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Le Lendemain de la pièce tombée

Le Lendemain de la pièce tombée, comédie en un acte, mêlée devaudevilles, de Maurice [Séguier], Dupaty et Jean-Baptiste Dubois, 13 fructidor an 13 [31 août 1805].

Théâtre du Vaudeville.

Titre :

Lendemain de la pièce tombée (le)

Genre

comédie mêlée de vaudevilles

Nombre d'actes :

1

Vers / prose

prose, avec couplets en vers

Musique :

vaudevilles

Date de création :

13 fructidor an 13 (31 août 1805)

Théâtre :

Théâtre du Vaudeville

Auteur(s) des paroles :

Dupaty, Maurice [Séguier] et Jean-Baptiste Dubois

Sur la page de titre de la brochure, à Paris, chez Barba, an xiv (1805) :

Le lendemain de la pièce tombée, comédie en un acte, mêlée de vaudevilles ; Par MM. Dupaty, Maurice et Dubois, Représentée, pour la première fois, à paris, sur le théâtre du Vaudeville, le 13 fructidor an xiii.

Courrier des spectacles, n° 3123 du 16 fructidor an 13 [3 septembre 1805], p. 2 :

[Le sujet de la pièce nouvelle fait naître de la nostalgie chez le critique, qui évoque la déception qui assaille l’auteur de la pièce tombée, après l’exaltation qui précède la première représentation. C’est ce qu’ont voulu montrer les auteurs, mais sans cruauté envers les malheureux. Ils ont montré de façon amusante comment on prépare cette première pour tenter de forcer le succès. Pas d’intrigue bien neuve dans une telle pièce, mais la pièce met bien en lumière madame Harvey, dont le critique regrette vivement qu’elle soit si peu utilisée, à l’inverse de madame Duchaume, dont l’impréparation a failli faire échouer la pièce. Le succès a toutefois été au rendez-vous, et si la salle n’était pas pleine (« tous les auteurs tombés » n’étaient pas là), mais on a bien ri sans eux.]

Théâtre du Vaudeville.

Le Lendemain de la Pièce tombée.

Le lendemain d’une pièce tombée est un jour fort triste pour les auteurs. Avant la représentation, on ne rêvoit que succès, qu’applaudissemens, transports, enthousiasme ; on se voyoit en idée chargé de lauriers et amené triomphant sur la scène au milieu des bravo universels ; mais quand une fois la toile est levée, quand un léger murmure, précurseur de l’orage, commence à circuler de rang en rang, quand les sifflets aigus et discordans se font entendre, quand le rire du public, les bons-mots des plaisans et le trouble des acteurs amène la chûte du rideau et de la pièce, alors quel douloureux réveil ! comme les illusions s’évanouissent ! quelle triste réalité succède à un rêve enchanteur !

Les auteurs de la pièce nouvelle ont voulu nous donner une légère idée de ces petites tribulations, et s’égayer aux dépens de leurs confrères. Un proverbe grec dit : Ne riez pas de la chûte de votre prochain, et la raison qu’il en donne, c’est qu’on n’est pas toujours sûr d’être ferme sur ses pieds ; MM. Emm. Dupaty, Dubois et Maurice n’ont pas tout à-fait respecté le proverbe grec, mais au moins ils ont agi galamment, et leurs épigrammes ne passent pas les bornes d’une gaité décente.

Ils nous ont révélé tous les petits secrets du métier, la distribution des billets gratis, les leçons faites aux amis, la disposition des grouppes dans la salle, les signaux convenus pour élever la voix à propos, redoubler les applaudissemens, faire entendre les bravo, demander bis, etc. Tous ces détails sont fort amusans et développés avec esprit dans des couplets fort bien tournés.

L’intrigue qu’ils y ont jointe n’a rien de neuf, mais ils en ont confié le rôle principal à une actrice pleine de grâce et de talens, et qui peut, par le charme de son débit, donner du prix aux plus petites choses. Cette actrice est Mad. Hervey ; il y a long-tems qu’on a rendu, dans ce journal, hommage à son mérite. On se plaignoit de la voir en quelque sorte délaissée, tandis que d’autres actrices peut-être moins habiles qu’elle jouissoient de toute la faveur du public.

L’absence de ses camarades lui a rendu service, en l’obligeant de se montrer souvent ; les auditeurs qui ne la connoissoient pas seront étonnés de trouver aux secondes places un talent du premier rang, et elle est devenue l’objet des plus justes applaudissemens. Ses yeux respirent l’intelligence, la finesse et la grâce ; son débit est pur et soigné; sa voix a beaucoup de charme, et ce qui vaut mieux encore, c’est qu’elle chante et qu’elle joue sans affectation et sans recherche.

Il seroit à souhaiter que Mad. Duchaume contrastât un peu moins avec elle, qu’elle étudiât mieux ses rôles, et qu’elle donnât un peu plus de noblesse à son jeu ; elle a failli plusieurs fois compromettre le succès de la pièce, qui pourtant peut se soutenir par elle-même. Il est à présumer que tous les auteurs tombés n’étoient point à cette représentation ; l’auditoire eût été plus nombreux, et le rire moins fréquent.

Mercure de France, littéraire et politique, tome vingt-unième (an xiii), n° CCXVIII (20 fructidor an 13, samedi 7 septembre 1805), p. 566-568 :

Théatre du Vaudeville.

Le Lendemain de la Pièce tombée, comédie en un acte, par MM. Dubois , Dupaiy et Maurice Séguier.

« Voltaire, disait Montesquieu, refait tous les ouvrages qu'il lit. » En ce point, tout le monde ressemble plus ou moins à Voltaire. Après avoir lu ou entendu une œuvre dramatique sur-tout, chacun en redresse le plan, et la recompose en idée à sa façon. De même lorsqu'une affiche ou un titre annonce clairement un sujet, on se dit intérieurement : Voilà comme je le traiterais, et si l'auteur suit une autre marche, on lui en sait ordinairement mauvais gré. Cependant ceux du lendemain ont trompé l'attente générale et ont réussi : on s'attendait à voir un pauvre diable pestant contre la cabale, le public et les acteurs, rassemblant ses débris, fabriquant en hâte avec ses amis des hémistiches de remplacement. On n'a presque rien vu de tout cela ; mais l'esprit et la gaieté du dialogue et des couplets ont fait oublier au spectateur le plan qu’il s'était formé d'avance. Satisfait du plaisir qu'on lui procurait, il n'a pas chicané sur la manière. Les auteurs avaient une très-forte cabale qui eût été absolument inutile si la pièce avait été mieux jouée. Il s'y trouvait une actrice dont la négligence et la trivialité avaient l'air de cabaler contr'eux. En revanche ils ont eu infiniment à se louer de madame Hervey, que l'administration de ce théâtre ne nous montre presque jamais, quoique le public ne se lasse point de la desirer, et quoique, sans faire oublier ses rivales, elle ne les fasse jamais regretter.

Arlequin a fait avant le couplet d'annonce un lazzi et une plaisanterie qui valaient mieux que le couplet, lequel était fort entortillé et que je n'ai jamais pu comprendre. On le presse d'annoncer la pièce nouvelle ; il a l'air d'y répugner; enfin après avoir été long-temps stimulé, il répond, en se grattant l'oreille : « Une pièce tombée ! sur quel air veut-on que je chante cela ? »

L'intrigue offre quelques réminiscences ; mais il y en a une partie qui appartient aux trois auteurs, et beaucoup de détails ont paru avoir la fraîcheur de la nouveauté.

Un cousin amoureux de sa cousine, sévèrement observée par une tante très-fâcheuse et très-ridicule, n'a imaginé d'autre moyen de déclarer son amour, qu'une comédie, dans laquelle il a peint sa situation ; il la donne. Sa maîtresse n'y va pas. La tante y était, s'y est reconnue, et pour comble d'infortune la pièce est tombée. Un valet qui avait travaillé le succès, a mandé les sous-ordres. Quatre jurés applaudisseurs arrivent. Le valet, en présence de son maître, reproche à l'un d'eux d'avoir bâillé. « Vous m'aviez dit de faire comme les autres. » On entend un portier qui siffle, comme il se pratique dans quelques maisons pour annoncer un survenant. L'auteur dit à son domestique de voir qui ce peut être. « Ce n'est pas pour vous, répond celui-ci, on n'a sifflé qu'une fois. » Le mot serait plus piquant s'il n'était pas absolument détaché de l'intrigue, et si le coup de sifflet n'avait pas été donné uniquement pour l'amener.

On lit les journaux qui ont parlé de la chiute. Le cousin se récrie sur la malignité des journalistes,

Dont chacun se croit plus d'esprit
Quant il croit l'auteur une bête.

Malgré la surveillance de la tante, qu'on prétend extrême, le poète trouve le moyen d'entretenir sa cousine. Il la supposait instruite de son malheur, dont elle ne savait pas un mot, elle veut voir la déclaration, l'amoureux la lit, elle la trouve très-ingénieuse et demande ce qu'y répond la jeune personne ; on lui passe le manuscrit : sa naïveté, son embarras, sa rougeur forment un tableau très-agréable. L'amoureux se jette aux pieds de sa cousine, et la tante le surprend dans cette posture. Les accès de sa colère sont interrompus par l'arrivée d'un personnage qui engage l'auteur à faire subir à sa comédie l'épreuve d'une seconde représentation. Comme il est indécis, son ami cherche à le rassurer. « Il ne s'agit, suivant lui, que d'accoutumer le public à une pièce : il va s'y amuser comme à une autre.  Il promet que celle-ci ira aux nues si l'on veut renforcer le caractère de la tante, la rendre plus ridicule, plus méchante, plus acariâtre. L'auteur rejette ce conseil, « et proteste qu'il aime mieux réussir en peignant des vertus qui existent, que des vices qui n'existent pas. »

La tante trouve le trait sublime, lui pardonne sa petite espièglerie et lui donne sa nièce. Ce vaudeville a eu du succès, et en aura encore davantage lorsqu'il sera joué avec plus d'ensemble. Les journalistes qu'on y a un peu égratignés n'en ont pas témoigné d'humeur jusqu'à présent.

Magasin encyclopédique, ou Journal des sciences, des lettres et des arts, 10e année, 1805, tome V, p. 420

Théâtre du Vaudeville.

Ce théâtre, pendant l'absence des premiers sujets, a donné beaucoup de nouveautés, mais point de pièces marquantes.

[...]

Le Lendemain de la pièce tombée est un cadre où les auteurs ont fait entrer le tableau des petites ruses que l'on emploie pour faire tomber ou réussir une pièce de théâtre. Ces détails n'amusent jamais le public qu'aux dépens des auteurs; et il est bien maladroit à ceux-ci de donner des armes contre eux-mêmes. La pièce est de MM. Maurice, Dupaty et Dubois.

Archives littéraires de l’Europe, tome septième (1805), Gazette littéraire, septembre 1805, p. lxxxiii-lxxxiv :

[L'attribution à Chazet à la place de Maurice Séguier est une erreur.]

Théâtre du Vaudeville.

Le Lendemain de la pièce tombée, par MM. Chazet, Dupaty et Dubois:

Il était hardi de donner un pareil titre à une pièce ; et les auteurs pouvaient craindre que le parterre n’eût envie de faire du joui le lendemain. Maïs peut-être aussi qu'en qualité de chansonniers, ils se sont rappellés le vieux couplet que chantaient nos grand'pères :

Demain est un jour qui fuit
Lorsque l'on croit qu'il s'avance,
Au milieu de chaque nuit,
Il perd son nom dès sa naissance.
Quand on croit s'assurer de lui,
On trouve que c'est aujourd'hui,

Ils auront cru que le lendemain qu'ils jouaient ne viendrait jamais pour leur ouvrage, et ils ne se sont pas trompés. Ils ont su y peindre avec beaucoup de fidélité, et les présages qui annoncent la chute d'une pièce, et les phénomènes qui l'accompagnent, et la tactique la plus propre à la prévenir. Tout cela n'était pas bien nouveau pour les spectateurs qui fréquentent les théâtres avec quelque assiduité, et qui connaissent les deux Métromanies, grande et petite ; mais avec de la gaîté dans les détails, et quelques couplets bien tournés, on se tire toujours d'affaire au Vaudeville, et celui-ci a eu effet obtenu beaucoup d'applaudissemens.

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