Créer un site internet

Julie ou le Pot de Fleurs

Julie ou le Pot de Fleurs, opéra en un acte, paroles d'A. J*** (Antoine-Gabriel Jars), musique de Spontini et Fay, 21 ventose an 13 [12 mars 1805].

Théâtre de l'Opéra Comique.

Titre :

Jolie, ou le Pot de fleurs

Genre

opéra comique (comédie mêlée de chants)

Nombre d'actes :

1

Vers ou prose ,

en prose, avec des couplets en vers

Musique :

oui

Date de création :

21 ventôse an 13 (12 mars 1805)

Théâtre :

Théâtre de l’Opéra Comique

Auteur(s) des paroles :

Antoine-Gabriel Jars

Compositeur(s) :

Spontini et Fay

Almanach des Muses 1806.

Julie doit épouser M. de Verseuil ; mais elle aime un jeune officier qu'elle n'a pas vu depuis longtemps. Elle laisse tomber, par mégarde, un pot de fleurs de sa fenêtre, et le hasard veut que ce pot tombe sur le jeune officier, qui, par bonheur, n'est point blessé. Cependant il monte furieux, et pénètre dans l'appartement de Julie, qu'il reconnaît aussitôt. Il apprend alors qu'on veut la contraindre à épouser M. de Verseuil, et il forme le double projet de se venger de son rival et de fléchir le père de sa maîtresse ; mais il ne connaît ni l'un, ni l'autre, ce qui occasionne une méprise, qui fait tout le nœud de la pièce : il s'adresse à M. Verseuil, pour obtenir la main de Julie, et parle au père de celle-ci comme à un rival qu'il veut mettre à la raison. Enfin tout s'explique, et Verseuil cède prudemment la main de Julie.

Des invraisemblances ; peu de comique ; peu de succès.

Sur la page de titre de la brochure, Paris, chez Mad. Cavanagh, an 13. 1805 :

Julie, ou le pot de fleurs, comédie en un acte, en prose, mêlée de chants ; Paroles de M. A. J***, Auteur des Confidences ; Musique de MM. Fay et Spontini ; Représentée pour la première fois, à Paris, sur le Théâtre de l'Opéra-Comique, par les Comédiens ordinaires de l'Empereur, le 21 Ventôse an 13 (12 Mars 1805).

Sur l'exemplaire de la Bibliothèque de Lyon (visible sur Internet), le nom de l'auteur est indiqué sous les trois étoiles anonymes : il s'agit de M. A. Jars (Antoine-Gabriel Jars, 1774-1857, auteur, entre autres, des Confidences, comédie en 2 actes, jouée à l'Opéra-Comique le 10 Germinal an 11 [31 mars 1803]).

Courrier des spectacles, n° 2929 du 22 ventôse an 13 [13 mars 1805], p. 2 :

[Un sujet sans surprise, une héroïne entre ingénuité et audace, un bel officier, tout cela est bien convenu. Heureusement, il y a la musique de Spontini (et l'autre musicien cité par la brochure est ignoré).]

Théâtre de l’Opéra-Comique.

Julie, ou le Pot de fleurs.

Le Pot de fleurs est pour très-peu de chose dans cette pièce ; tout autre pot auroit pu produire le même effet ; l’intrigue est très foible, et n’a rien de neuf que le rôle de Julie, petite personne moitié ingénue, moitié délurée, qui déclare nettement sa préférence pour les jolis militaires qui ont de beaux yeux, un beau buste, et tout ce qui convient pour se rendre intéressant. Son début est assez gai ; elle annonce qu’elle veut arroser son petit jardin, et continue à-peu-près sur ce ton. Le dénouement est un peu bizarre, et a provoqué quelques coups de sifflets ; mais la musique est gracieuse, vive, élégante et animée, sur-tout le premier air de Mad. Desbordes et celui d’Elleviou.

L’auteur des paroles a gardé l'incognito ; celui de la musique est M Spontini , connu déjà par des compositions pleines de mérite.

Courrier des spectacles, n° 2930 du 23 ventôse an 13 [14 mars 1805], p. 2-3 :

[Après les quelques lignes publiées la veille, le grand article. Il commence par une longue analyse de l'intrigue, sur un mode un peu ironique : sans épargner le moindre détail, le critique fait bien sentir la pauvreté d’une intrigue qui accumule les clichés les plus usés du genre. Tout cela pour arriver au dénouement attendu de tous : la jeune personne préfère épouser le beau et jeune officier plutôt que le prétendu que son oncle lui proposait. Il ne reste plus ensuite qu’à souligner la pauvreté de la pièce, réduite à « quelques effets de situation et quelques mots heureux », à critiquer le caractère de Julie, à la fois trop naïve et trop audacieuse : en la montrant faisant des avances à son officier bien aimé, elle va contre toutes les bienséances. Elle est certes dans l’air du temps, mais les considérations morales que comporte le dialogue ne compense pas le caractère peu convenable de la situation. Heureusement la musique est jugée « très agréable, et plusieurs morceaux ont permis aux divers interprètes de montrer leurs qualités vocales, grâce au talent de Spontini (la brochure citait aussi Fay comme compositeur).]

Théâtre de l’Opéra-Comique.

Julie ou le Pot de fleurs.

Un oncle qui veut marier sa nièce à un homme âgé, une jeune nièce qui ne veut point d'un homme âgé, et lui préfère, comme de raison, un officier charmant ; le charmant officier qui vient disputer la main de sa maîtresse à son rival et obtient la préférence, voilà un plan et des idées dont la découverte ne sauroit fatiguer l’imagination : c’est le cercle vulgaire dans lequel roulent la plupart de nos jeunes auteurs.

Que faire quand on n’a point l’avantage de produire un sujet neuf ? Il faut alors stimuler la curiosité par un titre piquant, se rejetter sur les détails, combiner des méprises, des situations, des mots heureux, plaire par l’esprit, la grâce, la finesse. C’est une étoffe commune dont on couvre les défauts par une broderie élégante.

C’est aussi ce qu’a voulu faire l’auteur de Julie. Il a commencé par décorer sa pièce d’un titre vraiment printanier : le Pot de fleurs présente les idées les plus gracieuses ; le salon se remplit naturellement de caisses, de jardinières, de vases de toute espèce. Si l’odorat ne tire aucun parti de ces fleurs de papier peint ou de batiste, il y a au moins quelque illusion pour les yeux. Je connois des femmes que la vue d’une rose jette dans des ravissemens de sensibilité.

Julie, qui aime beaucoup les fleurs, a soin de les arroser tous les jours, et d’en exposer quelques-unes sur la croisée de son appartement. C’est l’arrosoir à la main qu’elle entre sur la scène, et elle chante même II faut que j’arrose mon petit jardin. Quand le petit jardin lui paroît suffisamment rafraîchi, elle cueille une fleur pour l’offrir à son oncle ; mais elle ne la donne que quand son oncle l’a embrassée deux fois. Après ce début pastoral, la conversation s’engage entre l’oncle et la nièce, et l’on juge bien qu’il est question de mariage. Julie ne dissimule point le plaisir que cette cérémonie lui feroit, sur-tout si c’étoit avec ce jeune officier qu’elle aime tant, qui a de si beaux yeux, une si belle taille, de si beaux cheveux, etc. Mais il ne s’agit point ici de cet Apollon ; l’oncle, qui ne le connoît pas même de nom, prévient sa nièce qu’il est question de M. Verseuil, homme fait, d’une quarantaine d’années, d’un esprit sage, d’un si bon cœur que Julie elle-même l’appelle son ami. Julie se soumet pour ne point contrister son onclc ; mais en femme loyale qui ne veut tromper personne, elle l’avertit qu’il n’y auroit pas de sûreté pour Verseuil, si le charmant officier revenoit après le mariage.

Le charmant officier reviendra comme vous allez voir. Julie, seule, retourne à ses fleurs ; elle avoit oublié de placer encore un vase sur sa croisée, elle veut l’y mettre, le pot de fleurs tombe, et va meurtrir de son poids l’épaule de Valcourt (c’est le nom de l’officier) qui, par un hasard extraordinaire, passoit en ce moment même sous la fenêtre.

Valcourt arrive furieux, tenant au collet un des domestiques. On voit que tout autre vase auroit produit le même effet, et peut-être même d’une manière plus sûre ; mais le choix étant indifférent, on ne sauroit se plaindre que l’auteur ait donné la préférence à un pot de fleurs.

Valcourt reçoit d’abord les excuses de Julie, et apprend ensuite qu’elle doit être mariée le jour même qu’elle a donné son consentement et sa parole. Ce Valcourt est bien l’homme le plus propre à tourner la tête d’une femme. Il est si étourdi, si dénué de raison, d’égards, qu’il est impossible de n’en pas raffoler. Au moment où Julie lui jure une éternelle fidélité, Verseuil se présente. Valcourt le prend pour l’oncle de Julie, annonce qu’il aime cette jeune personne et qu’il tuera celui qui voudra la lui ravir. Verseuil ne se fait point connoître, et il résulte de cette méprise une scène qui n’est point dénuée de comique ; elle en amène naturellement une autre du même genre, entre Valcourt et l’oncle, que l’étourdi prend pour Verseuil, et qu’il traite comme son rival. Enfin l’erreur est reconnue. On découvre même que Verseuil est parent de Valcourt, que c’est contre lui que la famille de Valcourt soutient un procès qu’il a intenté injustement. Verseuil reconnoît son erreur et renonce à Julie. L’oncle irrité de cette versatilité, consent à donner sa nièce à Valcourt.

Il y a dans cet ouvrage quelques effets de situation et quelques mots heureux qui l’ont soutenu. Le caractère de Julie est un mélange de naïveté qui descend souvent jusqu’à la niaiserie, et d’assurance qui passe souvent les bornes de la modestie. Elle ne laisse aucune avance à faire à Valcourt ; elle avoue franchement et sans détour son amour pour lui et le desir qu’elle auroit de devenir sa femme. Cet oubli des bienséances est aujourd’hui une chose convenue et accordée ; ce ne sont plus les hommes qui soupirent, mais les femmes qui se plaignent des fers qu'elles portent et du martyre qu’elles endurent. Les hommes n’ont plus d’autre peine que celle de se laisser rendre heureux.

On a remarqué aussi dans le dialogue des lieux communs de morale fort inutiles pour l’édification de l’auditoire et très-nuisibles pour le développement et la marche de l’action. Mais la musique en est très-agréable. L’ouverture est d’un style léger, gracieux et varié. L’air de Mlle. Desbordes est d’une composition très élégante ; on a redemandé celui d’Elleviou. Le quatuor entre Solié, Chenard , Elleviou et Mlle. Desbordes a été aussi très-vivement applaudi. On a reconnu dans ces différons morceaux le talent distingué de M. Spontini.

L'Esprit des journaux français et étrangers, an XIII, tome VIII (floréal an XIII, Avril 1805), p. 279-282 :

[Après avoir épuisé les jeux de mots qu’on peut faire sur cette affaire de pot de fleurs qui tombe sans que la pièce tombe, le critique nous livre l’analyse du sujet. Celui-ci nous conte une histoire de pupille qui aime un jeune homme et doit en épouser un autre. Après un nombre raisonnable de quiproquo, la jeune fille épouse celui qu’elle aime, son fiancé officiel cédant sa main à son rival. Fonds faible, réduit à « deux scènes remarquables », « du meilleur comique ». Dialogue de bon ton. Caractères bien conçus. Dénouement trop simple, dont il était possible de déguiser la faiblesse avec « quelques mots piquans ». La musique contient « des morceaux gracieux », dont l’ouverture et une romance. Les interprètes sont jugés (« en général la pièce est bien montée »). Auteurs demandés, mais le librettiste est resté anonyme.]

Théâtre de l’Opéra-Comique.

Julie ou le Pot de fleurs.

Bien que la chûte d'un pot de fleurs soit en quelque sorte le sujet de la pièce, le Pot de Fleurs n'est pas tombé, et ceux à qui nous empruntons ce joli calembourg auraient pu ajouter : bien que le Pot de Fleurs soit fort peu de chose, ce n'était pas une pièce à jetter par les fenêtres.... ; on en va juger par l'analyse.

Julie, nièce et pupile d'un particulier, dont le nom nous échappe, est promise par lui à Verseuil, homme d'un âge mûr, qu'elle n'aime point ; et elle garde son cœur à un jeune officier breton nommé Valcour, dont elle déplore l'absence depuis long-temps.

Un jour, étant à la fenêtre, elle voit son amant passer dans la rue, et, en s'avançant pour s'en faire remarquer, elle pousse étourdîment un pot de fleurs qui tombe droit sur le pauvre jeune-homme, Celui-ci, furieux de l'apostrophe, entre brusquement dans la maison, monte à l'étage d'où le pot est tombé, et reconnaît sa chère Julie ; on pense bien que sa colère est facilement appaisée ; Julie lui apprend qu'on veut la marier à Verseuil, et il se trouve que ce Verseuil est précisément cousin de Valcour ; ces deux parens plaident l'un contre l'autre sans se connaître.

Au moment où notre officier baise la main à son amante, et lui promet fidélité, Verseuil paraît, devine ce dont il s'agit, et adresse la parole à Valcour, qui le prenant, à sa mine, pour le père de Julie, lui fait un aveu de son amour. Verseuil se prête au quiproquo ; il invite Valcour à se faire connaître, et celui-ci, qui est muni des meilleurs papiers, n'hésite point à confier son porte-feuille au présumé beau-père. Cette confiance est d'autant plus imprudente de sa part, que dans le porte-feuille dont il s'agit, se trouve un acte qui assure à Valcour le gain de son procès, et que Verseuil, nanti d'une pareille pièce, pourrait facilement en abuser. Mais il en est incapable.

Peu de temps après, autre quiproquo. Valcour, qui vient de prendre Verseuil pour le père de Julie, prend le père de Julie pour Verseuil, et lui cherche une querelle de breton, ce qui va encore plus vîte que les querelles d'allemand. Heureusement Julie et Verseuil paraissent à point nommé pour empêcher l'affaire de mal finir ; et comme Verseuil n'a pas moins de raison que de probité, non-seulement il rend à Valcour son porte-feuille, mais il lui cède la main de Julie.

Le fonds de cet opéra était si faible, qu'il faut savoir gré à l'auteur d'avoir pu en tirer parti. Il n'y a guères que deux scènes remarquables dans la pièce, mais devait-on en exiger plus d'une bluette ? Combien de tragédies en cinq actes qui doivent tout leur succès à une seule situation, à un seul mot ? Les deux scènes dont il s'agit sont d'ailleurs du meilleur comique.

En général le dialogue est d'un fort bon ton. L'ingénuité de la petite fille est plaisante sans niaiserie. Tous les caractères sont bien conçus.

Le dénouement pèche par excès de simplicité. Prévu par tout le monde, il a dû être jugé sévèrement. Nous croyons pourtant qu'au moyen de quelques mots piquans on en aurait déguisé la faiblesse. C'est sur-tout quand il y a un défaut dans le dessin, qu'il faut brillanter le coloris ; c'est ce qu'on appelle jetter de la poudre aux jeux.

Il y a des morceaux gracieux dans la musique. L'ouverture est d'un genre neuf. La romance, moitié guerrière, moitié galante, que chante Valcour, a un caractère très-piquant. On a fait répéter le dernier couplet.

Mlle. Desbordes, chargée du rôle de Julie, s'en est tirée à merveille. Cette jeune actrice a un vrai talent. Elleviou joue très-bien le rôle de Valcour et chante parfaitement sa romance. En général la pièce est bien montée.

Les auteurs ont été demandés. Celui des paroles a voulu garder l'anonyme : Ceux de la musique sont MM. Spontini et Fay.

Dans leur Théâtre de l'Opéra-Comique Paris : répertoire 1762-1972, Nicole Wild et David Charlton signalent que Fay est l’auteur de deux morceaux (un air et un duo), qui ne figurent pas dans la partition imprimée. Créé le 12 mars 1805, l’opéra a eu 6 représentations.

Ajouter un commentaire

Anti-spam