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La Jeunesse de Favart

La Jeunesse de Favart, comédie anecdotique en un acte et en prose, mêlée de vaudevilles, de Gentil et Antoine-Pierre-CharlesFavart, 2 novembre 1808.

Théâtre du Vaudeville.

Antoine-Pierre-Charles Favart est le petit-fils de Charles-Simon Favart, le grand Favart.

Titre :

Jeunesse de Favart (la)

Genre

comédie anecdotique mêlée de vaudevilles

Nombre d'actes :

1

Vers / prose

en prose, avec des couplets en vers

Musique :

vaudevilles

Date de création :

2 novembre 1808

Théâtre :

Théâtre du Vaudeville

Auteur(s) des paroles :

Gentil et Antoine-Pierre-Charles Favart

Almanach des Muses 1809.

Sur la page de titre de la brochure, Paris, chez Cavanagh, 1809 :

Le Jeunesse de Favart, comédie anecdotique, en un acte, en prose ; mêlée de Vaudevilles, Par MM. Gentil et Favart. Représentée pour la première fois, à Paris, sur le Théâtre du Vaudeville, le 2 Novembre 1808.

Mercure de France, littéraire et politique, tome trente-quatrième, n° CCCLXXXI, samedi 5 novembre 1808, p. 279-280 :

[Le critique choisit de ménager l’amour-propre du jeune auteur de la pièce, le propre petit-fils de celui qui est le héros de la pièce. Il ne peut aller jusqu’à en dire du bien, il se contente d’encourager le jeune homme, qui a obtenu un succès à ses yeux immérité, et à l’inviter à apprendre le théâtre, à chercher dans le théâtre de son grand-père « le secret de ce naturel que Favart semble avoir emporté avec lui », et dont son petit-fils n’a donc pas hérité (le Mercure de France ne parle pas de Gentil, le second auteur). On ne sait rien ni de l’intrigue, ni de l'interprétation.]

Théâtre du Vaudeville. — On a donné, à ce théâtre, la première représentation de la Jeunesse de Favart. Ce vaudeville, qui est l'ouvrage du petit-fils de l'auteur même, a été reçu avec l'indulgence que réclame un acte de piété filiale, puisque le jeune Favart consacre les premiers efforts de sa muse à célébrer son grand-père.

Un jeune homme qui se présente dans la carrière, avec une aussi belle recommandation que le nom de Favart, mérite d'être traité avec bienveillance ; nous lui prouverons la nôtre en ne le chicanant pas sur le succès qu'il vient d'obtenir, et en l'engageant à relire bien souvent les ouvrages de son aïeul, pour chercher à y découvrir le secret de ce naturel que Favart semble avoir emporté avec lui.                B.

Magasin encyclopédique, ou journal des sciences, des lettres et des arts, année 1808, tome VI, p. 187 :

[Le compte rendu résume rapidement l’intrigue, réduite à « un léger quiproquo » et à une coïncidence. Ce que le critique retient, ce sont « des couplets agréables, car pour des scènes il n'y en a pas ». Il donne ensuite le nom des auteurs, en précisant le lien de parenté de l’un des deux avec le héros de la pièce...]

La jeunesse de Favart, vaudeville joué le 2 novembre.

Favart, garçon pâtissier, faisant des tourtes et des couplets, attend avec impatience des nouvelles de sa Chercheuse d'esprit qu'on doit jouer le soir même, et n'ose mettre son père dans la confidence. Un léger quiproquo fait prendre à tout le monde Favart le père pour l'auteur de la pièce nouvelle : mais un ami du fils les détrompe, et lui apporte la violette d'argent qu'il a gagnée aux jeux floraux.

M. de la Popelinière, fermier général, se trouve là fort à propos pour que les dons de la fortune se réunissent à ceux d’Apollon. Cette petite pièce a réussi par des couplets agréables, car pour des scènes il n'y en a pas. Les auteurs sont MM. GENTIL et FAVART, petit-fils de celui qu'il a mis en scène.

L’Esprit des journaux français et étrangers, tome I, janvier 1809, p. 277-284 :

[Le spectacle donné est « une vraie fête de famille », la famille Favart réunie pour célébrer son glorieux ancêtre, et la famille du théâtre du Vaudeville, parfaitement adapté pour glorifier son illustre auteur. La pièce nouvelle est « un acte de piété filiale », respecteux de la morale que le parterre a soin d’applaudir, même si, comme ici, elle s’applique mal à M. de la Popelinière. La pièce utilise une anecdote concernant un autre personnage que M. de la Popelinière. Le critique nous raconte par le menu la rencontre de ce personnage avec Favart, avant de passer à la pièce, qui modifie sur plusieurs points l’anecdote (et pas seulement sur des points secondaires : contrairement à la réalité, le père de Favart est encore vivant et il refuse l’idée que son fils devienne auteur, mais il finit par être obligé d’accepter le brillant destin qui l’attend). Le jugement porté ensuite sur la pièce souligne qu’il est plein d’esprit, et qu’il a la sagesse de ne pas abuser des calembours et des équivoques. Des couplets bien tournés, mais aussi de grosses maladresses : les premières scènes ne tiennent pas vraiment au sujet, une autre scène repose sur l’usage abusif des roses, en honneur de Mlle. Rose Favart, la fille de Favart. Un regret concernant l’interprétation : les acteurs ne connaissaient pas bien leur rôle. Les auteurs ont été « demandés et nommés ».]

Théâtre Du Vaudeviile.

La Jeunesse de Favart.

C'était au Vaudeville une vraie fête de famille, Favart chanté par son petit-fils, des couplets pour le grand-père, pour le petit-fils un succès, et dans la salle des tantes ou des cousines qui applaudissaient de si bon cœur. Si dans quelqu'occasion il peut être bon, pour juger une pièce, de savoir le nom de l'auteur, c'est dans celle-ci. La modestie peut être ordonnée à un fils en parlant de son père, mais l'enthousiasme est permis, et l'enthousiasme oublie la modestie même, sans qu'on le lui reproche. L'exagération, dans ce cas, ne choquerait point parce qu'elle serait de bonne foi, parce qu'elle n'a rien que d'honnête, et qu'il est aussi honorable de se vanter des talens de son père que ridicule et plat de se vanter de l'existence qu'il a pu avoir. Le style un peu emphatique des auteurs du Vaudeville, pour célébrer la gloire de leur héros, n'est donc ici que le style de la situation. Au reste , puisqu'on distribue la gloire au Vaudeville, Favart, plus que tout autre, est en droit de l'y aller chercher ; et beaucoup de lauriers y ont été donnés plus gratuitement à des personnages historiques par des auteurs qui ne leur étaient de rien. Celui-ci aurait d'ailleurs gagné à ce qu'on le soupçonnât dans quelques scènes de famille toujours un peu froides pour un spectateur indifférent, lorsqu'un auteur indifférent vient les lui présenter, mais lorsqu'on sait d'ailleurs que Favart exerçait les vertus qu'on lui donne ici, et quand c'est son petit-fils qui le dit, les mêmes scènes, par une circonstance particulière, sortent des lieux communs de ce genre, beaucoup trop communs au Vaudeville ; et quelque chose du sentiment qu'a dû éprouver l'auteur se communique au spectateur et le dispose à prêter quelque chose à l'occasion. Heureusement les auteurs du Vaudeville pouvaient voyager sur leurs propres fonds ; ils ont su par eux-mêmes arriver à bon port, et n'ont pas exposé le parterre à siffler un acte de piété filiale : il en aurait sûrement été bien affligé ; car le parterre du Vaudeville, quoiqu'il aime un peu les gaités, a beaucoup de vertu. Il ne laisse pas passer incognito une sentence de morale ; il a beaucoup applaudi à celle de M. de la Popelinière qui, dans ce vaudeville, vient chanter que quand on vieillit , il faut

Abandonner le monde et les amours.

On pourrait faire dire cela à tout la monde plutôt qu'à M. de la Popelinière, qui abandonna peut-être les amours à temps, je n'en sais rien ; mais qui ne songea jamais à quitter le monde et n'était rien moins qu'hermite dans sa maison de Passy, où il tenait une espèce de cour et s'entourait de ses protégés avec un faste ridicule dans un homme puissant, bien plus ridicule dans un homme qui n'est que riche et qui ne peut donner que de l'argent. Au reste, M. de la Popelinière fut en effet utile aux gens de lettres, et sauf sa chanson, le rôle qu'il joue ici n'a rien d'inconvenant ; l'anecdote qu'on lui attribue est attribuée, dans la notice sur Favart, placée à la tête de sa correspondance, à M. B., aussi fermier général, et dont quelques raisons particulières ont apparemment fait changer le nom contre celui, de M. de la Popelinière. Voici comme le fait est raconté dans la notice. Après la représentation des Deux-Jumelles, son premier ouvrage, « M. Favart. qui, depuis la mort de son père, continuait de seconder sa mère dans son commerce, trouve en rentrant chez lui, non pas des vers à sa louange, mais une commande considérable de pâtisserie qu'on était venu faire à sa mère. Notre jeune poète est donc obligé de déposer les lauriers qui couvrent sa tête, et de prendre, quoi ? Tout bonnement le bonnet et le tablier du métier. A peine a-t-il mis la main à la pâte, qu'il entend s'arrêter à la porte de la boutique un équipage ; il en voit descendre M. B., fermier général, très-riche et homme d'esprit, qui s'adressant à lui, dit qu'il voudrait parler à M. Favart, l'auteur de la nouvelle pièce qu'il vient de voir et d'applaudir au théâtre de la foire, avec tous les spectateurs. Un petit mouvement de vanité s'empare de l'auteur ; il n'ose se faire connaître sous un pareil négligé ; et après avoir balbutié quelques monosyllabes, il ne trouve rien de mieux, pour sortir de cet embarras, que de se donner lui-même pour son garçon de boutique, en disant qu'il va prévenir son maître. Pour soutenir ce rôle, il monte dans sa chambre placée précisément au-dessus de son four, et qui ne recevait; de jour que par une croisée donnant sur la boutique : le financier apperçut à travers cette ouverture la toilette précipitée du jeune homme, et vit que le maître et le garçon n'étaient qu'un, ce dont il rit beaucoup. Enfin , la coèffure faite à la hâte et l'habit endossé, M. Favart descend bien vite pour savoir ce que M. B. lui veut. « Il voulait le charger de composer une fête qu'il devait donner à sa femme, et propose à Favart de venir le soir même souper chez lui. Favart s'excuse, en disant qu'il a de l'ouvrage pressé pour le lendemain. M. B. l'engage à s'en reposer sur ses garçons, sur celui que j'ai vu là haut, ajoute-t-il malignement. Oh, répond M. Favart, qui voit bien que son financier n'est pas dupe, pour celui-là c'est encore moi ». Tout fut arrangé et remis à sa place ; le cuisinier de M. B. vint faire les petits pâtés commandés à M. Favart ; celui-ci alla souper chez M. B. et composer les couplets dont il avait besoin, et le tout en fut probablement beaucoup meilleur. Les auteurs ont su tirer parti de ce trait d'une manière assez piquante, en supposant que le père de Favart vit encore, ignore le talent et les succès de son fils, qui a jusqu'alors gardé l'incognito, s'oppose même tant qu'il peut à son goût pour la littérature, et l'emploie à faire des échaudés, quoique lui-même ait fait une chanson à laquelle il attache beaucoup de vanité. L'action est censés se passer le jour de la première représentation de la Chercheuse d'esprit. Il est arrivé le matin, à l'adresse de M. Favart, dix billets d'entrée pour le spectacle, de la part du directeur. Favart fils n'ose les réclamer : Favart père est d'abord étonné de cette attention du directeur. Ah ! c'est ma chanson, dit-il ; et persuadé qu'il doit ces billets à sa qualité d'auteur, il en profite sans en vouloir donner un à son fils, qu'il laisse se morfondre dans la boutique, beaucoup plus occupé de l'ouvrage qu'on donne à la foire, que de celui qui lui est commandé. C'est pendant ce temps qu'arrive M. de la Popeliniêre : le jeune Favart va, dit-il, chercher son maître. Dans le temps qu'il met à faire sa toilette, Favart père revient du spectacle. M. de la Popeliniêre, ne doutant pas que ce ne soit l'auteur qu'il attend, s'épuise en complimens : Ah ! dit l'autre, c'est ma chanson ; mais bientôt comprenant qu'il s'agit de la pièce qu'on vient de jouer, il se défend d'en être l'auteur ; M. de la Popeliniêre veut forcer sa modestie ; il a son nom du directeur, et le presse d'avouer un talent qui assure sa réputation, en l'assurant qu'un tel ouvrage doit faire vivre l’ouvrier. Le pâtissier lui répond :

Dans mon métier de talent je me pique,
Et je le dis sans me faire prier,
L'incognito ne vaut rien en boutique :
Dans mon secret j'ai mis tout le quartier ;
Il vole, il va de pratique en pratique,
Et l'œuvre ainsi fait vivre l'ouvrier.

Tout s'éclaircit par l'arrivée de Favart jeune en toilette d'auteur. Au même instant arrive encore à Favart père un prix gagné par son fils aux jeux floraux ; il convient alors qu'il vaut encore mieux faire des vers que des échaudés, dont on sait pourtant qu'il était l'inventeur. Au reste, il ne s'étonne pas de la réputation qu'on annonce à son fils, il tient de bonne race, et mes œuvres, dit-il,

Seront toujours dans chaque bouche.

II y a de l'esprit dans ce vaudeville, peu de calembourgs, peu d'équivoques, et cela est à remarquer : les couplets en sont généralement bien tournés, mais les auteurs ne savent pas encore faire une pièce. Jusqu'à l'arrivée de M. de la Popelinière, le théâtre est trop souvent occupé par des scènes qui ne tiennent pas au sujet et qui ne sont pas toujours assez piquantes. Quelqu'indulgence que le public ait ordinairement pour les roses, il a pensé se révolter contre l'abus qu'on en a fait dans une scène, entre Mlle. Rose Favart et son jeune amoureux. Le rôle de Favart père est gai et a été fort bien joué par Vertpré, à qui il ne manquait que de le mieux savoir. Les autres acteurs avaient également négligé cette précaution nécessaire, ce qui a fort contribué à jetter un peu de froideur sur la pièce. Elle a cependant été applaudie sans contradiction ; plusieurs couplets ont été redemandés. Les auteurs demandés et nommés, sont MM. Favart et Gentil.                 P.

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