leurs travaux, la troupe d artistes qui doit jouer la comédie de Jovial, vient le trouver. Le poète avoue que son dénouement l’embarrasse ; mais il se flatte que quelque heureuse circonstance viendra le tirer d’embarras. On fait préparer un déjeûner, et pour mieux juger de l’effet de la pièce, Jovial propose à ses artistes d’en faire une répétition en présence de Fricoteau. Le bon restaurateur ne demande pas mieux que de voir son salon transformé en théâtre. Il s’occupe lui-même de la disposition de la scène ; et pour séparer l’auditoire des acteurs, il forme une barrière de bouteilles. La pièce commence : En voici le sujet :

Mathurin, bon paysan, a pour fille Pauline, que Nicaise recherche en mariage. Ce Nicaise a toute la niaiserie qu’annonce le nom qu’il porte, et déplaît souverainement à Pauline. Mais en récompense elle aime de tout son cœur un jeune militaire brave et spirituel, qu’on appelle Frédéric. Malheureusement ce Frédéric est Allemand et prisonnier de guerre ; et la grande difficulté est d’epouser un homme qui n’est pas maître de sa personne.

Nicaise se prévaut de ses avantages, et presse Mathurin de lui donner la main de Pauline. La jeune amoureuse refuse ; la lutte s’engage, c’est ici que le dénouement est difficile à trouver ; mais au moment où l’on y pense le moins, un soldat arrive de la Grande-Armée, et annonce que la paix est conclue. Frédéric et Pauline sont au comble de la joie , Nitaise en pâlît, et Mathurin, homme de bon sens, reconnoissant le mérite, de Frédéric, consent à l’unir à Pauline.

Cette pièce est terminée par un divertissement relatif à l'heureuse nouvelle que vient d’apporter le Soldat de la Grande-Armée. La scène représente les jardins de Fricoteau disposés comme un jour de fête. De jeunes garçons et de jeunes filles de village, des soldats Français et des prisonniers Autrichiens, mêlés et confondus, se livrent à toute la joie que peut inspirer le retour de la paix, bientôt un grouppe se forme spontanément autour du jeune guerrier Français ; l’orchestre fait entendre l’air du pas redoublé, pendant lequel le militaire est placé sur un tertre de gazon. Deux Villageois viennent lui offrir une couronne de laurier. Un d’eux chante le couplet suivant :

Air : Dans le cœur d'une cruelle, etc.

      O guerriers ! dont la vaillance
      A, par d’immortels travaux,
      Sçu réduire à l’impuissance
      Les efforts de nos rivanx,
            Qu'une couronne
      Ceigne votre front vainqueur !
      Soldats, ce prix de l’honneur
            C’est notre cœur
            Qui vous le donne.

Le chœur répète : Qu'une couronne , etc. ; en même tems deux villageoises, dont l’une est mariée, présentent au militaire des guirlandes de roses, et la mariée chante :

      Quand le salut de la France
      Vous uarachoit de nos bras,
      D’une telle préférence
      Nos cœurs ne murmuroient pas ;
            Mais la victoire
      Vous ramène en ce beau jour.
      Guerriers, souffrez que l’amour
            Prenne son tour
            Après la gloire.

Jovial, s’avançant au milieu de la scène avec Larmoyant :

      Cet Achille qu’on estime,
      Que la Fable a tant vanté,
      Aux vers d'un chantre sublime
      A dû l'immortalité,
            Mais d'âge eu âge
      D'un plus illustre renom,
      Pour un Homère, ton nom,
            Napoléon
            Sera le gage.

Cette représentation n’a pas été sans orages ; quelques passages ont été sifflés, d’autres ont été applaudis ; on a saisi avec plaisir diverses allusions aux succès de nos armées et à la gloire de l’Empereur.

Quoique les acteurs de ce Théâtre ne soient point accoutumés à chanter, on a remarqué néanmoins qu’ils chantoient tous agréablement ; mais on a distingué sur-tout Mad. Bourdais, dont la voix pure, gracieuse et souvent élégante a servi très-heureusement à soutenir le pièce.

L'Esprit des journaux français et étrangers, 1806, tome II (février 1806), p. 292-293 :

[Après le mélodrame sérieux (Caroline et Dorville, ou la Bataille des Dunes), « un joyeux opéra comique », à la gloire de nos armées triomphantes. Après le champ d ebataille, le salon d’un restaurateur. L’intrigue tourne autour de la mise au point d’un spectacle, qui s’effectue à la fin d’un repas, à quoi s’ajoute bien entendu une intrigue amoureuse à connotations patriotiques. Comment finir ? En faisant entrer un soldat qui « annonce la paix » : la jeune première va pouvoir épouser son bel Allemand, qui n’est plus prisonnier. On finit par un bal, danses et couplets. Les acteurs ne sont pas des chanteurs, mais « tous ont trouvé de la voix pour chanter nos victoires ».]

Le Dénouement impromptu.

A un mélodrame sérieux, on a voulu joindre un joyeux opéra comique, afin de chanter nos triomphes sur tous les tons. Il n'y a point ici d'autre combat que celui de deux poëtes qui luttent ensemble à qui célébrera le plus dignement les belles actions de nos braves. Le champ de bataille, ou si l'on veut le Parnasse de ces deux champions, est une espèce de guinguette ; c'est chez le restaurateur Fricoteau qu'ils se réunissent pour travailler à leur immortalité : l'un donne dans le comique, et s'appelle Jovial; l'autre est noir et lugubre, il se comme Larmoyant.

Le poète comique va plus vite en besogne ; sa pièce est presque achevée, mais le dénouement l'embarrasse ; pour donner une secousse à son génie, il ordonne un déjeûné ; et pour juger de l'effet de son Ouvrage, il propose une répétition. Un théâtre impromptu s'élève comme par enchantement dans le sallon du restaurateur ; on voit une jeune paysanne très- déniaisée, amoureuse d'un jeune militaire, et très-dégoûtée d'un Nicaise que son père veut lui faire épouser. Par malheur le militaire est un Allemand prisonnier de guerre, dont il est difficile de faire un mari ; d'un autre côté, comment se résoudre à épouser un Nicaise ? Voilà le nœud. Comment trouver un dénouement ? Par le hasard le plus agréable, un soldat de la Grande-Armée entre dans le sallon pendant qu'on répète, et annonce la paix ; nouvelle qui met le prisonnier en état de se marier, et réduit au désespoir le Nicaise : c'est-là le Dénouement Impromptu. Il est suivi d'un bal dans les jardins de Fricoteau : toute la jeunesse du village s'unit à des soldats français et à des prisonniers autrichiens, pour se réjouir de la paix. Les danses sont coupées par d'agréables couplets. Ce petit opéra est d'une gaieté franche ; l'idée en est ingénieuse ; il fait honneur au zèle et au talent de M. le Craig. Quoique les acteurs de ce théâtre ne soient pas chanteurs de profession, tous ont trouvé de la voix pour chanter nos victoires.

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