Créer un site internet

Laujon de retour à l’ancien Caveau

Laujon de retour à l’ancien Caveau, vaudeville en un acte, par les convives du Caveau Moderne (Barré, Radet et Desfontaines), 2 décembre 1811.

Théâtre du Vaudeville.

Les convives du Caveau moderne sont bien plus nombreux que ces trois auteurs : l’article que Wikipédia consacre à cette institution donne une liste fournie : Armand Gouffé, Pierre Capelle, Moreau, Francis d’Allarde, Pierre Laujon, Pierre Gallet, Désaugiers, Antoine Antignac, Brazier, René de Chazet, Désaugiers, Demautort, Emmanuel Dupaty, Despréaux, Ducray-Duminil, Cadet-Gassicourt, Grimod de La Reynière, fondateur de l'Almanach des Gourmands, Jouy, Philippon de La Madelaine, de Piis, le comte de Ségur aîné, le docteur Marie de Saint-Ursin, et encore (le second ban) Gentil, Coupart, Jacquelot, de Jarry, Longchamps, Maurice Ourry, Rougemont, Réveillère, Eusèbe Salverte, Théaulon, Tournay et Chapelle, des musiciens : Frédéric Duvernoy, Mozin, Doche, Alexandre Piccini, Lafont, Romagnési, d’illustres invités, Boufflers, Delille, Sébastien Mercier (l'auteur du Tableau de Paris), le docteur Gall, Regnaud de Saint-Jean-d'Angély et le fin dîneur d'Aigrefeuille (liste extraite de l'article de Wikipédia)..

Titre :

Laujon de retour à l’ancien Caveau

Genre

vaudeville

Nombre d'actes :

1

Vers / prose

prose, avec couplets en vers

Musique :

vaudevilles

Date de création :

2 décembre 1811

Théâtre :

Théâtre du Vaudeville

Auteur(s) des paroles :

les chansonniers du Caveau moderne (Barré, Radet, Desfontaines)

Sur la page de titre de la brochure, à Paris, chez Capelle et Renand, 1811 :

Laujon de retour à l’ancien Caveau, vaudeville en un acte, par les convives du Caveau moderne ; Représenté sur le Théâtre du Vaudeville, le 2 Décembre 1811.

Le texte de la pièce est précédé d’une « Notice historique sur P. Laujon » (p. 3-8).

Notice historique sur P. Laujon.

PIERRE LAUJON naquit à Paris, le 13 janvier 1727. Ce fut de l’aveu de son père, procureur au parlement, qu’il se dévoua aux Muses dès sa plus tendre jeunesse. Aussi s’y livra-t-il sans réserve, à l’exemple d’Ovide, aux dépens même de toute autre étude :

Et quod tentabat soriber, versus erat.

Laujon fit des chansons en entrant dans le monde ; il fut l’arme des fêtes de Berni, et l’un des soutiens de celles d’Étioles et de Saint-Cloud. Il fut l’ami et l’émule de Piron, Panard, Collé, Crébillon fils, Saurin et Favart avec lequel il composa plusieurs parodies pour l’Opéra-Comique, et fit un journal de chansons sous le titre de Fleurettes.

Laujon fut jaloux de faire briller ses talens sur la scène lyrique. L’opéra de Daphnis et Chloé fut lu et applaudi dans les meilleures societés, où l'auteur allait déjà essayer ses couplets et jouer la comédie.. Accueilli par le duc d’Ayen, le duc de Nivernois, l’abbé de Bernis ; produit par Duclos, Lachaussée et Crébillon fils, il fut bientôt protégé par madame de Villemur, par madame de Pompadour, et enfin par 1e comte de Clermont, qui se l’attacha en. qualité de secrétaire de. ses commandemens.

Il se consacra aux plaisirs, qui formaient la principale occupation de la cour de ce prince ami des arts ; et les opéra d’Églé, de Sylvie, d’Ismène et Ismenias, ouvrirent à leur auteur l’entrée des petits cabinets, où ses ouvrages furent représentés devant Louis XV, par tout ce que Versailles avait de plus illustre.

L’Amoureux de quinze ans, que l’on joue toujours avec succès, et qui ne fut composé que pour une fête de famille, est un tableau plein de grace et de naïveté. Cette pièce, et celle du Poëte supposé, peuvent être mises à côté des meilleures de Favart, par le naturel et la gaîté. Le Couvent, ouvrage de sa .vieillesse, est une comédie agréable, et le Juif bienfaisant, qu’il a imité de l’anglais , se lit avec intérêt.

Parmi ses parodies , se distingue Matroco, qui a pour objet de travestir les héros de la chevalerie ; et parmi ses drames lyriques, on peut citer Héro et Léandre, Épaphus et Memphis, l’Éducation de l’Amour, et Léonore Pétrocori.

Laujon fut surtout fécond en scènes de famille, et en divertissemens de fêtes pour les plaisirs de ses augustes protecteurs. Dans tous ses ouvrages, on trouve de la facilité, de la grace et de la gaîté, souvent des saillies heureuses et des tableaux piquans. N’eussent-ils d’autre mérite que de fournir des sujets d’imitation, leur publicité serait utile ; l’on y peut puiser des idées aimables et des images gracieuses pour de semblables amusemens, qui contribuent, plus qu’on ne pense, à entretenir le goût des beaux arts et les douces affections.

Mais la partie la plus brillante des œuvres de notre auteur, c’est, sans contredit , la chanson, pour laquelle il avait un talent presqu’inimitable.

Les personnes qui ont connu le bon Laujon se souviendront toujours avec plaisir de l’accent avec lequel il chantait : J'ai marié ma fille en Perse ; Sunt cornua, cum cornibus ; Mon toutou, j'en fais mon bijou ; C'est Suzon la camarde ; Mon manchon joli ; Mademoiselle Tonton ; Mademoiselle Nichon ; les Amours de Christophe et Georgette ; Vous me grondez d'un ton sévère, ou Il reviendra. ce soir, je crois, etc., etc. La gaîté et la bonhomie de l’auteur donnaient à ces folies un sel et un charme que des censeurs trop difficiles pourraient bien ne pas leur trouver, en les lisant gravement au coin de leur feu, ou devant leur bureau.

Il les a publiés lui-même, en forme de testament, peu de tems avant sa mort, en 4 volumes in-. Il avait déjà fait paraître en 1776, sous le titre d’A-propos de société, 3 autres volumes du même format (1).

« Peu de tems avant sa mort, dit M. Etienne, M. Laujon avait donné l’édition complète de ses œuvres; on y reconnaît un esprit fin, un travail facile, une aimable négligence. On voit que l’auteur n’a pas besoin d’attendre l’inspiration : il fait des chansons comme La Fontaine fait des fables, sans recherche, sans effort. presque sans y penser. »

« Sa vie ne fut qu’une longue fête, ajoute encore M. Etienne, son digne successeur à l’Académie, parvenu à son dix-septième lustre, il tirait encore des sons mélodieux de sa lyre octogénaire ; enfin, les Muses avaient présidé à sa naissance, et les Muses ont reçu son dernier soupir. »

Comme tous les poëtes véritables, Laujon négligea sa fortune, croyant assez acquérir en enrichissant son imagination.

Mais on prit soin de ses affaires ; et, comme Anacréon, son modèle, il vécut dans l’intimité des grands, qui surent se l’attacher par des bienfaits. Il fut pendant quarante ans secrétaire des commandemens du comte de Clermont, l’ordonnateur des fêtes et des plaisirs de la cour de ce prince aimable, son familier et son ami.

Décoré de la croix de Saint-Louis, nommé commissaire des guerres et secrétaire général des dragons, en survivance de Gentil Bernard, membre, comme lui,, de l’ancien Caveau, il perdit ses charges et ses biens dans les tempêtes de la révolution ; mais il sauva du naufrage sa gaîté, sa philosophie ; il mourut membre de l’Académie et président du Caveau moderne, le 13 juillet 1811.

Une députation. de l’Institut escorta les reliques du moderne Anacréon ; tous les gens de lettres et les artistes de la capitale qui avaient été liés avec lui, tous les membres du Caveau, et plusieurs étrangers distingués par leur mérite, assistèrent à cette triste cérémonie ; de sorte que les beaux arts, les sentimens tendres et agréables, et les douces vertus du défunt, y étaient en quelque sorte représentés par députés :

Avec étonnement on voyait sous le deuil
Les Jeux et les Amours, les Muses et les Grâces :
Tant que vécut Laujon, ils marchaient sur ses traces ;
           Ils suivaient encor son cercueil.

Arrivés au lieu du monument, chacun voulut lui donner un dernier témoignage d’estime et de tendresse. Le droit de faire son éloge appartenait au dernier élu de ses confrères à l’Institut, et M. Parceval Grandmaison retraça en peu de mots ses vertus et ses talens, Parmi les vers împromptus que les membres du Caveau moderne adressèrent à leur vieux président, nous citerons ceux de Ph, de Lamadelaine :

Gaie ou tendre, toujours sa lyre
Au ton du bon goût se monta ;
Il ne connut point la satire,
L’Envie aussi le respecta :
Un seul trait peint, d’après nature,
Ses écrits, sa vie et ses mœurs :
C’est le ruisseau dont l’onde pure
Roule en se jouant sur les fleurs.

(1) On trouve les uns et les autres chez Capelle et Renand, libraires, rue J. J. Rousseau, n° 6.

Les A-propos de société se vendent 12 fr., et 15 fr. franc de port.

Les Œuvres choisies, 24 fr., et 30 fr. franc de port.

Journal de Paris, 3 décembre 1811, p. 1-4 :

[Presque tout le feuilleton du jour est consacré à cette pièce qui ne présente pas un bien grand intérêt pourtant, puisque c'est la célébration d'un auteur bien secondaire, plus cpnnu par ses saillies que par ses pièces. Il faut d'abord que le critique s'étonne longuement que les membres du Caveau moderne aient tant tardé pour produire une pièce destinée à payer leur tribut à l'un des leurs récemment décédé. Puis il consacre une large place à raconter l'intrigue d'une pièce qui n'en a pas (c'est le critique qui le dit, bien sûr). Et il finit par un jugement un peu amusé : tout a été applaudi, les couplets, qui sont de loin l'essentiel de l'hommage à Laujon, sont de qualité diverse, mais tout le monde a reconnu les auteurs. Succès donc, un seul acteur est nommé, c'est celui qui joue le rôle de Laujon, « le moins saillant de tous ». Il est venu nommer les auteurs qui n'ont pas paru.

THÉATRE DU VAUDEVILLE.

Première représentation de Laujon de retour â l’ancien Caveau,
comédie-vaudeville en un acte.

On raconte que des députés de la ville de Troie chargés d’aller faire un compliment de condoléance à l'empereur Tibère, qui avait perdu sa mère, mirent si peu d'empressement à remplir leur mission, qu’ils n’arrivèrent à Rome que plus d’an après la mort de cette princesse.... L’empereur écouta froidement le haranguer phrygien. Mes amis, dit-il aux députés, je vous remercie de la part que vous prenez à ma douleur; et moi aussi je pleure avec vous la perte que les troyens ont faite. — Quelle perte, seigneur ? — Celle de votre Hector (tué il y avait plus de mille ans ) ; c’était un grand capitaine.

Le souvenir de cette paresseuse ambassade m’est revenu à l’occasion de l’hommage tardif que les joyeux communaux de feu M. Laujon ont rendu hier soir à sa mémoire sur le théâtre du Vaudeville.

Si le défunt chansonnier a dû, pour être reçu par ses collègues de l'ancien caveau, attendre le passeport chantant que lui ont expédié les convives du caveau moderne, il a longtemps erré sur les bords du fleuve fatal au milieu de ces tristes ombres que Caron repousse de sa barque, parce qu’elles n’ont pas reçu les honneurs funèbres. Quoiqu’il en soit, je ne puis assez m’étonner qu’une nombreuse réunion de gens d'esprit ait été si long-temps à composer la petite pièce que l’amitié leur a inspirée.... On écrit si rapidement et si bien quand c’est le cœur qui dicte ! Peut-être aussi ce retard provient-il de la lenteur qu'on a mise à monter l’ouvrage. Alors ma surprise doublerait en pensant qu’il se joue sur un théâtre où les acteurs savent, ou du moins apprennent si vite une pièce. Serait-ce un calcul de la part des amis de M. Laujon ? Auraient-ils pensé qu’ils ne risquaient rien de laisser presque effacer le souvenir de cet aimable épicurien, bien certains de le renouveler par leur ouvrage ? Je ne puis croire que telle ait été leur idée ; ils savent trop bien que les sensations éteintes se réveillent difficilement, et qu’en France rien n’est plus essentiel que de saisir l’à-propos, même en fait d'apothéose.

M. Laujon n’a pas laissé une de ces réputations robustes qui survivent pendant des siècles aux hommes qui les ont méritées.... Sa couronne n’était composée ni de lauriers ni d’immortelles, mais de ces fleurs légères et délicates. Quoiqu’il ait eu l’honneur de passer par l'académie, comme l’a dit ingénieusement l’abbé Virgile, son nom n’est point gravé sur le marbre, mais sur l’écorce fragile des heures ; et les tablettes sur lesquelles Momus trace le nom de ses favoris, ne sont point les fastes de l’immortalité. Il fallait donc s'empresser de faire jouir son nom de tout l’éclat qu’il pouvait espérer ; il fallait escompter, si j’ose m’exprimer ainsi, tout ce qui devait lui revenir de renommée. Mais nos lecteurs sont sans doute plus curieux de connaître la pièce que les motifs qui ont pu en retarder la représentation ; nous allons les satisfaire.

Il était difficile de se concilier la faveur publique par un couplet d’annonce plus agréable que celui dans lequel Guénée est venu, à la fin de la première pièce, retracer les droits de Laujon au bienveillant intérêt de tous les amis de la gaieté française. Voici ce couplet :

Air du Vaudeville de l'Avare.

Au jour ses paupières sont closes ;
Mais ici son nom reparaît.
Comme il n’a connu que les roses ,
Une épine le blesserait.
Aimé pendant sa vie entière,
Il fut partout bien accueilli ;
Ah ! faites croire à notre ami
Qu’il n’a pas fini sa carrière.

Les auteurs s’étaient adroitement cachés derrière une tombe encore couverte de fleurs ; mais le succès leur a prouvé qu'ils n’avaient pas besoin de se manager une retraite. 1

Le théâtre, au lever de la toile, représente les champs élysées Au fond de la scène on remarque le terrible Achéron, sur lequel navigue l’éternel nautonier. Caron, qui nous a paru assez civilisé, célèbre par quelques couplets philosophiques le pouvoir de sa barque qui nivèle tout. Le noir batelier peut ignorer que ses idées, que sans doute il croit neuves, passent sur la terre pour des lieux communs.

Il est interrompu par l'ombre du traiteur Landelle qui tient d'une main l’ombre d’une bouteille, et de l'autre l'ombre d'un verre..... Il a établi Cabaret chez Pluton, et annonce ainsi son changement de domicile :

Lantelle, marchand de vin traiteur, ci-devant carrefour de Bussy,
maintenant aux Champs Elysées.

Caron consommee chez, lui tout ce que les morts lui donnent pour boire, et ne craint pas de manquer d'argent dans un pays où la vie ne coûte rien. Bientôt paraissent toutes les vieilles pratiques de Lantelle. Piron, Favart, Lattaignant, Voisenon, Vadé et autres bons vivans, qui ont conservé l’habitude de se réunir. à jour fixe, chez leur ancien hôte, et qui ne paraissent pas gens à se contenter de l'ombre d'un dîner.... Ils hâtent par leurs vœux l’heure de se mettre à table.... Tout-à-coup ils apprennent que lever président Anacréon ne peut se trouver à la séance bachique il s'en excuse par ce billet :

Un essai de femmes jolies
Jaloux de vos joyeux ébats,
Sur moi punissant vos folies,
Par des fleurs enchaîne mes pas
Entre le plaisir et la peine
Tour-à-tonr et triste et content,
Je suis trop vieux et trop galant
Pour tenter de briser tua chaîne.

Dans l'instant où l’on délibère sur le choix d'un vice-président, dignité que chacun s’excuse modestement d'accepter, des ombres femelles, à la tète desquelles est Mme Favart, viennent annoncer l'arrivée d’un nouveau débarqué, digne d’occuper la place d’Anacréon. Long-temps on cherche à deviner son nom ; mais enfin les dames le peignent sous des traits qui ne permettent plus de le méconnaître, et un cri unanime proclame Lanjon.... Il paraît ! Caron lui demande le denier du passage... Je n'ai pas une obole, répond Laujon ; mais voici mon dernier jeton de l'académie. Eh quoi ! Tu as été de l'académie, s'écrie Piron, qui prouve par plusieurs traits que l'eau même du Léthé ne lui a pas fait oublier sa vieille rancune. Quelles nouvelles là-haut ? —On rit, on boit, on chante encore au Caveau. — Il est donc ressuscité ? — Oui — Et quel était le président de nos joyeux successeurs ? — Moi. — Tu seras 1e nôtre. — C’est trop d'honneur. — Tu en passeras par-là....

Telle est à-peu-près la conversation du nouvel habitant des Champs-Elysées, et des lurons qui en font les honneurs:... On offre au président le luth, la coupe et la couronne d’Anacreon ; i1 paraît un peu embarrassé de cet attirail.... Mais soudain l’ombre d'une cloche fait retentir l’air de deux coups bien distincts : c’est l’heure du dîner, les morts veut se mettre à table, et la pièce finit.

Nous avons exactement suivi l'action d'une pièce qui n en a pas...... Nous n’essayons pas de donner une idée des nombreux couplets qui eu font tout le mérite.... Ce serait vouloir tracer l'analyse d'un feu d’artifice...... On s’aperçoit aisément qu'ils ne sont pas tous de la même plume, quelques-uns sont gais et francs, et à côté de moi on reconnaît l'auteur.... D'autres gracieux et bien tournés, on en nommait l'auteur.... Ceux-ci fades et précieux, on en nommait l’auteur ; ceux-là, enfin tout-à-fait insignifians, et on en nommait encore l’auteur.

En résultat, l’ouvrage a obtenu un grand succès, et par son mérite et par son motif....

Le rôle de Laujon, du héros de la tète, nous a paru le moins saillant de tous. Peut-être n’était-il pas encore fait à l’air du pays Nous n’osons penser qu’il ait laissé sa gaieté sur l’autre rive ; il aurait perdu la partie la plus précieuse de son bagage.... Les auteurs ont été demandés, et Vertpré, qui avait représenté Laujon, est venu annoncer que la pièce était des membres de la société Caveau moderne. Plusieurs voix ont crié : Qu’ils paraissent... Mais sachant qu’on ne passe pas deux fois l'Achéron, ils ont sans doute craint de se montrer sur la scène.

A.          

Magasin encyclopédique, ou Journal des sciences, des lettres et des arts, 16e année, 1811, tome VI, p. 406-407 :

THÉATRE DU VAUDEVILLE.

Laujon de retour à l’ancien Caveau, vaudeville en un acte, joué le 2' décembre.

Les auteurs réunis du Caveau moderne ont voulu, par cette pièce, faire une espèce d'apothéose de leur ancien président.

Le théâtre représente les Champs-Elysées. Au fond l’Achéron, sur lequel navigue Caron, qui nous a paru assez civilisé ; il célèbre par quelques' couplets philosophiques le pouvoir de sa barque qui nivèle tout. Il est interrompu par l'ombre du traiteur Landelle qui a établi cabaret chez Pluton. Caron consomme chez lui tout ce que les morts lui donnent pour boire, et ne craint pas de manquer d'argent dans un pays où la vie ne coûte rien. Bientôt paroissent toutes les vieilles pratiques de Landelle. Piron, Favart. Lattaignant, Voisenon, Vadé,et autres bons vivans qui ont conservé l'habitude de se réunir, à jour fixe, chez leur ancien hôte. Ils hâtent par leurs vœux l'heure de se mettre à table.... Tout-à-coup ils apprennent que leur président Anacréon ne peut se trouver à la séance bachique. Dans l'instant où l'on délibère sur le choix d'un vice-président, des ombres femelles, à la tête desquelles est Madame Favart, viennent annoncer' l'arrivée d'un nouveau débarqué, digne d'occuper la place d'Anacréon. Longtemps on cherche à deviner son nom ; mais enfin les Dames le peignent sous des traits qui ne permettent pas de méconnoître Laujon. Il paroît ; on lui accorde l'honneur de la présidence, et on lui offre le luth, la coupe et la couronne d'Anacréon ; il paroit un peu embarrassé de cet attirail.... Mais soudain une cloche fait retentir l'air de deux coups ; c'est l'heure du dîner : les morts vont se mettre à table, et la pièce finit.

Les couplets tiennent lieu de tout dans cette bluette ; ils sont gais et faciles, abondans surtout ; et cela n'est pas étonnant, puisque la pièce est de vingt chansonniers exercés.

Ajouter un commentaire

Anti-spam