Le Nègre par amour

Le Nègre par amour, opéra en un acte, de Saint-Just [Godard], musique de Charles, 23 février 1809.

Théâtre de l'Opéra-Comique.

L'identité de « M. Charles », le compositeur, dont on sait seulement que c'est « le premier ouvrage », est difficile à éclaircir : le site dezede propose Armand de Villeblanche, dont ce serait la seule œuvre que le site répertorie (https://dezede.org/individus/villeblanche/). Le Catalogue général de la BNF propose le nom d'Auguste de Villebichot, mais ce compositeur né en 1825 ne peut avoir écrit la musique de la version jouée en 1809.

Titre :

Nègre par amour (le)

Genre

opéra (comique)

Nombre d'actes :

1

Vers ou prose  ?

en prose, avec des couplets en vers

Musique :

oui

Date de création :

23 février 1809

Théâtre :

Théâtre de l’Opéra-Comique

Auteur(s) des paroles :

Saint-Just [Godard]

Compositeur(s) :

Charles

Almanach des Muses 1810.

Poëme qui a paru inférieur à tous ceux que l'auteur a déja donnés ; quelques passages pourtant qui annoncent du talent.

Le site Dezède, https://dezede.org/sources/id/13059/, publie le procès verbal de censure de cette pièce (Archives nationales de France, F/21/968/1) :

Ecrit le 18 fer 1809

Théâtre de l'opéra Comique.

Le negre par amour

opera en un acte

Voici encore une amante délaissée qui se travestit et se met au service de son infidelle. celle-ci devient un negre, se fait reconnaître au moment favorable, et épouse le noble castillan qui avait trahi son amour. à cette intrigue peu serieuse l'auteur en a réuni une autre d'un genre subalterne et comique. il s'agit d'un nouveau marié jaloux et poltron qui se trouve dans une situation où ces deux gentleman se combattent et peuvent dérider le spectateur. rien de remarquable dans cette bagatelle très médiocre.

Le Bureau de la Presse propose à M la____ D'accorder l'autorisation pour la représentation de cet ouvrage.

Les signataires ; Lémontey, Esménard, Lacretelle.

(Dans la marge, une signature que je n'identifie pas)

Il publie aussi le livret manuscrit de la pièce, https://dezede.org/oeuvres/le-negre-par-amour/ ce qui permet de voir le cheminement difficile qu'il faut emprunter pour faire jouer une pièce en 1809. La liberté du théâtre est bien loin !

Il faut envoyer la pièce, après sa réception par le théâtre (ici, l'Opéra-Comique), au Ministre de la Police, pour approbation (10 février 1809). Elle reçoit alors le visa du Ministère de la Police Générale de l'Empire, conformément aux dispositions du Décret Impérial du 8 Juin 1806 et à la décision du ministre (signature du secrétaire général, en date du 16 février 1809). La pièce obtient alors le permis d'afficher et de représenter, en date du 18 février 1809 (signature du Conseiller d'Etat, Préfet de Police). Un seul point positif : la rapidité de la procédure !

Magasin encyclopédique, ou journal des sciences, des lettres et des arts, année 1809, tome I, p. 391 :

[Le compte rendu commence par expliquer le titre, résume rapidement l’intrigue et juge la pièce de façon plutôt sévère : c’est un « petit roman peu vraisemblable est encore moins neuf », dans la longue série des « infidèles ramenés ». Le point original : le déguisement en nègre. La musique, œuvre d’un débutant, vaut mieux que le livret. Auteurs nommés.]

THÉATRE DE L’OPÉRA COMIQUE.

Le Nègre par amour, opéra en un acte joué le 22 février.

Le nègre par amour est une jolie femme qui s'est barbouillé le visage, pour suivre, sans en être reconnue, un amant infidèle. Cet infidèle est repentant, il regrette sa Sophie, et ne suppose pas qu'elle soit si près de lui ; mais Sophie se débarbouille, et paroît vêtue élégamment : reconnoissance à grand effet ! Un Valet jaloux n'est pas le moins satisfait de cet hymen qui le tranquillise sur le compte de sa femme. Ce petit roman peu vraisemblable est encore moins neuf ; on ne voit plus aujourd’hui sur la scène que des infidèles ramenés. On y avoit vu aussi des belles délaissées se déguiser en jokeys et en pages ; mais on n’en avoit pas encore vu en nègres : c'est là le, le nec plus ultra de l'imagination.

La musique, qui annonce du talent, est le début dramatique de M. Charles.

Les paroles sont de M. de Saint-Just.

L’Esprit des journaux français et étrangers, tome III, mars 1809, p. 278-280 :

[Le compte rendu commence par l’analyse, sans commentaire, de l’intrigue, assez convenue (un homme qui abandonne son amante, qui fait tout pour le retrouver (même se déguiser en domestique noir), et qui le retrouve. Ce que la pièce a de mieux, c’est un « petit épisode villageois jetté assez adroitement au travers de cette légère intrigue » et surtout sa musique, « légère , vive et variée ». Succès pour les deux interprètes principaux. Les auteurs sont nommés.]

Théâtre de l'Opéra-Comique.

Le Nègre par amour.

Un seigneur espagnol, don Orlandès, a passionnément aimé une Française nommée Sophie de Valmont (ou de Valmore), et une fois sûr d'en être payé de retour, l'a cruellement abandonnée. Cette tendre amante se déguise en nègre pour être admise comme domestique dans la maison de son perfide, dont elle veut épier les actions. Celui-ci, promptement revenu de ses erreurs, se rend avec ce nouveau valet de chambre dans une terre qu'il a au fond de l'Andalousie, et s'y rappelle avec un plaisir mêlé de regrets, tous les heureux momens qu'il a passés dans ce séjour auprès de sa Sophie. Le concierge du château est dans les intérêts de cette dame, et profite avec empressentent de la circonstance pour amener une réconciliation. Il conduit à dessein son maître vers une grotte solitaire où, pour la première fois, Orlandès avec la sensible Sophie avait goûté les douceurs du tête à tête. L'aspect de ce lieu, les chiffres amoureux qui couvrent encore les rochers d'alentour, tout sert à réveiller dans le cœur de notre Espagnol son ancien amour pour la belle Française ; il croit la voir, il la nomme,... elle se jette dans ses bras, non plus noire comme elle était quelques minutes auparavant, mais vêtue d'une brillante robe de satin blanc, et mille fois plus belle que jamais aux yeux de son amant enchanté.

Un petit épisode villageois jetté assez adroitement au travers de cette légère intrigue, en a fait excuser l'extrême faiblesse. Pédrille secrettement marié à Zulina, est jaloux de don Orlandès, à qui il suppose des vues sur sa femme, et ( à l'exemple de François Premier, qui, dans l'opéra de Françoise de Foix, se plaît à tourmenter le mari de cette princesse) Orlandès s'amuse un moment des terreurs du pauvre Pédrille, qui, à la fin, est désabusé. Cette petite mystification donne lieu à quelques jeux de scène qui valent mieux que toute la pièce.

La musique aussi vaut beaucoup mieux que les paroles; elle est légère , vive et variée.

Martin dans le rôle de Pédrille, et Mme. Gavaudan dans celui de Zulina, ont été vivement applaudis.

Les auteurs ont été demandés. Celui du poème est M. S.-Just, à qui l'on doit Zoraïme et Zulnar. La musique est de M. Charles, dont elle est le premier ouvrage.

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