Les Deux lettres, comédie en deux actes et en vers, mêlée d’ariettes, de Delrieu, musique de Jadin, 17 thermidor an 4 [4 août 1796].
Théâtre de l’Opéra-Comique National
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Titre :
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Deux lettres (les)
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Genre
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comédie mêlée d’ariettes
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Nombre d'actes :
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2
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Vers / prose
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vers
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Musique :
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ariettes
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Date de création :
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17 thermidor an 4 (4 août 1796)
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Théâtre :
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Théâtre de l’Opéra Comique National
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Auteur(s) des paroles :
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M. Delrieu
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Compositeur(s) :
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M. Jadin
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Magasin encyclopédique, ou Journal des sciences, des lettres et des arts, 2e année, 1796, tome II, p. 555 :
Théâtre de l’Opéra-Comique National.
La comédie nouvelle jouée à ce théâtre, et qu’il a plu à l’auteur d’intituler : Les Deux Lettres, est en deux actes et en vers, mêlée d’ariettes.
Le fond de cette pièce est un mari sottement jaloux. Si l’on veut prendre un tissu de ruses très-ordinaires pour de l’intrigue, et quelques gestes pour de l’action, elle passera pour un chef-d'œuvre dramatique.
Belfor, las du veuvage, épouse à quarante ans Rosalie, jeune personne aussi riche que belle. Valcour possédait son cœur depuis long-temps ; il ne l’ignoroit pas. Il résolut donc de les mettre tous deux à l’épreuve. D’abord il imagine de composer une lettre dans laquelle il contrefait l’écriture de sa femme : il lui suppose un retour vers son rival et un besoin de le voir. Rosalie survient ; elle se félicite du bonheur qu’elle goûte dans les bras de son époux ; mais celui-ci la tente, en lui rappelant l’énorme différence d’âge qui existe entre eux ; l’esprit enjoué de Valcour, et sur-tout son attachement pour ce jeune homme, qui réunit à la fraîcheur de la jeunesse un caractère aussi aimable. Soit par surprise d’un pareille [sic] langage, soit pour ne pas se déceler, Rosalie se retire. Le jaloux recommande sa lettre à Lucette : quoiqu’elle soit de sa main, il feint de croire qu’elle est de son épouse. Tout frapé qu’il paroisse de cette démarche, il respecte trop Rosalie pour soupçonner sa vertu. Valcour se présente assez à temps pour épargner une course à Lucette, qui lui remet la lettre. Rosalie est censée, comme nous l’avons dit, lui demander une entrevue. Mais en homme sage, prudent, et qui connoît les bienséances, il ne veut pas, il ne doit pas voir celle qui lui est si chère. Le mari s’est mis en tête de ne pas éloigner Valcour ; il exige au contraire qu’il jouisse d’une liberté entière dans la maison, et qu’il accompagne sa femme par-tout. On a beau lui remontrer la bizarrerie, l’imprudence d’une telle conduite, il n’écoute rien. Belfor a une fille de son premier mariage ; il la destine à Valcour. Julie, c’est son nom, à qui on en a déja parlé, acceptera volontiers sa main ; rien de plus naturel. Malgré le soin que prend Rosalie d’éviter la présence de son ancien amant, un hasard les rapproche. On se rappelle son bonheur passé, on se plaint du sort ; mais Valcour ne doit désormais compter que sur une simple amitié ; il lui est même défendu de paroître davantage. Ce discours l’étonne d’autant plus, qu’il ne peut le conciler avec le style qui règne dans la lettre qu’il croit être de Rosalie.
Le théâtre change et laisse voir un jardin. Belfor entre dans un petit cabinet à gauche, et se met à écrire. Dans cette seconde lettre Rosalie est encore supposée parler elle-même et demander un rendez-vous. Sur ces entrefaites paroît Valcour tout déconcerté ; il est déjà prévenu qu’il sera obligé de faire retraite et de renonce rà Lulie, dont il est tombé très-subitement amoureux. Mais il est consolé par Belfor, qui lui promet sa fille, et lui enjoint d’être plus assidu que jamais au logis. Rosalie arrive; accompagnée de Lucette, elle tient une lettre portant un congé absolu pour Valcour : on veut la faire lire au mari, qui s’en défend avec vivacité. Cependant, loin d’être d’avis qu’on le chasse, il s’obstine toujours à vouloir que sa maison soit ouverte à toute heure à son ami. Observons que Belfor a fait un échange des deux lettres : il a gardé celle écrite par sa femme, et a donné la sienne à Lucette pour être remise à Valcour. Celui-ci apprend la ferme résolution qu’on a prise de l’expulser. Pour s’en assurer on décachete la lettre, qu’on présume venir de Rosalie ; mais leur étonnement est au comble, puisqu’au lieu d’un congé il y est question d’un rendez-vous pour minuit. Julie ne peut croire sa belle-mère coupable d’une telle imprudence : elle soupçonne son père ; on s’arrange donc pour le faire dupe de sa propre ruse. Il est nuit ; on se retire ; Valcour reste au jardin. Julie revient sous un habillement pareil à celui de Rosalie. Le jaloux ne tarde pas à e mettre au guet ; il surprend sa fille, qu’il prend pour sa femme. Afin de pouvoir tout entendre, il se cache dans un bosquet à droite ; Valcour parle de son amour dans des termes capables d’alarmer Berfor, qui, bientôt se fait connoître. Rosalie, Lucette et le jour qui reparoît concourent à tirer le jaloux de sa méprise. Il s’avoue vaincu, et pense que le meilleur parti est de satisfaire Julie en l’unissant à Valcour.
Il est aisé de voir que l’auteur auroit pu aussi bien intituler cette rapsodie : les Trois Lettres. Mais quoiqu’un titre doive être exact, et en quelque sort l’abrégée d’une pièce, on lui passeroit encore cette insignifiance, si les défauts dont la comédie fourmille étoient rachetés par la correction et l’élégance du style, par quelques détails agréables, par quelques situations comiques. Mais tout est froid, rien n’y est motivé. La jalousie de Belfor, foiblement prononcée, ne produit aucun effet marquant. Il y a de la petitesse, de l’invraisemblance dans ses moyens. En un mot, c’est un événement romanesque mis en dialogue et très-mal versifié. Il y a des pièces de ce genre qui doivent faire oublier celle du citoyen Dérieux. Nous sommes portés à croire que ke jeu des artistes a plus contribué au succès momentané dont elle a joui, que les méchans couplets contre les maris. La musique nous a paru sans grace et sans chaleur. J. L. G.
D’après la base César, la pièce, dont les paroles sont d’Etienne-Joseph-Bernard Delrieu et la musique de Louis-Emmanuel Jadin, a connu 2 représentations au Théâtre Italien les 4 et 6 août 1796.
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