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Hommage du petit Vaudeville au grand Racine
Hommage du petit Vaudeville au grand Racine, vaudeville en un acte, de Coupigny, Piis, Barré, Radet et Desfontaines. 2 Prairial an 6 [21 mai 1798].
Théâtre du Vaudeville
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Titre :
Hommage du petit Vaudeville au grand Racine
Genre
vaudeville
Nombre d'actes :
1
Vers / prose
en prose, avec des couplets en vers
Musique :
vaudevilles
Date de création :
2 prairial an 6 [21 mai 1798]
Théâtre :
Théâtre du Vaudeville
Auteur(s) des paroles :
Coupigny, Piis, Barré, Radet et Desfontaines
Almanach des Muses 1799.
Arlequin, député par le Vaudeville, arrive aux Champs-Elysées ; il y trouve Petit-Jean, l'un des personnages des Plaideurs, établi portier et causant avec Antoine, jardinier de Boileau, et Laforest, servante de Molière. Il demande la permission d'entrer, il est introduit auprès de Molière et de Boileau, il leur rend compte de sa mission ; il voudrait offrir au grand Racine l'hommage du petit Vaudeville ; cette faveur lui est accordée.
Pièce dont le produit était destiné à soulager une petite nièce de Racine, réduite à la plus extrême indigence. Point d'intrigue, mais de l'esprit, des couplets très-piquans, beaucoup de succès.
Sur la page de titre de la brochure, Paris, Charles Pougens, an VI :
Hommage du petit Vaudeville au grand Racine. Vaudeville en un acte, Représenté pour la première fois sur le Théâtre du Vaudeville, à Paris, le 2 Prairial, an VI de la République française.
La Décade philosophique, littéraire et politique, Volume 3, n° 25, du 10 prairial an VI, p. 426-428 :
[La pièce est destinée à aider une descendante de Racine tombée dans la misère, et le critique en profite pour appeler de ses vœux une loi créant une caisse destinée à aider les « descendans malheureux de nos grands hommes ». La pièce, attribuée à Coupigny a su éviter l’écueil de la fadeur qui menace ce genre de pièce, grâce à un cadre ingénieux : l’envoi d’un messager aux Champs Elysées pour rendre hommage à Racine. Occasion de rencontrer divers personnages, dont Boileau et Molière. Coupigny s’est associé à la joyeuse bande du Vaudeville, et ils ont créé des couplets mordants « sur nos productions actuelles, sur nos modes, nos costumes, nos mœurs, nos théâtres, nos promenades ». Le compte rendu donne des exemples des traits d’esprit que ces couplets contiennent. Le plus haut degré de complexité du compte rendu, c’est quand un de ces couplets, que le public a applaudi est cité, bien qu’il soit « plus spirituel que juste ». L’explication qui suit ne manque pas d’intérêt ! Apparemment d'ailleurs le public a beaucoup applaudi : « à l'intention de l'auteur, à l'invention du cadre, à la délicatesse des formes et à l'esprit des couplets ».
Article repris dans l’Esprit des journaux français et étrangers, 1798 (vingt-septième année), tome VII (juillet 1798, messidor, an VI), p. 177-180.]
Théâtre du Vaudeville.
Hommage du petit Vaudeville au grand Racine.
Les circonstances viennent de fournir encore une nouvelle preuve de la nécessité d'organiser promptement la caisse destinée à recevoir le produit des ouvrages des auteurs morts, et de l'utilité dont elle pourrait être aux descendans malheureux de nos grands hommes : une petite nièce de l'immortel Racine se trouve réduite à la plus extrême détresse.
Mais en attendant l'exécution de cette loi bienfesante, qui n'est encore qu'une résolution du Conseil des Cinq-Cents, et qui attend la sanction des Anciens, le malheur de cette parente du plus grand de nos poètes, a ému les cœurs sensibles. Le C. Coupigny s'est d'abord adressé à un entrepreneur des grands théâtres ; l'état de fluctuation et d'incertitude dans laquelle se trouvent aujourd'hui leurs entreprise, ne leur a pas permis de prendre un parti assez prompt, et à leur défaut le théâtre du Vaudeville qui ne se borne pas au seul plaisir de rendre un stérile hommage aux grands hommes, a secondé avec un zèle digne d'éloges les bonnes intentions du C. Coupigny : celui-ci a senti qu'il fallait accompagner cette bonne action de formes délicates, et la faire en quelque sorte partager au public ; c'est l'objet de la pièce de circonstance qu'on a donnée avec un grand succès le deux de cette décade.
La difficulté réelle de ces sortes d'ouvrages est toujours d'éviter la fadeur, et de trouver un cadre ingénieux ; elle a été surmontée avec grâce et succès par l'auteur de cette bluette. Il suppose que le Vaudeville députe son Mercure extraordinaire aux Champs-Elysées , pour demander la permission d'évoquer les illustres morts, et de faire accepter au grand Racine l'hommage du petit Vaudeville. Arlequin chargé de la commission, aborde en effet au seuil des Champs-Elysées : il y trouve d'abord le Petit-Jean des Plaideurs de Racine, établi portier, et causant avec Antoine, jardinier de Boileau, et Laforest, servante de Moliere : il demande l'entrée, et ces bonnes gens l'introduisent auprès de Molière lui-même, et du sévère Boileau ; il remplit alors avec circonspection et timidité le message dont il est chargé, et obtient en faveur de sa délicatesse la permission qu'il sollicite.
Le C. Coupigny, afin de hâter l'effet de ses bonnes intentions , a cru devoir s’associer les auteurs ingénieux de Scarron, pour remplir son cadre , et ceux-ci l'ont merveilleusement secondé. Sans perdre de vue l'objet principal , ils ont profilé de l'invention heureuse de faire trouver ensemble Petit-Jean, Antoine et Laforest, qui leur a fourni les couplets les plus piquans tour-à-tour sur nos productions actuelles, sur nos modes, nos costumes, nos mœurs, nos théâtres, nos promenades.
Ou doit distinguer entre-autres un hommage fort à propos rendu à la citoyenne Joly, que le théâtre vient de perdre. Nous croyons faire plaisir au lecteur de le citer.
Air: Comme v’là qu'est fait.
Certaine Actrice intéressante
Evitant les travers nouveaux,
Avec Molière était Servante
Et Soubrette avec Marivaux.
C'était une finesse extrême ;
C'était gai, pur, touchant, poli ;
C'était la Nature elle-même ;
En un mot, c'était accompli :
C'était Joli ! c'était Joli !
Rien de plus délicat que l'allégorie dont se sert Arlequin pour excuser le Vaudeville d'être le premier à faire ce que les grands théâtres auraient dû faire avant lui. C'est un arbuste précieux dont un rejetton languit : un enfant, faute du secours d'une pluie abondante, lui donne du moins en passant le peu d'eau dont sa cruche est remplie ; et si ce peu d'eau suffit à peine, du moins il rafraîchit sa racine.
Le public n'a pas exigé qu'une pièce de ce genre eût une fiction, une intrigue ; mais il a applaudi à l'intention de l'auteur, à l'invention du cadre, à la délicatesse des formes et à l'esprit des couplets ; il en a même fait répéter plusieurs, entre-autres ce refrein, peut-être cependant plus spirituel que juste, mais applaudi avec transport par les têtes poudrées.
Que de Titus aux cheveux noirs,
A jambe fine et bien tournée,
Pourraient se dire tous les soirs :
D'honneur ! zai perdu ma zournée.
Je dis que cette saillie est plus spirituelle que juste, parce que le costume des cheveux noirs ne désigne pas seulement les Titus ; parce que c'est à-peu-près généralement celui des gens occupés, des Artistes et des Gens-de-lettres ; parce qu'il est beaucoup plus dans la nature que tout autre ; enfin, parce que la poudre, cette invention bizarre, si long-tems inconnue, ne prouve pas qu'on emploie bien mieux sa journée, mais plutôt qu'on perd beaucoup de tems à sa toilette.
Le Censeur dramatique, tome quatrième (1798), n° 31 (10 Messidor an 6 [28 juin 1798]) p. 193-198 :
THÉÂTRE DU VAUDEVILLE*.
Pièce nouvelle.
» Le 2 Prairial, on a donné la première Réprésentation de l'Hommage du petit Vaudeville au grand Racine, Pièce en un Acte en Prose, mêlée de Vaudevilles, par MM. Coupigny, Radet, Barré et Desfontaines.
Je juge sans sévérité les gens qui me font rire.
Boileau, dans la 4e scène de l'Hommage.
» Rien ne convient mieux que cette Epigraphe, au Sujet que nous allons traiter ; et l'on ne peut disconvenir qu'il n'y ait certains Ouvrages pour lesquels on doive être indulgent, lorsque, faits d'ailleurs sans aucune prétention, ils ont encore l'avantage d'amuser par la délicatesse, et le piquant de l'esprit. Telle est la petite Pièce représentée le 2 Prairial, sur ce Théâtre, sous le titre de l'Hommage du petit Vaudeville, au grand Racine, par MM. Coupigny, Radet, Barré et Desfontaines.
» Ce qui a donné lieu à cette Pièce, a été le desir de porter quelques secours à une descendante du grand Racine, qui se trouve aujourd'hui dans l'indigence. Comme l'on voit, le motif seul suffisoit pour rendre l'Ouvrage intéressant ; quant au sujet, il est très simple.
» Petit-Jean (des Plaideurs), par la protection de Racine, a obtenu la place de Portier des Champs-Elysées, afin d'avoir de quoi vivre après sa mort. Il fait la conversation avec La Forêt, Suivante de Molière, et Antoine, Jardinier de Boileau, en prenant le frais que l'on. prend à la porte des Enfers. Ils font la comparaison de leurs Champs-Elysées d'en bas, avec les Champs-Elysées d'en haut. Ils se plaignent de ne prendre que du Nectar et de l'Ambroisie, tandis que les Parisiens prennent de tout dans leurs Champs-Elysées. Ils trouvent encore cette autre différence, qu'ils se trouvent dans le Paradis, tandis qu'au contraire les Femmes de Paris font damner leurs maris dans les Champs-Elysées d'en haut. Sur ces entrefaites, arrive Arlequin, auquel Mercure a prêté ses ailes ; il raconte la peine qu'il a eu pour pénétrer jusqu'à la porte des Champs-Élvséçs, par ce couplet :
Air: Du Pas redoublé.
Ne voulant pas de l'Achéron
Frauder les droits de Passe,
J'ai, dans les mains du vieux Caron,
Payé de bonne grâce ;
Mais j'ai cru n'arriver,jamais,
Tant la foule étoît grande :
Le rivage étoit plein d'Anglois,
Qui venaient par Ostende.
Surviennent Molière et Boileau, qui demandent des nouvelles de la terre ; ce qui donne lieu à plurieurs jolis Couplets de censure contre les hommes et femmes du Jour. La critique des Soubrettes amène le Couplet suivant en l'honneur de Mlle Joly.
Certaine Actrice Intéressante,
Évitant les travers nouveaux,
Avec Molière étoit Servante,
Et Soubrette avec Marivaux ;
C'étoit une finesse extrême,
C'étoit gai, pur, touchant, poli,
C'étoit la Nature elle-même,
En un mot, c'étoit accompli ;
C'étoit Joly. (bis.)
Arlequin ne-manque pas d'entrer dans de grands détails sur les Modes, aliment perpétuel des esprits caustiques, ou plus souvent encore des; envieux. Voici le Couplet pour les Dames :
Cette Beauté, riche d'attraits,
C'est.Faustine, ou bien Octavie.
Cette autre nous cache ses traits
Sous le voile de Virginie.
Ce goût Romain est fort joli,
Ces noms sont remplis de noblesse ;
Mais il est tare à Tivoli
De rencontrer une Lucrèce.
Quoique nous ne nous chargions nullement d'attaquer cette dernière observation, dont la vraisemblance est fondée sur la vérité , nous avouons cependant que nous ne nous attendions guère à voir figurer Tivoli dans ce Couplet. Celui sur les Messieurs à la Mode nous a semblé amené plus naturellement sans être rnoins vrai :
A ces antiques vêtemens,
Si la mode a soumis nos Belles,
Nous avons des François charmans,
Qui ne sont pas moins Romains qu'elles.
Que de Titus en cheveux noirs,
A jambe-fine et bien tournée,
Pourroient se dire tous les soirs :
D'honneur, j'ai perdu ma journée.
On se doute bien des applaudissemens et des bravo qu'attire ce Couplet, surtout de la part d'un Public qui n'aime pas beaucoup les têtes noires, et auquel on ne peut refuser qu'il n'ait eu quelques bonnes raisons de concevoir cette antipathie. Quoi qu'il en soit, ces Messieurs n'en porteront pas moins les cheveux noirs ; et auront d'autant mieux raison de le faire, que beaucoup d'cntr'eux n'en seront pas moins laids.
» Arlequin, après avoir bien passé en revue les Vivans, en vient à l'objet de sa mission ; il demande à messieurs les Morts de lui prêter quelques-uns de leurs Grands hommes pour les aider à offrir au Grand Racine un hommage digne ae lui. Il s'y prend surtout d'une manière délicate, pour énoncer le motif de cette Fête, en se servant d'une comparaison renfermée dans le Couplet suivant :
Air : De la Parole.
Faute des soins du Jardinier,
Faute d'une abondante pluie,
Un enfant mouille le Rosier
De l'eau dont sa cruche est remplie ;
Pour rendre à la fleur qui pâlit
Sa couleur fraîche et purpurine,
A peine ce peu d'eau suffit,
Mais il rafraîchit (bis) la racine.
Boileau fait quelques difficultés d'accéder à la demande. Arlequin observe que si les habitans des Champs-Elysées sont si difficiles, leurs voisins des Enfers le sont beaucoup moins, et qu'ils semblent même, depuis quelques tems, avoir pris plaisir à déchaîner tous les diables sur la terre. Molière plus traitable acquiesce à leur .prière, et la Pièce finit ainsi, en observant au Public qu'aux Champs-Elysées on ne doit s'attendre à voir que des ombres de talens.
Voilà l'esquisse de ce petit Ouvrage, qui a obtenu un très grand succès, graces au motif de l'action, vraiment louable de la part des Acteurs du Vaudeville, et grâces surtout-à la grande quantité d'esprit, et de Couplets saillans que l'on rencontre dans cette Pièce, et dont nous avons donné quelques échantillons.
» Les rôles de Petit-Jean, La Forêt, et Antoine, sont remplis d'une manière assez médiocre, par M. Carpentier, M. et Mme Duchaume. En revanche, on doit des éloges à légèreté, au naturel, et à la gentillesse que M. La porte à mis dans le rôle d'Arlequin. Ces louanges doivent être partagées à juste titre par MM. Hyppolite et Vertpré, qui remplissoient, le premier, le rôle de Boileau, le second, celui de Molière. Ils y ont mis l'un et l'autre d'abord beaucoup d'entente dans le costume, un très-bon goût de tradition, beaucoup d'aplomb, de bon ton, et de propreté. Nous avons vu avec plaisir qu'à cet egard notre opinion étoit celle, non pas peut être du plus grand nombre, mais bien certainement du meilleur monde.
N. B. Nous avons reçu une réclamation d'un Descendant de Racine, qui, selon sa généalogie, auroit des droits bien plus certains au produit de cette Pièce, que celle qui en a partagé les émolumens. Nous en parlerons dans un prochain Numéro;
Je n'ai pas trouvé ce « prochain numéro » où il serait question de ce litige...
Magasin encyclopédique, ou journal des sciences, des lettres et des arts, 4e année, 1798, tome I, p. 549 :
[Dans cette pièce-prétexte, qui consiste largement en une succession de couplets plutôt mordants, sur « nos modes, nos romans, nos productions littéraires, nos journaux ». La vitesse d’écriture permet d’expliquer qu’ils « soient un peu négligés »
L'HOMMAGE du petit Vaudeville au grand Racine, joué sur le même théâtre, a obtenu aussi un grand succès. La scène est aux champs élysées : Petit-Jean, portier du juge Dandin ; le jardinier de Boileau ; la Forest, servante de Molière ; enfin Molière et Boileau eux-mêmes, sont les acteurs de cette pièce. Arlequin, député du Vaudeville, descend aux Elvsées ; il veut parler à Racine, lui apprendre que le siècle qui a succédé au sien, sait l'admirer plus que l'imiter ; mais que, dans un petit temple consacré à la Folie, un encens pur et léger lui est adressé.
On demande à Arlequin des nouvelles de Paris, et dès-lors nos modes, nos romans, nos productions littéraires, nos journaux, tout essuie les traits du malin Vaudeville : presque tous les couplets de cette pièce offrent de saillies ingénieuses, quoiqu'ils soient un peu négligés, à cause de la promptitude avec laquelle ils ont été faits.
Les auteurs sont ceux de la charmante pièce de Scarron, réunis au citoyen Coupigny.
Dans la base César, on a bien la liste de cinq auteurs, Barré, Coupigny, Desfontaines, Piis et Radet. La pièce a connu 28 représentations, du 21 mai 1598 au 15 mai 1799 (23 en 1798, 5 en 1799), toutes au Théâtre du Vaudeville..*
* Cet Article est de l'Amateur du Vaudeville.
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