Le Mari sans caractère, ou le Bonhomme chez lui, comédie en cinq actes et en vers, de Lamartelière, 26 décembre 1808.
Théâtre de l’Impératrice.
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Titre :
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Mari sans caractère (le), ou le Bonhomme chez lui
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Genre
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comédie
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Nombre d'actes :
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5
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Vers / prose
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vers
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Musique :
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non
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Date de création :
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26 décembre 1808
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Théâtre :
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Théâtre de l’Impératrice
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Auteur(s) des paroles :
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Lamartelière
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L’Esprit des journaux français et étrangers, tome I, janvier 1809,p. 268-274 :
[Si la pièce de La Martelière n’a pas réussi, c’est que son titre ne convient absolument pas, et qu’il fait naître dans le public des attentes qui sont complètement déçues à la représentation. Le critique fait de ce mauvais titre une cause fréquente d’échec : les auteurs cherchent un titre racoleur, et le public vient avec une idée toute faite de la pièce, et se venge du sentiment d’avoir été trompé. Ainsi, le Mari sans caractère promettait une pièce montrant le spectacle d’une famille dans laquelle le mari ferait preuve de la plus grande faiblesse en face des exigences de sa femme. Et le public a vu une pièce où un honnête père de famille, confronté à mille difficultés, la ruine, l’apparente trahison d’un ami, le comportement scandaleux d’un fils joueur et débauché qui vole son père, fait preuve d’une conduite qui n’a rien de lâche : il sait répondre à toutes les situations avec fermeté. Devant subir pendant cinq actes un spectacle que le titre n'annonçait absolument pas, le public ne pouvait pas ne pas montrer sa désapprobation. Or, cette pièce est en fait une adaptation d’une comédie allemande (occasion pour le critique de rappeler que ce théâtre allemand où certains cherchent des modèles s’inspire lui-même de modèles français : la pièce nouvelle est ainsi « la copie d'une copie de nos modèles »). La pièce adaptée par Lamartelière est rapportée à toute une série de pièce françaises. C’est le cas de la scène où un fils vole son père avant de montrer ses remords : une telle scène n’a pas sa place sur le théâtre français. C’est aussi le cas de l’ami qui achète les biens du Mari sans caractère, avant de les lui rendre : là aussi on retrouve des modèles français. La pièce nouvelle n’est pas originale, et si elle a des qualités d’écriture, elle se ressent aussi de l’original imité, un drame au style éloigné de ce que requiert la comédie. Il ne s’agit pas pour le critique de nier les qualités de l’auteur, mais de l’inviter à en « donner à l’avenir de meilleures preuves ». Certaines parties de sa pièce montrent « un mérite assez réel » pour qu’on fasse preuve d’indulgence pour le reste. Félicitations enfin aux administrateurs de ce théâtre secondaire, qui ne craignent pas de monter une pièce en cinq actes et en vers, rassurant ainsi les auteurs : leur travail ne sera pas condamné à l’oubli avant d’être joué.]
Le Mari sans caractère, ou le Bonhomme chez lui.
Cette pièce n'a point eu un véritable succès, et nous espérions qu'à une seconde représentation, l'auteur, en en changeant le titre, serait plus favorablement accueilli ; mais cette seconde représentation est annoncée au moment où nous écrivons : le titre subsiste, nos remarques subsisteront donc aussi, car elles s'appliquent particulièrement au titre qui est à notre avis le défaut essentiel et fondamental d'un ouvrage qui en a beaucoup d'autres, et qui cependant ne peut être la production d'un homme sans moyens et sans talent.
En général, cette qualité si nécessaire, sur-tout dans un ouvrage dramatique, nous voulons dire la conformité au titre, est une chose trop négligée de nos jours ; l'un imagine un titre bizarre, comptant comme l'enseigne Beaumarchais, sur l’influence de l'affiche ; l'autre élève son ouvrage par le nom dont il le décore, à un rang dont la défaveur publique s'empresse de le faire descendre ; celui-ci cherche une allusion à un succès récent, et fonde sur cet artifice l'espoir de sa réussite ; celui-là calcule l'effet d'une contre-vérité, et allèche le spectateur par l'appât d'un sujet traité en sens inverse du titre. Qu'arrive-t-il ? Le. public qui s'est formé une opinion sur l’annonce de l'ouvrage, qui a établi ses calculs, créé son action, imaginé ses personnages, disposé ses scènes, arrive au théâtre, voit qu'on ne lui tient rien de ce qu'on lui a promis, et se venge assez durement d'avoir été trompé dans son attente.
Voilà l'historique de la représentation du Mari sans caractère. Qu'annonçait ce titre ? Que pouvait attendre le public ? Le tableau comique de l'intérieur d'un ménage, ou l'époux mené par une femme altière, et sur-tout capricieuse, révendique bien haut des droits que jamais il n'exerce, ordonne à chaque instant pour se laisser désobéir sans cesse, prend des résolutions vigoureuses que la plus légère opposition renverse, et donne à sa faiblesse, sa pusillanimité, sa molle complaisance, le nom de ces sacrifices mutuels, de ces condescendances réciproques, au moyen desquels la paix se maintient entre les époux. Le public attendait un nouveau Chrysale, donnant à sa sœur les leçons qu'il n'ose donner directement à sa femme ; il attendait enfin une pièce consacrée au développement de cette sorte de caractère qui consiste à n'en point avoir : que lui a-ton présenté ?
Un honnête père de famille, vieilli dans les emplois de la haute finance, qui, n'ayant pas assez surveillé l'emploi de ses revenus et réprimé l'éclat fastueux de sa femme, est obligé de supprimer sa maison, et de se renfermer dans les bornes d'une étroite économie. La première scène expose sa situation : il renvoie ses gens, vend son équipage et fait une réforme totale ; on espère que sa femme va paraître, et qu'un mot changera les résolutions prises, que le mari va donner une preuve de faiblesse de caractère, en cédant à des larmes ou à des fureurs ; rien de cela : l'époux se montre fort raisonnable dans sa réforme ; l'épouse fort raisonnable aussi en en recevant la nouvelle. Un ami chargé dans la pièce d'un rôle mystérieux, dont on pouvait attendre un parti plus comique, est accusé d'avoir acheté les diamans de Mme. de Solanges (c'est le nom du mari), ceux de sa fille, les bijoux de son fils, et d'exercer dans la maison de Solanges même, envers sa famille dissipatrice, le métier de préteur sur gage ; Solanges lui dit très-nettement et fermement sa pensée à ce sujet, et personne en cette occasion n'a pu le soupçonner de manquer de caractère ; enfin son fils, joueur et débauché, lui vole cent mille francs dans sa caisse, met son honneur en péril et sa fortune aux abois ; il évite noblement à ce fils la honte d'un aveu, et lui impose un long exil, après avoir arrêté les sacrifices nécessaires pour remédier à son crime. On n'a encore vu dans cette conduite rien qui annonçât l'homme sans caractère, rien qui lui méritât le nom du bonhomme chez lui.
Le spectateur a été ainsi occupé pendant toute la représentation à chercher par quelle combinaison d'idées, ou par quelle étrange méprise dans le sens qu'on est convenu de donner aux mots, l'auteur prenait à tâche de se démentir lui-même, de nous peindre un père de famille très-estimable, et de lui donner une épithète qui l'est si peu. On conçoit qu'une disposition semblable partagée pendant cinq actes par tous les spectateurs, empêcherait de réussir même un ouvrage remarquable par des beautés réelles.
Celui-ci est reconnu pour une imitation de la scène allemande ; imitation qui a souvent égaré nos auteurs, et les égarera, tant qu'ils ne discerneront pas en imitant les Allemands, ce que déjà les Allemands avaient imité de la scène française, et tant qu'ils nous donneront ainsi la copie d'une copie de nos modèles. On cite une comédie de l'acteur et auteur célèbre en Allemagne, M. Iffland, comme ayant fourni à M. de la Martellière le sujet et les principaux ressorts de son action. Ce n'est pas le premier emprunt que cet auteur fait au théâtre allemand ; ici il eût dû reconnaître entre le drame allemand qu'on nomme le Crime par point d'honneur et notre Ecole des Pères de M. Pieyre, et notre Clémentine et Desormes de M. Monvel. et notre Père de Famille de Diderot, des points de ressemblance assez frappans pour le dispenser de remettre sur la scène des tableaux qui peut-être ne sont pas faits pour elle : celui d'un jeune dissipateur, volant la caisse de son père, quel que soit le motif spécieux qui l'y force, quelle que soit la gravité de ses remords et de sa peine, est sans doute de ce nombre : le parterre a paru de cet avis ; car dans cette occasion, et dans une autre récente, il a interrompu cette scène de vol de la même manière que dans nos maisons ou nos places publiques, on cherche à empêcher le crime, ou du moins à en arrêter l'auteur.
Autre imitation : cet ami mystérieux qui s'empare de tout le mobilier, et même de la maison de Solanges, pour rendre le tout à la famille qu'il préserve de sa ruine, non-seulement est calqué sur un personnage du Tyran domestique de M. Duval, mais rappelle encore bien plu» précisément l'intention de Destouches dans son personnage de Julie, du Dissipateur ou l'adroite Friponne. L'auteur peut donc difficilement prétendre dans cet ouvrage au mérite de l'originalité et de l'invention : quelques scènes néanmoins sont préparées avec art et traitées avec talent ; quelques tirades écrites avec nerf et correctement: du reste, le style est sans unité. Il offre des passages d'une élévation qu'on pourrait nommer enflure, d'autres d'un naturel qui tient de la trivialité. Au total, ce style n'est pas assez constamment celui de la comédie, et l'auteur a été entraîné à ce défaut par la couleur romanesque et les incidens appartenant au drame, qu'il a multipliés dans son ouvrage.
Cette pièce n'a eu d'un succès que les apparence» ordinaires; les applaudissemens ont lutté contre les signes du mécontentement, et le nom de l'auteur a été prononcé. Cet auteur entendrait mal notre pensée, si sur l'opinion que nous émettons ici, il croyait que nous méconnaissons en lui un talent dont il peut donner à l'avenir de meilleures preuves : beaucoup d'idées éparses dans son ouvrage, et plusieurs scènes bien tracées décèlent un homme qui a réfléchi sur son sujet, l'a travaillé, et a longtemps calculé les moyens et les ressources : en un mot, on a dû reconnaître dans quelques parties de cet ouvrage un mérite assez réel pour juger les autres avec indulgence, et peut-être pour attendre du même auteur un ouvrage qui inspirerait un autre sentiment.
Quoi qu'il en soit, on ne peut que féliciter l'administration d'avoir reçu et donné cet ouvrage ; elle n'oublie pas qu'elle dirige le théâtre français secondaire ; que la représentation d'une pièce en cinq actes et en vers, même avec des défauts, même avec de la faiblesse, est une tâche imposée à son zèle, et à l'émulation de ses acteurs, et une garantie donnée aux auteurs que leurs efforts ne seront pas vains, et les fruits de leurs veilles condamnés à l'oubli avant même d'avoir vu le jour. S....
Magasin encyclopédique, ou Journal des sciences, des lettres et des arts, 14e année, 1809, tome I, p. 181-182 :
[L’auteur de l’article n’a pas aimé la pièce, c’est le moins qu’on puisse dire et il ne se prive pas de le dire : une mauvaise imitation de pièces qui lui sont bien supérieures, rien ne trouve grâce à ses yeux.]
ODÉON. THÉATRE DE L'IMPÉRATRICE.
Le Mari sans caractère, ou le Bonhomme chez lui, comédie en cinq actes et en vers, jouée le 26 décembre 1808.
Cette comédie, si l'on daigne l’honorer de ce nom, n'est qu'une imitation dans toute la force du terme : imitation d'une pièce d'Ifland, intitulée : le Crime par point d'honneur : imitation de l'Ecole des Mères, de l’Ecole des Pères, de Clémentine et Désormes, du Tyran domestique, et de beaucoup d'autres pièces du Théâtre Français. Style inégal, scènes mal filées, situations ridicules; et dans tout cela rien de comique. Un mari sans caractère qui commence la pièce par un acte d'autorité, et qui soutient assez bien son rôle ; mais qui au milieu de tout cela prêche et gémit sans cesse. Des escrocs qui passent pour honnêtes gens, un honnête homme qui passe pour un fripon : de l'argent prêté, rendu , volé, vingt fois : enfin, un salmis d'événemens qui ressemble à une comédie comme un mélodrame à une pièce de Racine. Cette sévérité est motivée par la prétention du titre qui n’est rempli en aucune façon.
On ne peut pas accuser l'auteur d'avoir mal choisi ses modèles, mais d'avoir fait un tout défectueux avec de bonnes pièces de rapport. Pour faire de la mosaïque, il ne faut pas ignorer l'art du dessin et du coloris. Cette école engagera sans doute M. Lamartelière à soigner davantage ses plans et à donner à son style plus de fini.
Iffland (Auguste-Guillaume) est un auteur et acteur allemand, né à Hanovre en 1759, mort à Berlin en 1814. Il débute sa carrière de comédien à Gotha en 1772, naturellement contre la volonté paternelle. Il s’essaie à l’écriture dramatique avec une tragédie, Albert de Thurneisen. Mais c’est comme auteur de ce qu’on appelait en Allemagne des Schauspiele (le genre que Diderot voulait surnommer le drame honnête, illustré par Lessing). Les plus connus de ses ouvrages : le Crime par point d’honneur, et le Joueur (d’après Biographie étrangère tome premier, Paris, 1819, p. 313-314)
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