Les Ménechmes grecs, comédie en prose et en 4 actes, précédée d'un prologue, de Cailhava. avec un air de Mlle Candeille, 13 janvier 1791.
Théâtre du Palais Royal
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Titre :
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Ménechmes grecs (les)
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Genre
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comédie précédée d’un prologue
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Nombre d'actes :
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4
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Vers / prose
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prose
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Musique :
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oui (un air chanté)
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Date de création :
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13 janvier 1791
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Théâtre :
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Théâtre du Palais-Royal
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Auteur(s) des paroles :
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Jean-François Cailhava
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Compositeur(s) :
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Mlle Candeille (qui chante l’air qu’elle a écrit)
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Almanach des Muses 1792
Sujet très comique et fameux dans l'antiquité. M. Cailhava a conservé de la pièce de Plaute tout ce qui pouvoit être transporté sur notre scène, et même jusqu'au costume des personnages. Cette comédie a eu beaucoup de succès à la représentation.
Sur la page de titre de la brochure, Paris, chez Boulard, 1791 :
Les Ménechmes grecs, Comédie en Prose & en quatre Actes ; précédés d'un prologue. Par Jean-François Cailhava.
L’Esprit des journaux français et étrangers, 1791, volume 3 (mars 1791), p. 327-331 :
[Compte rendu très favorable à la pièce : elle cumule à peu près toutes les qualités, pour l’intrigue (« conçue fortement, menée avec art & dén[o]uée d’une manière neuve », pour le ton, le goût pur. La pièce ressuscite le « bon genre, dont on s’écarte tant aujourd’hui ». Liste des défauts auxquels la pièce échappe : « point d'épisode ; jamais forcé ; point de boufissure, point de faux bel esprit ». Elle a de plus été supérieurement jouée, et les costume sont d’une grande exactitude (costumes à l’antique, bien sûr). En ouvrant leur théâtre par une pièce d’une telle qualité, les directeurs se sont imposés un challenge !]
THÉATRE DU PALAIS-ROYAL.
Le jeudi 13 janvier, on a donné à ce théatre, la premiere représentation des Menechmes grecs, comédie nouvelle en quatre actes en prose, avec un prologue; par M. Cailhava.
Tout le monde connoît le sujet des Menechmes, traité d'abord par Ménandre chez les Grecs, ensuite par Plaute, chez les Latins, imité par Rotrou, & que Regnard a fait passer avec tant de succès & de gaieté sur notre théatre. C'étoit une entreprise hardie que de traiter ce sujet après un si grand maître, & d'essayer la piece même de Plaute, sa marche & presque ses détails.
Un acteur romain, dans un prologue neuf & piquant, expose l'avant-scene.
Menechme d'Epidamne, tourmenté par l'humeur jalouse de sa femme, forme le projet d'aller passer la journée chez Erotie sa voisine, joueuse de luth, belle & célebre, & de lui faire la cour en lui offrant une bague qu'elle a paru désirer la veille, & qui appartient à sa femme. Son bijoutier se présente & lui promet de lui en procurer une toute semblable. Erotie revient du bain, suivie de ses femmes, & reçoit le cadeau de Ménechme qu'elle invite à dîner. Son beau-pere, averti par sa fille, vient se plaindre des inquiétudes que lui cause la conduite de son gendre, & entre pour la consoler.
Ménechme Sosiclès, arrivé ce jour même à Epidamne, paroît avec Messenion qui le prémunit contre tous les pieges qui l'attendent dans cette ville. Le bijoutier vient en effet lui parler d'Erotie, de sa femme, de la bague, & Messenion ne voit en lui qu'un fourbe. Erotie paroît ; trompée par la ressemblance, elle aborde le nouveau débarqué, & l'engage à entrer chez elle. Messenion le retient ; mais les charmes d'Erotie l'emportent ; il se défait de son esclave, &, pour le rassurer, lui donne sa bourse à garder.
Son frere lui succede ; sa femme lui reproche sa perfidie. Ménechme est fort embarrassé. Mais Démiphon, son beau-pere, trompé par le bijoutier, les racommode, & Ménechme part avec la résolution de reprendre la bague, & de la rendre à sa femme. Son jumeau sort de chez Erotie, une couronne de fleurs sur la tête, & la bague au doigt, qu'elle lui a donnée pour la faire arranger. Nouvelle surprise. Démiphon & l'épouse le pressent d'entrer. Conformément aux idées de Messenion, il les prend pour des intrigans qui sont d'intelligence avec l'homme officieux qui lui a parlé le premier, & les badine. Démiphon le croit fol, & va consulter un médecin qui ne manque pas de le confirmer dans ses allarmes.
Cependant le bijoutier n'a pu procurer la bague qu'il a promise à l'autre Ménechme, & celui-ci revient la demander à Erotie, qui paroît sur son balcon. Elle le traite avec le dernier mépris, & le laisse livré à ses réflexions.
Dans l'instant arrive le médecin avec Démiphon, scène très-plaisante ou le gendre & le beau-pere se croyent mutuellement fous. Ménechme d'Epidamne reste seul. Les éleves du médecin se disposent à le saisir. Messenion croit voir sou maître, repousse les éleves, lui remet sa bouse, & pour récompense, lui demande la liberté, qui lui est accordée; ce qui occasionne un nouvel embarras, quand le véritable maître redemande son argent, & menace Messenion de le livrer à la justice.
Il part, en effet ; les éleves reparoissent & apprennent à Messenion que son maître est fou. Le bon esclave s'attendrit sur son sort & se joint à eux pour le chercher. Le bijoutier offre le secours de ces garçons pour arrêter le fou échappé. Enfin les éleves ramenent un Ménechme ; les garçons du bijoutier ramenent l'autre. Nouvelle surprise ; mais grace à Messenion, l'énigme s'explique, & les deux freres se reconnoissent.
Cet; ouvrage fait le plus grand honneur à son auteur. C'est une intrigue conçue fortement, menée avec art & dénuée [dénouée ?] d'une manière neuve. Regnard est plus gai, sans doute, mais M. Cailhava est plus savant ; c'est vraiment une comédie dell' arte. Le ton en est excellent, le goût pur, la critique fine & délicate ; les rapprochemens ingénieux & point d'épisode ; jamais forcé ; point de boufissure, point de faux bel esprit, & les gens-de-lettres doivent savoir gré à M. Cailhava de ramener la scene au bon genre, dont on s'écarte tant aujourd'hui. Nous ne doutons pas que lorsque l'ouvrage sera mieux saisi par le public, & au moyen de deux ou trois légeres coupures, il n'ait un succès supérieur- à celui de la premiere représentation, quoiqu'il ait été très-brillant & très-flatteur. On a demandé l'auteur, & son nom, justement célebre dans les fastes de Thalie, a été fort applaudi. Jamais les acteurs de ce théâtre n'ont joué avec tant d'art, d'ensemble & d'intelligence. Tous méritent des louanges. M. Beaulieu a mis beaucoup de naturel & de bonhommie dans le rôle du beau-pere. M. Michaut a saisi le caractere de Messenion d'une maniere qui ne laisse rien à désirer. Mlle. Candeille a fait singulierement valoir le rôle brillant d'Erotie. Elle y a développé de vrais talens, & tous ses avantages naturels. Elle y chante un joli couplet dont elle a fait la musique.
On doit aussi des éloges aux directeurs pour l'exactitude du costume, portée jusqu'au scrupule. Tous les habits ont été dessinés sur les médailles antiques par M. Boucher, acteur de ce théatre, & le suffrage du célebre David prouve assez en leur faveur.
Cet ouvrage, qui commence pour ainsi dire la création de ce théatre, impose aux directeurs la loi d'être très-séveres sur le choix des pieces qu'ils admettront désormais, & le champ vaste que le décret de la liberté du théatre ouvre à leur zele & aux talens de leurs acteurs, leur fait une loi d'élaguer leur répertoire, qui n'a plus aujourd'hui d'autres bornes que celle que la nature a prescrites au génie.
Mercure universel, tome 4, n° 101 du jeudi 9 juin 1791, p. 142-143 :
[Pour marquer la publication de la brochure des Menechmes, le Mercure universel propose un compte rendu de la pièce dont l'auteur rappelle dans une préface l'origine (la pièce de Plaute) et le succès marqué par de multiples reprises, sous divers titres et dans tous les pays, avant d'en faire l'extrait comme si c'était une pièce nouvelle. La pièce de Cailhava. a été bien accueillie même le temps ne se prêtait guère à une pièce inspirée de l'antiquité, alors que ce sont plutôt les pièces permettant des applications empruntées à l'actualité. Lorsqu'ils ont été représentés, ils ont été joués avec ensemble et supporteront bien le passage à la lecture. Le critique y trouve ce qui fait la qualité des bonnes pièces, style simple, marche rapide imagination féconde, situations fortes et cohérence d'ensemble. Il affirme à son propos que les hommes ont toujours eu « les mêmes foiblesses, les mêmes travers, les mêmes ridicules » : la pièce est un miroir de ce que nous sommes, et nous y voyons nos défauts. L'article s'achève par un passage d ela pièce censé illustrer cette idée de permanence.]
Littérature, Annonces, etc.
Les Menechmes grecs, comédie en prose et en 4 actes , précédées [sic] d’un prologue par Jean-François Cailhava. A Paris, chez Boulard , imprimeur-libraire, rue Neuve St. Roch, N° 51, et chez tous les marchands de nouveautés.
M. Cailheva annonce dans sa préface que son intention a été de transplanter sur notre théâtre la comédie des Menechmes , dont Plaute, le meilleur des comiques latins, avoit emprunté la fable de Ménandre , poëte grec.
La comédie latine a été imitée chez toutes les nations, et sur-tout chez nous, sous les divers titres des Menechmes, des Jumeaux, des Méprises, des Ressemblances, etc...... M. Cailhava ne cherche pas à examiner si l'on a égalé Plaute ; il présente son ouvrage avec la modeste franchise qui accompagne les talens.
Ensuite il extrait la pièce latine, et en fait sentir les défauts. Il finit par en exposer les mœurs et les caractères, et motive les changemens qu’il y a apportés.
L’ouvrage de M. Cailhava a obtenu un succès d’estime très-soutenu, au ci-devant théâtre du Palais-Royal, dans des circonstances où il étoit peut être dangereux de risquer une pièce dans le genre antique, et où le mérite littéraire sembloit négligé, pour faire place à des pièces destinées à l’application des temps.
Nous croyons que les Menechmes grecs qui ont été rendus avec beaucoup d'ensemble, ne perdront rien de leur mérite à la lecture, et en supporteront l’épreuve, un peu rude pour certains ouvrages, qui ne doivent leurs succès éphémères qu’à l’illusion théâtrale.
Le style de celui que nous annonçons est simple, la marche en est rapide, l’imagination féconde, des situations fortes et l’ensemble étroitement lié à toutes ses parties...... C’est en quelque sorte une beauté académique, dont la régularité des formes ne blesse aucune règle de l’art.
La pièce de M. Cailhava prouve que les hommes eurent toujours, à quelques nuances près, les mêmes foiblesses, les mêmes travers, les mêmes ridicules. Le miroir en est d’au tant plus précieux, qu’il montre nos défauts sans blesser notre amour-propre ; témoin ce passage d’un dialogue entre Menechme et son esclave.
Menechme.
….. Les dames se promenent ici sans façons dans le simple négligé du ma tin, et parées de leurs propres charmes.
Messénion.
A-peu-près.
Menechme.
Sous quelques ajustement [sic] qu’elles soient, elles sont ravissantes. La dernière qu’on voit est toujours la plus belle, on l'a [sic] prendroit pour Vénus, ou pour une de ses favorites.
Messénion.
Jamais l’indulgente déesse n’eut en effet plus de prêtresses qu’ici. Comme elles exercent les devoirs de l’hospitalité ! comme elles se piquent de faire aux étrangers les honneurs de la patrie !
Menechme.
Tu n’aimes pas Epidamne , à ce qu’il me paroît.
Messénion.
Je la connoîs trop bien, cette charmante, cette dangereuse cité ; le rendez-vous des vices et des vertus, de l’ignorance et des beaux-arts; des grandeurs et de la petitesse. Je la connoîs trop bien pour ne pas l’admirer et la craindre, cette nouvelle Thèbes, dont le tableau souvent ter rible, mais plus souvent gracieux, afflige et charme en même-tems.
Mercure de France, tome CXXXIX, n° 25 du samedi 18 juin 1791, p. 116 :
[Annonce de la publication de la brochure, avec mention du succès qu’elle a connu, et indication du moyen de se la procurer pour les directeurs désireux de la monter...]
Les Menechmes Grecs, Comédie en prose & en quatre Actes, précédée d'un Prologue ; par J. F. Cailhava. Prix , 24 s. A Paris, chez Boulard, Imp Lib. rue Neuve-St Roch, N°.31, & chez les Mds. de Nouveautés.
Cette Piece est une de celles qui ont servi le plus efficacement à élever le genre du Théatre où elle a été donnée, qui s'intitule actuellement Théatre Français de la rue de Richelieu. Le costume grec est aussi bien observé dans le style qu'il l'était sur les habits des Acteurs. les Directeurs des différentes Troupes de Spectacle du Royaume qui voudraient l'essayer sur leurs Théatres, pourront s'en procurer des Exemplaires ainsi que des Ouvrages Dramatiques suivans, en s adressant, dans leur ville , au Correspondant du Bureau Dramatique de Paris.
Annales dramatiques: ou, Dictionnaire général des théâtres, tome sixième (Paris, 1810), p. 235-236 :
MÉNECHMES GRECS (les), comédie en quatre actes, en prose , avec un prologue, par M. Cailhava, aux Français, 1791.
Le sujet des Ménechmes, traité d'abord par Ménandre chez les Grecs, ensuite par Plaute, chez les Latins, imité par Rotrou, et que Regnard fit passer avec tant de succès et de gaieté sur notre théâtre, y fut introduit d» nouveau par M. Cailhava.
Cet ouvrage lui fait le plus grand honneur ; il offre une intrigue fortement connue, filée avec art et dessinée d'une manière neuve.
D'après la base César, la pièce est d'abord jouée 24 fois au Théâtre du Palais-Royal, du 13 janvier au 11 avril 1791 ; elle est ensuite jouée au Théâtre Français de la rue de Richelieu : 9 fois en 1791 (du 21 août au 29 décembre) et 4 fois en 1792 (1 fois en janvier, 3 fois en décembre) ; elle y est encore jouée 4 fois en 1795, 5 fois en 1796, 12 fois en 1797 et 1 fois en 1798. A partir de 1796, elle apparaît aussi sur d'autres théâtres : le Théâtre de société de Momus (5 fois, en 1796), le Théâtre de la rue Martin (1 fois en 1796), le Vaudeville de Boulevard (3 fois en 1796), le Théâtre de Molière (2 fois en 1797 et 4 fois en 1799). Total : 74 représentations.
Ils ont continué à être joué après 1799.
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