Huon de Bordeaux, ou l'Épreuve des amans fidèles, pantomime féerie, dialoguée, en cinq actes, en prose, de P. J. Noël, musique de Leblanc, 9 pluviôse an 9 [29 janvier 1801].
Théâtre de la Gaîté.
Créé le 9 pluviôse an 9, il a été également joué les 11 et 14 pluviôse [31 janvier et 3 février 1801].
« Huon de Bordeaux ou l 'Epreuve des amans fidèles, Pantomime Féerie, dialoguée en cinq Actes, en prose, à grand Spectacle, mêlée de Chants, Danses, Combats, Évolutions, etc., paroles du Cen P. J. Noël, Architecte, Musique du Cen Leblanc. Représentée pour la première fois , à Paris, sur le Théâtre de la Gaîté, le 9 Pluviôse, an IX de la République Française », selon la brochure, fait partie des œuvres en tout genre (théâtre, opéra, ballet pantomime, qu'inspire la très riche légende de Huon de bordeaux et Esclarmonde (voir Caroline Cazanave, D'Esclarmonde à Croissant: Huon de Bordeaux, l'épique médiéval et l'esprit de suite [Presses universitaires de Franche-Comté, « Littéraires », 2007]).
Courrier des spectacles, n° 1432 du 10 pluviôse an 9 [30 janvier 1801], p. 2 :
[Un compte rendu fort long, qui commence par l'expression du dépit du critique : la pièce n'a pas vraiment réussi, mais elle le doit au manque d'ensemble entre les interprètes, alors que « ces pantomimes » magiques doivent leur succès à la qualité de l'exécution. A ce défaut s'ajoute le poids de longueurs qui disparaîtront à la deuxième représentation. Avant de passer à l'analyse qui va constituer l'essentiel du compte rendu, le critique qualifie rapidement, de façon plutôt positive, chaque acte : il ne trouve comme défaut « plusieurs réminiscences » dans les deux derniers actes il faudra les faire disparaître. Il peut ensuite résumer l'intrigue pleine de magie de cet Huon de Bordeaux, qui suit le cours de la légende (on ne sait guère ce qui vient de la légende et ce qui est dans la pièce, bien chargée en événements si on y voit tout ce que contient le résumé. Après toutes les péripéties que travers Huon, le dénouement, évidemment magique, règle facilement le problème : le bûcher sur lequel il devait être brûlé avec la belle Amanda se transforme en « autel de l'hymen », et Obéron « reçoit à ses côtés les amans fideles ». La proclamation des noms des auteurs a été difficile, les « marques d'improbation » se mêlant aux « cris qui demandaient les auteurs. Noël pour les paroles, Leblanc pour la musique, Hus pour les ballets. C'est l'acteur Vicherat qui a donné les nom, et il a été applaudi pour son habileté dans un combat contre trois adversaires. Autre interprète félicitée, une danseuse, pleine de grâce, « assez bien secondée par le cit. Léger, qui débutait.]
Théâtre de la Gaîté,
Si le succès de la pièce féerie donnée hier pour la première fois à ce théâtre, sous le titre de Huon de Bordeaux, n’a pas été tout-à-fait décidé, la cause principale en est dans le défaut d’ensemble. Car ces pantomimes où la magie amène et commande les évenemens, se soutiennent d’ordinaire par une brillante exécution. Il ne faut pas y chercher de l’intérêt, il ne faut pas y réclamer des règles dramatiques. L’auteur veut offrir des effets merveilleux, des danses, des combats, des décorations, et si le tout marche bien il doit se trouver content et s’applaudir d’avoir atteint son but. La piece de Huon pèche sur-tout par les longueurs, que le public a improuvées, et qui disparoitront sans doute à une seconde représentation.
Le premier acte est assez bien fait. On y remarque trois jolis couplets chantés avec gaité par le citoyen Bignon.
Le second acte est brillant, le troisième présente quelques passages hardis pour l’exécution. Pour les deux derniers ils offrent plusieurs réminiscences, et nous ne pouvons dissimuler que l’auteur fera sagement de les réduire, s’il veut que son ouvrage marche mieux. En voici l’analyse :
Huon de Bordeaux a tué en duel le fils de l’empereur Charlemagne. Ce monarque irrité ne lui accorde sa grâce qu’à condition qu’il partira sur-le-champ pour Bagdad, qu’il y tuera celui qui sera à la droite du Calife, qu’il enlevera à ce prince sa fille Amanda, et une aigrette qu’il porte sur son turban. Arrivé sons les murs de Bagdad, un nain, génie bienfaisant, nommé Oberon, lui promet son secours et lui procure les habits sous lesquels il doit paroitre à la cour du Calife.
Ce prince est sur le point de marier sa fille à un guerrier arabe qu’elle déteste, et cet Arabe est le même qui sauvé quelques minutes auparavant près des murs par le courage de Huon, lui a enlevé son cheval.
Huon le défie au combat, le tue, et embrasse Amanda à la vue de son père, qui veut le faire charger de chaînes. Mais Oberon paroît, et tous les satellites du Calife demeurent immobiles. Le Génie promet à Huon de le seconder dans sa fuite, mais il exige qu’il respecte son amante jusqu’au moment où il touchera les rivages de France.
Huon promet tout, et il part sur un vaisseau que lui envoie Oberon. Cependant il oublie bientôt sa promesse, il obtient tout de la foible Amanda.
Le tonnerre gronde et la tempête pousse leur vaisseau vers des rochers déserts. Là, tandis qu’il cherche à découvrir quelque pays moins sauvage, des corsaires Tunisiens surviennent et enlèvent Amanda, qu’ils trouvent seule. Hnon malgré son courage ne peut la délivrer, il succombe sous le nombre, et son amante lui est ravie et est embarquée, tandis qu’il est attaché à un arbre.
Oberon vient bientôt le délivrer, et le transporte dans un nuage aux lieux où respire son Amanda. Là il retrouve son écuyer par le secours duquel il se fait recevoir comme garçon jardinier chez le vieux Hibraïm, jardinier du Sérail ; il apprend qu’Amanda y a été conduite, et cherchant le moment de lui parler, il fait un bouquet. En voyant une femme dans le jardin, il ne doute plus que ce ne soit Amanda. Il se précipite à ses pieds. Quel est son étonnement ! c’est la sultane favorite que le Dey de Tunis vient de disgracier pour s’attacher à Amanda. Il veut fuir ; la Sultane, pour se venger de son volage amant voudroit s’attacher Huon, mais fidèle à sa belle, il refuse les grandeurs qu’elle lui offre. Indignée de son indifférence, la Sultane le menace de toute sa colère, il se jette à ses pieds, et c’est dans cette attitude que le Dey le trouve. On l’arrête, on le charge de fers, et on le jette dans un noir cachot : c’est là que Amanda s’introduit sous le costume d’esclave. Le Dey les surprend ensemble, et dans sa fureur, les fait condamner au supplice du feu.
Les bûchers sont dressés, Huon et son amante sont prêts à être dévorés par les flammes, lorsque la foudre écrase ou disperse les satellites du Dey.
Le bûcher se change en un autel de l’hymen. Oberon descend sur un nuage, et y reçoit à ses côtés les amans fideles.
Quelques marques d’improbation se sont fait entendre au milieu des cris qui demandoient les auteurs. Le citoyen Vicherat est venu nommer les citoyens Noël pour l’ouvrage, Leblanc pour la musique, Eugène Hus pour les ballets. Sa modestie l’empêcha de recevoir les éloges que méritent son zèle et son adresse. Il est intrépide combattant avec un sabre dans chaque main, il se défend très-long-tems contre trois ennemis.
Mademoiselle Caroline a dansé avec infiniment de grace dans les ballets, où elle a été assez bien secondée par le cit. Léger, qui débutoit.
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