Monsieur Asinard, ou le Volcan de Montmartre, vaudeville en un acte, de Coster et Ourry, 7 septembre 1809.
Théâtre des Variétés.
[Les Supercheries littéraires dévoilées, de Joseph-Marie Quérard, Volume 2, p. 31 révèlent le nom des auteurs, Mario Coster pour Auguste et Maurice Ourry pour Ferdinand.
La France littéraire ou Dictionnaire bibliographique, etc., tome second, p. 169 et p.301, signale la publication de la brochure, à Paris, en 1809, chez Madame Cavanagh. Chazet est cité comme coauteur. C'est aussi le cas dans la Bibliothèque dramatique de M. de Soleinne.
Faut-il ajouter Chazet aux auteurs ? C'est ce que font beaucoup de bibliographies anciennes.]
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Titre :
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Monsieur Asinard, ou le Volcan de Montmartre
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Genre
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vaudeville
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Nombre d'actes :
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1
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Vers / prose ?
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en prose, avec des couplets en vers
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Musique :
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vaudevilles
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Date de création :
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7 septembre 1809
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Théâtre :
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Théâtre des Variétés
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Auteur(s) des paroles :
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Coster et Oury
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Magasin encyclopédique, ou journal des sciences, des lettres et des arts, 14e année, 1809, tome V, p. 135-136 :
[Après le récit d’une intrigue qui doit lui sembler consternante, le critique est obligé de constater le succès de la pièce, « en depit du bon goût » et malgré quelques sifflets. Une longue série de calembours empruntés à la pièce est censée nous édifier sur le niveau de la pièce, avant que le succès ne trouve son explication dans le jeu des acteurs (les vedettes du théâtre des Variétés). Et le nom des auteurs est donné, mais ce ne sont que des pseudonymes (ils « se sont cachés » sous ces noms, sans doute pour échapper à l’opprobre, mais c'est une cachette facile à trouver).]
THÉATRE DES VARIÉTÉS.
M. Asinard, ou le Volcan de Montmartre, vaudeville joué le 7 septembre.
Madame Poiré a promis la main de sa fille Nanon (la Vénus de Médicis de Montmartre) à Jérôme, batelier du canal de l'Ourcq; mais Asinard, venu à Montmartre pour raison de santé, et afin de se refaire en buvant du lait d'ânesse, a obtenu la préférence. Jérôme est éloigné, Asinard déclare son amour à Nanon sous l’auspice de la maternité. En vain, dit-il, qu'il ne vit qu'en Nanon (en ânon) ; Nanon jure de n'avoir pas d'autre époux que Jérôme, et d'après le conseil de Furet, employé de l'octroi, on agit de ruse : Asinard est très-crédule ; on lui fait accroire que Montmartre recèle dans son sein un volcan, qui ne peut tarder à faire explosion. Un feu d'artifice que l'on tire à Tivoli paroît être au nigaud le signal de l'éruption. Asinard veut fuir, et soustraire Nanon à une mort certaine ; le ravisseur est arrêté, on se moque de lui, et Jérôme épouse sa maîtresse.
En depit du bon goût, ces âneries ont réussi. En vain quelques sifflets ont voulu en faire justice, M. Asinard a triomphé.
Il ne parle qu'en calembourg ; il dit qu'à Montmartre il ne peut pas faire un pas sans rencontrer un pas-d'âne. Il dit encore que son père est bourgeois, (c'est-à-dire de Bourges), et qu'il a un cousin à la Chine, mais que c'est un parent éloigné. Il ajoute que l'on vit à bon marché sur les rives du Cher, et que lassé des plaisirs citadins il retourne aux champêtres (champs paître) , etc., etc.
Brunet, Tiercelin et Potier font beaucoup rire. Ce dernier, qui double Brunet, depuis quelque temps, est très-plaisant dans le rôle de M. Longue-Vue, employé au télegraphe. Les auteurs de cette farce, se sont cachés sous le nom de MM. Auguste et Ferdinand.
L’Esprit des journaux français et étrangers, tome XI, novembre 1809, p. 291-293 :
[La pièce n’a pas réussi, mais le critique nous rassure : au théâtre des Variétés, être sifflé peut avoir « une vertu vivifiante » et annoncer un succès, dont de nombreuses pièces donnent l'exemple. Cette pièce est comparée à un volcan, tant elle rejette de calembours et de propos niais, ce qui ne déplaît pas au public. Plutôt que d’en rendre vraiment compte, le critique reproduit un article de journal qui en résume l’intrigue, assez légère, avant de citer des couplets pour en montrer la qualité (faible) d’écriture.]
Théatre des Variétés.
Asinard, ou le Volcan de Montmartre.
Cette pièce a été sifflée, du moins à la première représentation; mais le sifflet qui fait tomber à plat une tragédie en cinq actes, semble avoir au contraire une vertu vivifiante pour les petits chefs-d'œuvre des Variétés. Jeannot, Cadet Roussel, les Jocrisse ont été sifflés dans leur temps, et chacun d'eux a eu plus de représentations en un an que toutes 1es pièces réunies de Corneille, Molière et Racine. Tel sera le sort d’Asinard. Tout ce qui constitue un bon, un excellent ouvrage, se trouve réuni dans cette nouveauté. Le génie des auteurs est véritablement un petit volcan (de Montmartre), et jamais le cratère du Vésuve et de l'Etna n'a vomi autant de bitume enflammé, que la bouche d’Asinard-Brunet ne vomit ici de calembourgs et de plates niaiseries. Cette lave d'un nouveau genre se répand dans toute la salle, et tout en haussant les épaules, les spectateurs se font un honneur d'en rapporter chez eux quelques parcelles, pour l'ornement de leur mémoire et la propagation du goût.
Voici au surplus l'analyse de la pièce, telle que noua la trouvons dans un journal.
« Cet Asinard, qui se donne pour un bon Bourgeois, parce qu'il est de Bourges, et qui a un parent éloigné, parce que ce parent est en Chine, prend du lait d'ânesse à Montmartre ; mais tout en le buvant, il s'enflamme pour Mlle. Nanon-Poiré, fille de la cabaretière du Poirier sans pareil ; et dès-lors il ne vit plus qu'en Nanon (qu'en ânon). Malheureusement pour lui, Jérôme, batelier du canal de l'Ourcq, est un vivant qui n'entend pas raison quand il s'agit de son objet. Il veut envoyer le pauvre Asinard dans le canal avec les poissons. Mais ramené par ses camarades à des sentimens plus doux, il se borne à persuader au triste amoureux que tout Montmartre va être détruit par l'éruption d'un volcan. Le feu deTivoli se fait entendre ; Asinard se croit perdu, se sauve, et veut, en se sauvant, enlever sa chère Nanon ; hêlas ! on le baffoue, et Jérôme épousa sa parsonnière ».
Les couplets suivans donneront une idée du style et du ton de ce joli ouvrage ; ils ont été distingués par les amateurs.
Air de Joseph,
A peine au sortir de l'enfance,
Vingt-neuf ans encor je comptais,
Et jusqu'alors mon innocence
De l'amour ignorait les traits.
En vain Bourges, Vendôme et Chartres
M'offrirent de jeunes attraits,
L'amour m'attendait à Montmartre,
Il était sûr que j'y viendrais.
Il était sûr que j'y viendrais ! C'est bien le cas de s'écrier :
« La chute en est jolie, amoureuse, admirable » !
mais passons à l'autre couplet :
Air : J'apprends qu'un jeune Prisonnier !
(d'une Heure de Folie).
Par les charmes de son esprit
L'une avait tenté de me prendre.
Autrement une autre s'y prit
En prenant un air doux et tendre.
Fuis pour me prendre par les yeux,
Vinrent des beautés sans pareilles ;
Mais vous vous y prenez bien mieux ;
Vous m'avez pris par les oreilles.
Nous ne pousserons pas plus loin la citation ; il nous semble déjà entendre les lecteurs s'écrier d'une voix suffoquée :
On n'en peut plus, on pâmes, on se meurt de plaisir ;
De mille doux frissons nous nous sentons saisir.
Un pareil état pourrait avoir des suites; il ne faut pas outrer les sensations.
[Les deux vers de la fin du compte rendu sont un emprunt aux Femmes savantes, acte 3, scène 2.
Et « La chute en est jolie, amoureuse, admirable. » est une citation du Misanthrope, acte 1, scène 2.]
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