Chaulieu à Fontenay

Chaulieu à Fontenay, vaudeville en un acte, en prose, de Ségur jeune et Philippon-Lamadelaine, 14 fructidor an 7 [31 août 1799].

Théâtre du Vaudeville.

Titre :

Chaulieu à Fontenay

Genre

comédie mêlée de vaudevilles

Nombre d'actes :

1

Vers / prose ?

en prose, avec des couplets en vers

Musique :

vaudevilles

Date de création :

14 fructidor an 7 [31 août 1799]

Théâtre :

Théâtre du Vaudeville

Auteur(s) des paroles :

Ségur jeune et Philippon-Lamadelaine

Sur la page de titre de la brochure, à Paris, chez le Libraire au Théâtre du Vaudeville, an VIII :

Chaulieu à Fontenay, comédie en un acte, en prose, mêlée de vaudevilles, Par les CC. Philipon-la-Madelaine et Ségur jeune. Représentée, pour la prmeière fois, sur le Théâtre du Vaudeville, le 14 fructidor an 7.

Courrier des spectacles, n° 922 du 15 fructidor an 7 [1er septembre 1799, p. 2 :

[La pièce ressuscite d'illustres personnages du temps de Louis XIV (il faudra veiller à respecter les costumes du temps, d'après le critique : ce n'est pas si simple d'après lui). Les deux auteurs ont réussi à faire d'une anecdote qu'on peut juger futile « un ouvrage charmant », dont les couplets sont remarquables. L'article détaille avec précision cette historie de baiser volé à Chaulieu par son ami, qui veut se réconcilier avec Chaulieu, et qui le fait d'une étrange manière : il se déguise en femme et se fait passer pour une jeune fille que Chaulieu a fait venir. Il réussit à obtenir ce qu'il avait parié, recevoir un baiser de Chaulieu. Les amis se réconcilient. Les interprètes sont énumérés et félicités.]

Théâtre du Vaudeville.

Les auteurs du Vaudeville viennent d’ajouter un nouveau portrait à ceux qu’ils ont successivement offerts des hommes célèbres dont la France s’honore. Les grâces inimitables qui règnent dans les poësies de Chaulieu, le rendoieut très-difficile à présenter dignement sur la scène. L’habillement du siècle de Louis XIV, qu’il étoit indispensable de conserver, et qui semble très-peu favorable au genre du vaudeville, offroit une nouvelle difficulté : le cit. Ségur jeune, auteur des Deux Veuves, et le cit. Philippon-de-la-Madeleine, non seulement ont surmonté ces obstacles, mais ont fait un ouvrage charmant sous le titre de Chaulieu à Fontenay, qui fut reçu hier avec enthousiasme. Plusieurs couplets ont été redemandés, et les meilleurs étoient d'autant plus difficiles à distinguer, qu’il n’en est pas dans cette pièce que l’on n’ait du plaisir à entendre.

Les paysans de Fontenay préparent une fête à l’occasion de la convalescence de Chaulieu. Ses amis, M. de la Fare et Mad. de Lassé, veulent y prendre part. Le chevalier de Bouillon lui-même, à qui Chaulieu en veut beaucoup pour avoir répandu une épigramme dont il est l’auteur et qui lui a fait perdre les bonnes grâces du Ministre, le chevalier de Bouillon parie que la soirée ne se passera pas sans que Chaulieu ne l’ait embrassé. Cet aimable vieillard, pendant qu’on s’empresse de le fêter, s’occupe lui-même du bonheur de ceux qui l’entourent. Indépendamment du mariage d’Ambroise, son jardinier, avec sa servante, il veut faire celui de Rose, nièce de cette dernière, avec le fils de son Tabellion.

Ambroise a été chargé d’aller chercher la jeune Rose, qui demeure chez M. de Malezieu ; mais comme on ignore le projet de Chaulieu, chacun l’interprète à sa manière : tandis que la bonne servante s’imagine qu’on veut donner sa place à une autre, M. de la Fare et Mad. de Lassé supposent une foiblesse à leur ami ; pour le chevalier de Bouillon, il n’y trouve qu’une occasion de se divertir, et court prendre les habits d’une jeune paysanne. II revient bientôt sous ce déguisement, est très bien reçu de Chaulieu, assez mal de la servant , à qui il a soin de cacher sa figure.

La fête a lieu : le moment arrive où Chaulieu doit découvrir la raison qu’il a eue de faire venir une jeune fille. Il apprend à sa servante que c'est sa nièce Rose qu’il veut marier au fils du Tabellion, en lui donnant une dot de 1,000 francs, et lui dit de l’embrasser. La prétendue Rose engage Chaulieu à donner l’exemple ; il y consent, et le chevalier de bouillon ayant ainsi gagné son pari, court reprendre ses habita et reparoît devant son ancien ami, qui oublia volontiers ses torts.

Les principaux rôles de ce joli vaudeville sont très-agréablement joués par le cit. Vertpré, qui remplit celui de Chaulieu, et par les citoyens Henry, Duchaume, et les cit. Sara-Lescot et Duchaume.

Magasin encyclopédique, ou journal des sciences, des lettres et des arts, 5e année, 1799, tome III, p. 252-253 :

[Vaudeville consacré à un nouveau personnage célèbre (c’est très fréquent), avec une intrigue qualifiée de simple (on peut avoir un autre avis). L’analyse de la pièce s’achève sur des compliments : « de très-jolis couplets, de l'esprit véritable, et point de calembours » (les calembours ne sont pas toujours appréciés dans les comptes rendus !). Deux remarques pour finir, l’une sur l’interprétation, remarquable, et sur les costumes, à la fois « exacts et brillans » (deux qualités fondamentales, apparemment).]

THÉATRE DU VAUDEVI LLE.

Chaulieu à Fontenay.

Les auteurs du Vaudeville viennent d'ajouter Chaulieu à la galerie d'hommes célèbres dont ils ont tracé les portraits. La première représentation de Chaulieu à Fontenay a été donnée le 14 fructidor. L'action est simple: Chaulieu relève de maladie; il marie sa vieille gouvernante à son jardinier, et les paysans du lieu veulent célébrer sa convalescence, par une petite fête à laquelle doivent assister La Fare, son ami, et M.me de Lassé. Le jeune chevalier de Bouillon, voudroit saisir cette occasion pour se raccommoder avec Chaulieu, qu'il a indisposé contre lui, pour avoir eu l'imprudence de publier une épigramme que celui-ci avoit faite contre le ministre.
Chaulieu a donné des ordres secrets à son jardinier pour recevoir
Rose, nièce de sa gouvernante, qu'il veut marier au fils du tabellion, et que lui envoie son ami Malezieu. Le chevalier de Bouillon le sait et en profite ; il parie avec La Fare que Chaulieu l'embrassera le jour même. Il s'affuble d'habits de femme, et se présente à Chaulieu, qui dit à sa vieille gouvernante d'embrasser sa nièce. La prétendue Rose prie Chaulieu de lui donner l'exemple ; Chaulieu l'embrasse, et le chevalier se sauve en criant : J'ai gagné mon pari. Chaulieu apprend la petite ruse du chevalier et lui pardonne sa supercherie.

Telle est à peu près l'analyse de ce vaudeville, qui se distingue par de très-jolis couplets, de l'esprit véritable, et point de calembours. Les auteurs ont été demandés. Ce sont les CC. Ségur jeune et Philippon-la-Magdeleine.

Les rôles de Chaulieu, La Fare et Bouillon, ont été très-bien joués par les CC. Vertpré, Julien et Henri. Ce dernier a beaucoup amusé dans son déguisement en femme. La Ce Sara-Lescot a mis, dans le rôle de M.me de Lassé, toute l'aisance et la gaieté qui lui conviennent.

On a toujours remarqué que le théâtre du Vaudeville ne néglîgeoit rien du côté du costume. Ceux de cette pièce sont en même temps exacts et brillans.

L’Esprit des journaux français et étrangers, vingt-neuvième année, tome I, vendémiaire an 8 [septembre 1799], p. 218-220 :

[La pièce met en scène des personnages bien oubliés aujourd’hui, mais qui sont bien connus des spectateurs (ou au moins du critique). L’intrigue telle qu’elle est résumée est une anecdote assez mince qui finit heureusement (même si aucun mariage n’est explicitement signalé). Le jugement porte surtout sur la conformité des personnages à leur modèle historique, chacun est caractérisé par ce que le critique sait d’eux. Couplets « soignés & remplis de sel », dialogue « semé des traits les plus heureux ». reproche classique : des longueurs au début, faciles à éliminer : la pièce est assez riche en traits d’esprit pour qu’on puisse y faire des coupures dans ce qui n’est pas essentiel. Si les auteurs sont simplement cités, les acteurs ont droit à une mention plus favorable : ils ont joué « de la manière la plus satisfaisante ».]

THÉATRE DU VAUDEVILLE.

Chaulieu à Fontenai, opéra en un acte.

Le chevalier de Bouillon, élève & ami de Chaulieu, a eu le malheur de se brouiller pour une étourderie avec cet estimable & aimable Epicurien. Sûr de n'en être pas accueilli s'il se présente à lui brusquement, il profite d'une occasion favorable pour en approcher sans en être reconnu. Le bon Chaulieu, qui va marier sa vieille domestique à son vieux jardinier, a mandé pour la remplacer une jeune nièce de cette ancienne gouvernante ; mais Rose (c'est le nom de cette jeune fille) n'est pas encore arrivée, & le chevalier, enchanté de ce retard, se présente à sa place, revêtu d'habits féminins. Il a parié avec le marquis de Lafare, qu'il se feroit embrasser par l'abbé, & au moyen d'une petite fête villageoise, il n'a pas de peine à réussir. Enchanté de son succès, il fait éclater sa joie avec tant de pétulance, que Chaulieu, surpris, en demande la cause. On lui raconte le fait, & il s'en fâche d'abord un peu ; mais son cœur ne peut pas résister long-temps aux instances de l'amitié, & il pardonne à son jeune élève.

Tel est le fonds de cette jolie pièce, jouée sur ce théâtre avec le succès le plus brillant. L'auteur y a peint avec beaucoup de fidélité le caractère épicurien, mais bon & sensible du célèbre abbé de Chaulieu ; la galanterie fine & délicate du marquis de Lafare, & la légéreté bien française, c'est à dire bien séduisante, du jeune chevalier de Bouillon ; ses couplets sont en général soignés & remplis de sel, & son dialogue est semé des traits les plus heureux. Mais peut-être les scènes qui précèdent l'arrivée du principal personnage sont-elles un peu trop longues ? Nous croyons qu'il est facile d'y remédier en y supprimant quelques plaisanteries de remplissage qui n'ont pas toutes le mérite de l'application. Les nombreux traits d’esprit qui fourmillent dans cet ouvrage peuvent d’ailleurs se passer d'ombre au tableau.

On a demandé les auteurs ; ce sont les CC. Ségur jeune, & Philippon de la Magdelaine.

La pièce a été jouée de la manière la plus satisfaisante, par les CC. Verpré (Chaulieu), Henry (chevalier de Bouillon), Julien (Lafare), Duchaume (le jardinier), & par les citoyennes Duchaume & Sara-Lescaut.

Paris, pendant l’année 1799, volume XXIV, n° CXCI, publié le 31 octobre 1799, p. 155-156 :

[Le compte rendu s’ouvre par l’analyse de la pièce, puis un paragraphe est consacré aux qualités de la pièce. Il part de ce qu’on peut attendre de « ces sortes d'ouvrages », savoir « moins l’action » que la capacité de donner l’illusion qu’on est « réellement avec des personnages justement célebres » : c’est justement la grande qualité de la pièce dont il s’agit ici, ainsi que la qualité « des couplets et des idées » (les deux semblent inséparables : gaieté, fraîcheur et style ont été appréciés. Des exemples de couplets doivent en convaincre le lecteur. Une dernière phrase insiste sur la qualité de l’interprétation.]

THÉATRE DU VAUDEVILLE.

Chaulieu à Fontenay.

Les amis de Chaulieu, Lafare et Madame de Lassé, lui préparent une fête pour sa convalescence : de son côté, il veut embellir cette fête par le mariage d'une jeune fille, et il se dispose à envoyer chercher une certaine villageoise de 16 à 17 ans, nommée Rose, qu'il n'a jamais vue, mais qu'il sait être niece de Marie, sa gouvernante. Le mystere qu'il a mis à faire venir cette jeune paysanne, inquiette Marie et Madame de Lassé ; Lafare en plaisante, et le Chevalier de Bouillon, momentanément brouillé avec Chaulieu, imagine d'en faire le motif de son raccommodement. Il parie de se faire embrasser par Chaulieu. En effet,. il arrive sous les habits de Rose, sert Chaulieu sans en être reconnu, assiste à la fête, et au moment de recevoir la main d'un jardinier que lui propose l'aimable vieillard, demande que celui-ci veuille bien l'embrasser ; Chaulieu consent : Bouillon, qui a gagné sen pari, se découvre ; Chaulieu rit et pardonne.

Ce qui plaît assez ordinairement dans ces sortes d'ouvrages, c'est moins l'action en elle-même que la vérité locale à la faveur de laquelle on se croit réellement avec des personnages justement célebres ; et à cet égard les auteurs ont parfaitement réussi à nous faire illusion. Il est impossible de mettre plus de grâces, de fraîcheur et de style qu'il n'y en a dans la plupart des couplets et des idées : celles de Chaulieu s'y trouvent encadrées avec beaucoup d'autres qui ne les déparent pas ; aussi la piece a-t-elle été généralement goûtée : les auteurs, vivement demandés, sont les CC. Ségur l'aîné et Philippon la Magàeleine.

Voici un couplet chanté par Lafare à Chaulieu, qui a été applaudi avec transport, et qui le mérite et par la tournure et par le coloris :

Il n'est qu'un heureux systême,
C'est celui d'Anacréon :
Il s'enivre, il chante, il aime.
Tu suis sa douce leçon :
            J’apperçois
            A-la-fois
Sur ton front la fleur vermeille,
Sur ta levre la bouteille,
Et la lyre sous tes doigts.

On a fort applaudi également le couplet où Chaulieu parlant au Chevalier de Bouillon, saisit l'occasion de faire éloge de Turenne, et celui où prévoyant la gloire future du jeune Voltaire, il prédit que

    Melpomene cessera
De porter le deuil de Racine.

La piece est fort bien jouée par les CC. Vertpré, Henrî, Julien et Duchaume, ainsi que par les citoyennes Sara et Duchaume.

L’Opinion du parterre de 1810 signale p. 320 la reprise de la pièce le 22 septembre 1809. Elle n’est plus attribuée qu’à « Ségur le jeune ».

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