Les Usuriers

Les Usuriers, vaudeville en un acte, de Domillier de Thésigny et Maurice Séguier, 3 brumaire an 11 [25 octobre 1802].

Théâtre du Vaudeville

Titre :

Usuriers (les)

Genre

vaudeville

Nombre d'actes :

1

Vers / prose

prose, avec couplets en vers

Musique :

vaudevilles

Date de création :

3 brumaire an 11 (25 octobre 1802)

Théâtre :

Théâtre du Vaudeville

Auteur(s) des paroles :

François-Denis Domillier de Thésigny et à Maurice Séguier

Almanach des Muses 1804

Courrier des spectacles, n° 2059 du 4 brumaire an 11 [26 octobre 1802], p 2 :

[Le compte rendu commence par un petit traité de l’art d’éviter les chutes à l'usage des hommes de théâtre : il suffit de ne pas exagérer les applaudissements, pour éviter de déchaîner les sifflets. Et c’est la méthode employée pou éviter le naufrage des Usuriers joués la veille. C’est une pièce « fort au-dessous du médiocre », mais le public ra supporté « des scènes éternelles, un dialogue froid, rien de piquant ni dans les pensées, ni dans la manière de les rendre, une certaine puérilité dans la contexture de l’ouvrage », dans l’espoir vain d’entendre de bons couplets (ce pourquoi on vient au Vaudeville, finalement). Le résumé de l’intrigue qui suit n’est guère enthousiasmant : une histoire de mariage rendu impossible par l'abandon par le futur marié de la maison à laquelle son oncle tenait tant. Mais il sait apitoyer les usuriers, qui ont intérêt à ce qu’il ne meure pas (je ne sais pas pourquoi), et ils lui rendent sa maison, si bien qu’il peut se marier. Si la pièce n’a pas échoué (le critique ne va pas jusqu’à dire quelle a réussi !), elle le doit aux acteurs, et en particulier à Hypolite qui sait si bien imiter l’accent juif d’un usurier, mais dont le langage n’était pas en accord avec la façon caricaturale dont il a joué son rôle.]

Théâtre du Vaudeville.

Applaudir vivement une mauvaise pièce, c’est provoquer les sifflets. Le-moyen de les épargner à l’auteur c’est de laisser aller tout doucement son ouvrage jusqu’à la fin. Alors la toile se baisse tranquillement, et deux ou trois personnes se chargent de manifester l’opinion générale : elles s’appaisent bientôt en n’éprouvant pas d’opposition. C’est ce qui arriva hier à la première représentation des Usuriers.

Ce vaudeville, dont l’auteur n’a point été demandé, nous a paru fort au-dessous du médiocre. Il n’a cependant point excité de vifs murmures. L’espoir toujours déçu, d’entendre quelques couplets saillans a soutenu l’attention jusques à la fin. Des scènes éternelles, un dialogue froid, rien de piquant ni dans les pensées, ni dans la manière de les rendre, une certaine puérilité dans la contexture de l’ouvrage auroient pu lui attirer une chute plus marquée ; nous félicitons l’auteur de l’indulgence du public.

Lord Sydney croit que Berton et Evelina, sa nièce, ont péri dans un naufrage. La nouvelle de la mort de cette amante chérie a porté dans le cœur du lord un entier découragement. Sa santé en est affoiblie, et il a perdu jusqu’à la faculté de soigner sa fortune.

Des usuriers ont profité de sa foiblesse et se sont fait céder à vil prix la jouissance de la totalité de ses biens, dont il n’a pas la propriété et sur lesquels ils lui font une modique pension.

Evelina n’a point péri, elle revient avec sou oncle. Ce retour rend la santé à Sydney, mais il n’a plus ni terre, ni maison de campagne, ni maison de ville. C’est sur-tout la perte de cette dernière qui excite le mécontentement de Berton. Il l’aimoit par prédilection, déjà il en avoit (on ne sait à quel titre) changé trois fois les distributions, et il se promettoit d’avance de la bouleverser de nouveau. Trompé dans son attente, il rompt avec Sidney, et veut partir le jour même avec sa nièce.

Le jeune lord forme le projet de retirer cette maison des mains des usuriers. En conséquence, il feint devant eux d’être réduit au plus grand désespoir par la perte de ses biens, et de vouloir terminer ses jours. Des pistolets chargés sont devant lui : assis sur un canapé il fait plusieurs fois semblant de se disposer à se brûler la cervelle. Chaque geste porte les usuriers, si intéressés à la conservation de ses jours, à lui faire des propositions. Dans un délire simulé il nomme sa maison. Aussi-tôt on lui en propose la restitution , il l'accepte ; et après la sortie de ces messieurs qui vont en faire dresser l’acte, il a sur ce sujet une explication avec Berton. Celui-ci a beaucoup de peine à croire une [sic] pareil miracle ; mais bientôt convaincu par l’exhibition du titre, il consent à donner la main de sa nièce.

Les acteurs ont soigné cette représentation et n’ont rien négligé pour assurer le succès de l’ouvrage. Le citoyen Hypolite a bien saisi l’accent juif, et auroit excité le rire si le personnage avoit par son langage secondé la carricature qu’il lui a donnée.

Magasin encyclopédique, ou journal des sciences, des lettres et des arts, 8e année (an 11 – 1802), tome 3, p. 404 :

[La critique porte essentiellement sur des questions de morale, parce que le spectacle montré est jugé intolérable (on ne peut pas montrer au théâtre un homme en train de se suicider, même si le personnage est un simulateur), et que le mélange de lugubre et de plaisanteries l’est tout autant.]

THÉATRE DU VAUDEVILLE.

Les Usuriers.

Ce vaudeville a été joué le lundi 3 brumaire.

Il est inconcevable que l’on ait reçu et joué une pièce dont la scène principale est celle où un jeune fou, qui a engagé tous ses revenus à des usuriers, feint de vouloir se brûler la cervelle pour les attendrir, et recouvrer sa fortune. Le jeu de l’acteur, qui met le canon du pistolet dans sa bouche, achève de révolter les spectateurs. Une telle scène est entremêlée de couplets où l’on plaisante gaiement sur les images les plus lugubres. Et cet ouvrage a été joué au Vaudeville ! et on le rejoue encore malgré les sifflets !

T. D.          

L’Annuaire nécrologique d’A. Mahul, année 1825 (Paris, décembre 1826), p. 290, attribue cette œuvre à François-Denis Domillier de Thésigny et à Maurice Séguier et dit qu’elle n’a pas été imprimée.

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