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La Famille vénitienne, ou le Château d'Orsenno

La Famille vénitienne, ou le Château d'Orsenno, mélodrame en trois actes, de Frédéric [Dupetit-Méré], musique de Bianchi, ballets d'Adam, 7 mai 1806

Théâtre des Jeunes Artistes.

Sur la page de titre de la brochure, à Paris, chez Maldan, 1806 :

La Famille vénitienne, ou le Château d'Orsenno, mélodrame en trois actes, à grand spectacle. Par Frédéric. Musique del Signor Bianchi, Ballets de Monsieur Adam. Représenté pour la première fois, à Paris, sur le Théâtre des jeunes Artistes, le 7 mai 1806.

Le 7 mai 1806, le Courrier des spectacles indique que le Théâtre des Jeunes Artistes faisait relâche.

Il signale la première à la date du 10 mai 1806.

Courrier des spectacles, n° 3384 du 12 mai 1806, p. 2 :

[Plutôt que de parler de la pièce, le critique parle du théâtre des Jeunes Artistes, qui met à son répertoire un mélodrame, à la place des comédies et des vaudevilles qu'il joue habituellement. Le public a adhéré à ce changement. Il y a pourtant de quoi être surpris de voir des enfants de huit à douze ans dans des rôles très au-dessus de leur âge. L'étonnant, c'est de constater qu'ils ont « joué avec autant d'ensemble » que les acteurs d'autres théâtres. Le critique cite le cas du très jeune Prudent, dont la brochure nous apprend qu'il jouait le rôle de Valério, qui n'est certes pas un rôle secondaire. Costumes, décors, ballets, combats, tout est de qualité dans cette pièce. Suit le traditionnel résumé de l'intrigue, une histoire familiale envenimée par un ennemi de la famille qui pense tirer profit des distensions entre les frères. Les rebondissements abondent, et font intervenir un bon vieillard, des corsaires, des arrestations, des libérations, jusqu'au combat final qui nécessite huit à dix combattants, au cours duquel les méchants meurent, comme d'habitude. Les auteurs, paroles et musique sont nommés. Le meilleur acte, c'est le deuxième (celui des rebondissements), le troisième vaut par la qualité du combat « que ces enfans exécutent parfaitement ». Et l'article s'achève comme il a commencé. Le critique met en grade les gens du théâtre contre la tentation du succès facile grâce à « ce genre bâtard » qu'est le mélodrame, et les encourage à revenir à la petite comédie ou au vaudeville, « le genre plus adapté à leur âge et à leurs moyens » : petite taille, voix de fausset. Certes, la comédie rapporterait moins que le spectaculaire mélodrame, mais elle a une valeur formatrice pour « ces élèves qui promettent dans la suite des sujets à nos premiers théâtres ».]

Théâtre des Jeunes Artistes.

La Famille Vénitienne.

Le mélodrame vient de faire son entrée dans ce petit théâtre, et la petite troupe n’a eu qu’à se louer de son nouvel hôte. Son début pourra tuer le répertoire adopté jusqu’ici, et malheureusement pour la comédie et le vaudeville, il a eu exclusivement, comme dans les autres théâtres du boulevard , l'assentiment et les suffrages du public, si facile à séduire par de belles phrases, lorsqu’elles sont soutenues par toute l’artillerie du mélodrame» Mais rien, dans cette pièce, n’étoit peut-être aussi curieux que l’âge de ceux qui étoieut chargés de la représenter. Qu’on se figure un tyran de douze ans au plus ; des amans, des amantes de dix ans ; un capitaine de corsaire de huit ans, etc., on croira peut-être que ces enfans n'ont pu donner aux rôles la couleur convenable ; mais l'intelligence de tous a suppléé à cette disproportion d’âge étonnante, et l’ouvrage a été joué avec autant d’ensemble que l’on en trouve parmi les acteurs faits des autres théâtres. On a particulièrement remarqué un enfant âgé tout au plus de neuf à dix ans, nommé Prudent, qui a rempli un rôle assez difficile, avec un a-plomb et une chaleur rares dans un âge aussi tendre.

Les costumes et les décorations sont du meilleur goût, les ballets agréables, et les combats exécutés avec une précision et une adresse qui ont excité les plus vifs applaudisscmens. Cette pièce mérite, sous ces divers rapports, d’être distinguée par le public.

Valério, fils du marquis de Logannez, et frère de Stéphany, a quitté l’Italie depuis huit ans, et son frère a seul recueilli l’héritage de son père. Un ennemi de la famille des Logannez, le seigneur d’Allambra, ramène Valério dans sa patrie, et lui persuade que Stéphany est l’auteur de tous ses maux ; Valério, ne respirant que vengeance, accourt à Venise, guide des corsaires de Tunis vers le-palais de son frère, et le fait arrêter. Dallambra profite de ce moment pour se défaire de Valério lui-même, mais celui-ci prend la fuite, et se réfugie chez un vieux serviteur du marquis de Logannez, qui vient déjà de donner un azyle à Stéphany, échappé lui-même des mains des pirates. Joannez (c’est le nom de ce vieillard) cache les deux frères ; mais bientôt les persécuteurs de Valério se présentent, et malgré les efforts de son hôte, l’arrêtent et l’entraînent dans un château isolé au bord de lâ mer ; c’est là que le corsaire doit venir mouiller pour recevoir le prisonnier des mains de Dallambra. Stéphani, qui a pris la résolution de venger son frère, après lui avoir pardonné ses torts, arrive suivi de ses vassaux ; Dallambra enveloppe sa petite troupe, le désarme, et l’envoie prisonnier dans le château. Cependant Constantia, épouse de Stéphani, parvient à le délivrer. Le premier usage qu’il fait de sa liberté, c’est de la consacrer au salut de Valério. Les gens qui l’ont suivi empêchent Dallambra et les Tunisiens de le mettre à mort ; alors il s’engage un combat à huit ou à dix, qui se termine par la mort de Dallambra et au capitaine du corsaire.

Les auteurs sont, pour les paroles, M. Frédéric, et pour la musique, M. Bianchi.

Le second acte de ce mélodrame est, sans contredit le mieux fait ; il est semé d’incidens nombreux, et tous plus altachans les uns que les autres. Le troisième se soutient par le mérite des combats, que ces enfans exécutent parfaitement.

Quelque succès cependant qu’ils aient obtenu dans ce genre, on ne doit pas leur dissimuler qu’un essai peut se pardonner, mais qu’ils perdroient jusqu’aux heureuses dispositions que l’on remarque en eux, si, séduits par les applaudissemens qu’ils ont reçus, ils sacrifioieut à ce genre bâtard le genre plus adapté à leur âge et à leurs moyens. Leur taille encore mal développée, leur organe en fausset, tout trahiroit leurs efforts, et il faudroit toute l’indulgence du public pour fermer les yeux sur ces défauts essentiels. Les petites comédies, les vaudevilles, feront, j’en conviens, moins d’argent, mais aussi ils serviront mieux à perfectionner ces élèves qui promettent dans la suite des sujets à nos premiers théâtres.

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