Jocrisse congédié, comédie en 2 actes, de Dorvigny, 9 Thermidor an 7 (27 juillet 1799].
Théâtre Montansier Variétés
Almanach des Muses 1800
Sur la page de titre de la brochure, Paris, chez Tutot, an VII :
Jocrisse congédié, folie en deux actes, Représentée sur le Théâtre Montansier ; Par Dorvigny.
Courrier des spectacles, n° 887 du 10 thermidor an 7 [28 juillet 1799], p. 2 :
[On arrive manifestement à la fin de la série de Jocrisse, même si les années à venir ne l’oublieront pas. En tout cas, le critique en a assez des mésaventures de celui qu’il qualifie de « valet imbécile et étourdi ». Le résumé de l’intrigue permet de mesurer la pauvreté du fonds de la pièce, et elle ne se soutient que par le jeu de Brunet. Les sifflets n’ont pas manqué, et l’auteur n’a pas été nommé, bien qu’on l’ait faiblement demandé. Et le critique trouve préférable qu’il reste inconnu.]
Théâtre Montansier.
Tant va la cruche à l'eau qu'à la fin elle se brise, dit un vieux proverbe ; pauvre Jocrisse ! tu peux bien te l’appliquer. Ce valet imbécile et étourdi commet tant et tant de sottises, qu’à la fin il lasse la patience la plus exercée, et celle de son maître, et celle du public : il a dû être congédié hier ; reviendra-t-il encore ?
Le cit. Duval marie sa fille ; Jocrisse prépare le repas de nôces ; il apporte dans un panier un gigot, du beurre, du noir de fumée, etc...., avec des bas de soie et un fichu de mousseline qui reçoivent des taches. Il laisse tomber des couverts d’argent dans un puits, brise les cordes d’une guitarre, d'une harpe et d’un violon, en voulant imiter la nouvelle mariée et son époux, qu’il a vus s'exercer sur ces instrumens. Un bonnet s’offre à sa vue ; il en pare sa tête, et ainsi coëffé, il est trouvé par son maître, qui s’emporte contre loi et lui reproche ses sottises.
Jocrisse sort pour aller essayer l'habit qu'on lui prépare pour figurer aux nôces, et reparoit bientôt costumé en Diable masqué. Grande rumeur par-tout : la jeune mariée se trouve mal à la vue de ce costume bisarre, et Jocrisse reçoit son congé. Le cit. Duval, si indulgent jusqu’ici, a plus de fermeté cette fois, et il renvoie sérieuse ment son jockey.
Les sifflets ont accueilli maints passages de cet ouvrage qui ne peut aller loin, et qui ne doit son succès au moins douteux qu’au jeu du citoyen Brunet qui, tout en débitant mille fadaises, les rend toujours moins insipides.
L’auteur a été demandé foiblement et n’a pas été nommé ; tant mieux ! Quelle plume peut tracer des inepties aussi frappantes ? Et si cela est, quel homme oseroit venir recevoir sur un théâtre des félicitations et des applaudissemens pour une telle production ?
Mercure de France, tome septième (an VII), Quintidi, 15 Thermidor, an 7, p. 130-131 :
THÉATRE DU JARDIN ÉGALITÉ,
ci devant Montansier.
9 Thermidor.
Jocrisse Congédié, Comédie en deux actes et en prose.
Encore un nouveau-né dans la famille des Jocrisses. Il y a tout lieu de croire que l'existence de celui-ci ne sera pas de longue durée. Ce genre de pièces commence enfin à s'user. Loin de nous cependant de vouloir dire qu'il faut exclure la gaité de la scène : au contraire, une situation comique, un- trait d'esprit saillant, exciteront toujours les ris ; mais des bêtises, des platitudes, amenées sans art, enchaînées sans goût, ne peuvent que faire hausser les épaules des spectateurs bénévoles qui les entendent patiemment, sans daigner seulement élever une voix sévère contre ces productions ineptes.
Jocrisse, dans la pièce dont il s'agit, sert le citoyen Duval, en qualité de domestique. Parmi nombre de bêtises qu'il fait, il jette l'argenterie dans un. puits, laisse échapper le cheval de «on maître, brise les cordes de plusieurs instrumens de musique, renverse tous les meubles, effraye sa jeune maîtresse, en paraissant devant elle, au moment où elle ne s'y attend pas, masqué et sous le grotesque costume d'un diable ; etc. etc. etc. etc. etc. Enfin, le citoyen Duval, justement irrité, ne peut plus contenir sa colère, et congédie sur-le-champ, son valet imbécille.
Quelle intrigue compliquée ; et quel intérêt elle présente !!!.... Quelles peines elle a dû coûter à l'esprit inventif de son auteur. Sans cet effort incroyable de génie, par le moyen duquel .cet auteur est parvenu à nous donner deux mortels actes, Jocrisse aurait pu être congédié aussitôt la levée du rideau ; le reste de la pièce n'étant qu'un tissu invraisemblable de scènes épisodiques, renfermant toutes plus d'inepties les unes que les autres, et se succédant sans goût, comme dans les pantomimes insignifiantes de Nicolet. Le citoyen Brunet est toujours plaisant, par le naturel avec lequel il remplit.les rôles divers qu'on lui confie. Combien d'auteurs doivent à son talent, cher au public, les légers suffrages dont ils ont été quelquefois honorés.
D'après la base César, la pièce a connu 19 représentations, du 27 juillet au 7 novembre 1799, toutes au Théâtre de Montansier.
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