La Femme médecin, ou la Porte secrète, comédie en un acte et en prose, de Besnard et Maurin de Pompigny, 10 juin 1806.
Théâtre de la Gaîté.
Sur la page de titre de la brochure, à Paris, chez Fages, 1806 :
La Femme médecin, ou la Porte secrète, comédie en un acte et en prose, Par MM. Besnard et Pompigny, Représentée, pour la première fois, à Paris, sur le Théâtre de la Gaîté, le 10 juin 1806.
La pièce est à cinq personnages : M. de Courville, qui est médecin, Dorsan, le peintre, qui se révèle être son neveu, Julie, sa femme, Mirval; le « jeune étourdi », dont on découvre qu'il est le frère de madame Dorsan. S'y ajoute un domestique, portier de M. de Courville.
La scène est à Paris, dans la maison de M. de Courville (Dorsan et son épouse habitent dans un appartement de cette maison, et la scène est un dispositif en deux parties.
DÉCOR ET ACCESSOIRES.
Le théâtre représente l'appartement de M. de Courville, et celui de Dorsan, ce qui forme une double scène. Dans le mur qui sépare les deux appartemens, est pratiquée une porte secrète. A la gauche des acteurs, est la chambre du peintre, plus grande, s'il est possible, que celle du médecin. Il y aura dans cette chambre un chevalet avec un tableau que peint la femme du peintre. Un secrétaire, sur lequel sont des papiers, etc., deux fauteuils dans le fond, et deux tabourets, dont l'un est devant le chevalet ; quelques modèles en plâtre, çà et là ; deux pistolets et un sabre, pendus à la muraille, du côté du secrétaire.
A la droite des acteurs est la chambre du médecin, dans laquelle sont une table et quatre chaises. La table est couverte, et dans le fond. Il n'y manque que les mets qu'on apporte, quand le médecin fait asseoir sa nièce. Une pendule à la droite des acteurs; une petite table, à côté de laquelle le médecin est assis, des livres dont il s'occupe, pendant que l'action se passe de l'autre côté. Il y aura deux portes, une dans le fond de chaque appartement, et une autre (au milieu de la cloison) qui est la porte secrète. Sur la porte de l'appartement du peintre, dans le fond, est une serrure avec sa clef. Sur une des chaises, dans l'appartement du médecin, est une robe rouge avec sa bordure et son épitoge d'hermine, la chausse y est aussi garnie en hermine, avec un bonnet carré, ayant une grosse houppe.
Courrier des spectacles, n° 3414 du 12 juin 1806, p. 2-3 :
[L'article commence par faire un portrait flatteur de la pièce : elle a du succès, grâce à « des détails agréables, des scènes amusantes » et une leçon donnée habilement à un mari jaloux, ce qui n'est bien sûr pas une situation nouvelle au théâtre : les applaudissements ont été nombreux. Cette leçon est ensuite longuement expliquée :l'intrigue se passe en famille, chez un peintre qui est d'une jalousie maladive et qui loue un logement à quelqu'un qui se révèle être son oncle perdu de vue depuis longtemps. L'oncle décide de guérir son neveu de sa jalousie, mais au cours d'un repas au cours duquel Julie se déguise en docteur (d'où le titre...) il ne fait qu'accentuer l'inquiétude de son neveu qui soupçonne fort « un étourdi » et qui surprend celui qu'il prend pour un galant, mais qui est en fait le frère de l'épouse du peintre, lequel promet bien sûr de se montrer « moins jaloux », promesse dont on ne sera pas si elle sera tenue : la pièce est terminée... L'article s'achève par de nouveaux compliments pour la pièce : la qualité de l'écriture, celle des interprètes. Et les auteurs sont nommés.]
Théâtre de la Gaîté.
La Porte secrette.
Cette comédie a mérité son succès. Elle offre des détails agréables, des scènes amusantes, et quoique la situation d’un jaloux désabusé ne soit pas neuve au théâtre, néanmoins la leçon que reçoit un mari dans cette pièce est amenée d’une manière adroite qui fait naître des situations comiques ; le public a accueilli l’ouvrage par de nombreux applaudissements.
Un M. de Courville, médecin et riche propriétaire, a loué depuis peu un logement à Dorsan, peintre, et jaloux à l’excès de sa moitié. Il porte cette manie au point de la séquestrer, pour ainsi dire, du monde entier, et lui-même ne sort de ce cloître que pour porter en ville le fruit de son travail et de celui de Mad. Dorsan, qui se livre aussi à la peinture. M. de Courville, curieux de connoître son nouveau locataire, qui ne lui a pas encore rendu sa visite de bon voisinage, monte un jour chez le peintre. La femme est seule ; on cause, on examine les tableaux ; parmi eux, est un portrait dans lequel M. de Courville croit se reconnoître ; on s'explique ; c’est celui d’un oncle que Dorsan n’a pas vu depuis longtems, et cet oncle, c’est M. de Courville lui-même. Il connoît la jalousie de son neveu, et pour l’en corriger, il forme un projet qu’il met à l’instant à exécution, de concert avec Mad. Dorsan , qui ne s'y prête cependant qu’à regret, dans la crainte d’affliger son mari. M. de Courville invite Dorsan à déjeûner ; son épouse doit être de la partie ; mais le peintre accepte pour lui seul, et pour s’assurer que pendant son absence sa femme ne sortira pas, il l’enferme à double tour, il craint sur-tout les visites d’un étourdi nommé Mirval, qui est venu lui commander un tableau. Il part, et en entrant chez M. de Courville, il trouve un jeune médecin dont les traits le frappent au point qu’il retourne brusquement chez lui sous un prétexte assez frivole : il retrouve sa femme occupée à travailler ; il revient, même visage, même incertitude, mêmes soupçons. Le jeune médecin parle, même son de voix ; il s'échappe encore, la dame est à son chevalet ; il sort de nouveau ; mais au lieu de venir chez M. de Courville, il rentre chez lui ; pour cette fois, plus de femme. Qu’est-elle devenue ? Mirval survient. Le peintre furieux lui saute au collet et lui demande son épouse. Celle-ci reparoît alors, conduite par le Docteur, qui la fait rentrer par la porte secrète qui sépare les deux appartemens. M. de Courville fait valoir son âge, qui le met à l’abri de tout soupçon, et en qualité d’oncle, il s’est arrogé le droit de donner à Dorsan une leçon qui le corrige. Mirval retrouve une sœur dans Mad. Dursan, dont le mari promet d’être à l’avenir moins jaloux.
Cette petite comédie n’est pas mal écrite ; c’est presqu'une rareté aux Boulevards ; elle est jouée d une manière satisfaisante par MM. Marty, Genest, St.-Victor, et par Mad. d’Herbouville.
Les auteurs sont MM. Pompigny et Besnard.
La pièce a été jouée en 1816 à Lyon au Théâtre des Célestins, et le Journal de Lyon en rend compte le 21 mai 1816.
Journal politique et littéraire du département du Rhône, n° 30 du 21 mai 1816, p. 4 :
La Femme médecin ou la porte secrète, est un de ces ouvrages qui ne peuvent se soutenir qu'à l'aide du jeu des acteurs. Qu'on se garde bien d'y chercher ni caractères, ni situations : le désappointement serait complet. Il est hors de toute vraisemblance qu'un époux méconnaisse sa femme, parce que celle-ci s'est affublée d'une robe et d'un bonnet doctoral, et cela à deux reprises différentes. Le rôle du peintre Salvatori, le moins mauvais de la pièce, est bien joué par Gobert ; mademoiselle Hugens sauve, par son talent et sa grâce, la nullité de celui de Julie. Guérin ne serait pas déplacé dans celui du docteur, s'il voulait bien soigner davantage sa diction et ne pas séparer des mots nécessairement liés par le sens.
E. M.
Ajouter un commentaire