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Hagar enfant de son père

Hagar enfant de son père, parodie en deux actes, mêlée de vaudevilles, d'Oscar fils d'Ossian, tragédie en cinq actes d'rnault, de Radet, Barré et Desfontaines, 4 messidor an 4  [22 juin 1796].

Théâtre du Vaudeville.

La pièce est parfois appelée Hagard fils de son père.

Titre

Hagard, enfant de son père

Genre

parodie

Nombre d'actes :

2

Vers / prose ?

en prose, avec des couplets en vers

Musique :

vaudevilles

Date de création :

4 messidor an 4 [22 juin 1796]

Théâtre :

Théâtre du Vaudeville

Auteur(s) des paroles :

Radet, Barré, Desfontaines

Almanach des Muses 1797 (qui donne comme titre Hagar, enfant de son père quand d'autres disent fils de son père).

De la gaîté sans amertume.

La Décade philosophique, littéraire et politique, an 5, IVe trimestre, n° 30 (30 Messidor an 5e, 18 Juillet 1797, vieux style), p. 179, donne comme auteurs Barré, Radet et Desfontaines.

Journal de Paris, n° 275 du 5 messidor an 4 [23 juin 1796 vieux style], p. 2-3 :

[Plutôt que de parler longuement de la parodie nouvelle, le critique s'attache à distinguer deux sortes de parodies, celles qui travestissent et celles qui critiquent. Autant celles qui travestissent sont considérées avec mépris, ridiculisant ce qui peut être « un bel ouvrage », autant celles qui critiquent sont un moyen de faire « ressortir les défauts d’une tragédie, les invraisemblances, les inconvenances » et jouent pour la tragédie le rôle que la comédie joue pour les ridicules de la société. La parodie d'Oscar s'est attaché à « relever les fautes » de la pièce sans la dénigrer : elle contient même des propos flatteurs pour son auteur. Petite question finale : quand l'acteur principal de la parodie imite si bien l'acteur principal de la pièce parodiée, faut-il y voir un hommage à l'acteur en question, le grand Talma, ou « un tour qu'il joue aux auteurs de la parodie » ? On ne sait pas grand chose sur la parodie nouvelle, mais les réflexions sur la parodie ne manquent pas de finesse.]

Théâtre du Vaudeville.

Hier, au théâtre du Vaudeville, on a joué avec succès Hagard, enfant de son père, parodie d'Oscar., fils d’Ossian.

Cette parodie, un peu trop longue, nous a paru d’un fort bon genre.

La médiocrité sur la scène tragique a trop décrié la bonne parodie, parce que la médiocrité envieuse a trop souvent produit la mauvaise, sur la scène comique.

Il me semble qu’on devroit distinguer deux espèces de parodies ; celle qui travestit, celle qui critique.

La parodie qui travestit le grand, le beau, le vrai tragique, qui mutile un bel ouvrage pour le traduire en ridicule, est méprisable. Elle est moins la parodie que l’abus de la parodie.Au reste, elle ne fait pas grand mal aux bons ouvrages. Ce n’est pas aux dépens de la pièce travestie que rit le spectateur, mais aux dépens des personnages qui en contrefont les sentimens ; & il n’y a rien de moins contradictoire que de rire de sentiments contrefaits, 8c de pleurer de sentimens vrais.

La parodie qui critique, qui fait ressortir les défauts d’une tragédie, les invraisemblances, les inconvenances, qui provoque le rire sur des choses pour lesquelles ou par lesquelles le poëte avoit mal ou mal-à-propos sollicité des larmes, la parodie de ce genre est très-utile à l'art dramatique. L homme de goût peut s'en servir pour donner au jeune poëte & à l'auteur tragiques des leçons animées, frappantes, telles qu'aucune instruction, aucune critique ne peuvent les donner. Ce genre est la comédie appliquée aux ridicules qui peuvent gâter la tragédie ; & pourquoi ne s’exerceroit-elle pas sur ces ridicules, comme sur ceux qui gâtent la société ?

La parodie d'Oscar paroît avoir eu pour objet de relever les fautes d’Oscar & non de le déprimer. Elle finit même par des couplets flatteurs pour Arnault.

L'acteur qui joue le rôle d'Hagard imite Talma plutôt qu’il ne le contrefait. Il est même bon de l’avertir qu'il l'imite au point d’être quelquefois touchant comme lui. Est-ce un hommage que l'acteur parodiste veut rendre à l'acteur tragique, ou est-ce un tour qu'il joue aux auteurs de la parodie ?

R.          

L’Esprit des journaux français et étrangers, 1796, volume 6 (novembre-décembre 1796), p. 291-293 :

[Justification du droit de parodier, que certains (dont Legouvé, ami d’Arnault, l’auteur de la pièce parodiée) ont remis en cause. Il s’agit pour le critique de montrer les limites de la juste parodie : être gai sans amertume, censurer gaiement, sans travestir. Celle de Barré, Radet et Desfontaines montre bien les qualités des trois premiers actes d’Oscar fils d’Ossian (dont il se fait un plaisir de souligner le caractère racoleur du titre), et fait aussi apparaître les défauts des deux derniers.

THÉATRE DU VAUDEVILLE.

On a donné à ce théâtre une assez jolie parodie, d'Oscar, fils d'Ossian, intitulée Hagard, fils de son père.

Le titre même de la parodie est une critique ingénieuse du titre de la pièce, car il n'y avoit d'autre raison, pour l’auteur de la tragédie, de l'intituler ainsi, que son désir de rappeller les poésies de ce Barde célèbre ; Ossian ne jouant aucun rôle dans l'ouvrage, il étoit inutile de rappelles son nom sur l'affiche.

La parodie d'Hagard est faite avec d'autant plus d'esprit, qu'elle est gaie sans amertume ; quoiqn'en général un vrai littérateur ne puisse voir qu'avec une sorte de peine, un genre dont le mérite consiste principalement à ridiculiser de grands ouvrages, il faut cependant distinguer la parodie qui censure gaiement, de celle qui travestit ; & c'est ce qui donne aux parodies des citoyens Radet, Baré & Desfontaines, un caractère particulier ; ce n'est ordinairement, chez eux , que le cadre d'une censure ingénieuse & fine, dont l’auteur parodié doit plutôt rire & profiter, que s'offenser.

II est si vrai que les auteurs tragiques n'ont rien à perdre à ce genre de critique, qu’assez ordinairement les meilleures parodies sont celles qui tombent sur les ouvrages les plus estimés, & que plus ceux-ci renferment de beautés, plus la parodie devient saillante.

On peut citer, en preuve, 1a pièce même d'Oscar ; le premier acte d'Hagard, ne parodiant que les trois premiers actes de la tragédie, qui sont réellement un ouvrage de mérite, renferme aussi plus de sel & de gaieté.

Le second', quoique spirituel, fait peut-être moins, de plaisir, parce, qu'il, tombe sur deux actes de tragédie, où les défauts l’emportent sur les beautés, & qu'alors le parodiste, embarrassé du choix de ses critiques, a dû devenir plus amer & moins gai.

On voit par cette réflexion, que nous persistons dans notre opinion sur les deux derniers actes de la tragédie du citoyen Arnault, malgré le ton un peu tranchant avec lequel le citoyen Le Gouvè nous a voulu démontrer que nous avions tort, & en dépit du tribut d'admiration que son amitié lui impose peut-être, mais auquel il semble qu'il n'a le droit de contraindre personne. Nous nous proposions de lui répondre ; mais une abonnée du journal de Paris nous a devancés, & nous ne voulons pas que le citoyen Arnault souffre plus long-temps de ce petit combat.

Au surplus, on doit également recevoir avec intérêt; ne fût-ce que pour les comparer, il tragédie d'Oscar & la parodie d'Hagard; l'une fera pleurer, l'autre fera rire, & toutes deux rempliront leur but.

Œuvres du comte P. L. Rœderer […] publiées par son fils, tome quatrième (Paris, 1856), Opuscules, De la représentation de pièces nouvelles et anciennes, p. 231-233 :

[Deux extraits du Journal de Paris du mois de juin 1796, le premier exprimant des idées proches de celles de l’article de l’Esprit des journaux français et étrangers, le second, un peu hors sujet, sur le retour en grâce de « messieurs » et « madame ». On y lira des propos sur le statut des femmes dans la société qui passeraient mal de nos jours !]

HAGARD, ENFANT DE SON PERE.

Hier, au théâtre du Vaudeville, on a joué avec succès, Hagard, enfant de son père, parodie d'Oscar, fils d'Ossian.

Cette parodie, un peu trop longue, nous a paru d'un fort bon genre.

La médiocrité sur la scène tragique a trop réussi à décrier la bonne parodie, parce que la médiocrité envieuse a trop souvent produit la mauvaise, sur la scène comique.

Il me semble qu'on devrait distinguer deux espèces de parodies : celle qui travestit pour ridiculiser, celle qui travestit pour critiquer.

La parodie qui travestit le grand, le beau, le vrai tragique, qui mutile un bel ouvrage pour le traduire en ridicule, a un objet méprisable. Elle est moins la parodie que l'abus de la parodie. Au reste, elle ne fait pas grand mal aux bons ouvrages. Ce n'est pas aux dépens de la pièce travestie que rit le spectateur, mais aux dépens des personnages qui en contrefont les sentiments; et il n'y a rien de moins contradictoire que de rire de sentiments contrefaits, et de pleurer de sentiments vrais.

La parodie qui critique, qui fait ressortir les défauts d'une tragédie, ses invraisemblances, ses inconvenances, qui provoque le rire sur des choses pour lesquelles ou par lesquelles le poëte avait mal ou mal à propos sollicité des larmes; la parodie de ce genre est très-utile à l'art dramatique. L'homme de goût peut s'en servir pour donner au jeune poëte et à l'acteur tragiques des leçons animées, frappantes, telles qu'aucune instruction, aucune critique ne peuvent les donner. Ce genre est la comédie appliquée aux ridicules qui peuvent gâter la tragédie; et pourquoi ne s'exercerait-elle pas sur ces ridicules, comme sur ceux qui gâtent la société ?

La parodie d'Oscar paraît avoir eu pour objet de relever les fautes d'Oscar, et non de le déprimer. Elle finit même par des couplets flatteurs pour Arnault.

L'acteur qui joue le rôle d'Hagard imite Talma plutôt qu'il ne le contrefait. Il est même bon de l'avertir qu'il l'imite au point d'être quelquefois touchant comme lui. Est-ce un hommage que l'acteur parodiste veut rendre à l'acteur tragique, ou est-ce un tour qu'il joue aux auteurs de la parodie?

(Journal de Paris, du 5 messidor an iv. — 23 juin 1796.)

AUX AUTEURS DU JOURNAL.

En rendant compte, il y a quelques jours, de la parodie d'Oscar, vous avez oublié de dire que le public ayant demandé le nom des auteurs, l'acteur qui avait joué Hagard a nommé Radet, Desfontaines et Barré, et a pris pour les nommer une forme assez étrange ; voici ses paroles :

« Messieurs, les auteurs de la parodie d'Hagard, sont messieurs Barré, Desfontaines et Radet. »

Il a paru plaisant que cet acteur portât le goût ou l'habitude de la parodie jusque sur le titre de citoyens, et qu'il s'avisât d'affubler d'un sobriquet les auteurs mêmes qui sont l'honneur de son théâtre.

Quelqu'un à qui je faisais hier cette observation, me répondit qu'il était revenu fort à la mode de remplacer le titre de citoyen par celui de monsieur. Je répliquai que dans les lieux publics, et au théâtre, les hommes du public doivent se conformer, non à la mode, qui est la fantaisie de quelques-uns, mais aux mœurs et aux lois, qui sont la volonté de tous.

Notre conversation avait lieu dans un café, et mon adversaire venait de lire le Journal de Paris. Voyez, me dit-il, ce journaliste, qui, dans sa lettre à une femme, lui dit : Madame, et non pas citoyenne. — Ceci, repartis-je, est autre chose. Les citoyens, dans la république française, sont les membres de l'État. Être membre de l'État, c'est avoir un droit politique. Le titre de citoyen est donc un titre politique. Mais une femme n'est que membre de la famille, elle n'a aucun droit politique dans l'État. Elle ne doit donc porter aucun titre politique.

A Rome on disait les citoyens romains, et les dames romaines, matronæ.

Ce n'est pas parce que les femmes sont au-dessous des hommes, qu'elles doivent avoir un autre titre ; c'est parce qu'elles sont au-dessus. Dame veut dire maitresse, dominatrice. Le mot vient de la même origine que domaine. Nous sommes le domaine des femmes.

Mais autrefois ne disait-on pas le président et la présidente, le comte et la comtesse ? — Oui, mais on ne disait pas mon médecin et ma médecine, mon avocat et mon avocate. Et pourquoi la différence ? c'est qu'autrefois les emplois publics s'obtenant toujours par faveur ou par argent, c'était madame qui les obtenait pour monsieur; madame en était aussi capable que monsieur, et souvent les exerçait au moins par moitié avec monsieur. Mais dans les professions où il fallait payer de sa personne, comme celles de jurisconsulte et de médecin, le titre du mari ne passait point à la femme. Or, le devoir de citoyen est de ceux pour lesquels il faut payer de sa personne.

Mais on disait autrefois le roi et la reine. Abus qui donna lieu à mettre en principe qu'il n'y avait qu'une majesté en France, de sorte que le parlement refusa toujours le titre de majesté aux reines.

Ici un plaisant se mêla de la conversation: Parbleu, dit-il, en s'adressant à mon interlocuteur, que nous parlez-vous encore de citoyennes ? Les plus zélés républicains n'ont-ils pas réhabilité le madame, quand ils ont applaudi à Notre-DAME-des-Victoires et à Notre-DAME-de-bon-Secours ? Eh morbleu ! soyez citoyens, et laissez-nous nos dames.

(Journal de Paris, du 11 messidor an iv. — 29 juin 1796.)

Dans la base César : pièce d'auteur inconnu. 17 représentations, du 21 juin au 2 novembre 1796, au Théâtre du Vaudeville.

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