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La Foire de Senlis

La Foire de Senlis. comédie-vaudeville, d'Auger et Mabire, 8 frimaire an 9 [29 novembre 1800].

Théâtre des Troubadours

Almanach des Muses 1802

Courrier des spectacles, n° 1371 du 9 frimaire an 9 [30 novembre 1800], p. 2-3 :

[Après avoir dit que la pièce n’a pas eu grand succès, le critique en résume l’intrigue, qui rappelle bien d’autres pièces (l’ancien valet devenu un monsieur, et que le serviteur de l’amant démasque, permettant à son maître d'épouser sa maîtresse). Seule originalité peut-être, le moyen employé pour faire connaître la vérité. Peu de qualités (traits comiques, saillies, dialogue « quelque-fois serré et rapide », pas mal de défauts (entrées et sorties non motivées, trop de détails et pas assez d’action) : si les auteurs ont été demandés, et nommés, ils n’ont pas échappé aux sifflets. Il faut que les auteurs songent à des coupures dans une pièce au « but vraiment moral ». L’article cite enfin un couplet rempli « de grace et de facilité » (il y en aurait deux ou trois dans ce cas). Deux acteurs sont nommés, sans qu’on sache leur rôle (les serviteurs plutôt que les maîtres ?).

Théâtre des Troubadours.

La Foire de Senlis, comédie-vaudeville, donnée hier pour la première fois à ce théâtre, n’obtint qu’un foible succès. En voici l’analyse :

M. et madame Baguenaudier, amateurs de nouveautés, se sont rendus de Paris à Senlis, dans l’intention de jouir de toutes les curiosités que la Foire peut offrir aux amateurs. Ils ont emmené avec eux leur fille Lucile, à qui ils destinent pour époux un fat nommé la Rapinière, espèce de nouveau riche sans esprit et sans éducation. Sainville , amant préféré de Lucile, se rend secrettement à Senlis, et il descend précisément; dans l’auberge où logent le père et la mère de sa maîtresse. Il s’agit de s’opposer aux prétentions de la Rapinière, et déjà mille projets occupent la tête de Frontin, valet de Sainville, et celle de Lisette, suivante de Lucile. Celle-ci , occupée de son dessein, voit par le plus heureux hasard arriver à Senlis un ancien ami, Lafleur, jadis valet, aujourd’hui directeur de troupe de Comédiens et acteur, et qui plus est auteur lui-même. Lisette le met au fait. La compagnie arrive ; Lafleur, sous le nom de Tout-à-tout, examine la Rapinière ; ses traits ne lui sont pas inconnus ; à l’instant il dresse sa batterie ; il fait apporter dans la chambre de l’auberge un vaste transparent, à travers lequel une glace réfléchit les personnes, non telles qu’elles sont, mais telles qu’elles ont été.

Bientôt il fait annoncer ce nouveau genre de spectacle. M. et madame Baguenaudier sont les plus empressés à s’y présenter. Il leur offre dans la glace l’image de leur hymen ; un rentier s’y voit gras,bien vêtu, etc. Enfin vient le tour de la Rapinière, qu’on invite, que l'on presse même fortement de s’y regarder. Il cède aux instances et voit... un laquais dans la glace. Envain il crie à l’infamie, au scandale ; Tout-a-Tout se nomme, et redevenu Lafleur, il force la Rapinière à redevenir Champagne et à le reconnoître. Celui-ci, en s’esquivant, laisse à Sainville le champ libre, et les deux amans sont unis.

Cet ouvrage offre plusieurs traits comiques, des saillies piquantes, et un dialogue quelque-fois serré et rapide ;. des entrées, des sorties non-motivées, toujours des détails et presque pas d’action, nuisirent à cette représentation : et aux voix qui demandèrent les auteurs, se mêlèrent quelques coups de sifflets. Il n’empêchèrent cependant pas les auteurs d’être nommés : ce sont les citoyens Auger et Mabille. Nous les engageons à faire des coupures dans cet ouvrage, qui a un but vraiment moral.

On a remarque et redemandé deux ou trois couplets. On y reconnoit de la grace et de la facilité. Qu’on nous permette de citer le suivant :

Lisette veut savoir le secret de Lafleur.

Celui-ci refuse de le lui dire, et ajoute, en comparant la femme à un vase d’argile qu’il possède, et dans lequel il a mis de l’eau :

      Air : Une fille est un oiseau.

Mais je vois avec regret
Que son argile infidèle
A l’onde qu'elle recèle
Ouvre un passage indiscret ;
Tout soin devient inutile,
La liqueur prompte et subtile
A travers filtre et distile :
Elle disparoît soudain.
La femme est l’urne fragile
Et ce secret l’onde agile
Qui s’échappe de son sein

Mad. Bailly et le cit. Bosquier-Gavaudan méritèrent particulièrement d’être applaudis à cette représentation.

F. J. B. P. G***.

Magasin encyclopédique, ou journal des sciences, des lettres et des arts, sixième année (an VIII – 1800), tome quatrième, p. 417 :

Théâtre des Troubadours.

La Foire de Senlis.

Cette pièce a été jouée le 8 frimaire.

M. et M.me Baguenaudier se sont rendus à la foire de Senlis avec Lucille, leur fille, et la Rapinière, nouveau riche. Sainville , amant de Lucille, l’a suivie, et arrive avec Frontin, son valet. Celui-ci forme avec Lisette plusieurs projets pour s’opposer aux projets de la Rapinière. Ils rencontrent La Fleur, ci-devant laquais, maintenant auteur, acteur et directeur ; on le met dans la confidence : il annonce alors un miroir magique dans lequel on se voit, non tel qu’on est, mais tel qu’on a été. Lorsque la Rapinière s’y présente, on le voit vêtu en laquais ; M. et M.me Baguenaudier, désabusés, le chassent, et donnent Lucile à Sainville.

Le dialogue est vif et serré ; les entrées et sorties rarement motivées. Cette pièce a eu un demi-succès. Les auteurs sont les CC. Auger et Mabire.

L'Année théâtrale, almanach pour l'an X, p. 240-241, se montre particulièrement sévère pour les productions du théâtre des Troubadours, qui a disparu, et parle de La Foire de Senlis comme d'une « véritable pièce de foire », ce qui n'est pas un compliment, mais est loin d'être le jugement le plus sévère porté sur les spectacles des Troubadours.

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