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Monsieur et Madame Bernard, ou les deux Portraits

Monsieur et Madame Bernard, ou les Deux portraits, comédie en un acte mêlée de vaudevilles, de M. D*** [Jean-Baptiste Dubois], 26 juillet 1814.

Théâtre de la Gaîté.

Titre :

Monsieur et Madame Bernard, ou les Deux portraits

Genre

comédie mêlée de vaudevilles

Nombre d'actes :

1

Vers ou prose ?

en prose, avec des couplets en vers

Musique :

vaudevilles

Date de création :

26 juillet 1814

Théâtre :

Théâtre de la Gaîté

Auteur(s) des paroles :

M. D*** (Jean-Baptiste Dubois)

Sur la page de titre de la brochure, à Paris, chez J. N. Barba, 1814.

Monsieur et Madame Bernard, ou les deux Portraits, comédie en un acte mêlée de vaudevilles, Tirée du Conte de M. de Sarrasin, Par M. D***. Représentée, pour la première fois, à Paris, sur le Théâtre de la Gaîté, le 26 juillet 1814.

 

Gazette de France, n° 215 du 3 août 1814, p. 856 :

[Un premier paragraphe est consacré à parler de l'extension du domaine du vaudeville, puisque le voilà au Théâtre de la Gaîté, pour une pièce qui n'est finalement pas si gaie. Le sujet n'est pas nouveau (le critique le rapproche d'une autre pièce) : un homme ruiné demande de l'aide à quelqu'un qu'il a aidé autrefois et essuie un refus. Mais lors de la vente des biens de Monsieur Bernard, deux tableaux sont achetés à un prix très élevé, et c'est celui qu'il a obligé qui a acheté les deux portraits. Cela lui vaut d'épouser la fille de la maison. Curieusement, le seul jugement proté sur la pièce est consacré à la rapprocher d'une autre pièce.]

THEATRE DE LA GAITÉ.

Monsieur et Madame Bernard, ou les deux Portraits.

Le théâtre de la Gaité se pique par-fois de donner des pièces qui rappellent le nom qu'il porte. Il ne veut pas toujours tenir ses habitués au régime des larmes et de la terreur. De son côté, le Vaudeville, qui n'a pas constamment à se louer de la manière dont il est accueilli à la rue de Chartres et aux Variétés, n'est pas fâche d'étendre son domaine et de faire quelques excursions sur un territoire étranger. Ses courses ont été quelquefois assez heureuses; mais ici, il semble que le voisinage du mélodrame ait exercé une influence maligne sur l'imagination de l'auteur. On ne rit guere dans cette pièce, mais n'importe; sans être bien gai, le petit drame en chanson a intéressé et a été applaudi.

La pièce s'annonçait d'abord assez joyeusement. Deux époux bien unis se donnent une fête pour célébrer la vingt-cinquième année de leur mariage; et la surprise de la fête a été leurs portraits, dont une nièce leur a fait cadeau. Mais tout-à-coup la fête est troublée par l'arrivée d'un huissier qui exige le paiement d'une lettre-de-change endossée par M. Bernard. M. Bernard n'a pas d'argent ; comment faire ? L'impitoyable huissier ne donne qu'un quart-d'heure de grâce. Louise s'adresse à M. de Lisban, émigré rentré, qui a reçu autrefois l'hospitalité chez M. et Mme Bernard. M. de Liban refuse, et cependant Louise a deviné qu'elle en était aimée; elle a peine à expliquer ce procédé. Les meubles sont saisis et vendus sur-le-champ ; au théâtre, la justice va encore plus vite qu'au Palais. Un parent éloigné de M. Bernard se trouve là, met l'enchère aux deux portraits qu'on allait adjuger à vil prix, et le montant de l'enchère suffit pour payer la lettre-de-change. On s'étonne, on examine le prétendu parent, il est bientôt reconnu. C'est M. de Lisban lui-même qui a voulu cacher sa belle action. Cette découverte porte la joie dans tous les cœurs, et la pièce finit par le mariage de Louise avec M. de Lisban.

Cette pièce rappelle Caroline ou le Tableau, de M. Roger, que l'on revoit toujours avec plaisir aux Français.

L’Esprit des journaux français et étrangers, tome VII, juillet 1814, p. 294-298 :

[Avant de parler de la pièce, jouée dans un théâtre du boulevard, le critique se lance dans une réflexion sur les théâtres secondaires, sur l’exigence de leur public, qui attend de beaux costumes, des décors magnifiques, et des acteurs qui jouent vraiment, le risque de la chute pouvant faire perdre tout l’argent investi. A la Gaîté, le risque est moindre : les seuls frais sont les « frais de mémoire », à condition que les acteurs les fassent... Il ne faut pourtant pas penser que les théâtres du boulevard n’ont pas à se faire de souci dans le choix de leurs « petites pièces » : elles conditionnent le bon déroulement de la représentation, avant la grande pièce. Ils ont donc tout un répertoire de pièces courtes, « spirituelles et gaies ». Et la pièce nouvelle enrichit ce répertoire. Le résumé de l’intrigue ne donne pas l’impression d’une pièce bien neuve, au dénouement qui n’est vraiment pas surprenant. Pièce à « la morale pure et touchante », mais aussi « plusieurs jolis couplets », « le rôle très-gai d’un valet niais » : le public a demandé l’auteur. Mais le plaisir de ceux qui connaissaient la pièce ayant servi de modèle a été un peu gâché !]

THÉATRE DE LA GAITÉ.

Première représentation de M. et Madame Bernard, ou les deux Portraits.

Les petites pièces eu un acte ne sont pas celles qui attirent aux théâtres du boulevard. Les Variétés et le Vaudeville ont seuls, par le genre de leur répertoire, le privilège de faire de l’argent avec des petits proverbes dont la représentation dure à peine trois quarts d'heure, et qui n'exigent aucun frais de décoration et de costume. Au boulevard on n'obtient pas des recettes à si bon marché ; les amateurs ne se contentent pas à moins de trois bons actes, bien-longs, bien chargés ; ils veulent encore que les habits soient riches et les décors magnifiques ; il faut de plus que les acteurs jouent non pas terre à terre, d'un ton de voix naturel, et comme s'ils étaient chez eux, mais qu'ils se fatiguent et s'épuisent par des gestes et des cris forcenés; et quand ils obtiennent ou plutôt quand ils arrachent des applaudissemens, ils peuvent se flatter de les avoir gagnés à la sueur de leur front. C'est moins un encouragement qu'un salaire ; lorsqu'après tant d'efforts et de dépenses la pièce vient à tomber (car on tombe aujourd'hui partout, même à l'opéra), quel désappointement ! Voilà douze ou quinze mille francs et deux ou trois mois de perdus ; tandis que, si le même malheur arrive à la rue de Chartres ou au Panorama, il ne coûte d'autres regrets que ceux de quelques frais de mémoire, en supposant encore que les acteurs aient daigné les faire.

Plusieurs de ces messieurs et de ces dames, par une prévoyance paresseuse que l'événement justifie trop souvent, croient superflu d'apprendre leur rôle... « A quoi bon me .rompre la tête, disait, naïvement mademoiselle***, pour y faire entrer un rôle que je ne jouerai peut-être, qu'une fois ? Ne serai-je pas toujours à. temps ? Si la pièce réussit à la première représentation, je m'arrangerai pour savoir mon rôle à la .seconde. » C'est une dame qui ne met rien au hasard, .elle ne travaille qu'à coup sûr, et ne saurait se résigner aux non-valeurs.

On concluera [sic] peut-être de ce que je viens de dire, que les théâtres du boulevard sont dispensés de choisir avec discernement et de monter avec soin les petites pièces dont l'effet est à-peu-près nul pour la caisse ; on se tromperait étrangement. Leur influence, pour ne se faire sentir qu'indirectement, n'en- est pas moins réelle. Ces petits ouvrages, qu'on joue avant les grands mélodrames, peuvent se comparer à ces ballons d'essai, à ces globes en miniature qu'on lance avant les gigantesques aërostats ; leur effet met le spectateur dans une disposition plus ou moins favorable pour la grande expérience ; souvent même, loin de se borner à indiquer le vent, les petits ballons dramatiques le dirigent ou le modifient. Par exemple, le jour de la première représentation d'un des mélodrames à grand spectacle et à plus grand espoir, lorsque le public manifeste par du tumulte et souvent par des cris son impatiente curiosité qu'on a eu dès long-temps le soin d'exciter et d'entretenir, il est plus essentiel qu'on ne pense que la petite pièce qu'on n'est pas venu pour voir, mais qu'il faut bien voir puisqu'on est venu, puisse conjurer et non pas grossir l'orage toujours prêt à crever sur une pièce nouvelle, et ne fournisse pas aux gens d'humeur guerroyante l'occasion de commencer cette petite guerre si meurtrière, qui a tué tant d'ouvrages et blessé tant d'auteurs.

Si la petite pièce amuse et fait rire, l'entr'acte s'écoule paisiblement, on lui pardonne sa longueur, et la salle ne retentit pas d'avance de ce bruit sinistre et menaçant que les échos, du ceintre ne répètent qu'avec effroi. L'Ambigu-Comique et la Gaîté ont donc eu la sage précaution de se composer une collection de petites pièces spirituelles et gaies, dont plusieurs, quoiqu'elles ne soient là qu'accessoires, ne dépareraient pas le répertoire des théâtres consacrés à-peu-prés exclusivement aux ouvrages en un acte. M. et Madame Bernard, ou les deux Portraits, se joindront utilement aux comédies-vaudevilles par lesquelles on est dans l'usage de commencer le spectacle.

M. et Mad. Bernard ne sont pas tout-à-fait aussi vieux époux que M. et Mad. Denis, ou M. et Mad. Wasner, de la Danse interrompue. Ils n'ont que vingt-cinq ans de mariage, et ils célèbrent cette époque sans renoncer à l'espoir de fêter leur cinquantaine ; Louise leur nièce, leur fait présent de leurs portraits, et le repas a été commandé par M. de Lisban qui, poursuivi comme émigré, a trouvé chez ces braves gens la plus généreuse hospitalité. La fête est troublée par un huissier qui vient réclamer le remboursement d'une lettre de change endossée par Bernard. Le limier de Thémis accorde généreusement un délai... d'un quart-d'heure, au bout duquel il procède à l'enlèvement et à la vente des meubles. Louise, pour sauver ses chers parens, s'enhardit à implorer l'assistance de M. de Lisban, qui lui a souvent témoigné plus que de l'amitié. Quelle est sa surprise ! quelle est sa douleur !.... elle essuie un refus.

Mais un parent de Bernard avec lequel il était brouillé depuis long-temps, se rend à la vente, met l'enchère sur les deux portraits qu'on allait adjuger à vil prix, et paie les huissiers, qui ont encore le tour de bâton.

En vain M. de Lisban, pour couvrir son bienfait du voile du mystère, a pris le nom et le costume de ce parent ; la famille Bernard découvre bientôt que c'est à lui qu'elle doit un tribut de reconnaissance. Les bénédictions de ses amis et la main de Louise sont sa plus douce récompense.

La morale pure et touchante que respire cette pièce n'aurait pas suffi pour assurer son succès ; mais plusieurs jolis couplets, dont quelques-uns ont été répétés, et le rôle très-gai d'un valet niais joué fort plaisamment par Basnage, ont justifié la flatteuse impatience avec laquelle le public a témoigné le désir de connaître l'auteur ; c'est M. Alexandre. Les spectateurs les moins heureux sont ceux auxquels ce petit vaudeville aura rappellé le souvenir de la jolie comédie intitulée : Caroline, ou le Tableau. La comparaison entre les deux pièces aura diminué et le mérite de la nouvelle et. le plaisir qu'elle aurait pu leur faire.

A MARTAINVILLE..

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