L'Époux républicain

L'Époux républicain, drame patriotique en deux actes et en prose, de Maurin de Pompigny, 20 pluviôse, an 2 [8 février 1794].

Théâtre de la Cité-Variétés.

Sur la page de titre de la brochure, à Paris, de l'imprimerie de Cailleau, an 2 de la République Française, 1794, vieux style :

L'Époux républicain, drame patriotique, en deux actes et en prose ; Par Pompigny. Représenté pour la première fois à Paris, sur le Théâtre de la Cité, Variétés, le 20 Pluviose, seconde année de la République Française, une & indivisible.

L'homme de bien n'a pas besoin d'exemple pour faire son devoir ; il ne consulte que son cœur.

Acte II, Scène XX.          

Le texte de la pièce est précédé de deux textes, l'un « à la section de l'Indivisibilité », l'autre « aux amis de la Vérité ».

[Sur l'exemplaire qu'on trouve dans Gallica comme dans Google Books, le « prétention » a été raturé et on a écrit à la plume en marge le mot « Protection ».]

LIBERTÉ, ÉGALITÉ.

A LA SECTION

DE L'INDIVISIBILITÉ.

Mes Freres,

Quelques Auteurs se font jadis déshonorés en mendiant dans une Dédicace rempante, une prétention imaginaire, qu'une vanité ridicule feignait de leur accorder.

La Liberté a fait disparaître pour toujours

Ces Protégés si bas, des Protecteurs si bêtes !

Ainsi c'est en vrai Patriote que je vous fais hommage de mon Époux Républicain, & je le dois, puisque c'est au milieu de vous, dans votre sein, que j'ai puisé les traits de patriotisme qui caractérisent ce Héros de la Liberté.

Le germe de ces sentimens était inné dans mon cœur ; mais c'est par vos leçons & par votre exemple que j'ai appris à le développer. Recevez donc ce faible tribut de ma reconnaissance ; il n'a de prix que par l'intention & le zèle qui me l'ont dicté.

Salut & fraternité.

POMPIGNY, Citoyen          
Soldat de la Section de          
l'Indivisibilité.          

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AUX AMIS DE LA VÉRITÉ,

FRATERNITÉ,

Dans tous mes Ouvrages, j'ai toujours mis la vertu en opposition avec le vice pour la faire triompher : j'en pourrais citer pour garants, l'Artisan Philosophe, l'Épreuve Raisonnable, Bayard, le Père comme il y en a peu, & même les Ramonneurs. (*) Car, si mon Barogo a obtenu de grands suffrages, c'est moins à cause de son langage original & la singularité de sa bigarure, que par son caractère d'honnête homme jovial, personnage tout-à-la-fois probe & gai ; c'était un vrai Sans-Culotte que je présentais d'avance à mes Concitoyens.

Dans L'Époux républicain, j'ai voulu peindre un vrai Patriote à l'épreuve ; & la couleur de rose ne convenait point à ce tableau. Lorsque ce sujet se présenta à mon esprit, j'avoue que je fus effrayé des difficultés qui me menaçaient, mais je consultai mon cœur, & j'y trouvai des forces qui ranimèrent mon courage. L'effet m'a prouvé que lorsqu'on plaide la cause de la Liberté devant des Français, on ne peut manquer de réussir.

Le Rédacteur de la Feuille du Salut Public m'a fait (avec autant d'honnêteté que de franchise) le reproche d'avoir laissé glisser de ma mémoire des vers de réminiscence.

Il a raison : ce beau vers, qui doit être gravé dans l'esprit & dans le cœur de tout bon Républicain ; ce vers de Voltaire dans l'Orphelin de la Chine.

« Nous naissons Citoyens avant que d'être Pères.

Je l'ai mis dans ma Pièce, non-seulement par réminiscence, mais par un motif décidé, comme citation sentencieuse : quant à quelques tirades où se rencontre la mesure d'un vers, je répondrai qu'ayant fait jusqu'à ce jour huit ou dix mille vers, dont j'ai eu le courage de brûler plus des trois quarts, il n'est pas étonnant qu'il m'en échappe quelques-uns de tems-en-tems; tel eft celui-ci.» C'est toi, Franklin, c'est toi qui me donne la mort.

Je sçais la fable du Geai, & j'ai trop de bon sens pour m'exposer à jouer ce personnage ; je ne puis assez louer le zèle fraternel des Artistes, dont les talens ont embelli mon Ouvrage ; ma reconnaissance seule peut l'égaler : cependant je m'y attendais ; car j'étais assuré de leur vrai Républicanisme.

(*) Toutes ces Comédies se trouvent chez Cailleau, Imprimeur, rue Galande, n. 50.

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PERSONNAGES.

ACTEURS.

Les Citoyens.

FRANKLIN, Serrurrier, retiré du Commerce.

Varennes.

FERVIDOR, fils aîné de Franklin.

S.t Clair.

FLORÉAL, second fils de Franklin.

Vallienne.

GERMINAL, ami des deux frères.

Lafitte.

BRUMAIRE, ci-devant Chanoine.

Roseval.

ROMARIN, homme de confiance de Franklin.

Duval,

VENDÉMIAIRE, Commissaire de Section.

Lemaire.

Les Cit.

MÉLISSE, ci-devant Prieure, femme de Franklin.

Germain.

ROSALIE, ci-devant Religieuse, amante de Floréal.

St-Clair.

HYACINTE, femme de Romarin.

Lacaille.

Quatre GENDARMES.

 

La Scène est à Paris, dans la Maison de Franklin.

Je, soussigné, déclare avoir cédé au Citoyen Cailleau, les droits d'imprimer & de vendre, L'ÉPOUX RÉPUBLICAIN, DRAME PATRIOTIQUE, EN DEUX ACTES ET EN PROSE, sans préjudice de mes droits d'Auteur que je me réserve selon l'article de la loi, sur les Théâtres auxquels je donnerai le droit de la représenter. A Paris, ce duodi 2 pluviose. l'an second de la République.

POMPIGNY.          

On trouve sur Internet des articles mettant en lumière la portée idéologique de la pièce de Maurin de Pompigny.

Paola Perazzolo, « « D’un bon et franc républicain / Le mariage est la loi première »: le célibat civil sur les planches révolutionnaires », Studi Francesi, 169 (LVII | I) | 2013, 74-85, prend la pièce de Maurin de Pompigny comme un bon exemple de la volonté de la République nouvelle de promouvoir le mariage comme norme de vie du patriote : dans les pièces jouées après 1792, « la corruption et la lâcheté morales signalent le plus souvent une âme antipatriotique », et c'est bien ce que montre la pièce de Pompigny :« un serrurier patriote épouse une ancienne prieure, qui le trompe avec un prêtre et conspire avec les réactionnaires pour rétablir l’Ancien Régime avant d’être dénoncée par son conjoint ».

L'épouse de Franklin apparaît dans la pièce comme l'exemple de l »épouse faussement convertie au républicanisme » : elle est « pétrie d’esprit contre-­révolutionnaire, elle complote en réalité, aidée d’un chanoine, contre son époux patriote » (Eva Bellot, « Marianne sur les planches : les héroïnes anonymes du théâtre de la Révolution française (1793-1798) », Annales historiques de la Révolution française 2012/1 (n° 367), pages 69 à 92).

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