La Métempsychose, comédie nouvelle en un acte et en prose, mêlée de vaudevilles, de Frédéric Bourguignon, 5 messidor an 13 [24 juin 1805].
Théâtre du Vaudeville.
Almanach des Muses 1806.
Sur la page de titre de la brochure, Paris, chez Léopold Collin, an 13 – 1805 :
La Métempsychose, comédie en un acte et en prose, mêlée de vaudevilles, Par M. Frédéric Bourguignon, représentée pour la première fois sur le théâtre du Vaudeville, le 5 messidor an 13.
Courrier des spectacles, n° 3051 du 6 messidor an 13 [25 juin 1805], p. 2 :
La Métempsychose, jouée hier au Théâtre du Vaudeville, a eu un succès de faveur. L’auteur de cette pièce est M. Frédéric Bourguignon.
Courrier des spectacles, n° 3052 du 7 messidor an 13 [26 juin 1805], p. 2 :
[L’auteur a tenté de se concilier le public par son couplet d’annonce, mais il n’a pas suffit pour masquer l’indigence et le manque d’originalité de l’intrigue. Le public a su pourtant se montrer indulgent envers un auteur jeune et prometteur. Intrigue connue donc : une veuve qui veut rester fidèle à son mari, et qui croit à la métempsychose. Pour la convaincre de reprendre le cours de sa vie, un ami entre dans le tombeau du mari et prend la parole en son nom. Cela suffit pour convaincre la veuve : elle accepte de se remarier avec cet ami, au nez et à la barbe de ses rivaux. Peu d'imagination donc, la voix d’outre-tombe étant utilisé dans tous les genres, et principalement le mélodrame. Une seule innovation, ce ruisseau dont les variations déterminent les changements d’état d’esprit de la veuve. Cela ne suffit pas à combler le critique. L’interprétation est de qualité.]
Théâtre du Vaudeville.
La Métempsycose.
Avant de nous mettre dans sa confidence, l’auteur a voulu nous mettre dans ses intérêts. Voici son couplet d’annonce :
L'Auteur est toujours satisfait
De l'ouvrage qu'il vous présente,
Il sourit à tout ce qu'il fait,
Son ame est toujours indulgente.
Pour sa Métempsycose et lui
Notre Auteur qui ressemble aux autres
Voudroit que son ame aujourd'hui
Pût passer dans les vôtres.
Ce couplet a fait merveille ; l’on s’en est sou venu au lever du rideau ; l’on s’en est souvenu encore dans les premières scènes ; mais on n’a presque pas eu besoin de s’en souvenir quand on a entendu plusieurs couplets tournés avec facilité. L’intrigue est foible, et rappelle trop la Matrone d’Ephèse ; mais l’indulgence a dirigé le jugement du parterre ; il s’est contenté du peu qu’on lui avoit offert d’une façon si gracieuse, et les applaudissemens ont été quelquefois jusqu’à l’enthousiasme. Il est à présumer qu’ils avoient moins pour objet le mérite de l’ouvrage que le désir d’encourager l’auteur qui paroit jeune encore, et qui donne des espérances avantageuses.
Le Colonel Adolphe a fait promettre en mourant à Aurore son épouse qu’elle lui conservera son cœur et sa foi. Aurore née sur la côte du Malabar est persuadée, suivant le système de Pylhagore, que l’ame de son époux anime quelqu’un des objets qui l’environnent, et voit toutes ses démarches. Envain Charles, l’ami du Colonel, envain le sémillant Derval cherchent-ils à la distraire ; toute entière à son amour, elle passe la moitié de sa vie dans un jardin, près du buste et du tombeau de son Adolphe. Derval se croit aimé, parce qu’on a accepté quelques parties pour s’étourdir sur les nouveaux sentimens que Charles a fait naître, et en effet , Charles s’apperçoit de l’impression que sa vue a faite sur la jeune veuve ; il ne vouloit que la consoler ; il l’aime, et il brûle de la déterminer à oublier ses sermons Il ne s’agit que de frapper par quelque prestige l’imagination et les yeux d’Aurore ; pour y réussir, il pénètre dans le tombeau, répond à la romance qu’elle adresse à l’ombre de son époux ; enfin il se montre à ses yeux, tel qu’étoit jadis son cher Adolphe. Le prodige réussit. Derval et un autre rival de Charles arrivent précisément pour être témoins de son mariage, et vont s’en consoler à l’Opéra.
On voit par cette analyse que l’auteur n’a pas fait beaucoup de frais d’imagination. Une voix sortant du fond d’un tombeau, un revenant, une apparition sont aujourd’hui des moyens vulgaires et usés. On les trouve dans les tragédies, dans les opéra, et sur-tout dans un grand nombre de mélodrames. La seule invention de l’auteur est un ruisseau qui a l’air de couler dans le fond du théâtre, et dont le cours, plus ou moins rapide, doit déterminer le changement d’Aurore. Cette idée a paru petite, et il a fallu tout le jeu et toute la gaité d’Hyppolite pour lui donner quelque mérite. Les rôles ont été' très-bien rendus par MM. Julien, Henri, Cha pelle, et par Mesd. Belmont et Blosseville.
L'Ambigu, ou variétés littéraires et politiques, volume X (1805), n° LXXXIII, du 20 juillet 1805, p. 138 :
La Métempsychose. Opéra-vaudeville.
On a donné pour la premiere fois, le 24 Juin, au Théâtre du Vaudeville, une jolie petite .piece en un acte, intitulée la Métempsychose, par M. Ernest Bourguignon, jeune homme de 18 ans. Le couplet d’annonce avait prévenu favorablement, et le public, bien disposé, a réalisé le vœu de l’auteur. Tout le monde a souri de bon cœur aux jolis détails de ce petit vaudeville, et ce n’est point à l’indulgence qu’il a dû son succès.
Couplet d’annonce.
L’auteur est toujours satisfait
De l’ouvrage qu’il vous présente ;
Il sourit à tout ce qu’il fait.
Son âme est toujours indulgente.
Pour la Métempsychose et lui
Notre auteur qui ressemble aux autres,
Voudrait que son âme aujourd’hui
Pût passer dans les vôtres.
Archives littéraires de l'Europe, tome septième (1805), Gazette littéraire, juillet 1805, p. xxvii-xxviii :
Théâtre du Vaudeville.
La Métempsycose, comédie en un acte.
Le sujet de la Matrone d'Ephèse, de Pétrone, si naïvement racontée par Jean Lafontaine, avait été mis en scène à ce théâtre par M. Radet. Quoique cet ingénieux auteur eût cherché à éviter, de son mieux, les écueils du sujet, on ne peut disconvenir que son ouvrage ne présente un tableau pénible, et un résultat fâcheux pour les mœurs. Le ridicule, versé sur la constance dans les affections, s'étend naturellement sur les affections même. En plaisantant sur ce qu'il y a de religieux et de sacré dans la douleur et les regrets, on nous instruit que l'on ne doit plus aimer sérieusement et sans scandale, que pour la jouissance du moment, et que l'objet de notre amour n'a plus aucun droit à nos souvenirs et à notre respect, du moment où la mort nous l'a enlevé. Un jeune auteur, M. Frédéric Bourguignon, paraît avoir senti ce que ces principes avaient d'affligeant pour l'humanité ; il nous présente dans sa Métempsycose une jeune femme indienne, veuve d'un officier français, élevée dans la doctrme de Pythagore, et croyant que l'ame de son mari anime tous les objets qui l'entourent. Sa tristesse est adoucie par ce prestige. Un amant profite de son système. Il se revêt des habits de l'officier, emprunte sa voix, et se fait entendre à la jeune veuve dans le silence de la nuit. I1 lui déclare que son ame habite le corps de celui qui l'aime en ce moment, et lui prescrit de l'épouser. La veuve est émue. L'amant paraît. Sa victoire est complette. Il obtient sa main. L'auteur a joint à cette petite table un épisode de Zadig. La veuve avait promis d'être fidèle à la mémoire de son époux, tant que coulerait le ruisseau de son jardin. Le cours du ruisseau est détourné par les soins d'un jardinier, que l'amant a mis dans ses intérêts.
Ce léger ouvrage est, comme on voit, assez faible de conception ; mais la couleur en est riante. Le rôle de la veuve est agréablement tourné. Il y a une foule de jolis couplets. Trouve-t-on beaucoup plus que cela dans la plupart des vaudevilles ?
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