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Nourjahad et Chérédin, ou l'Immortalité à l'épreuve

Nourjahad et Chérédin, ou l'Immortalité à l'épreuve, mélodrame en quatre actes mêlé de chants et de danses de Louis-Charles Caigniez, musique de Quaisain, 25 floréal an 9 [15 mai 1801].

Théâtre de l'Ambigu-Comique.

Sur la page de titre de la brohure, à Paris, se vend au Théâtre, an 9 – 1801 

Nourjahad et Chérédin, ou l'Immortalité à l'épreuve, mélo-drame en quatre actes et en prose, mêlé de chants et de danses. Représenté pour la première fois, sur le Théâtre de l'Ambigu-Comique, le 25 floréal an IX. Par L. C. Caigniez.

Courrier des spectacles, n° 1538 du 26 floréal an 9 [16 mai 1801], p. 3 :

Théâtre de l'Ambigu- Comique.

Nourjahad et Chéredin, mélodrame en quatre actes, dont la première représentation a eu lieu hier sur ce théâtre, a obtenu un brillant succès ; l’auteur vivement demandé a paru au milieu des applaudisemens : c’est le citoyen Caigniez déjà connu par sa pièce de la Forêt enchantée. Nous reviendrons demain sur cet ouvrage.

Courrier des spectacles, n° 1539 du 27 floréal an 9 [17 mai 1801], p. 2-3 :

[Après quelques informations (succès, source de la pièce), le résumé de l'intrigue, une féerie montrant un personnage désireux d'immortalité, et que son ami tente de satisfaire. Acte par acte, le critique raconte une histoire orientale pleine de houris, de fêtes, qui consiste à faire croire au personnage qu'il a dormi fort longtemps, avant de le détromper. Le critique a d'ailleurs soin de montrer la part de l'auteur dans l'invention de cette intrigue ; il ne s'est pas contenté de copier son modèle. L'article s'achève par une longue série de compliments, pour la morale de la pièce, pour les auteurs (mais pas d'indication de l'auteur des ballets, pourtant « très-jolis »), pour la qualité des costumes et des décors, pour les divers interprètes

Théâtre de l'Ambigu- Comique.

Nous avons annonce dans le numéro d’hier le succès de Nourjahad et Cheredin, ou l'Immortalité à l'épreuve, mélodrame en quatre actes. L’auteur a puisé son sujet dans un joli roman connu depuis long-tems sous le titre de Nourjahad.

Il est échappé à Nourjahad, ami de Chéredin, sultan d'Ormuz, de dire que s’il avoit le pouvoir de choisir sa destinée, il demanderoit des richesses inépuisables et l’immortalité.

Chérediu a formé le projet de lui procurer l’illusion de ce prétendu bonheur. Tout est préparé pour affermir sa crédulité. Il lui donne la propriété d’une maison de plaisance à quelque distance d’Ormuz, et l’y exile. Il ne peut en franchir l’enceinte. Son épouse Mandane qu’il adore et un vieux esclave nommé Azem sont chargés de tout conduire.

Nourjahad seul pendant la nuit voit un Génie qui lui annonce de la part du Grand Prophète qu’il est prêt à satisfaire le vœu qu’il a formé d’être immortel et toujours riche, mais à la condition que s’il abuse du bienfait, il pourra en être puni par des sommeils de plusieurs années. Nourjahad accepte, il trouve le trésor inépuisable que lui a annoncé le Génie ; il est enivré de joie. On lui annonce un marchand d’esclaves qui lui vend toutes ses femmes ; il remarque une cantatrice nommée Zulime. Mandane jalouse, saisit ce moment pour commencer l’épreuve, et lui verse un narcotique dans sa boisson. Nourjahad ordonne à Azem une fête où toutes ses odalisques représenteront les Houris et Mandane sera la belle Cadisha, favorite du Prophète. Il commence à sentir l’effet du narcotique, et on l’emmène.

Au second acte, Nourjahad s’éveille ; on lui persuade qu'il a dormi quatre ans, et qu’il y en a plus de trois que Mandane est morte en couches. On remarque sur un petit arbre une inscription que Mandane y a gravée quelque tems avant sa mort. On lui amène un enfant qu’il croit le sien. Il se désole. Azem lui propose pour le distraire la fête des Houris qu’il a ordonnée il y a quatre ans. Zulime vient à la tête des Houris qui exécutent cette fête. Nourjahad rebute un vieillard respectable qui vient réclamer l’une d’elles comme sa fille.

Au troisième acte, Nourjahad voit à la place du petit arbre qui portoit l’inscription de Mandane un grand arbre où se trouve la même inscription en plus gros caractères. Cette vue le pétrifie : cette idée est une de celles qui appartiennent à l’auteur. Plusieurs vieilles femmes viennent en chantant le féliciter sur son réveil : ce sont ses odalisques ainsi déguisées, et la plus caduque est cette jolie Zulime qui dans la fête des Houris étoit chargée du rôle de la céleste Cadisha. Tout lui persuade qu'il y a quarante ans et onze mois qu'il s'est endormi ; il apprend qu'Azem est mort et que Ceredin vit encore, mais sous le poids de l’âge et des infirmités. Le fils que lui avoit donné Mandane est mort aussi, mais il a laissé une fille qui est dans sa vingtième année, et qui a tous les traits de son ayeule : c’est Mandane elle même qui joue ce rôle. Il est enchanté de trouver en elle la beauté d’une épouse adorée ; mais une passion illicite fermente déjà dans son cœur ; il devient furieux d'apprendre que sa petite tille est mariée. Si son époux ose se présenter, il périra. Zulime crie en se sauvant : Nourjahad est injuste, il en sera puni ; et Nourjahad veut la poignarder. Cette situation qui appartient entièrement à l’auteur est vraiment neuve et piquante. Elle sort naturellement du sujet qui par lui-même déjà très-neuf au théàtre.

La situation du quatrième acte offre une pensée grande et philosophique. Nourjahad vient de se réveiller au milieu des ruines, il y rencontre un viens derviche qui lui apprend que ces ruines sont celles du palais de Nourjahad qui vivoit il y a cent ans sous le règne de Chéredin. Nourjahad déplore sa triste destinée ; il déteste son privilège et ses richesses qui ne peuvent contribuer à son bonheur. Son Génie lui apparoît une seconde fois, et lui retire, à sa prière, le prétendu don qu'il en a reçu. Le Sultan paroît, c'est Chéredin lui-même quui étoit aussi le Derviche. Nourjahad revoit autour de lui Mandane et Azem. Il croit r^ver. Chéredin lui dit qu'il ne s'est écoulé qu'un jour depuis son exil ; son plus long sommeil n’a pas duré plus de deux heures. Le lieu où il se trouve est le palais de Chéredin à Ormuz, et les ruines d’où il sort sont celles du vieux Sérail qui touche à ce palais, et que sa préoccupation l’a empêché de reconnoître.

L’idée des ruines appartient encore à l’auteur et annonce en lui une imagination féconde dont il avoit déjà fait preuve dans sa jolie féerie de la Forêt enchantée.

Cette pièce, qui est très-morale, offre beaucoup de pompe de spectacle. Elle attache par des situations piquantes, originales, et par un style élégant et correct.

En général cet ouvrage est monté avec soin. Les costumes sont frais, le décor convenable et les ballets très-jolis. La musique est du citoyen Quaisin. On a beaucoup applaudi les deux airs que chante Zulime.

Le cit. Tautin mérite des éloges pour la maniere dont il a rendu le rôle de Nourjahad, qui offroit de grandes difficultés.

Le cit. Corse a mis de la gaîté dans celui d’Azem ; et le cit. Rivalard s’est bien acquitté de celui de Chéreddin: mademoiselle l’Evêque dans le rôle de Mandane n’a rien laissé à desirer et pour la grâce et pour l’intelligence.

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