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Le Grand-Père, ou les Deux âges

Le Grand-Père, ou les deux Âges, opéra-comique, d'Alexandre de Favières, musique de M. Louis Jadin, 22 vendémiaire an 14 [14 octobre 1805].

Théâtre de l’Opéra-Comique.

Titre

Grand-Père (le), ou les deux Âges

Genre

comédie mêlée d’ariettes (opéra-comique)

Nombre d'actes :

1

Vers / prose ?

prose, avec des couplets en vers

Musique :

oui

Date de création :

22 vendémiaire an 14 [14 octobre 1805]

Théâtre :

Théâtre de l’Opéra-Comique

Auteur(s) des paroles :

Al. F. (Alexandre de Favières)

Compositeur(s) :

Louis Jadin

Sur la page de titre de la brochure, à Paris Mme. Masson, an XIV – 1805 :

Le Grand-Père, ou les deux Âges, comédie en un acte, mêlée d’ariettes, Représentée pour la première fois sur le Théâtre de l’Opéra Comique, le Lundi 22 Vendémiaire an 14. (14 Octobre 1805.)

Si la couverture ne donne pas de nom d’auteur et de compositeur, la troisième page comporte une « épître dédicatoire à mon père » signée Al. F.

ÉPITRE DÉDICATOIRE,

A MON PÈRE.

Je dois aux vrais talens, comme à vos bons avis,
            L'heureux succès de mon ouvrage ;
            Mais pour mon cœur le plus doux prix,
            C'est de vous en faire l'hommage.
            Je célébrais la bravoure et l'honneur,
            C'était avoir des droits à l'indulgence ;
            Quand sur la scène on offre la valeur.
Comment ne pas trouver des protecteurs en France ;
            Encouragé par mon premier essai,
      Si j'en tente un second, il plaira je l'espère,
            J'aurai pour guide un ami sûr et vrai,
Et le plus cher pour moi, ce sera vous mon père.

D’après la Bibliothèque de Soleinne, volume 6, p. 163, l’auteur des paroles est bien M. Alexandre de Favières.

Courrier des spectacles, n° 3187 du 25 vendémiaire an 14 [15 octobre 1805], p. 2 :

[La pièce a manifestement un contenu moralisateur, le contraste entre la sagesse de l’homme mûr et la légèreté de la jeunesse, et le critique ne peut que constater que l’opéra comique n’est pas le cadre idéal pour traiter « un sujet si grave ». Le choix de ce cadre pour ce sujet est pour lui le signe de l’immaturité de l’auteur de la pièce, tout comme de son ignorance des exigences de la scène intrigue trop pauvre, scène mal reliées, inutilité de certains personnages, dialogue et versification sans élégance. Ce qui n’a pas empêché la pièce de réussir. L’intrigue, longuement résumée, nous plonge dans une expérience familiale menée par un grand-père qui veut savoir ce que vaut son petit-fils et qui le soumet à des épreuves dont il se sort bien : il pourra épouser la jeune fille qu’il aime. Le critique ne revient pas sur l’intrigue quand il porte jugement de la pièce. Il se limite à féliciter les acteurs principaux, les autres ayant des rôles « presque nuls » ou se réduisant au port de l’uniforme. La musique par contre est assez durement jugée : « point riche en effets ni en harmonie », « accompagnemens […] un peu communs », le critique ne trouve à sauver qu’un duo.]

Théâtre de l'Opéra-Comique.

Le Grand-Père, ou les Deux Ages.

Si l’auteur de cet ouvrage a voulu opposer la sagesse de l’âge avancé à l’étourderie de la jeunesse, s’il a voulu montrer les défauts et les qualités qui s’attachent à ces deux extrémités de la vie, il s’est renfermé dans un cadre bien étroit ; ce n’étoit gueres en chansons qu’un sujet si grave devoit être traité ; tout annonce que cette pièce n’est qu’un essai ; quoique l’auteur ait gardé l'anonyme, il a été facile de reconnoitre un jeune homme dont la tête est encore peu riche en idées, et dont la muse n’est pas familiarisée avec les secrets de l’art. Le fonds de son intrigue est foible, pauvre et de peu d’intérêt ; les scènes ne sont pas liées entr’elles ; plusieurs personnages sont absolument inutiles ; le dialogue manque souvent d’élégance, et les vers ressemblent beaucoup au dialogue. Cependant le succès a été complet et même assez brillant ; tant il est vrai qu’un parterre bienveillant et de bons acteurs sont une excellente ressource.

Rodolphe est un enfant de quinze ans qui revient du collège, et que son grand-père, (Monsieur de Mercour), vieux militaire destine au service. Néanmoins, comme il veut s’assurer du caractère et des dispositions de son petit-fils, il fait placer dans sa chambre trois habits différens, un habit de militaire, un habit de magistrat et un habit bourgeois. L’habit de magistrat paroitra peut-être un peu grave pour un enfant de quinze ans ; aussi Rodolphe le laisse-t-il de côté pour se saisir avidement de l’habit militaire.

Le Grand-Père (M. Mercour) a pour ami un de ses anciens compagnons d’armes nommé Florval, et M. de Florval a pour fille unique Adèle, jeune personne fort aimable et fort jolie.

Comme on n’imagine pas que le petit Rodolphe ait rapporté de son collège des dispositions amoureuses pour Adele, on se dispose à la marier à un jeune officier plein d’esprit, de sagesse et de raison. On sait qu’aux âmes bien nées la vertu n’attend point le nombre des années. Rodolphe est réellement très-amoureux d’Adèle, et quand i! apprend que Solange est son rival , il n'hésite pas à le provoquer. Déjà il a le pistolet à la main, lorsque le Grand Père arrive, et gourmande, comme il convient, le petit étourdi. Il lui apprend que ce rival qu’il a provoqué, que ce Solange qu’il veut tuer s’est lui-même intéressé pour le succès de ses vœux ; et que, loin de vouloir lui enlever Adèle, il a obtenu de M. de Florval qu’elle devînt l’épouse de Rodolphe.

Après ces explications , M. de Mercour veut que son petit-fils fasse des excuses à Solange ; mais Rodolphe sent déjà toute la dignité de l’habit qu’il porte ; il se dispose à le quitter avant d’obéir à son Grand-Père. C est alors que M. de Mercour reconnoît son sang, qu’il embrasse son petit-fils, et lui promet incessamment la main d’Adele.

Le rôle de Rodolphe est joué avec beaucoup de vivacité, d’intelligence et de grâce par Mad. Haubert-Lesage. Juliet remplit bien celui du Grand-Père. Le rôle de Mad. Gonthier et celui de St.-Aubin sont presque nuls. M. Paul porte très bien l’habit militaire, et se tire avantageusement du rôle de Solange.

La musique est de M. Louis Jadin ; elle n’est point riche en effets ni en harmonie ; les accompagnemens sont un peu communs ; mais on y a remarqué un duo agréable entre Mad. Haubert et Juliet.

Mercure de France, littéraire et politique, tome vingt-deuxième (an XIV), n° CCXXIII (27 Vendémiaire an 14, samedi 19 Octobre 1805), p. 183-185 :

[La première représentation a été triomphale, pas la deuxième : le critique incrimine les journaux, mais on peut aussi penser aux amis de l’auteur, venus seulement à la première ! L’essentiel du compte rendu est consacré à une fort longue analyse de l’intrigue. La conclusion : si la première a été si réussie qu’on le dit, elle le devait au talent des acteurs. D'autres explications sont possibles !]

Théâtre de L'Opéra-Comique.

Le Grand-Père ou les Deux Ages, paroles d'un anonyme, musique de M. Jadin.

La première représentation de cette pièce avoit, dit-on, été fort applaudie. A la seconde, que nous avons vue, on ne s'en seroit pas douté. Peu de personnes ont paru curieuses de vérifier si ces applaudissemens étoient mérités : on étoit extrêmement à l'aise dans toutes les parties de la salle. Peut-être doit-on attribuer cette fâcheuse solitude à l'impitoyable véracité des journaux, qui n'ont pas été de l'avis du succès, et qui malheureusement nous semblent n'avoir pas tout-à-fait tort. Le poème n'a rien de saillant, et dans la musique on n'a distingué qu’un duo.

Une Bonne ouvre la scène ; elle entretient le spectateur de l'attachement qu'elle a pour son maître, M. de Mercour. Tout va bien suivant elle dans le château, si ce n'est les jours de gala, où l’on consomme trop de sucre. Elle attend le petit-fils de la maison, Adolphe, enfant de i5 ans, qui sort du collège. Il arrive, et commence par jeter au feu tous ses livres de classe, en témoignant combien il est aise de se voir délivré de l'ennui qu'ils lui ont causé. Cette saillie a été froidement reçue du public. Le grand-père voulant connoître l'état pour lequel Adolphe se sent du goût, au lieu de le lui demander, ce qui eût été trop simple, fait placer dans sa chambre un uniforme, une robe de palais et un habit ordinaire. Le petit drôle ne veut être ni robin, ni bourgeois, et reparoît en militaire.

Depuis bien des années, c'est-à-dire dès le berceau, il adore Adèle, aimable et riche héritière, qui est invitée à dîner au château. Il est payé de retour, et veut un gage de son bonheur : on lui demande en rougissant ce qu'il exige. Il se borne à supplier Adèle de déposer un baiser bien tendre sur une rose qui pare son sein, et de la lui donner ensuite. Accordé ; et on devine bien avec quel transport il presse de ses lèvres cette rose précieuse.

Un jeune officier, mais plus âgé qu'Adolphe, trouve aussi Adèle assez de son goût. Il l'aime très-tranquillement toutefois, et en fait confidence au grand-père, on ne sait trop pourquoi. Il ajoute qu'il a rimé pour sa fête quelques couplets, qu'il voudroit faire copier parce qu'ils ne sont tracés qu'au crayon. M. de Mercour répond qu'il a sous la main quelqu'un qui fera cette copie. Il en charge son petit-fils, étant loin de se douter qu'il s'adresse à un rival de Solange, et lui dit : « Ce sont des vers faits pour la vertu et la sagesse »

Adolphe les emporte, et revient bientôt en fureur. Il a cependant commencé par se venger ; feignant de croire que les couplets étaient pour une vieille femme, il les lui a remis. Le paquet est à son adresse,ajoute-t-il ; car on m'a prévenu qu'il étoit destiné à la sagesse. Mais cette vengeance ne suffit pas à sa colère, il oblige Solange à se battre. Déjà ils sont en présence, le pistolet à la main, lorsque le grand-père arrive à propos, apprend à son petit-fils que son généreux adversaire a demandé et obtenu du père d'Adèle la main de sa fille pour l'ingrat Adolphe. Celui-ci est confondu, et ne sait en quels termes exprimer sa reconnoissance. Cela ne contente pas M. de Mercour, ancien et brave militaire, et qui connaît les procédés usités en pareil cas. Il déclare qu'il faut une réparation en règle, qu'il est dans l'ordre que son petit-fils demande pardon. En vain celui-ci se révolte à ce mot. L'aïeul, comme officier supérieur, commande impérativement. « Eh bien ! s'écrie Adolphe, puisqu'on me traite en écolier, je vais le redevenir ! Je ne déshonorerai point l'habit que je porte. » Il se met en devoir de s'en dépouiller. Le grand-père, pleurant de joie, lui annonce qu'il est satisfait. On lui promet Adèle après qu'il aura fait sa première campagne; et pour que tout le monde soit content, on accorde à Solange la sœur d'Adolphe, qu'on peut supposer aussi belle qu'on voudra ; car on ne l'a pas vue, et il en est question alors pour la première fois. Si quelque chose peut expliquer le bonheur de la première représentation de cette pièce, c'est le jeu plein d'agrément et de vivacité de madame Haubert-Lesage, qui a sous l'uniforme une grâce infinie. Les autres rôles sont aussi très-bien rendus par mesdames Gontier, Desbordes, et par Juliet. Mademoiselle Desbordes, dans la première pièce (Lisbeth), avoit montré beaucoup d’ame et d'énergie.

L’Esprit des journaux français et étrangers, tome III, frimaire an XIV [novembre 1805], p. 275-276 :

[Pièce plus digne d’un théâtre d’éducation (on en fait des volumes entiers) que de l’Opéra-Comique : sujet sans intérêt qu’il aurait fallu traiter de façon comique, et non le prendre « sur le ton du sentiment ». Auteur anonyme, musique sans couleur, le verdict est sans appel.]

THÉATRE DE L'OPÉRA – COMIQUE.

Le Grand-Père, ou les deux Ages.

Cette pièce figurerait mieux dans le théâtre d'éducation, que sur la scène de l'Opéra-Comique. Sans le talent des acteurs, je doute qu'elle eût été jusqu'à la fin. Les étourderies d'un enfant de 15 ans, à peine sorti du collége, ses amours et ses rodomontades n'ont rien d'intéressant. Il faut une grande gaîté pour plaire avec un tel sujet: lorsqu'on le prend sur le ton du sentiment, on est bien sûr de manquer son but. M. de Mercour, vieux militaire, retire son petit-fils du collége pour l'envoyer au régiment : mais il veut auparavant savoir le goût du jeune homme ; et au lieu de le lui demander tout bonnement, il fait mettre dans sa chambre trois habits. Le jeune homme prend l'uniforme : ce qui ne signifie rien, parce qu'un joli habit qui le séduit ne prouve pas qu'il connaisse le mérite et les difficultés de l'état qu'il embrasse. Quelques momens après, il appelle en duel un officier estimable, tandis qu'il ne sait pas même se mettre en garde, ce qui est assez étonant pour un garçon que l'on destine à l'état militaire. Enfin, comme il annonce un bon cœur, et que la jalousie seule lui avait faire des sottises, on lui pardonne, en lui promettant de le marier après sa première campagne. L'auteur a gardé l'anonyme. La musique est sans couleur ; on n'y a remarqué qu’un assez joli duo. Elle est de M. Jadin.

Magasin encyclopédique, ou journal des sciences, des lettres et des arts, 10e année, 1805, tome VI, p. 203 :

[Pièce de collège, juste bonne donc à éduquer les jeunes gens (et à leur donner le bon exemple). Elle manque de l’indispensable gaîté qui ferait seule réussir un sujet aussi mince. Les acteurs seuls ont pu sauver la pièce.]

Le Grand-Père.

C'est plutôt une pièce de collège qu'un ouvrage fait pour l'Opéra-Comique. Les espiègleries et les amours d'un César de quinze ans, qui endosse l'uniforme en sortant du collège, n'ont rien de bien intéressant. Il faudroit une grande gaîté pour réussir avec un semblable sujet. C'est ce qui manquoit à l'ouvrage nouveau. Aussi ne peut-on pas dire qu'il ait réussi, mais seulement qu'il n'est point tombé, et cela, grâce au jeu de madame Lesage, qui a été parfaitement secondée par Juliet et madame Gonthier. La musique de M. Jadin est peu saillante : on n'y a remarqué qu'un duo assez joli.

Selon Nicole Wild et David Charlton, Théâtre de l'Opéra-Comique Paris, répertoire 1762-1972, p. 270, la pièce a été jouée à l’Opéra Comique jusqu’en 1806.

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