Monsieur Pataud ou la Mascarade vénitienne, folie en deux actes, de Dupin, 20 février 1813.
Le nom de l'auteur est donné par la brochure.
Le titre de la pièce est sujet à variations : Monsieur Pataut ou la Journée vénitienne, Monsieur Pataut ou la Mascarade vénitienne.
Journal de Paris, n° 53 du 22 février 1813, p. 2 :
[C'est le moment des pièces de Carnaval, qui repose sur un pacte : les auteurs s'engagent à faire rire, et un public qui promet de ne pas se montrer très exigeant. La pièce est présentée comme une copie conforme de Monsieur de Pourceaugnac. Le critique donne, pour montrer la pauvreté de la nouvelle pièce, quelques exemples de calembours qu'il juge avec sévérité. Le public a sifflé, et les sifflets sont venus « de l'endroit où se place la classe de spectateurs du goût le moins difficile ». L'auteur n'a pas pris le risque de se faire connaître : il a donné un pseudonyme amusant. Il faut toutefois reconnaître que deux ou trois couplets ont été répétés, et le critique cite celui qu'il estime « le plus saillant » (chacun jugera !). Reste à parler du ballet, qualifié de joli, et des interprètes, qui pourraient l'un et les autres, sauver « cette triste folie ».]
THÉATRE DE LA GAIETÉ.
Première représentation de M. Pataut, ou la Mascarade vénitienne,
comédie-folie en deux acte*».
C’est le théâtre de la Gaîté qui a ouvert le jubilé de folie et d'indulgence qui a lieu tous les ans à cette époque. Il existe pendant le carnaval une espèce de traité tacite entre les auteurs et le public. Les uns s'engagent à faire rire, et à cette seule condition l’autre promet de n'être pas difficile sur les moyens qu’on emploiera. Tout est bon, tout est de mise ; soyez fou, mais soyez gai. M. Pataut était annoncé comme une folie, et vraiment c’en serait une grande que d’en croire toujours l'affiche. Si M Pataut est fou, sa folie n'est pas du moins d’un genre bien divertissant. Il arrive de Padoue à Venise, comme M. Ponrceaugnac de Limoges à Paris ; un certain Fonrbino s’attache au padouan comme Sbrigani au limousin : Pataut et Ponrceaugnac sont tous deux menacés de la potence, et tous deux, bien bernés, bien bafoués, bien mystifiés retournent dans leurs pays en abandonnant à un rival la belle qu’ils venaient épouser. La différence des deux pièces n’existe que dans les détails et dans les plaisanteries, mais j’avoue qu’elle est grande. On dit à M. Pataut que la fille du doge l’attend dans son palais. « Comment, s'écrie-t il, ici les dogues ont des palais ; dans mon pays les plus grands n’ont que des petites niches ». il est abordé par un masque dont le corps est enfermé dans un tonneau. « Ah ! un tonneau qui marche, il vient peut-être de faire cercle dans quelque société ». Tel est le sel que M. Pataut jette à pleines mains dans sa conversation : il a paru trop grossier, même pour le boulevard et pour le carnaval. Des sifflets ont accueilli plusieurs plaisanteries, et j’ai remarqué qu’ils partaient de l'endroit où se place la classe de spectateurs du goût le moins difficile. Le public de la Gaîté s’est permis une malice qui jusqu’ici paraissait réservée aux spectateurs des théâtres d’un ordre plus relevé. On a demandé l’auteur pour lui faire niche, mais le malin a su attraper les railleurs ; il a soutenu jusqu’au bout son caractère facétieux, et s’est masqué sous l'ingénieuse pseudonymie de M. Bernard, marchand forain de Padoue. Pataut et Bernard, ces noms là ne sont ils pas bien italiens.
La vérité m'oblige à dire que deux ou trois couplets ont été répétés. Voici le trait qui a paru le plus saillant.
Pataut veut se sauver du palais ; on lui rappelle sur l’air Au clair de la lune, son amour pour la princesse ; et il répond :
Non, ma flamme est morte,
Je n’ai plus de feu,
Ouvre-moi la porte
Pour l’amour de Dieu.
Un joli ballet de masques de caractère, et les caricatures burlesques de Duménis dans Pataut, et de Basnagc dans la fille du dogue, pourront valoir à celle triste folie quelques représentations.
A.
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