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Les Deux Suisses, ou l'Amour filial

Les Deux Suisses, ou l'Amour filial, comédie en un acte, mêlé d'ariettes, paroles de M. Demoustier, musique de Gaveaux, 7 mars 1792.

Théâtre de la rue Feydeau.

Titre :

Deux Suisses (les) ou l’Amour filial

Genre

comédie mêlée d’ariettes

Nombre d'actes :

1

Vers / prose

en prose, avec des couplets en vers

Musique :

ariettes

Date de création :

7 mars 1792

Théâtre :

Théâtre de la rue Feydeau

Auteur(s) des paroles :

M. Demoustier

Compositeur(s) :

M. Gaveaux

Mercure Français, n° 15 du 14 avril 1792, p. 54-55 :

[Avant de parler des nouveautés, d’ailleurs mineures, mais agréables, du Théâtre de la rue Feydeau, le critique prend acte de la prise de possession de ce théâtre par l’opéra français, c’est-à-dire l’opéra comique, au détriment de l’opéra italien (l’opéra buffa), dont la piètre qualité explique la désaffection du public. Les Deux Suisses racontent une jolie histoire sentimentale sans grande surprise, finie par le mariage attendu. Le nom de l’auteur suffit à en montrer les qualités d’écriture. La musique est également excellente, « juste au ton du sujet », et l’acteur qui joue l’unijambiste est félicité pour sa prestation.]

Le Théâtre de la rue Feydeau vient de donner deux Nouveautés peu importantes, mais agréables, & qui ont fait beaucoup de plaisir ; ce sont deux Opéras Français, genre qui ne devrait être qu’accessoire à ce Théâtre, & qui en devient le soutien principal. Il faut avouer que c’est avec quelque raison que l’Opéra Italien a cessé d’y briller. Le peu de soin qu’on met dans le choix des Nouveautés, l’abandon affect qu’on y remarque des Ouvrages des grands Maîtres, justifient pleinement la négligence du Public. Mais enfin parlons des Opéras Français, puisque ce sont les seuls qui y réussissent.

Le premier est intitulé les deux Suisses, ou la Piété filiale. Un vieux Militaire Suisse s’est retiré, avec son fils, dans un lieu où il a autrefois combattu vaillamment, & où un de ses amis a été blessé en lui sauvant la vie. Le pere & le fils apperçoivent une jeune fille qui s’est égarée en cherchant son pere. On la fait reposer. Bientôt les deux jeunes gens prennent beaucoup d’intérêt l’un pour l’autre. Le vieillard qui s’en apperçoit, & qui se prête même à faire durer long-temps leur tête à tête; charge son fils de remettre Louise dans son chemin. Ils reviennent bientôt avec Germont, le pere de Louise, qui a une jambe de bois. C’est justement cet ami, ce camarade du vieillard, qui a été blesé en le défendant. On sent bien que les deux enfans sont unis par leurs peres.

Cette Piece est de M. Demoustiez, Auteur d’Alceste à la campagne, du Conciliateur, &c. c’est dire assez qu’elle est écrite avec l’élégance la plus fleurie & la plus soutenue. La musique est de M. Gavaux, Acteur & Chanteur excellent de ce Théâtre ; elle est juste au ton du sujet, d’un chant fort agréable, & fait infinimment d’honneur à son goût. M. Julien joue très-plaisamment le personnage à la jambe de bois.

[La deuxième nouveauté du théâtre de la rue Feydeau, c’est Cadichon, ou les Bohémiennes.]

L’Esprit des journaux français et étrangers, 1792, volume 2 (février 1792), p. 315-317 :

[Le critique est très sensible à l’émotion qui émane de cette pièce pleine de bons sentiments : « fonds simple, mais touchant », « de charmans tableaux, un style touchant & soigné, & sur-tout une grande simplicité & beaucoup de sensibilité ». La musique, qui est de Gaveaux débutant, est elle aussi simple, « chantante & villageoise, elle a la couleur juste du sujet ». Interprétation remarquable : « un ensemble & un comique dignes des applaudissemens multipliés que le public donne à cette piece touchante ».]

On a donné, le mercredi 7 mari, les deux Suisses , ou l'Amour filial, comédie en un acte, mêlée d'ariettes, paroles de M. Dumoutier, musique de M. Gavaux.

Le fonds simple, mais touchant de cette jolie piece, est tiré d'un conte de Gessner, intitulé : la Jambe de bois. Arnaud, vieux suisse, a bâti une cabane dans la plaine de Nefeld, sur le lieu même où, 37 ans auparavant, il s'est trouvé à une bataille sanglante, & où un inconnu lui a sauvé la vie. Armand a un fils, Félix, qui l'aime, & lui jure que la tendresse seule peut suffire à son bonheur. Une jeune fille égarée, demande un abri à Armand ; elle a perdu son pere en route : ce pere, suisse aussi, & qui a une jambe de bois, a coutume, tous les ans, d'aller en pèlerinage à l'endroit où jadis il a signalé sa valeur. Louise est bientôt d'intelligence avec Félix : Armand, qui brûle de marier son fils, les laisse ensemble ; puis il ordonne à Félix d'accompagner Louise qui va chercher son pere, égaré sans doute aussi dans les montagnes. Enfin ce pere arrive seul : c'est Germon, c'est un ancien camarade d'Armand, c'est ce généreux inconnu qui lui a sauvé la vie, & à qui cette bonne action a coûté une jambe. Ces deux peres donnent un libre cours à leur reconnoissance ; puis on convient de bâtir une seconde cabane & d'unir les jeunes gens.

De charmans tableaux, un style touchant & soigné, & sur-tout une grande simplicité & beaucoup de sensibilité, voilà ce qui fait le mérite de ce joli ouvrage. La musique est le coup d'essai de M. Gavaux, acteur de ce théatre ; simple, chantante & villageoise, elle a la couleur juste du sujet : on y distingue sur-tout un excellent trio, & des romances d'un chant neuf & gracieux : il joue dans sa piece, ainsi que MM. Valliere, Julliet, & Mde. Scio, & tous les quatre y mettent un ensemble & un comique dignes des applaudissemens multipliés que le public donne à cette piece touchante, dont on fait toujours répéter les deux derniers couplets, que voici.

Louise & Félix, aux deux peres.

    Sous deux vénérable! ormeaux,
    Qui les couvrent de leur seuillage,
Deux rejetons â-peu-près du même âge
En 1'élevant, unissent leurs rameaux.
    A la tendresse conjugale
Vous prêtez votre ombre aujourd'hui !...
Vous trouverez quelque jour un appui
    Dans la piété filiale!

Louise, au public.

    De la vertu sans ornement,
    Il faut toujours peindre l'image :
Ne cherchez point d'esprit dans cet ouvrage,
Il n'est dicté que par le sentiment.
    Pour en pratiquer la morale,
Embrassez vos parens ce soir ;
Et, par amour, remplissez le devoir
    De la piété siliale!

D’après la base César, on trouve la pièce sous le titre de l'Amour filial, ou la Jambe de bois (on trouve aussi comme titre les deux Suisses, ou la Jambe de bois (par exemple dans la Biographie universelle, ancienne et moderne) et l’Amour filial, ou les deux Suisses. Les auteurs sont Charles-Albert Demoustier pour le texte, Pierre Gaveaux pour la musique. Très gros succès : la pièce est jouée 52 fois en 1792, 43 fois en 1793, 24 fois en 1794, 8 fois en 1795, 15 fois en 1796, 1 fois en 1797, 25 fois en 1798, 20 fois en 1799. Soit 188 représentations, presque toutes au théâtre Feydeau.

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