Le Valet philosophe

Le Valet philosophe, comédie en prose, en trois actes, publié chez les marchands de nouveautés, an 13 (1805). Attribué au Marquis de La Maisonfort.

Sur la page de titre de la brochure, à Paris, chez les Marchands de Nouveautés, an 13. – 1805 :

Le Valet philosophe, comédie En Prose, en trois Actes.

« Les conséquences des sentiments de ces philosophes mènent non-seulement aux plus grandes absurdités, mais elles renversent aussi tous les fondements de la société. »

Euler, 2.e vol. Lett. 117.e éd. de Petersbourg, 1768.

Le texte de la pièce est précédé d'une préface :

[Comme tous les auteurs qui publient une pièce qui n'a pas été jouée, le Marquis de Maisonfort la dote d'une préface dans laquelle il défend sa pièce contre l'accusation de trop copier et de manquer d'originalité. Comme elle attaque les philosophes, il souligne qu'il n'a pas voulu défendre la religion contre les positions anti-chrétiennes des philosophes, parce que ce n'est pas à l'auteur de théâtre de défendre la religion. La pièce n'a pas été jouée. Si l'auteur (anonyme) n'a pas tenté de la proposer à un théâtre (il n'y en a que deux qui pouvaient éventuellement l'accueillir), c'est qu'il sait trop combien la scène est soumise à des pressions, de la cabale ou des gens de théâtre.]

PRÉFACE.

Voici une comédie qui aura surement plus de censeurs que de partisans. Dans l'intention de savoir ce qu'on en dirait, j'en ai fait circuler quelques exemplaires, avant de la rendre tout-à-fait publique. Quelques personnes en ont fait l'éloge, et d'autres la critique. C'est aux sentimens de celles-ci que je vais m'arrêter. Les uns prétendent que le sujet de ma pièce n'est pas neuf, qu'il a été traité dans la comédie des Philosophies. Cela est vrai ; mais si M. Palissot et moi avons eu le même but en vue ; nous n'avons certainement pas pris le même chemin pour y arriver. Mon Valet ne débite point non plus la même morale que le Valet philosophe du Seducteur. D'ailleurs le rôle de Zérones n'est qu'accessoire ; celui de Pasquin est le principal. D'autres critiques ont trouvé que Philaminte et Timon sont trop ouvertement bernés. Ils ignorent donc qu'il n'y a rien de plus crédule et de plus aisément dupe que les vieilles gens qui affichent le savoir et le bel esprit. S'ils avaient lu avec réflexion le Tartuffe et les Femmes savantes, ils auraient vu qu'Orgon et sa mère Madame Pernelle se laissent duper de la manière la plus grossière ; et que Philaminte et Bélise ont une admiration non moins extravagante pour Trissotin. Ces mêmes censeurs ajoutent qu'il est invraisemblable qu'Ariste consente à marier sa fille à Dorante qu'il ne connaît pas personnellement. Si ce sont là des invraisemblances, nos meilleures pièces en sont pleines, et n'en sont pas plus mauvaises ; parce que, dans le vrai, il est très-possible et même ordinaire, que des amants, qui craignent d'être traversés dans leurs amours, se voient à l'insu de leurs parents. Enfin, quelques-uns m'ont reproché de la froideur, tandis que d'autres louent principalement ma pièce à cause du vis comica qui s'y trouve, et qui, par la nature même du sujet, était si difficile à y mettre.

Mon dessein est en conséquence de profiter de ce que ces diverses critiques renferment de bon ; et de faire dans une seconde édition de ma comédie les changements dont elle peut être susceptible.

Au surplus, quel que soit le sort de ma pièce, on n'aura point à me reprocher d'être sorti des bornes de la décence qui convient à tout écrivain. On n'aura pas non plus à se plaindre que j'aie outré et dénaturé les principes de nos grands hommes : le plus souvent j'ai cité leurs ouvrages, afin qu'on puisse vérifier les passages que j'en extrais. Ce n'est pas que je les rapporte textuellement, le genre d'écrire que j'ai adopté ne le comporte guères ; ainsi j'en ai usé à leur égard, comme Messieurs Guenée, Barruel et autres, contre lesquels personne ne s'est inscrit en faux, me contentant de conserver le sens.

Je me suis scrupuleusement abstenu de parler de tout ce qui concerne la religion, quoique le sujet n'y entraînât. Cet objet auguste ne doit point trouver place dans une comédie. Laissons aux Châteaubriand, Bonald et Duvoisin l'honorable tâche, dont ils s'acquittent si bien, de venger le christianisme des sarcasmes et des calomnies de nos esprits forts. Un auteur dramatique doit se borner à ce qui intéresse la société et les mœurs : sa part est bien assez importante et assez glorieuse.

J'avais, pour atteindre le but que je me propose dans ma pièce, un moyen plus efficace, sans doute ; c'était de la faire jouer. Mais, outre que la cabale est encore trop puissante, quelles difficultés pour en venir là ! Des deux théâtres que j'aurais pu choisir, l'un est dirigé par un auteur fameux qui, à lui seul, vaut un répertoire ; il abonde en richesses : l'autre n'est pas d'un accès plus facile, sur-tout quand on n'a pas l'honneur d'être connu de Mesdames et de Messieurs les Artistes. J'aurais pu faire long-temps antichambre chez eux, avant de pouvoir obtenir une première audience ; car je connais le train de ce monde-là. Tout calculé, je m'en suis tenu à l'impression ; d'autant mieux que si ma comédie est goûtée du public, je pourrai la rendre propre à être représentée; et peut-être alors, (car que ne voit-on pas dans ce siècle de merveilles !) me trouverais-je, à mon tour, dans le cas de me faire aussi prier.

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