Théodose le jeune

Théodose le jeune, comédie héroïque en cinq actes & en vers libres, d'Honoré Riouffe, 7 novembre 1791.

Théâtre du Marais.

Titre :

Théodose le jeune

Genre

drame héroïque

Nombre d'actes :

5

Vers / prose

en vers libres

Musique :

non

Date de création :

7 novembre 1791

Théâtre :

Théâtre du Marais

Auteur(s) des paroles :

 

L’Esprit des journaux français et étrangers, 1792, volume 1 (janvier 1792), p. 352-354 :

[Comme le critique n’a, semble-t-il, pas grand chose à dire de la pièce, il parle des personnages historiques qu’elle met en scène, et déverse sur eux une érudition minutieuse. De la pièce, on sait seulement qu’elle comporte « 5 actes très-longs & assez froids », que « l'auteur a su profiter adroitement de quelques traits de cet empereur, dont le grand défaut étoit de signer tout ce qu'on lui présentoit » (mais on ne sait si c’est ce qu’on voit dans la pièce...), qu’elle rappelle une pièce de Regnard, et qu’« elle est cependant versifiée avec beaucoup de pureté & de facilité » (quel sens donner à ce « cependant »?). Une petite phrase positive sur l’interprétation.]

Le lundi 7 novembre, on a donné la premiere représentation de Théodose le jeune , comédie héroïque en cinq actes & en vers libres.

Voici le trait d'histoire qui sert de base à cet ouvrage. Théodose II, empereur d'orient, frere de Ste. Pulchérie, & à qui nous devons le Code, dit Théodosien, cherchoit par-t»ut une épouse qui pût faire son bonheur, & en même tems celui de ses peuples, lorsqu'il arriva à Constantinople une jeune personne remplie de graces, d'esprit & d'érudition : Athénaïs, c'étoit son nom, étoit fille de Léonce, philosophe athénien, qui l’avoit déshéritée pour faire la fortune de ses freres. Athénaïs, après la mort de son pere, vouloit rentrer dans tous ses biens, que ses freres lui contestoient : elle venoit porter ses plaintes à Pulchérìe, sœur de Théodose. Cette princesse, étonnée de son esprit, autant que charmée de sa beauté, la fit épouser à son frere, l'an 421. Les freres d'Athénaïs, instruits de sa fortune, se cacherent pour échapper à sa vengeance ; mais Athénaïs les fit chercher pour les élever aux premieres dignités de l'empire ; générosité qui rend sa mémoire plus chere aux ames bienfaisantes, que remarquable par l'élévation de sa fortune. Après son mariage, elle reçut le baptême, & se fit nommer Eudoxie, ou Eudocie : son trône fut toujours environné de savans, & elle composa elle-même plusieurs ouvrages. Photius cite d'elle, avec éloge, une traduction, en vers hexametres, des huit premiers livres de l'Ecriture. On attribue encore à cette princesse, un ouvrage appellé le Centon d'Homere, qu'on trouve dans la bibliotheque des peres. Du Cange pense que cet écrit est tout ce qui nous reste de ses ouvrages ; mais la plupart des critiques conviennent qu'il n'est ni d'elle, ni digne d'elle. Ceux qui voudront connoitre plus particuliérement cette princesse, peuvent consulter Villeford, qui a écrit sa vie. M. d'Arnaud a fait, sur le même sujet, une Nouvelle intitulée Eudoxie.

C'est ce mariage d'Eudoxie avec Théodose, qu'on nous a présenté dans 5 actes très-longs & assez froids. L'auteur a su profiter adroitement de quelques traits de cet empereur, dont le grand défaut étoit de signer tout ce qu'on lui présentoit, sans même prendre la peine de le lire ; défaut dont Ste. Pulchérie le corrigea, en lui présentant à signer un acte par lequel il abandonnoit l'impératrice sa femme, pour être esclave. Lorsque Pulchérie lui eut fait connoître ce qu'il venoit de signer si aveuglément, Théodose en devint si confus, qu'il ne retomba jamais depuis dans la même faute.

Quoi qu'il en soit, cette piece a une certaine physionomie avec le Démocrite de Régnard ; elle est cependant versifiée avec beaucoup de pureté & de facilité ; mais il y a trop de longueurs, & l'intérêt y est trop divisé.. La piece a été fort bien jouée.

Journal de la cour et de la ville, tome 6, année 1791, n° 9 du mercredi 9 novembre, p. 68-69 :

[Dans ce journal aux sympathies royalistes affirmées, la pièce, attribuée à M. Riouf, qui met en scène la cour d’un empereur byzantin est jugée sévèrement, avec une ironie marquée : la froideur de la pièce, jugée supérieure à tout ce qu’on connaissait a été dument mesurée avec un thermomètre de Réaumur. Elle appartient d’ailleurs au « genre le plus détestable » après le drame, c’est une comédie héroïque. L’intrigue réfrigérante est assez vite résumée : un ministre de Théodose, qualifié de « sans-culotte » réussit à force d’intrigue à épouser la sœur de l’empereur qui, lui-même voudrait épouser la sœur de son ministre. Mais cette dernière lui tient des discours savants pleins de références antiques, pleins de la meilleur morale à l’image des principes de Madame de Sillery (madame de Genlis) pour lui prouver qu’elle ne peut l'aimer. Mais elle l’épouse quand même « au grand contentement de tout le monde » : il fallait bien que la pièce finisse... Le critique règle ensuite un certain nombre de comptes avec la pièce : elle montre un empereur indécis qui signe tout ce qu’on veut, ce qui serait une allusion à l’attitude du roi en ces années de révolution ; elle est écrite en un très mauvais français (pleine de barbarismes et de solécismes) ; elle est d’un ennui sans limite ; et l’acteur principal joue plutôt mal, moins bien en tout cas que sa femme. Une petite pique contre M. Parisot, qui pourrait bien être Jean Nicolas Jacques Parisot, député à la Constituante, clôt un article où l’hostilité aux idées que la pièce véhicule est claire. Même l'histoire de Byzance est riche d'enseignement pour les révolutionnaires, et pour leurs adversaires. Même l'histoire de Byzance est riche d'enseignement pour les révolutionnaires, et pour leurs adversaires.]

Théâtre du Marais.

Après le drame, nous ne connoissons pas de genre plus détestable que la comédie héroïque ; cette vérité, démontrée par mille et une chûtes, n'a point du tout effrayé M, Riouf, qui a conspiré d'une manière bien glaciale contre le public, dans une pièce de sa composition, intitulée : Théodose le Jeune, et donnée pour la première fois, lundi dernier, sur le théâtre du Marais. Un physicien qui avoit apporté avec lui un petit thermomètre de Réaumur, nous a assuré en sortant, que de mémoire d'homme, et dans les hivers les plus rigoureux, le froid n'étoit jamais monté à un si haut degré qu'à cette représentation. Effectivement depuis Don Sanche d'Arragon jusqu'à Isabelle de Salisbury, de M. d'Eglantines, nous n'avons pas encore vu de pièce d'une température plus froide ; nous allons cependant tâcher de pénétrer à travers les frimats poétiques de l'écrivain, pour en extraire une façon d'intrigue qui donnoit à sa pièce un ton si rafraîchi,

Un sans-culotte, à l'ombre du nom de Narsès, devient. ministre de l'empereur Théodose ; à force d'intrigues, il échappe à la corde, et finit par épouser une demoiselle Pulchérie, soeur du despotisme de Bizance, Un empereur, passablement fainéant, tombe amoureux d'une jeune Grecque qui se trouve sœur de Narsès ; la jeune personne, qui a été élevée dans les principes de madame de Sillery, débite à son auguste amant une superbe morale ; elle commente tranquillement Sénèque, donne un supplément au traité de l'amitié de Ciceron, et finit par citer Homère, pour lui prouver qu'elle ne peut pas l'aimer. Cependant la pièce finit, au grand contentement de tout le monde, par le mariage.

Nous ne parlerons pas des bénignes allusions qu'on a faites, lorsque l'empereur signe, de confiance, ce qu'on lui présente ; des Jacobins ont prétendu que ceci avoit trait à l'acceptation de la constitution ; nous ne parlerons pas, non plus, des sollécismes et barbarismes dont cette pièce est remplie ; nous pardonnons volontiers à l'auteur de ne pas connoître sa langue, mais non pas la dose copieuse d'ennui qu'il nous a forcé de dévorer. M. Baptiste, qui a beaucoup de talent, n'étoit pas merveilleux dans le rôle de Narsės ; nous avons été un peu plus content de sa femme, On accusoit hautement au foyer, M. Parisot, l'auteur de la feuille du jour, d'avoir trempé dans cette pièce, Nous présumons que c'est une calomnie.

César : la pièce est donnée comme d'auteur inconnu, et la base ne connaît qu'une représentation, la première.Le Journal de la cour et de la ville l’attribue à Honoré Riouffe, attribution que suit André Tissier dans les Spectacles à Paris pendant la Révolution, tome 1, p. 264.

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