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Avis aux femmes

Avis aux Femmes ou le Mari colère, opéra en un acte, paroles de Guilbert de Pixerecourt, musique de Gaveaux ; 5 brumaire an 13 (27 octobre 1804).

Théâtre de l'Opéra-Comique.

Titre :

Avis aux femmes, ou le Mari colère

Genre

opéra-comique

Nombre d'actes :

1

Vers ou prose ,

en prose, avec des couplets en vers

Musique :

oui

Date de création :

5 brumaire an XIII (27 octobre 1804)

Théâtre :

Théâtre de l’Opéra-Comique national

Auteur(s) des paroles :

Guilbert Pixerécourt

Compositeur(s) :

Gaveaux

Almanach des Muses 1806.

Même sujet que l'Avis aux Maris et la Jeune Femme colère.

Du succès.

Sur la page de titre de la brochure :

Avis aux femmes, ou le mari colère, comédie en un acte et en prose, mêlé d'ariettes ; Paroles de R. C. Guilbert-Pixerécourt, Musique de P. Gaveaux. Représentée, pour la première fois à paris, sur le théâtre de l'Opéra-Comique national, le 5 brumaire an xiii. (27 octobre 1804.)

Courrier des spectacles, n° 2800 du 6 brumaire an 13 [28 octobre 1804], p. 2 :

L'Avis aux femmes, joué hier pour la première fois au même théâtre, est plutôt un avis aux maris ; c’est le même sujet que la Jeune Femme colère, et e succès a été aussi le même. Les auteurs sont MM, Pixérécourt pour les paroles et Gavcaux pour la musique Mad. Gavaudan s’est sur-tout distinguée par la grâce et la finesse de son jeu. L’ouvrage est conduit avec esprit et intérêt ; la musique est sage et élégante, sans profusion d’ornemens. On a voulu non seulement connoître, mais voir les auteurs, qui ont été amenés sur la scène.

Courrier des spectacles, n° 2801 du 7 brumaire an 13 [29 octobre 1804], p. 2-3 :

[Un fort long article, qui commence par dire que la pièce donne une leçon salutaire : elle apprend à guérir quelqu'un par le mal même dont il souffre, idée qu'on rencontre dans la Sparte antique et dans La Bruyère. C'est Madame de Genlis qui a servi d'inspiratrice comme souvent, et sa nouvelle du Mari instituteur a fourni à Pixerécourt un sujet qu'il n'avait plus qu'à habiller selon les besoins du théâtre. Mais sa malchance a été d'être devancé par Étienne, parce qu'il a dû se plier à toutes « les cérémonies d'usage » de l'Opéra-Comique, sources de lenteur, alors qu'Étienne, directeur du théâtre de l'Impératrice, pouvait monter rapidement sa propre pièce, la Femme colère, qui a réussi. Pixerécourt a choisi d'inverser le propos de madame de Genlis, et d'Étienne, et de faire du mari celui dont il faut calmer le tempérament colérique. Sinon, sa pièce ressemble beaucoup à celle de son rival. Le critique peut entreprendre le résumé de l'intrigue de Pixerécourt, la transformation conduite par son oncle et son domestique de la douce épouse en furie, dans le but de faire cesser le comportement emporté de son mari. L'actrice chargé de ce rôle a été parfaite pour peindre ses constants changements d'humeur. Le mari est tout surpris du brusque changement de celle qu'il tyrannisait en même temps que toute sa maison : c'est elle qui prend les décisions les plus arbitraires, chasse les domestiques, se querelle avec son mari. Et c'est l'oncle qui ramène la paix, en révélant au mari consterné que tout n'était qu'une machination destinée à lui faire prendre conscience de son propre tempérament : tout ce qu'a fait son épouse n'était qu'une ruse. Et bien sûr il promet de s'amender. Les deux pièces, d'Étienne et de Pixerécourt ont beaucoup de points communs, puissés à la même source. Il y a tout de même des différences, dans « la marche et les idées principales, mais surtout dans le style, celui d'Étienne montrant grâce, finesse et élégance, Pixerécourt étant plus proche de la bouffonnerie, en particulier grâce à un rôle de niais joué par un acteur que le critique compare à Brunet, comparaison très flatteuse. La pièce de Pixerécourt a réussi, quelques sifflets étant étouffés par les applaudissements. Elle a été très bien interprétée, par les acteurs, mais plus encore par madame Gavaudan. La musique enfin est jugée positivement, et le critique loue « une composition sage, spirituelle et élégante », sans « ornemens inutiles » (la musique d ethéâtre doit savoir rester à sa place !). Elle est de Gaveaux, à qui « elle fait beaucoup d'honneur ».]

Théâtre de l’Opéra-Comique.

L’avis aux Femmes. 1re. Représentation.

Ce sont les Lacédémoniens qui ont fourni les premiers l’idée de cette pièce. Quand ils montraient à leurs enfans des esclaves ivres, ils leur faisoient comprendre à merveille toute la difformité de l’ivresse. La Bruyère est, après les Lacédémoniens, le second inventeur de ce sujet : « Rien, dit-il, ne nous corrigerait plus promptement de nos défauts que si nous étions capables de les avouer et de les reconnoître dans les autres ; c’est dans cette juste distance, que nous paraissant tels qu’ils sont, ils se feraient haïr autant qu’ils le méritent. »

Je ne sais si Madame de Genlis a profité de cette idée de Labruyère, ou si elle a emprunté son sujet de Shakespear ; mais elle a eu au moins le mérite de développer cette pensée avec tout l’esprit et la grâce qui caractérisent ses productions. Son Mari instituteur a paru une si bonne fortune à nos jeunes auteurs qu'ils se sont hâtés de le mettre sur la scène. C’est un grand avantage de trouver un sujet tout fait, sur-tout quand il a été traité par Madame de Genlis ; il ne s'agit plus alors quel d’y couper des scènes, d’y tailler un dialogue, et de répandre un peu d’action sur les faits principaux,

M. Pixérécourt a le premier saisi l’occasion. Mais par malheur pour lui, il s’est adressé à un théâtre où les cérémonies d’usage ont retardé son admission. Tandis qu'il étoit occupé du soin de ses visites, qu’il rédigeoit ses pétitions, que l’on travailloit à la musique de son opéra, M Etienne le gagnoit de vitesse. Le directeur du théâtre de l’Impératrice est un homme singulièrement expéditif, il admet son monde sur-le-champ, on ne fait point anti-chambre chez lui ; si le candidat se présente bien, si sa physionomie est heureuse et son langage agréable, il est accueilli sans difficulté et sans cérémonie, et fait aussitôt partie de la famille. C’est ce qui-est arrivé à la jeune femme colère de M. Etienne. Nous avons dit à son sujet tout ce qu’elle méritoit, et les applaudissemens du public ont confirmé notre jugement.

M. Pixérécourt a pris une autre marche : il a voulu faire preuve de galanterie auprès du beau sexe. Ce n’est point à la femme, mais au mari qu’il a voulu donner le défaut de l’emportement et de la colère ; il a cru qu’il y aurait plus de mérite à réserver la victoire au sexe le plus foible. D’ailleurs sa fable est à-peu près la même que celle de la jeune Femme colère.

St.-Brix est un jeune homme plein d’aimables qualités, mais gâté par une mauvaise éducation : il est impatient, emporté, violent. Il vient d’épouser Laure, jeune personne dont la douceur et la bonté font le charme de toute sa famille ; pendant quelques jours il dissimule son mauvais caractère ; mais à peine son beau-père l’a-t-il laissé seul avec sa jeune épouse, qu’il ne se contraint plus ; sa violence qui éclate à chaque instant, effraie tous les gens de la maison. M. Dormont, oncle de Laure, apprend tous ces emportemens ; il se hâte d’arriver en l’absence de son frère pour arrêter le mal, s’il est possible. Laure, fidelle à ses devoirs et à sa bonté, avoit jusqu’à ce jour, caché les défauts de son mari, et se contentait de gémir sans se plaindre ; elle n’opposoit que la douceur et la patience à toutes les fureurs de son époux; mais son secret est trahi par un vieux domestique qui révèle tout à M. Dormont. Alors celui-ci forme le projet de tirer parti des bonnes qualités de Saint-Brix, pour le ramener à des mœurs plus douces ; il recommande à sa nièce de jouer l'emportement, de se livrer en apparence à des actes d’impatience et de colère, et de les opposer habilement à ceux de son mari. La jeune personne entre avec beaucoup d'adresse et d’esprit dans les vues de son oncle, et s’acquitte de son rôle .avec une. merveilleuse habileté.

Ce personnage a été rendu avec une grâce particulière par Mad Gavaudan, dont la jolie figure se prête, avec un charme singulier, aux passages très-rapides de la gaieté, de la tristesse, de la candeur et de la malignité. Saint-Brix, étonné de ce changement subit, en cherche bientôt la cause, et se trouve lui-même tout étonné d’apprendre de Germain, le plus vieux domestique de la maison, que sa jeune épouse est sujette à ces sortes d’accès d’humeur violente ; qu’elle n’a fait que se contraindre pendant quelques jours, et qu’en l’absence de son mari elle donne carrière à toute sa mauvaise humeur. Il lui annonce même qu’elle vient de chasser l’intendant, le valet-de-chambre, et deux ou trois autres domestiques de la maison. Laure justifie bientôt le récit de Germain par des violences simulées ; elle assure à sou mari qu’elle est bien aise de le voir furieux ; qu’elle s’étoit jusqu’alors gênée pour paroitre bonne, mais que désormais elle n’aura plus de ménagemens incommodes à garder. Tout cela est développé dans des scènes très-agréablement conçues ; il y en a une sur-tout qui a fait beaucoup de plaisir, c’est celle où Laure chante une romance dans laquelle est peint le caractère de son mari, l'impatience de Saint-Brix qui accompagne sa femme, ses efforts pour cacher son dépit, forment un tableau très-piquant. Enfin, après plusieurs crises où les époux se reprochent mutuellement leurs emportemens, et se promettent de se corriger, tout le mystère s’éclaircit. Dormont avoue à Saint-Brix que tout ce qu’il a vu n’est qu’un jeu, que sa femme n’a pas cessé d’être bonne, douce et patiente, comme elle l’étoit auparavant, et qu’elle n’a feint ces changemens de caractère que pour adoucir et changer celui de son époux s’il étoit possible. Saint-Brix, touché de la conduite et des soins de Laure et de son oncle, se jette à leurs pieds et promet de n’être plus colère.

Il y a comme ou voit, beaucoup de ressemblance entre l’ouvrage de M. Pixérécourt et celui de M. Etienne ; et il pouvoit y en avoir davantage, puisque ces auteurs ont puisé dans la même source. On voit néanmoins qu’il n'y a point eu de connivence. La marche et les idées principales ne sont pas les mêmes. Le style diffère encore davantage. M. Etienne s’est attaché à la grâce, à l’élégance, à la finesse. M. Pixérécourt a sacrifié davantage à cette gaîté franche et un peu bouffonne qni fait rire toutes les classes de spectateurs. Il a introduit un rôle de valet niais et maladroit, qui est joué avec une grande perfection par Lesage. C’est une espèce de Brunet, qui fait toutes les gaucheries, qui commet tous les quiproquo, et tous les coq-à-l'âne d’un véritable Jocrisse. Ce personnage conviendroit peut-être mieux à un théâtre subalterne, néanmoins il jette de la gaité sur l’ouvrage, et quand on a ri l’on est désarmé. Le succès de cet opéra a été complet, malgré un ou deux coups de sifflets réfractaires qui ont été étouffés par le bruit des applaudissemens. La pièce est très-bien jouée. Tous les acteurs sont choisis. Gavaudan, Chenard et Juliet y ont fait beaucoup de plaisir. Il est difficile de mieux chanter que Mad. Gavaudan ; on peut dire que cette jeune actrice s’est surpassée, et qu’elle a donné l’idée la plus heureuse de ses talens. C’est un témoignage que nous rendons à son mari et à elle, avec d’autant plus de plaisir que l’on ne peut point nous reprocher de les avoir flattés. La musique est d’une très-bonne facture. C’est une composition sage, spirituelle et élégante. L’auteur ne l’a point chargée d’ornemens inutiles, sa parure est aimable et gracieuse sans colifichets. Elle fait beaucoup d'honneur à M. Gaveaux.

Le Nouvel Esprit des journaux français et étrangers, tome III, frimaire an XIII [novembre 1804], p. 274-275 :

[Après la Jeune femme colère d'Étienne, l’Avis aux femmes, ou le Mari colère de Pixerécourt. La même pièce, avec inversion des rôles. Mais ce qui était convenable (ou presque) chez Étienne devient inacceptable chez Pixerécourt : une jeune épouse qui sait feindre des sentiments, même si c’est pour corriger son mari, voilà qui est dangereux, c’est le « vice radical de la pièce », mais il n’est pas le seul, puisque « les valets n'ont point avec leurs maîtres le ton convenable » et que « les emportemens des époux, leurs raccommodemens ne sont point dans la juste mesure ». Le critique en profite pour renvoyer Pixerécourt au théâtre de boulevard et au mélodrame où il obtient ses triomphes faciles : «  Quand on produit habituellement de grands effets, on ne peut s'astreindre à l'observance de si petites règles ». Reste à parler du travail du musicien, agréable, parce qu’on reconnaît la musique pour l’avoir déjà entendue (le critique ne dit pas qui il a pillé, lui-même ou d’autres) et de celui des acteurs, qui « ont très bien joué ».]

THÉATRE FEYDEAU.

Le Mari colère.

Pour avoir fait sa pièce plus vîte, M. Etienne ne l'a pas faite moins bien que son concurrent de l'Opéra-comique ; il lui est au contraire très-supérieur. Il a senti que Madame de Genlis était un guide sûr, s'est entièrement reposé sur elle de son succès, et en effet il a réussi. M. Pixerecourt a travaillé sa pièce davantage et a tout-à-fait gâté le conte. Il a aussi réussi, mais il ne le méritait guères. Ce n'est point la femme qui est colère dans sa pièce, c'est le mari ; et pour le corriger, la jeune femme feint d'après le conseil d'un oncle, d'avoir un caractère très-emporté. Cette permutation dans les deux rôles indique tout de suite une absence totale de gcût. On voit que ce qui était très-convenable dans le mari, ne l'est presque point du tout dans la femme, et doit allarmer tout-à-fait pour le bonheur du ménage. Il est en effet très-dangereux qu'au bout de quinze jours de mariage elle sache, pour le grand bonheur de son mari, feindre des sentimens qu'elle n'a pas. Ce vice radical de la pièce est accompagué de tous ceux qui peuvent provenir du défaut de tact. Les valets n'ont point avec leurs maîtres le ton convenable ; les emportemens des époux, leurs raccommodemens ne sont point dans la juste mesure. M. Pixerecourt, qui triomphe sur les boulevards, et qui fait pleurer trois fois la semaine tout le quartier forain, n'est point accoutumé au style qui convient à nos grands théâtres. Quand on produit habituellement de grands effets, on ne peut s'astreindre à l'observance de si petites règles.

La musique de M. Gavaux a paru d'autant plus agréable, qu'on s'est ressouvenu dans plus d'un passage de l'avoir déjà applaudie ailleurs. Les acteurs ont fort bien joué.

Dans son Théâtre choisi, tome I, Paris, 1841, p. LXIV, Pixerécourt donne les informations suivantes sur le destin de son opéra-comique : joué sur le Théâtre Favart le 27 octobre 1804, il a été imprimé chez Barba. Il a eu 54 représentations à paris, 164 en province, soit 218 au total.

D’après le Théâtre de l'Opéra-Comique Paris : répertoire 1762-1972, de Nicole Wild et David Charlton, le livret est inspiré d’un conte de madame de Genlis, le Mari instituteur (mais avec inversion des rôles respectifs du mari et de la femme) et l’ouvrage a été joué jusqu’en 1810 à la salle Favart.

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