Ninon de Lenclos, ou l’Épicuréisme, comédie-vaudeville en un acte et en prose ; par A. Creuzé de Lesser.,16 fructidor an 7 [2 septembre 1799].
Théâtre des Troubadours.
Sur la page de titre de la brochure, Paris, chez les Libraires qui vendent les Nouveautés, an 8 :
Ninon de Lenclos, ou l’Épicuréisme, comédie-vaudeville en un acte et en prose, Par le C. Auguste Creuzé. Représentée pour la premiere fois, sur le Théâtre des Troubadours, le 16 Fructidor an 7.
Brochure présente sur le site Gallica de la BNF.
Courrier des spectacles, n° 924 du 17 fructidor an 7 [3 septembre 1799], p. 2 :
[Encore une pièce sur Ninon de Lenclos, mais le critique pense que c’est gage de succès, le public étant avide de voir « la femme qui fit les délices du siècle dernier ». L’intrigue repose sur une anecdote, Ninon montrant son honnêteté scrupuleuse envers un ami, et sa générosité envers une jeune fille qu’on veut marier malgré elle, alors que l’abbé Tarteffe se montre au contraire mesquin. La pièce incorpore, « assez adroitement » selon le critique, une autre anecdote, celle du billet qui contient la promesse de Ninon de ne pas tromper son amant, ce qu’elle s’empresse de faire évidemment. Deux billets de Ninon, l’un qu’elle respecte scrupuleusement (il s‘agit d’une affaire d’argent), l’autre dont elle se moque joyeusement (une affaire de cœur). L’abbé Tarteffe est donné comme le modèle de Tartuffe. L’auteur, demandé a été nommé. Et l’article s’achève par deux couplets empruntés à la pièce, l’un où Molière donne une leçon à l’abbé Tarteffe (futur Tartuffe présumé) et l’autre qui montre le désintéressement de Ninon, opposé à l’avarive d’une madame de Sévigné fort dépensière.]
Théâtre des Troubadours.
Peindre Ninon de Lenclos, la réprésenter entourée de ce que la ville avoit de plus poli, et la République des lettres de plus illustre, c’est être d’avance sûr du succès. Aussi le vaudeville donné hier à ce théâtre sous le titre de Ninon de Lenclos a-t-il mérité les nombreux applaudissemens d’un public charmé de voir sur la Scène la femme qui fit les délices du siècle dernier.
Govrville, un des amans de Ninon, absent depuis plusieurs années, lui avoit remis avant son départ un dépôt de dix mille francs, et il avoit eu la même confiance dans l’abbé Tarteffe. Mais ce dernier, au retour de Gourville, nie le dépôt, au lieu que Ninon s’empresse de restituer l’argent qu’elle a reçu. Ninon est instruite de ce manque de foi de l’abbé, qui joint à ce premier trait un autre non moins infâme. Il abuse de son crédit chez une voisine de Ninon, pour l’engager à marier sa fille Lucile à un vieux comte quelle n’aime pas. La jeune Lucile, au moment de signer, cherche un asyle dans les bras de Ninon, alors au milieu de ses amis. Celle-ci la console : sachant que le jeune homme que Lucile préfère n’est pas riche, elle offre une portion de son revenu. Ses amis imitent sa générosité, et le vieillard est éconduit.
L’auteur a sçu assez adroitement, insérer la scène du Billet à la Châtre dans le corps de son ouvrage. La Châtre, amant préféré, va partir : il exige de Ninon un billet ou promesse de lui ètre fidelle. Ninon y consent, et à peine après son départ, accorde quelque faveur à Sévigné. Dans ce moment, elle chante en riant :
Ah ! le bon billet qu'a la Châtre !
Molière et Chaulieu, dans cette jolie production, sont peints avec beaucoup de vérité, et c’est l’aventure de l’abbé Tarteffe qui fournit au premier le sujet de son chef-d’œuvre.
L’auteur demandé vivement est le cit. Creuzé.
Voici deux couplets que le public a fait répéter:
Molière à Tarteffe.
Air : La Comédie est un miroir.
C’est un acteur qui vous le dit,
Monsieur, vous jouez a merveille.
Tarteffe.
» Comment je joue ? »
Moliere.
Mais pourtant tout cela vous nuit:
Restituez , je vous conseille.
Tarteffe,(avec dédain.)
Monsieur l’acteur , laissez moi donc:
Vous , me prêcher ! quelle folie !
Moliere.
Je puis vous donner le sermon,
Vous me donnez lu comédie.
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Ninon à Mad. de Sevigné.
Je jouis de peu de richesse,
Mais pourtant telle que je suis,
Je puis toujours dans leur détresse
Secourir mes anciens amis.
Sevigné.
De vous en cela je diffère.
Ninon.
J'ai de mon revenu courant
Toujours une année en avant.
Sevigné.
J’en ai toujours une en arrière.
Jean Marie Querard, Les supercheries littéraires dévoilées. Galerie des auteurs apocryphes, tome second (Paris, 1847), p. 581, précise que la pièce de Creuzé de Lesser, comme celle de Vigée, a été réimprimée avec d'autres pièces concernant Ninon, à la suite des « Lettres de Ninon », par Damours. Paris, 1806, 3 vol. in-8.
D'après la base César, la pièce a été jouée 30 fois, du 2 septembre au 8 novembre 1799, au Théâtre des Troubadours.
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