L’Habit du Chevalier de Grammont

L’Habit du Chevalier de Grammont, opéra-comique en un acte, paroles de Saint-Victor, musique d'Eler, 28 nivôse an 9 ([8 janvier 1801).

Date fournie par Nicole Wild et David Charlton, Théâtre de l'Opéra-Comique Paris : répertoire 1762-1972, p. 274 : le 8 janvier 1801; ce serait le 18 nivôse an 9. Elle confirme l’annonce faite dans le Courrier des spectacles, n° 1410 du 18 nivôse an 9 [8 janvier 1801].

Théâtre Favart.

Titre :

Habit du chevalier de Grammont (l’)

Genre

opéra comique

Nombre d'actes :

1

Vers / prose

en prose, avec des couplets en vers

Musique :

oui

Date de création :

28 nivôse an 9 [18 janvier 1801]

Théâtre :

Théâtre Favart

Auteur(s) des paroles :

Saint-Victor

Compositeur(s) :

Eler

Sur la page de titre de la brochure, à Paris, chez Barba, an XII (1804) :

L’Habit du chevalier de Grammont, opéra-comique en un acte, Paroles de ***. Musique d’Éler. Représenté, pour la première fois, sur le théâtre Feydeau, le 14 frimaire an XII.

La date donnée correspond au 6 décembre 1803, soit plus de deux ans après la publication de la critique dans le Magasin encyclopédique. C’est la date de la reprise signalée par Nicole Wild et David Charlton dans leur Théâtre de l'Opéra-Comique Paris : répertoire 1762-1972, p. 274. Cette repise a bien eu lieu au Théâtre Feydeau, alors que la création en 1801 a eu lieu au Théâtre Favart. L’opéra-comique a été joué jusqu’en 1825.

Courrier des spectacles, n° 1411 du 19 nivôse an 9 [9 janvier 1801], p. 2 :

[L’article s’ouvre directement sur l’analyse du sujet : d’abord un copieux avant-scène qui raconte les malversations du valet du chevalier, qui revend pour son compte l’habit qu’il a acheté pour son maître. Puis une intrigue assez banale : bien sûr, le valet est démasqué (la morale est sauve), mais aussi le chevalier de Grammont se montre séducteur, puis généreux : la jeune fille qu’il croyait pouvoir séduire aime un jeune homme qu’elle ne peut épouser faute d’argent, et le chevalier la dote en lui donnant l’argent de l’habit subtilisé par son valet. Jugement : d’abord positif, « des scènes assez plaisantes, puis moins positif : des longueurs (reproche rituel), mais aussi un certain manque d’intérêt lié au fait que l’habit ne joue guère de rôle, alors qu’il était au centre du roman (non précisé) dont la pièce s’inspire. Pour la musique, un adjectif suffit : elle est jolie, et un morceau est mis en avant : un duo. Sort à peu près identique pour les interprètes : Elleviou est remarquable, deux autres interprètes le secondent efficacement (le verbe est intéressant). Une phrase suffit pour nommer les deux auteurs.]

Théâtre Favart.

Après quatre ans d’exil en Angleterre, le chevalier de Grammont revient en France, où il doit faire les délices de la cour et de la ville ; un mois avant son départ de Londres, il a chargé Thermes son valet de lui acheter à Paris l’habit le plus riche et le plus somptueux possible, et de le lui apporter à Londres.

Thermes s’est acquitté de la commission, a acheté un habit magnafiique [sic] 200 pistoles, mais sur sa route de Paris à Calais, l’habit a tenté un riche paysan nommé Dumont qui lui en a offert 50 pistoles au-dessous du prix et le fripon de valet a cédé l’habit de son maître, et à son arrivée à Londres, il a cherché à pallier ce vol sous mille histoires dont le chevalier n’a pas été la dupe. Tous deux arrivent à Abbevillle ; une lettre que Grammont y reçoit d’un ami à Hambourg, ne lui laisse plus de doute sur la friponnerie de son valet. Thermes qui a un billet de deux cents pistoles à toucher sur un banquier d’Abbeville, prie la maitresse de l’auberge d’arrêter son maître une demi-heure seulement, afin de pouvoir se faire payer dans cet intervalle. Le chevalier d’abord impatient d’arriver à Paris, est tantôt distrait par son valet, tantôt contrarié par la lenteur du postillon ; enfin, occupé par un joli minois qu’il apperçoit dans l’auberge. L’hôtesse qui doit tout au père du chevalier lui présente cette jeune personne nommée Elise, comme sa nièce. Celle-ci restée seule avec Grammont, lui parle de son amour pour Armand, que sa tante ne veut pas voir, et qu'elle refuse parce qu’il n’est pas riche. Le Chevalier à qui l’embarras d’Elise avoit fait croire d’abord à une bonne fortune pour lui-même finit par lui promettre sa protection, lorsque son valet vient lui annoncer que les chevaux sont prêts et que l’on n’attend plus que lui. Cet empressement de Thermes vient de ce qu’il a vu le paysan à qui il a vendu l’habit. Ce dernier se marie et vient faire la nôce à l’auberge. Thermes prétexte pour sortir une indisposition, mais le chevalier qui interroge le paysan sur son brillant costume et qui croit voir du rapprochement entre l’époque de la vente de l’habit et celle du voyage de son valet, le fait rappeler, et là le confronte avec l’acheteur. Thermes est dans un grand embarras, lorsqu’Elise accourt implorer le secours du chevalier contre la violence de sa tante qui veut chasser Armand. Grammont appaise l’hôtesse ; et comme le peu de fortune du jeune homme est le seul obstacle à son bonheur, il ordonne à Thermes de lui donner les 200 pistoles qu’il a dû toucher dans le jour même sur un billet de Dumont.

Tel est le fonds de cet ouvrage, donné hier sous le titre de l’Habit du Chevalier de Grammont. Il offre des scènes assez plaisantes, mais aussi des longueurs qui ont excité à-la-fois quelques murmures qui ont été étouffés par les applandissemens.

Nous pensons que l’intérêt est bien diminué par l’indifférence que témoigne Grammont pour son habit, tandis que dans le roman, le besoin qu’il en a rend extrêmement plaisant le rôle de cet habit qui passe en tant de mains avant d’arriver à son véritable maître. La musique en est jolie ; le Duo entre Grammont et Elise est sur-tout remarquable par son originalité. Le cit. Elleviou a rendu avec beaucoup de grâces le rôle du Chevalier, et a été bien secondé par le cit. Martin et Mlle Jenny. Les auteurs sont, pour les paroles, le cit. St-Victor , et pour la musique , le cit. Eler.

J. B. C. Grainville

Magasin encyclopédique, ou journal des sciences, des lettres et des arts, 6e année, 1801, tome V, p. 271-273 :

[D’abord la source de l’anecdote que la pièce met en scène. Ce qui est raconté ensuite peut provenir aussi bien des Mémoires que de l'intrigue. On est de toute façon dans l’avant-scène. Ce n’est qu’au deuxième paragraphe qu’on s’intéresse à l’intrigue proprement dite. Elle ne brille pas par son originalité (encore une jeune fille qui ne peut épouser son amant trop pauvre, et qu’un personnage généreux aide : le dénouement ne surprend pas. Verdict : tout n’est pas mauvais (« Quelques scènes plaisantes », mais que de longueurs ! La pièce n’est certes pas aussi drôle que les Mémoires du chevalier. Le compte rendu s’achève par les noms des auteurs, sans aucun commentaire (on ne saura rien de la musique).]

THÉATRE FAVART.

L'Habit du chevalier de Grammont.

L'opéra joué le 28 nivose, sous ce titre, est tiré des Mémoires du chevalier de Grammont. Il revient en France après quatre ans d'exil en Angleterre. Un mois avant son départ de Londres, il avoit chargé Thermes, son valet, de lui acheter, à Paris, l'habit le plus riche et le plus brillant. Thermes s'est acquitté de la commission, et a acheté un habit magnifique. Mais, sur la route, l'habit a tenté un riche paysan, à qui il l'a vendu. Revenu près de son maître, il invente mille .mensonges pour s'excuser de la perte de cet habit.

Grammont part avec lui , et arrivés à Abbeville, Thermes prie la maîtresse de l'auberge d'arrêter son maître pendant une demi-heure : sa raison est qu'il a un billet à toucher sur un banquier d'Abbeville. Le chevalier, d'abord impatient de partir, est retenu par la lenteur du postillon, et ensuite par un joli minois qu'il aperçoit dans l'auberge. C'est Elise, la nièce de l'aubergiste ; elle fait confidence au chevalier, de son amour pour un jeune homme, qu'on ne veut pas lui donner en mariage à cause de son peu de fortune. Grammont, qui croyoit d'abord que c'étoit une bonne fortune que le hasard lui adressoit, finit par lui promettre sa protection, lorsque son valet vient lui annoncer que les chevaux sont prêts. Son empressement vient de ce qu'il a vu le paysan à qui il a vendu l'habit de son maître, et qui .vient faire sa noce à l'auberge. Le brillant costume de ce paysan frappe Grammont, qui le confronte avec son valet. Il découvre la friponnerie, et lui ordonne de remettre à Elise l'argent qu'il vient de toucher, et avec lequel elle épouse son amant.

Quelques scènes plaisantes sont noyées dans des longueurs qui ont excité le murmure. Ce sujet avoit besoin, pour paroître amusant, de tout l'esprit avec lequel lequel il est raconté dans les mémoires de Grammonr. Mais il offre, dans l'opéra, d'autant moins d'intérêt, que Grammont témoigne beaucoup d'indifférence pour son habit, tandis que, dans ses mémoires, c'est le besoin qu'il en a qui rend plaisant de le voir passer dans plusieurs mains avant d'arriver à son maître.

L'auteur des paroles est le C. Saint-Victor, et celui de la musique le C. Eler.

L’Esprit des journaux français et étrangers, trentième année, tome VI, ventôse an IX [février-mars 1801]p. 217-218 :

[Le critique ne trouve guère d’intérêt à cette pièce construite sur une anecdote assez mince, qu’il a fallu réduire à une seule de ses deux parties (c’est la loi du théâtre !), ce qui lui enlève beaucoup de son intérêt : l'original anglais faisait voyager l'habit de Londres à Abbeville. Et l’intrigue subalterne que l’auteur a cru devoir ajouter reprend « presque mot pour mot » une scène de Goldoni. La musique ne vaut pas beaucoup mieux : «  Elle est simple, légère, agréable, il y a du chant & quelques motifs heureux : rien de très saillant. »]

THÉATRE DE L'OPÉRA COMIQUE.

L’Habit du chevalier de Grammont.

Le titre désigne assez le trait que l’auteur a emprunté de M. Hamilton; mais dans les mémoires, cet habit magnifique, si impatiemment attendu pour le bal de Londres, cet habit que Thermes dit avoir perdu dans les sables mouvans de Calais, cet habit, à quelque temps delà retrouvé d'une manière si plaisante, à Abbeville, sur le dos d'un gentillâtre nouvellement marié, donne lieu à deux actions qu'Hamilton a pu séparer dans son récit, mais que l'auteur de la pièce nouvelle, le C. Saint-Victor, n'a pu réunir dans son ouvrage.

L'un de ces traits étoit cependant indispensable pour que l'autre parût piquant. Que nous importe, en effet, que le chevalier de Grammont retrouve ou ne retrouve pas son habit, si nous n'avons pas été les témoins de la circonstance où il en avoit besoin, si nous n'avons pas vu les mouvemens de son extrême impatience, si nous n'avons pas entendu terminer son plaisant récit au roi par ces mots : « Sire, j'aurois infailliblement tué Thermes, si je n'avois craint de faire attendre mademoiselle Hamilton ? »

L'aventure d’Abbevìlle perd beaucoup de son intérêt, si l'on n'a été en quelque sorte témoin de celle de Londres, & l'auteur n'a pu trouver ou n'a pas imaginé le moyen de les faire succéder l’une à l'autre. Il a borné son action à l'ouverture de l'auberge d'Abbeville, en lui liant une petite intrigue subalterne qui divise l'intérêt, fait jouer au principal personnage un rôle très-mesquin, & ne donne lieu qu'à une scène que l'on trouve presque mot à mot dans Goldoni.

La musique de ce petit ouvrage est du C. Eler, compositeur sur le mérite duquel il n'y a qu'une opinion, mais dont les productions sont peu nombreuses. Elle est simple, légère, agréable, il y a du chant & quelques motifs heureux : rien de très saillant.

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