Les Deux pères, ou la Leçon de botanique

Les Deux pères, ou la Leçon de botanique, comédie en deux actes en vaudevilles, de Dupaty, 15 prairial an 12 [4 juin 1804].

Théâtre du Vaudeville

Almanach des Muses 1805

Sur la page de titre de la brochure, Paris, chez Mme. Masson, an XII (1804) :

Les deux Pères, ou la leçon de botanique, comédie en deux actes, en vaudevilles, par M. Emmanuel Dupaty. Représentée pour la première fois, à Paris, sur le Théâtre du Vaudeville, le 15 Prairial an XII (4 juin 1804.)

Il vaut encore mieux placer ses secrets dans le sein d'un père, que dans celui d'une fleur.

Forlis, act. II, Sc. dern.

La pièce est dédiée à Madame J. Récamier.

On trouve sur internet d'autres éditions de la pièce : la troisième, de 1806, la quatrième de 1809...

Courrier des spectacles, n° 2656 du 16 prairial an 12 [5 juin 1804], p. 2-3 :

[Avant de passer à l'analyse de la pièce, le critique dresse une longue liste des défauts qu'il trouve à faire à la pièce, et qu'il attribue à l'abondance de l'esprit de Dupaty, son auteur. Trop d'incidents, de couplets, une action trop longue, un langage inadapté prêté aux personnages, et surtout une mise à mal des règles morales. L'analyse de la pièce est un long résumé de l'intrigue, pas toujours très claire. Elle raconte les péripéties de la découverte de l'amour entre deux eunes gens, le père de la jeune fille souhaitant donner une leçon un peu compliquée à son jeune homme dont il a assuré l'éducation en l'absence de son père. La leçon passe par une curieuse ruse : on fait passer le père du jeune homme pour son rival, et le dénouement arrive quand cette ruse est dévoilée. Le critique n'est pas convaincu par ce dénouement, que le public a pourtant applaudi. Les interprètes sont jugés positivement, avec une mention particulière de l'actrice qui a joué le rôle de la jeune fille.]

Théâtre du Vaudeville.

Première représentation des Deux pères, ou la Leçon de Botanique.

Un malheur semble attaché aux gens qui ont beaucoup d'esprit, c’est d’abuser de ce précieux don de la nature.

M. Dupaty nous paroit n’avoir pu se garantir de ce défaut dans son nouvel ouvrage. On y reconnoit l’esprit de son auteur, mais on a souvent à lui reprocher la multiplicité des incidens, la profusion des couplets, la longueur de l’action, le défaut de goût, les acteurs n’y parlent point conformément à leur situation, et avec un but moral de couplets qui respirent la délicatesse ; ce vaudeville a plusieurs fois été trouvé contraire aux mœurs. On ne peut concevoir, par exemple, qu’un père place un bouquet sur le sein de sa fille pour le faite dessiner par l’amant de celle-ci, et et qu’il parle du mouvement que ce bouquet;éprouve sur ce pupitre. Le rôle du jeune homme n’est pas non plus exempt de reproches. Mais passons à l’analyse de la pièce.

Dorval, resté veuf avec un fils de cinq ans, et se trouvant entièrement ruiné, a confié cet enfant à son ami Forlis, et est parti pour les Grandes Indes, dans l’espoir d’y réparer sa fortune. I1 y a fort bien réussi, et revient dans sa patrie. Une lettre a annoncé son retour à Forlis, qui n’en a pas prévenu Prosper, c’est le nom du fils de Dorval. Notre jeune homme s’est livre avec zèle à l’étude de la botanique, en suivant les leçons de Forlis, personnage très habile dans cette science. Mais ce ne sont pas seulement des plantes qui attirent Prosper dans le jardin de Forlis, il y a de fréquens rendez-vous avec la charmante Laure, sa fille, assez tendre quoique coquette

Forlis a remarqué l’attachement de ces jeunes gens. Il aime Prosper, mais il voit avec peine qu’un jeune homme, élevé par ses soins et ses bienfaits, et qui croit n’avoir point de fortune, ait pu se résoudre à séduire la fille de son bienfaiteur.

Aide de Rustique, son jardinier, et au grand regret de Dorval, qui brûle d’embrasser son fils, Forlis remplace à un rendez-vous sa fille qu’il tient enfermée. Non content de les priver du plaisir qu’ils se proposoient, sous l’apparence d’une confidence amicale, il se plaint à Prosper qu’un jeune homme, qui lui a beaucoup d’obligations, veut séduire Laure. Prosper se trouble ; mais apprenant que ce jeune homme est riche, (et en effet lui même l’est par le retour de sou père) il cesse de croire qu’il soit question de lui, et la jalousie succède dans son cœur à l’amour. Il se rappelle que la veille Laure à quitté son bras pour prendre celui de Folleville.

Forlis le laisse dans cette pénible situation et va déprisonner Laure. Elle accourt bien vite au rendez-vous, disant même (et nous ne le citons que comme un trait de mauvais goût clans la situation où elle se trouve) : Que pour arriver plutôt elle a passé devant une fontaine sans s’y regarder.

Prosper prévenu ne lui tient pas compte de cet empressement. Le jeune homme est jaloux, la jeune fille est piquée et coquette : il s’en suit la rupture la mieux conditionnée. Forlis échauffe encore la tète de sa fille en blessant son cœur, ou si l’on veut, son amour-propre. Il lui fait entendre que Prosper aime une autre personne. Le dépit a tant de pouvoir sur Laure qu’elle presse son père, et même un peu fort, de lui donner un mari.

Forlis, qui porte la méchanceté un peu loin, dit à sa fille qu’il a un époux à lui donner, et qu’elle se décide en conséquence à épouser Dorval. Cette proposition, peu faite pour plaire à Laure dans aucun tems, vient d’autant mal-à-propos, que dans une scène où son père l’a forcée de servir de pupitre à Prosper, c'est-à-dire de porter à son côté un bouquet qu’il destine [sic] ; celui-ci a négligé les fleurs pour peindre sa maîtresse, et que Laure, déjà disposée à la réconciliation, n’a pu résister à cette preuve d’attachement.

Il nous est impossible de suivre la la pièce tous ses détails. Bornons nous donc à dire que Prosper, connoissant un rival riche dans Dorval, et engagé par celui-ci à vaincre son amour, ne pouvant parler seul à Laure, lui écrit, et place son billet dans la plus belle rose du jardin, qu’il charge Rustique de donner de sa part à Laure ; mais Rustique, contre l’usage reçu, sert ici les pères contre les enfans.

Forlis donc instruit de tout, se saisit de la rose nu moment où elle est présentée à sa fille ; il veut, dit il, en faire le sujet d’une leçon de botanique. En donnant sa leçon, il effeuillecette rose, trouve facilement le billet qu'l sait qu’elle renferme, et est surpris de voir que ce ne sont que des adieux mêlés de regrets. Le bon Dorval est dans le ravissement. Prosper veut partir, Forlis le retient en lui remettant une lettre de son père ; mais grâces à un habit verd et à une canne à bec à corbin que ce père doit porter, notre jeune botaniste reconnoit que Dorval est son père.

Cette reconnoissance a paru mal amenée, mais on n’en a pas moins applaudi l’union des deux amans.

Mad. Belmont a joué le rôle de Laure avec le plus grand talent. Les autres personnages ne pouvoient être que bien rendus par Vertpré, Henry, Carpentier et Hypolyte.

Magasin encyclopédique des sciences, des lettres et des arts, XI. année, tome V.(Germinal an XII), p. 564-565 :

Les Deux Pères ou la Leçon de Botanique.

C'est une des plus jolies comédies données depuis long-temps au Vaudeville. On y reconnoît par-tout l'esprit et la touche de M. Dupaty.

Prospère doit tout à M. Dorlis. Il se croit sans fortune, et aime cependant Laure, qui doit avoir en mariage une dot proportionnée à la richesse de son père. M. Dorlis veut faire sentir à Prospère la légèreté de sa conduite. Dorval, père du jeune homme, arrive des Indes avec une grande fortune, et on le fait passer pour un étranger, grand amateur de botanique. Après quelques scènes de brouilleries et de raccommodement, il s'agit de donner la leçon, et M. Dorlis prend pour sujet une rose que l'on apportoit à Laure de la part de Prospère. Il l'effeuille, et y trouve un billet écrit par le jeune homme. Il se fâche d'abord. Mais ce billet étoit pour instruire Laure de son départ et de ses regrets : les deux pères se laissent désarmer, et unissent les jeunes gens. Ce n'est ici qu'un apperçu de l'ouvrage, car il est fort intrigué ; toutes les scènes y sont jolies ; les incidens se multiplient sans rien confondre. Les couplets sont tous gracieux et spirituels.

Madame Belmont, Verprê, Hipolyte, Henry, ont joué avec un ensemble parfait.

 

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