Les Femmes soldats, ou la Forteresse mal défendue

Les Femmes soldats, ou la Forteresse mal défendue, folie-vaudeville en un acte, de Théaulon et Armand Dartois, 9 février 1809.

Théâtre du Vaudeville.

Titre :

Femmes soldats (les), ou la Forteresse mal défendue

Genre

folie-vaudeville

Nombre d'actes :

1

Vers / prose

en prose, avec des couplets en vers

Musique :

vaudevilles

Date de création :

9 février 1809

Théâtre :

Théâtre du Vaudeville

Auteur(s) des paroles :

Théaulon et Dartois

Sur la page de titre de la brochure, à Paris, chez Fages, 1809 :

Les Femmes soldats, ou la Forteresse mal défendue, folie-vaudeville en un acte ; par MM. Marie Théaulon et Armand d’Artois ; Représentée pour la première fois, à Paris, sur le Théâtre du Vaudeville, le 9 février 1809.

L’Esprit des journaux français et étrangers, année 1809, tome III (mars 1809), p. 269-275 :

[Un compte rendu bien long, pour une pièce qui ne mérite pas tant d'honneur. Le résumé de l’intrigue ne laisse rien ignorer de la pièce, qu’il n’est peut-être plus nécessaire de voir. Après ce luxe de détails, le dernier paragraphe dit ce qu’il faut penser du vaudeville : c’est « une folie de carnaval », gaie, avec un fond digne d’une pièce de carnaval, parfois un peu long au début, mais sinon « l’action est vivement conduite ». Sur le style, des remarques tout à fait intéressante (et qui nous éloignent d’ailleurs de la pièce) : « dans le dialogue peu de calembourgs, pas beaucoup d'équivoques » (est-ce un reproche ? On trouve souvent des comptes rendus où c’est un compliment !), des couplets qui « n'ont pas toujours cette pointe qu'on nous a accoutumés à y trouver », « de simples couplets de dialogue ». C’est l’occasion de faire un peu d’histoire du vaudeville, de rappeler qu’il fut un temps où tout le vaudeville était en couplets, « sans aucun mélange de dialogue parlé ». Et le critique paraît nostalgique d’un temps où il n’était pas nécessaire de faire preuve sans cesse d’esprit, aussi bien dans les couplets que dans le dialogue. Mais pas de reproche à faire à cette pièce : « on a fort applaudi, et, qui mieux est, on a ri ». Et les auteurs ont été demandés, et nommés, et Théaulon a encore vu son nom écorché.]

Les Femmes soldats, ou la Forteresse mal défendue.

Tout est permis en carnaval,

excepté d'ennuyer les gens. Aussi ce vaudeville a-t-il amusé, et avec cela,

Tout est permis en carnaval.

C'est d'après ce principe que sept jeunes demoiselles, de je ne sais quelle ville, ont imaginé de se mettre en patrouille pour aller visiter leurs frères, cousins, amans, etc., enfermés, au nombre de six dans une forteresse voisine pour avoir donné dans la ville des sérénades qui endormaient les maris

Et réveillaient les femmes,

Parmi ces jeunes gens, le plus sage c'est Henri, fils du commandant de la ville, M. Osmond, qui ne donne point de sérénades, mais qui a voulu enlever une jeune fille qu'il aime et que son père ne veut pas lui laisser épouser ; trois invalides gardent ces six étourdis, ce qui fait croire qu'on ne veut pas les garder long-temps : mais l'on annonce qu'il va arriver un renfort de six soldats et un caporal. La lettre est signée Victor, neveu et secrétaire du commandant ; c'est lui qui a fourni aux sept héroïnes les habits et les moyens nécessaires pour entrer dans la forteresse : à leur tête est Emilie, cousine de Henri, et dans la troupe est sa maîtresse la tremblante Sophie. Le détachement arrive ; l'invalide Bataille, en sentinelle sur le haut du donjon, annonce son arrivée. Sans-Quartier se met sous les armes pour le recevoir, et le commandant du fort,

Qui portait la clef dans sa poche,

leur ouvre la porte. La nouvelle garnison paraît bien un peu jeune, mais d'ailleurs elle se présente fort bien, grace à quelques leçons d'exercice qu'on a reçues de Victor. La troupe paraît leste et joyeuse, disposée à rire, mais pas tout-à-fait assez disposée à boire ; cependant il faut bien goûter du vin du fort. On lit aussi aux nouveaux soldats quelques petits articles de discipline qui ne laissent pas de les inquietter un peu ; mais il n'est plus temps de réfléchir : d'ailleurs Sophie vient d'être laissée tête à tête avec son amant, ce n'est pas le moment de la prudence. Placée en sentinelle sur le donjon, on juge qu'elle a bientôt descendu la garde pour rejoindre Henri ; mais au moment le plus tendre arrive l'invalide commandant qui trouve qu'il n'est pas du tout de la consigne de venir embrasser Henri, et qui envoie la sentinelle en prison. Grande consternation dans la troupe ; elle augmente bien autrement quand on amène le commandant de la ville, M. Osmond, père de Henri : la garnison se sauve. L'invalide commandant, qui connaît trop bien son devoir pour ne pas recevoir son chef avec tous les honneurs militaires, refuse absolument de lui ouvrir la porte que tous ses soldats ne soient sous les armes. Une menace de prison les force enfin à paraître. M. Osmond entre, passe la troupe en revue, paraît ne reconnaître personne, et après avoir renvoyé les soldats à la caserne, déclare qu'il vient rendre la liberté aux prisonniers, et cela au grand chagrin d'Henri, désolé de laisser ses alliés dans l'embarras ; mais un mot de Victor le tranquillise ; ils partent. L'agitation est dans la garnison femelle, ainsi abandonnée dans un poste qui n'est plus tenable. On tient conseil ; la plus brave de ces amazones veut qu'on se fasse ouvrir la porte l'épée à la main :

Il faut montrer du caractère.
- Ça n'se peut pas, ça n'se peut pas,

répond dolemment toute la troupe. Que faire cependant

Jusqu’à demain, fait-il se taire ?
- Ça n'se peut pas, ça n'se peut pas,

Enfin on prend le parti que prennent ordinairement les femmes dans les occasions urgentes, c'est de se reposer, en ne faisant rien, de la fatigue qu'elles ont prise à imaginer les partis les plus actifs. Elles se déterminent donc à attendre qu'Henri vienne les délivrer ; mais au lieu de lui, arrive une dépêche de M. Osmond, qui annonce au commandant du fort qu'on a signalé en mer une frégate barbaresque qui paraît se disposer à attaquer le fort bâti sur la côte, et qu'il compte pour la défendre sur la brave garnison, dont une partie prend de rechef le chemin de la caserne, sans que pour cette fois il soit possible de l'en tirer. D'ailleurs, il faut se préparer à soutenir l'attaque ; on examine les munitions de guerre, qui consistent en trois onces de poudre, du plomb, pas tout-à-fait ce qu'il en faut pour rincer une bouteille, ce qui n'empêche pas l'invalide Bataille de faire grand fond sur son fusil, auquel il ne manque que la baïonnette. Le sabre de Sans-Quartier n'a pas de lame ; mais quant à l'épée du commandant, en s'y mettant à deux, on parvient assez aisément à la sortir du fourreau. Des coups de feu annoncent l'arrivée de l'ennemi. On te tire, crie le commandant à Bataille, qui a repris son poste sur le donjon ; oui, mais on me manque, répond celui-ci. Cependant la porte est bientôt forcée, et il y allait avoir du sang répandu, si heureusement un coin de moustache soulevé à propos et un coup-d'œil d'intelligence ne faisaient reconnaître au commandant, sous la barbe du chef des corsaires, M. Osmond lui-même, que son neveu, le trouvant dans des dispositions favorables, a instruit de tout et qui veut se divertir encore de la peur de ces dames. Les vainqueurs déclarent hautement qu'ils veulent que la garnison vienne se rendre prisonnière de guerre. Alors elle paraît en habits de femme qui avaient été apportés dans les sacs. Enchantés d'un si joli butin, les Algériens s'empressent de le partager, et quand chacun a ce qui lui faut, les turbans et les barbes tombent, et les captives effrayées sont fort contentes de reconnaître des corsaires avec lesquels on puisse au moins entrer en composition. M. Osmond , qui n'est pas plus méchant que les autres, consent, pour la peur qu'il a causée à Sophie, à ce qu'elle épouse son fils.

Ce vaudeville est une folie de carnaval, et elle est gaie ; le fond en est ce qu'il doit être , une plaisanterie ; à cela près de quelques longueurs dans la première moitié, l'action est vivement conduite. Il y a dans le dialogue peu de calembourgs, pas beaucoup d'équivoques ; quant aux couplets, ils n'ont pas toujours cette pointe qu'on nous a accoutumés à y trouver ; ce sont quelquefois de simples couplets de dialogue qui rentrent dans l'action, au lieu d'en sortir par un trait tiré de droite ou de gauche. Ces sortes de couplets étaient en grand nombre autrefois dans le vaudeville, lorsqu'il était tout en couplets sans aucun mélange de dialogue parlé. Ce dialogue ainsi chanté avait la permission d'être simple ; le trait y arrivait amené par l'action, et était reçu avec d'autant plus de plaisir, qu'il n'était pas obligé. Le reste du temps, ce choix et cette variété d'airs gais, la gaieté des refrains donnait au dialogue un mouvement qui dispensait d'y mettre tant d'esprit. Maintenant il faut qu'un dialogue qui vient après des couplets soit piquant, et il n'est pas toujours ce qu'il faut qu'il soit. Des couplets qui interrompent le dialogue, annoncent nécessairement la prétention d'être saillans ; car dès qu'on prend la peine de parler en vers, il est clair qu'on doit promettre quelque chose de plus intéressant que ce qu'on disait en simple prose. Cependant les couplets ne tiennent pas toujours leur promesse, et l'on ne sauroit croire combien le parterre se trouve désappointé quand un couplet finit tout uniment. On n'a cependant rien trouvé à reprocher à ceux-ci ; on a fort applaudi, et, qui mieux est, on a ri. Les auteurs, unanimement demandés, sont MM. Tholon [sic] et Dartois.

Magasin encyclopédique, ou journal des sciences, des lettres et des arts, 14e année, 1809, tome I, p. 393 :

[Une « petite pièce », qui doit son « petit succès » à l’idée de déguiser des femmes en soldats, de leur faire manier les armes, mais de manifester aussi à la première occasion leur faiblesse face à l’ennemi. L’intrigue est fort mince, et « les scènes les plus comiques sont celles des trois vieux invalides », soit un tableau tout à fait secondaire. On a tout de même le nom des auteurs (ou presque...).]

Les Femmes soldats, ou la Forteresse mal défendue, vaudeville joué le 9 février.

Ici l'idée vaut mieux que l'exécution, et voilà la raison du petit succès que le carnaval a fait obtenir à cette petite pièce. On juge sans rigueur les folies, et on a trouvé agréable le tableau de huit femmes en habit militaire, et faisant assez passablement l'exercice ; mais ces nouvelles Amazones qui se sont déguisées pour voir leurs amans, tremblent de peur à la nouvelle de l'approche des corsaires barbaresques qui viennent assiéger la forteresse où elles se trouvent renfermées. Ces prétendus corsaires sont les amans eux-mêmes qui ne tardent pas à se faire reconnoître de leurs belles. Les scènes les plus comiques sont celles des trois vieux invalides à qui est confiée la garde du fort.

Les auteurs de cette bluette sont MM. Taulon [sic] et Dartois.

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