Il veut tout faire

Il veut tout faire, comédie en un acte et en vers, de Collin-Harleville. 21 Pluviôse, an 12 [11 février 1804].

Théâtre de la rue Louvois

Titre

Il veut tout faire

Genre

comédie

Nombre d'actes :

1

Vers / prose ?

en vers

Musique :

non

Date de création :

21 pluviôse an 12 [11 février 1804]

Théâtre :

Théâtre de la rue Louvois

Auteur(s) des paroles :

Collin d’Harleville

Almanach des Muses 1805

Comédie épisodique, des détails agréables, du succès.

Sur la page de titre de la brochure, Paris, chez Madame Masson, an XII (1804) :

Il veut tout faire, comédie épisodique, en un acte et en vers, Par M. Collin-Harleville, De l'Institut National. Représentée pour la première fois sur le théâtre de Louvois, le 21 Pluviôse, an XII. (11 février 1804)

Courrier des spectacles, n° 2542 du 22 pluviôse an 12 (12 février 1804), p. 2 :

[Un compte rendu bien court pour un auteur de l’importance de Collin d’Harleville, qui a été nommé. C’est qu’il s’agit d’une pièce appartenant à la catégorie des pièces « vulgairement appelée[s] à tiroirs ». Elle ne doit son succès qu’à « la grace du style » et au « mouvement qui règne dans l’ouvrage ».]

Théâtre Louvois,

Il n’est pas de théâtre qui donne autant de nouveautés que celui-ci ; et presque toutes y obtiennent du succès. Celle jouée hier sous le titre de il veut tout faire, a été fort applaudie. L’auteur a été demandé , c’est M. Collin-d’Harleville.

Le caractère tracé dans cet ouvrage est assez commun dans la société. On y rencontre fréquemment des gens qui naturellement portés à a rendre service à tout le monde, entament vingt négociations sans en terminer aucune Ce sujet ne pouvoit être traité que par épisodes, et ne devoit parconséquent fournir qu’une pièce vulgairement appelée à tiroirs, et dénuée d’intérêt ; mais la grace du style, et le mouvement qui règne dans l’ouvrage ont captivé-tous les suffrages.

Courrier des spectacles, n° 2544 du 24 pluviôse an 12 (14 février 1804), p. 2 :

[Retour sur la pièce de Collin d’Harleville. Il y avait du monde, mais le critique pense que c’était peut-être surtout pour les deux autres pièces, dont Frontin et Marton ou Assaut de valets lui semble une très bonne pièce pour les théâtres disposant des acteurs convenables dans les emplois de valet et de soubrette. La pièce de Collin d’Harleville est à nouveau sévèrement jugée : plaisante par le style, faible par l’action. Et la comparaison avec Monsieur Musard n’est pas à son avantage.]

Théâtre Louvois.

La seconde représentation de Il veut tout faire, avoit attiré beaucoup de monde hier à ce théâtre, où l'on jouoit à la vérité deux autres pièces fort agréables ; le Collatéral et Frontin et Marton, ou Assaut de Valets. Malgré les critiques qui ont été faites de ce petit ouvrage, je persiste à croire qu’il fera toujours plaisir. Les directeurs de théâtres qui peuvent compter dans leur troupe un bon valet et une bonne soubrette, avantage assez rare aujourd’hui, ne sauroient mieux faire que de monter cette petite pièce. Quant à la comédie de M. Colin, elle ne peut manquer de plaire par le style, mais je crois qu’il n’en est pas de même de l’action, je ne sais trop pourquoi elle a été annoncée comme le pendant de M. Musard. Elle lui est bien inférieure, et perd trop à la comparaison.

Magasin encyclopédique, ou journal des sciences, des lettres et des arts, 9e année, au XII, tome IV, p. 540-541 :

[Compte rendu favorable, sans enthousiasme : la pièce est d’un auteur consacré, et sa pièce reflète « le talent qu’on lui connoît », l’acteur qui l’incarne a su tirer « tout le parti possible » du caractère. Le critique parle de « succès d’estime, et il estime ce succès durable.]

Il veut tout faire; comédie épisodique en un acte et en vers.

C'est le contraste de M. Musard. On y voit un homme.qui ne fait rien parce qu'il a la manie de tout faire. Il ébauche tout et n'achève rien, il promet toujours et ne tient jamais ; ce caractère est bien commun aujourd'hui. M. Colin D'harleville l'a traité avec le talent qu'on lui connoît, et quoique Vigny n'ait pas dans ce rôle autant d'occasions de briller que dans M. Musard, il en tire tout le parti possible. Cette pièce a eu un succès d'estime, et on la verra longtemps avec le même plaisir.

L'Ambigu : ou variétés littéraires et politiques, Volume 4, n° XXXVI du 20 mars 1804, p. 315-318 :

[Le compte rendu traite d’abord de questions annexes : le titre choisi est-il le bon ? Picard, acteur et directeur du théâtre, a-t-il eu raison de présenter l’auteur comme un ami ? Double réponse négative, bien sûr. On arrive enfin au sujet de la pièce. Le critique insiste sur la nouveauté des caractères montrés dans la pièce (« deux hommes qui ne finissent rien ; l'un parce qu'il baguenaude, l'autre, parce qu'il veut tout faire à la fois »). Deux caractères dont il souligne qu’ils sont fort différents. Suit le résumé de l’intrigue, fait de manière assez désordonnée, sans vraiment faire comprendre le déroulement de la pièce, ramenée assez artificiellement à une intrigue unique, celle de la « jeune et jolie plaideuse » que le personnage principal n’aide guère. Pourtant, on finit par comprendre qu’il s’agit d’une pièce à tiroirs, avec une série de personnages victimes de l’activité brouillonne du personnage. Une des scènes où intervient un de ces personnages secondaires a fait beaucoup rire, et me critique y voit l’origine du succès de la pièce, jusque là incertain. Finalement, caractère bien observé, peinture minutieuse du personnage, la pièce est conforme à ce qu’écrit habituellement Colin d’Harleville. Elle est même écrite de manière plus rigoureuse, dans un style « plein, animé, brillant ».]

THÉATRE LOUVOIS.

IL VEUT TOUT FAIRE, Comédie en un Acte et en Vers, par M. Colin d'Harleville, ami de Picard.

C'est ainsi que Picard a désigné l'auteur de cette piece. Nous pensons qu'elle serait mieux intitulée la Manie de tout faire Le titre qu'on lui a donné nous semble baroque. Pour s'en convaincre, il n'y a qu'à l'employer dans quelques-unes des phrases auxquelles il peut naturellement donner lieu : j'assiste à la premiere représentation d'Il veut tout faire ; j'ai été très satisfait d'Il veut tout faire. On conviendra que cela forme des locutions barbares, et pourtant nécessaires. Moliere n'intitulait pas son Tartufe, Il veut tromper, mais l'Imposteur, ou le Faux dévot.

On a aussi très-justement observé à Picard qu'il avait tort d'annoncer au public que l'auteur demandé était de ses amis. Picard est un écrivain très-gai, très-ingénieux, et, ce qui vaut mieux, un homme, à ce qu'on dit, généralement connu par les qualités du cœur les plus estimables. Mais au théâtre ce n'est qu'un comédien, et c'est de sa part une trop grande familiarité de mettre les spectateurs dans la confidence fort peu intéressante de ses amitiés et de ses liaisons.

On se plaint quelquefois que les caracteres manquent. En voilà pourtant deux de trouvés pour ainsi dire coup sur coup : deux hommes qui ne finissent rien ; l'un parce qu'il baguenaude, l'autre, parce qu'il veut tout faire à la fois. Le resultat est semblable ; mais les caracteres sont très-différents. La joie et la tristesse font quelquefois aussi verser également des larmes ; il s'en faut pourtant un peu que ces deux sentiments soient les mêmes. Il y a encore une troisieme espece d'hommes (sans parler des irrésolus) dont le caractere produit les mêmes effets ; c'est celle des temporiseurs. Le Cardinal de Retz, un des plus grands, ou le plus grand peut-être des peintres de ces temps modernes, l'a tracé de main de maître, dans le portrait de Gaston, temporiseur par timidité, et qu'il appelle si plaisamment l'interlocutoire incarné. Les sujets ne manquent pas , il ne faut que des peintres.

La scene s'ouvre par un monologue d'une ancienne gouvernante, qui jete [sic] des regards indiscrets sur le bureau de Polymathe, ou [sic] elle voit entassées une foule d'affaires de genres tout opposés ; elle instruit le spectateur du travers de son maître, qui est de vouloir rendre service à tout le monde à la fois ; d'où il résulte qu'il n'oblige personne, et nuit à beaucoup de gens, lesquels trouveraient ailleurs des recommandations utiles, s'il ne leur avait pas, en quelque sorte, ordonné de s'en tenir à la sienne. Une jeune et jolie plaideuse, dont le procès se juge dans le jour, compte sur lui pour la mener chez son rapporteur. Mais tandis qu'il s'amuse à écrire à un évêque pour solliciter une cure, et en même temps à rimer quelques couplets pour une actrice, quittant tour-à-tour la chanson pour la lettre, et la lettre pour la chanson, l'heure fatale a sonné. La plaideuse ne pouvant l'arracher à sa prose et à ses vers, sort avec précipitation, vole chez son rapporteur, revient désolée ; les titres décisifs de son procès étaient restés dans le cabinet de Polymathe. Il était sorti enfin pour aller chez le rapporteur. La plaideuse se lamente, on trouve les papiers, on lui crie : courez donc chez votre rapporteur. Il n'est plus temps, dit-elle ; en ce temps peut-être on me juge. Ce peut-être est une inadvertance (facile à corriger) ; car, dans le doute, il n'y avait point à balancer, il n'y avait pas une minute à perdre. Cependant elle en perd encore plusieurs avec Polymathe qui rentre, et qu'elle accable de reproches mérités. Polymathe est riche, et trouve la veuve aimable ; il offre sa main pour réparer ses torts. Un autre de ses protégés survient : c'est un officier à qui ce protecteur universel devait faire avoir un régiment. Il avait vu la jeune veuve plusieurs fois chez Polymathe ; elle lui avait plu, et elle s'était senti quelque inclination pour lui. Témoin du retardement que mettait le solliciteur à sa visite, il s'etait douté qu'il arriverait trop tard, avait été lui-même trouver la partie adverse de la veuve, et avait arrangé l'affaire. Polymathe alors propose à l'officier et à la dame de s'entremêler de leur mariage. Le premier lui répond très-plaisamment :

                         Ah ! pour dernier service,
Ne vous en mêlez pas, afin qu'il s'accomplisse.

Tel est le fond de cette bagatelle. On y a intercalé plusieurs scenes à tiroir ; entr'autres, celle de deux commis pour lesquels Polymathe a sollicité à la fois la même barriere, qu'un troisieme a obtenue ; d'un ancien précepteur de Polymathe, dont celui-ci néglige depuis un temps infini de faire liquider la pension. Dès votre enfance, lui dit ce précepteur, votre caractere s'était annoncé ; j'avais prévu que vous voudriez embrasser toutes les sciences ;

Est-ce ma faute à moi si je suis propre à tout ?

Répond Polymathe. Le précepteur rabat cet amour propre en ajoutant : « J'avais prédit en conséquence que vous n'apprendriez rien du tout. »

La scene qui a le plus réussi est celle d'un musicien qui vient chercher une partition d'opéra, égarée au milieu des paperasses de Polymathe. C'est une farce, mais très-comique, et très-bien jouée par l'ami Picard

Jusques-là on trouvait un peu de langueur dans la piece, et le succès en semblait incertain : des éclats de rire l'ont annoncé : et il s'est soutenu. Le caractere du personnage principal est observé jusques dans les plus petits détails. Par exemple, en prenant son thé, il allait écrire une lettre, si sa gouvernante ne s'y était opposée. Il y a aussi dans le cours de cette jolie petite piece quelques traits, tels qu'on en trouve dans tous les ouvrages de M. Colin, qui peignent une âme sensible, douce, candide et vertueuse, celle d'un vrai philantrope. Le style a paru exempt de cette négligence, de cette diffusion qu'on a reprochée à quelques endroits de certaines comédies de l'auteur ; il est dans celle-ci plein, animé, brillant.

Le Nouvel Esprit des journaux français et étrangers, tome septième, germinal an XII [mars 1804], p. 277-278 :

[La pièce a réussi. Elle montre un personnage qui veut aider tout le monde, et qui fait échouer tout ce dont il se mêle. La pièce est une pièce à tiroirs faisant se succéder les solliciteurs et montrant l’échec de l’aide que le personnage principal leur apporte (et aussi son propre échec, puisqu’il se fait souffler la femme à qui il proposait le mariage). Caractère pas tout à fait abouti, imitation de très nombreuses pièces, mais « des vers charmans, un style élégant et rapide, un rôle excellent de Mélomane » : l’interprète du mélomane est excellent, et l’auteur est nommé.]

Il veut tout faire, comédie en un acte et en vers.

Succès mérité. Protecteur et défenseur officieux de tous ceux qui ont une place à solliciter, ou un procès à conduire, ou une pièce à faire jouer ; Polymaque apporte tant de négligence dans la suite de ses mille affaires, que bien .loin d'être utile aux gens qu'il veut servir, il finit toujours par leur faire plus de tort que leurs ennemis. De-là plusieurs scènes à tiroirs, qui offrent tantôt un commis sollicitant une place aux barrières, tantôt un musicien réclamant sa partition d'opéra ; tantôt, enfin , une plaideuse dont Polymaque a égaré les pièces. Désolé d'avoir compromis les intérêts de cette femme, notre brouillon offre de réparer le dommage en l'épousant ; mais un jeune officier, plus alerte que lui, a empêché les juges de prononcer la sentence fatale, et obtient la main de cette belle dame. Caractère qui aurait dû être en opposition avec celui de Musard, et qui n'en est réellement que la copie avec des variations. Imitations frappantes du Distrait, de l'Etourdi, des Voisins et de vingt autres pièces. Mais des vers charmans, un style élégant et rapide, un rôle excellent de Mélomane, en un mot le cachet du vrai talent, Picard joue avec beaucoup de gaité le personnage du faiseur d'opéra. La pièce est de son ami Colin.

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