Les Epoux de trois jours, ou J’enlève ma femme

Les Époux de trois jours, ou J’enlève ma femme, vaudeville, d'Ourry et Moreau, 15 octobre 1810.

Théâtre du Vaudeville.

Titre :

Époux de trois jours (les), ou J’enlève ma femme

Genre

comédie mêlée de vaudevilles

Nombre d'actes :

2

Vers / prose

en prose, avec des couplets en vers

Musique :

vaudevilles

Date de création :

15 octobre 1810

Théâtre :

Théâtre du Vaudeville

Auteur(s) des paroles :

Ourry et Moreau

Sur la page de titre de la brochure, à Paris, chez Martinet, 1810 :

Les Epoux de trois jours, ou J’enlève ma femme, comédie en deux actes, en prose, mêlée de vaudevilles ; Par MM. Moreau et Ourry ; Représentée, pour la première fois, à Paris, sur le théâtre du Vaudeville, le 15 Octobre 1810.

L'esprit des journaux, français et étrangers, année 1810, tome XII (décembre), p. 290-294 :

[Compte rendu fort abondant, et qui donne une idée très précise de l'intrigue (on peut se demander si, après l’avoir lu il est encore utile de voir la pièce : il ne reste plus que les plaisanteries et les couplets à découvrir). Point de départ : la comparaison de la pièce nouvelle avec une autre, proche, mais bien sûr différente (un oncle remplacé par une tante, un départ des tourtereaux pour le château familial seuls dans un cas, accompagnés par la tante dans l’autre). La suite du compte rendu détaille les deux actes de la pièce avec minutie (on voit revenir régulièrement les plaisanteries sur le désir d’un des personnages de manger, sans cesse contrariés). Même les tractations qui aboutissent au dénouement sont expliquées avec clarté (ou presque). Ce dénouement est ce qui choque le plus le critique, qui le juge trop brusque et trop peu vraisemblable à ses yeux. Il propose donc une série de modifications qui le rendraient plus conforme à ce qu’on attend d’un vaudeville. Mais c’est « le seul [défaut] qui nous ait frappé dans ce joli ouvrage », dont il vante la gaieté. Les personnages secondaires dans chaque acte joue un rôle important dans cette gaieté. Si l’intrigue est un peu faible, « elle marche vivement », et la pièce a tous les cntharmes d’un bon vaudeville : « un dialogue rapide, naturel, semé de mots plaisans qui naissent des situations, entremêlé de couplets remplis de gaieté sans recherche et de sel sans méchanceté » (dans cette formule, chaque mot compte !). Il n’y aurait que quelques couplets à supprimer, pour une raison pas très explicite (« les mêmes idées » ?), et quelques traits de la caricature du parasite, eux aussi usés. Reste à régler le sort de la pièce : succès ou échec ? Le récit des incidents qui ont émaillé la première représentation montre qu’elle est passée très près de la chute, mais le critique réserve son jugement : il faut attendre que la pièce soit vue « par les vrais juges », c’est à dire ni les amis des auteurs, ni leurs ennemis.]

THÉATRE DU VAUDEVILLE.

Les Epoux de trois jours, ou J'enlève ma Femme, comédie-vaudeville en deux actes, de MM. Moreau et Ourry.

Nos lecteurs se souviennent sans doute de ces deux nouveaux mariés des deux Paravents, qui, excédés des complimens et des visites qu'ils étaient obligés de recevoir à Paris, demandèrent à un bon oncle qui avoit fait leur mariage la permission de se retirer en tête-à-tête dans un vieux château presqu'abandonné. On doit se souvenir aussi que l'oncle rusé se garda bien de repousser leur demande, qu'il se reposa sur l'ennui d'un tête-à-tête prolongé, du soin de lui ramener son neveu et sa nièce, et qu'il réussit au gré de ses vœux. Les jeunes époux de la pièce nouvelle, Adolphe et Victorine, se trouvent dans une situation à-peu-près semblable ; mais leur tante, Mme. de Vétilly, n'est pas à beaucoup près aussi adroite que l'oncle des deux Paravents. Elle consent, comme lui, à laisser partir les nouveaux mariés pour la campagne ; mais elle s'y rend avec eux : elle y amène un certain parasite gascon, nommé Famignac ; et, qui pis est, elle force Adolphe et Victorine à recevoir les visites du voisinage, aussi nombreuses et bien plus ennuyeuses que celles de Paris. On prévoit déjà l'effet d'une telle conduite. Adolphe a dix-huit ans, Victorine en a seize ; ce n'est pas l'âge où l'on aime beaucoup la vie des châteaux ; et nos deux étourdis s'échappent un beau matin de celui de leur tante, le mari en robe-de-chambre et la femme dans le plus grand négligé.

Après avoir fait près de deux lieues à travers champs, ils arrivent à un village et s'adressent précisément à la maison d'un M. Simon, maire et greffier de son endroit, et qui probablement aussi en est l'aubergiste. Un moment auparavant, Simon a reçu la visite du médecin en chef d'une maison de santé établie dans le voisinage et destinée au traitement des fous. Le docteur a prévenu M. le maire que deux de ses pensionnaires, un jeune homme et une jeune femme, viennent de s'évader. Simon est déjà sorti pour donner ses ordres en conséquence ; à son retour, il trouve chez lui Adolphe et Victorine ; il les prend pour les deux malades du docteur et les arrête. Mais, à son grand regret, le docteur revient, lui fait connaître sa méprise, et après avoir interrogé les jeunes voyageurs, les remet en liberté. Ils trouvent, en sortant de chez Simon, une diligence qui se rend à Paris, et les voilà en route pour la capitale, bien tranquilles sur toutes les recherches que pourra faire Mme. de Vétilly. A dix-huit ans, cette sécurité est bien excusable ; mais avec un peu plus d'expérience, nos fugitifs auraient pu se défier du malin docteur. Sous prétexte de leur rendre service, en les aidant à se bien cacher, il leur donne l'adresse d'un hôtel garni du Marais, et à peine Mme. de Vétilly arrive-t-elle au village, accompagnée de son cher Famignac, qu'il leur fait part de cette adresse, et aussitôt la tante et le Gascon se mettent en route, malgré les réclamations de ce dernier, qui est encore à jeun et n'aime point à voyager de cette manière.

Le second acte se passe à Paris, chez M. Guillemin, traiteur-aubergiste, rue du Pas-de-la-Mule, près la place des Vosges, à la Bête du Gévaudan. Adolphe et Victorine y sont d'abord fort bien reçus par une petite Cauchoise, filleule de M. Guillemin. Le parrain, qui les a vu arriver sans bagage, et qui aime à assurer ses paiemens, veut ensuite les faire déloger ; mais un peu d'or, montré fort à propos par Adolphe, change ses dispositions. Les jeunes mariés sont mis en possession de deux petites chambres, et pendant qu'on prépare leur dîner, ils s'amusent à écrire à leur tante et à dessiner. Bientôt la Cauchoise vient les avertir de l'arrivée de Mme. de Vétilly. Adolphe voit bien qu'il faudra se rendre, mais il ne veut pas que ce soit à la première sommation. Il se barricade ; la tante et Famignac paraissent dans la chambre voisine, et l'on commence à parlementer. Le Gascon, pressé de dîner, demande une trève ; Adolphe l'accorde, mais il exige que, pendant que sa tante dînera, Famignac reste pour traiter, en qualité de plénipotentiaire. Le Gascon trouve cet arrangement fort peu agréable. Pour le tourmenter encore, Adolphe, après l'avoir fait entrer chez lui, le force à mettre la capitulation par écrit, pendant qu'il dîne lui-même avec Victorine ; mais il le dédommage ensuite bien généreusement de ces petites contrariétés. Ce n'était pas seulement en qualité de parasite que Famignac faisait sa cour à Mme. de Vétilly ; il aspirait à obtenir des droits constans à sa table et à sa fortune en l'épousant ; et le géméreux Adolphe, après s'être assuré par sa capitulation la liberté de vivre chez sa tante à sa manière, stipule, par un dernier article, qu'elle épousera Famignac.

Il est fâcheux que ce dénouement soit aussi brusque et aussi peu vraisemblable. Où trouver un neveu qui, même à dix-huit ans, soit aussi empressé de remarier une tante riche, et de la remarier à un Gascon ? Il nous semble qu'il aurait mieux valu donner à Mme. de Vétilly, dont on a fait une fort bonne femme, un caractère impérieux ; que l'article de la capitulation, proposé par Adolphe en faveur de Famignac, n'eût été qu'un piége tendu à ce parasite ; que Mme. de Vétilly l'eût rejetté avec hauteur, et qu'en se réconciliant avec sa famille, elle eût chassé l'impudent Gascon. Quoi qu'il en soit, ce défaut est d'ailleurs le seul qui nous ait frappé dans ce joli ouvrage, où il règne, d'un bout à l'autre une franche gaieté. Le rôle du maire de village est très-comique. L'importance qu'il se donne, forme un contraste fort plaisant avec son ignorance et sa bêtise, et se déploie d'une manière très-piquante dans ses scènes avec sa femme et avec le médecin. Le détail des friponneries du traiteur, Guillemin, la naïveté de sa filleule, forment, au second acte, un épisode non moins amusant. L'intrigue principale n'est pas très-forte, mais elle marche vivement; et ce qui peut en faire oublier les invraisemblances, c'est un dialogue rapide, naturel, semé de mots plaisans qui naissent des situations, entremêlé de couplets remplis de gaieté sans recherche et de sel sans méchanceté. On désirerait seulement d'en voir supprimer quelques-uns qui roulent sur les mêmes idées, comme aussi de voir retrancher quelques traits du parasite, caricature qui n'est pas nouvelle et dont le public commence à se lasser.

Si l'on nous interroge maintenant sur le succès de cet ouvrage, il nous sera plus facile de nous expliquer sur le sort qu'il doit avoir aux prochaines représentations, que sur celui qu'on lui a fait à la première. Quoique le public impartial s'y amusât beaucoup et le témoignât par de fréquens éclats de rire, un sifflet. s'est fait entendre dans un moment où il n'y avait pas lieu de siffler. Les amis des auteurs ont voulu faire mettre les perturbateurs à la porte ; peu-à-peu la lutte s'est échauffée ; la faiblesse du dénouement a contribué peut-être à rendre neutre le véritable public ; et le tumulte est devenu si violent, qu'on n'a pu entendre les derniers couplets du vaudeville. Est-ce une chûte ? Est-ce un succès ? Nous croyons que ce n'est ni l'un, ni l'autre, car ce ne sont pas les vrais juges qui ont prononcé ; mais nous sommes persuadés qu'à leur tribunal les auteurs obtiendront un arrêt favorable.                   G.

Magasin encyclopédique, ou journal des sciences, des lettres et des arts, 15e année, 1810, tome V, p. 382-384 :

[Le résumé de l’intrigue, qui ouvre le compte rendu est un peu décousu. L’annonce du mariage de la tante est plutôt une surprise, signe que le résumé a omis quelques éléments utiles à la compréhension. Le compte rendu indique la source du sujet, qui « manque d’intrigue », défaut compensé par « un dialogue vif et des couplets agréables » (formules qu’on retrouve souvent dans les critiques). Il s’achève par un curieux récit des circonstances de la représentation, apparemment assez agitée, avant que (miraculeusement ?) le calme revienne pour cet instant capital qu’est la révélation du nom des auteurs.]

Les Epoux de trois jours, ou j'enlève ma Femme, vaudeville en deux actes, joué le 15 octobre.

Adolphe et Victorine, jeunes gens de 17 ans, sont mariés depuis trois jours. Ennuyé par des importuns qui l'empêchent de jouir du tête-à-tête avec sa femme, Adolphe l'enlève. Tous deux quittent le château de leur tante, et s'arrêtent dans un village où on les prend pour des fous échappés de Charenton ; on veut les traiter comme tels : mais ils en sont quittes pour la peur, et se rendent à Paris dans un hôtel garni du Marais. La tante les y trouve, fait sa paix avec eux, et se marie avec un gascon, parasite affamé.

Quelques chapitres d'un roman de Pigault-Lebrun ont fourni l'idée de la pièce. Elle manque d'intrigue: mais un dialogue vif et des couplets agréables l'ont soutenue. Une assez forte opposition paroissoit décidée à la faire tomber ; le parterre a été transformé un moment-en une arène ; le calme s'est rétabli à propos pour que l'on entendît nommer les auteurs, MM. OURRY et MOREAU.

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