Le Tuteur célibataire, comédie en un acte, en vers libres, de Desforges, 17 novembre 1789.
Théâtre Italien.
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Titre :
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Tuteur célibataire (le)
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Genre
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comédie
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Nombre d'actes :
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1
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Vers / prose ?
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en vers libres
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Musique :
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non
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Date de création :
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17 novembre 1789
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Théâtre :
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Théâtre Italien
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Auteur(s) des paroles :
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Desforges
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Mercure de France, tome CXXXVII, n° 49, p. 19-20 :
[Compte rendu d’une petite comédie, dont le sujet n’est certes pas original (encore une histoire de tuteur !), mais ce que le critique apprécie, c’est la capacité de l’auteur de renouveler ce « sujet rebattu par des ressorts neufs, par des développemens gais, rians, comiques » et de maintenir l’attention du public jusqu’au bout « par des moyens extrêmement simples, mais adroitement mis en œuvre »: tous les auteurs n’en sont pas capables ! Il faut pourtant faire un reproche sérieux, celui du style, parfois négligé jusqu’au mauvais goût (le défaut suprême). Deux interprètes sont distingués, dont Solié, passé avec succès dans « l’emploi des grimes » (les vieillards ridés, un peu grotesque, l’inverse des pères nobles), mais à qui le critique conseille de ne pas sombrer dans la caricature.]
COMÉDIE ITAL1ENNE.
Le Mardi 17 Novembre, on a représenté pour la première fois le Tuteur célibataire, Comédie en un Acte & en vers libres, par M. Desforges.
Un vieux garçon qui s'étoit fait un systême du célibat, devient subitement amoureux de sa pupille, & se propose de l'épouser. Il se propose en même temps de marier un neveu, son unique héritier, avec une femme de quarante ans, veuve, riche, encore très-fraîche, & sur-tout très-aimable. Mais ce double mariage est impossible, car le neveu & la pupille sont mariés secrètement. La jeune personne est très effrayée des projets de son oncle. A la manière dont les propositions de la veuve sont reçues, celle-ci s'apperçoit bien que le vieillard projette unc extravagance. Gaie, sensible & spirituelle, elle gagne la confiance des jeunes gens, plaide leur cause auprès du Tuteur, le menace d'un procès en réparation d'honneur, obtient enfin la ratification du mariage, & donne elle-même la main au Tuteur, à condition que par le contrat qui doit les unir, le neveu & la pupille seront institués leurs héritiers.
Le fond de cette Pièce est peu de chose : il nous semble pourtant qu'on n'a point assez tenu compte à M. Desforges du mérite que l'on remarque dans cette petite Comédie. Régénérer un sujet rebattu par des ressorts neufs, par des développemens gais, rians, comiques, & soutenir la curiosité jusqu'à la fin par des moyens extrêmement simples, mais adroitement mis en œuvre ; tout cela n'est pas donné à tous les Ecrivains qui se croient appelés à faire des Pièces de Thêatre, & voilà ce que l'on trouve dans le Tuteur célibataire. Le style est quelquefois un peu négligé, on y remarque même du mauvais goût, & cela fàche. Nous avons vu avec plaisir M. Solié jouer, pour la première fois, dans cet ouvrage, un rôle de l'emploi des Grimes avec autant d'intelligence que de soin & de comique. Qu'il s'observe sur les nuances trop prononcées qui peuvent conduire à la caricature, & nous lui promettons des succès dans cet emploi. Mme. Gonthier joue le rôle de la veuve avec un très bon ton, & un genre de gaîté qui fait honneur à son esprit.
L’Esprit des journaux français et étrangers, 1789, tome XII (décembre 1789), p. 341-342 :
[Pièce de peu d’importance, mais qui a réussi : le compte rendu se contente de raconter une intrigue tout à fait convenue, une nième variation sur le thème de l’oncle tuteur, de la pupille, du neveu et de la veuve, indispensable pour composer un quatuor équilibré. Puis il constate le succès avant d’en montrer les limites : « bagatelle », amusement d’auteur, qui crayonne une esquisse « pour se délasser d’ouvrages plus importans » (le critique cite la Femme jalouse, pièce de 1785, jouée à la cour).]
Le mardi. 17 novembre, on a donné la premiere représentation du Tuteur célibataire, comédie nouvelle en un acte, en vers libres.
Les tuteurs qui figurent sur la scene, sont ordinairement dupes ou crédules. Aussi est-ce le caractere du personnage qui a fourni le titre de cette piece. Voici en peu de mots ce qu'est le Tuteur célibataire, & ce qui lui arrive:
Vieux garçon, qui a passé toute sa vie dans les plaisirs, sans songer qu'il avoir une pupille à établir, il s'avise tout-à-coup de vouloir en faire une femme. Mais la jeune personne, qui s'est vue délaissée, a épousé en secret le neveu de son tuteur. Celui-ci, en même-tems qu'il s'occupe de lui-même, projette d'unir ce neveu à une veuve riche, mais sur le retour.
Les deux jeunes gens que cette double résolutions [sic] alarme, encouragés par la franchise & la gaîté de la veuve, lui confient le secret de leur position ; & elle se détermine aussi-tôt à les protéger auprès du tuteur. Après de très-vifs reproches de ce qu'il l'a compromise en la proposant à un homme marié, elle déclare qu'elle va lui intenter un procès en réparation d’honneur. Cette menace l'effraie : il pardonne à sa pupille & à son neveu ; & la veuve, pour le récompenser de cette bonne action, lui accorde sa main.
Cette bagatelle, qui a obtenu des applaudissemens, est de M. Desforges. Il y a tout lieu de présumer qu'il s’est amusé à la crayonner, pour se délasser d'ouvrages plus importans, & capables de soutenir la réputation qu'il s'est acquise par sa comédie de la Femme jalouse.
Mercure universel, tome 8, n° 227 du jeudi 13 octobre 1791, p. 191 :
[Remarque préliminaire : le critique ne sait pas que la pièce a été jouée au Théâtre Italien du 17 novembre 1789 au 21 janvier 1790, soit six représentations. Ce n'est donc pas une nouveauté. Sinon, il trouve que c'est une comédie à succès que l'auteur dont le nom est donné peut avouer « sans nuire à sa réputation, mais sans l’augmenter », jolie formule pour en suggérer le peu d'importance. Le résumé de l'intrigue confirme la légèreté de la pièce : un tuteur qui veut épouser sa pupille, ce n'est guère neuf en effet. Et le procédé employé par l'auteur, mettre son neveu dans la confidence pour qu'il l'aide à épouser la pupille se heurte à une 1égère impossibilité, le mariage du neveu avec la pupille. Le tuteur avait prévu de récompenser son neveu en lui faisant épouser une veuve un peu âgée, mais agréable (ce n'est pas incompatible, semble-t-il). C'est lui qui va se rabattre sur ce lot de consolation. L'intrigue n'est pas le point fort de la pièce, mais le critique souligne sa grande qualité : ni valet, ni soubrette, « si usés au théâtre ». Sinon, des qualités et des défauts : du bavardage, des saillies à la limite du convenable, un caractère de femme assez neuf (la veuve ou la, pupille ?), un dénouement sans surprise et un peu de morale (le critique laisse le choix du classement à son lecteur). Dernière notation : « l’auteur a fait quelque chose avec rien » (est-du bien ou du mal ,). L'actrice jouant le rôle de la veuve, sous l'apparence d'un compliment (un rire naturel) est accusée « d'avoisiner le trivial ».]
Theatre de Mademoiselle Montensier.
Le Tuteur célibataire, comédie en 1 acte et en vers, donné hier avec succès est de M. Desforges, auteur de la femme jalouse, et cette production a pu échapper de sa plume, sans nuire à sa réputation , mais sans l’augmenter.
Un tuteur déjà sur le retour forme le projet d’épouser sa pupille, (cette donnée n’est rien moins que neuve), il en fait la confidence à son neveu, qu’il prie de le servir auprès de sa pupille ; mais reconnaissant de ce bon office, il veut l’en récompenser en lui donnant une veuve enjouée, vive, et sémillante, dont l’heureux caractère fait oublier les torts de 1'âge mur [sic]. Le projet semble bien concerté, cette double union doit les rendre tous heureux : il ne se rencontre qu’une petite difficulté, c’est que le neveu est marié depuis 2 ans avec la pupille ; ce qui force le tuteur à se contenter de sa veuve.
Cette jolie comédie a l’avantage d’être préservée de valets et de soubrettes, qui sont maintenant si usés au théâtre. Un style qui tient quelquefois du parlage des saillies plus libres que gaies, un caractère de femme presque neuf et piquant, un dénouement trop prévu, quelques idées de morale ; voilà le bien et le mal que nous pensons de cette comédie, dont l’auteur a fait quelque chose avec rien.
Mad. Vazel a prouvé dans le rôle de veuve qu’elle savoit rire naturellement ; peut-être sa gaieté ne tient pas assez de la bonne compagnie, pour ne pas être soupçonnée d avoisiner le trivial.
D’après la base César, la pièce de Desforges a été jouée 6 fois au Théâtre Italien, du 17 novembre 1789 au 21 janvier 1790. Elle a ensuite été reprise au Théâtre Montansier, du 12 octobre 1791 au 8 mai 1793 (18 représentations) et le 10 septembre 1793 au Théâtre National (Richelieu).
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