Fagotin, ou l'Espiègle de l'Isle Louvier, vaudeville-parade, en un acte, de Georges Duval, 17 fructidor an 9 [4 septembre 1801].
Théâtre Montansier-Variétés.
Courrier des spectacles, n° 1650 du 18 fructidor an 9 [5 septembre 1801], p. 2-3 :
[La pièce est du genre grivois. Elle raconte les aventures compliquées de Fagotin, un domestique qui fait la cour à sa patronne. Chassé par son patron, il se travestit en cuisinière, et sous ce costume il séduit les hommes de son entourage, si bien que, devenu propriétaire de la moitié des biens d'un de ses « prétendants », il se trouve assez aisé pour épouser sa fille. Bien sûr, il ne faut pas attendre d'une telle pièce du bon goût, et si on la voit, c'est « comme une plaisanterie sans prétention ». Particularité : les airs des vaudevilles sont « des airs du grand opéra ». La pièce est de Georges Duval, qui pour une fois a travaillé seul. Les interprètes ont été remarquables.]
Théâtre Montansier.
Les auteurs de différentes pièces grivoises représentées depuis quelque tems à ce théâtre, mettent à l’envi Paris et les places publiques à contribution. Ce n’est plus la place des Innocents, ce n'est plus la rue de l’Oursine qui est le lieu de la scène, c est l'île Louviers. Là un M. Rondin qui a pris depuis peu Fagotin à son service, s’apperçoit que son serviteur n’est pas indifférent à madame Rondin, et il en fait de vifs reproches à sa femme, qui l’accuse à son tour de la laisser toute la semaine au chantier, et lui prouve qu’elle lui fait plus qu’aucun autre porter du bois en ville. Un nouveau grief contribue à faire chasser Fagotin. Il a pris le cheval brillant et l’a fatigué au bois de Boulogne, au point que l’animal, en rentrant, est mort sur la place. A peine est-il expulsé, que le charretier de M. Rondin, le beau, le tendre Diahu, qui va toutes les décades à l’opéra retenir les grands airs de quelques petits vaudevilles, renouvelle ses protestations d'amour à la fille de la maison, qui aime Fagotin. Celui-ci a imaginé de se travestir en cuisinière et de venir offrir ses services à M. Rondin. Il est méconnu par Diahu qui, lui trouvant un air gentil, lui adresse son hommage, et par M. Rondin lui-même, qui lui offre et lui donne par contrat la moitié de son chantier. On sent bien que cette donation sert à Fagotin pour forcer le vieux Rondin à le recevoir pour gendre en place de Diahu.
Tel est le fonds de Fagotin, ou l'Espiègle de l'île Louviers. Cet ouvrage est gai, et quoiqu’il soit d’un genre grivois, quoique plusieurs expressions ne soient pas avouées par la décence, on a ri, et (il faut bien le dire) on a été désarmé. On ira le voir, non comme un ouvrage de goût (il est loin d’en être un) mais comme une plaisanterie sans prétention. Les couplets en général ne sont pas forts, mais beaucoup ont été applaudis, parce qu’ils sont sur des airs du grand opéra. Cette idée de faire chanter ces airs par un charretier, est plaisante. Cet ouvrage, qui exige plusieurs suppressions utiles, est du cit. Georges Duval, et c’est le premier qu’il ait travaillé seul ; car son nom est ordinairement accolé à celui de quelqu’autre vaudevilliste. Les citoyens Brunet et Tiercelin rivalisent de talens dans les rôles de Fagotin et de Diahu. Le citoyen Dubois, mesd. Barroyer et Ferton ont rempli les leurs avec intelligence.
F. J. B. P. G***.
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