La Pauvre fille ou la Victime de la séduction

La Pauvre fille ou la Victime de la séduction, pantomime en 3 actes, de J. G. A. Cuvelier, musique arrangée par Alexandre [Piccini], 9 mars 1813.

Théâtre de la Gaîté

Sur la page de titre de la brochure, à Paris, chez Barba, avril 1814 :

La Pauvre fille ou la Victime de la séduction, pantomime en trois actes, Par J. G. A. Cuvelier. Musique arrangée par M. Alexandre, Représentée, pour la première fois, au le Théâtre de la Gaîté le 9 mars 1813.

Mémorial dramatique: ou Almanach théâtral pour l'année 1814, p. 209-211 :

[L'essentiel du compte rendu est consacré au résumé d'une intrigue très émouvante, pleine des malheurs d'un jeune couple et de son enfant, que le père du jeune homme persécute, jusqu'à ce qu'il accepte pour bru celle que son fils a choisie. Mais la jeune femme rejette la proposition qu'il lui fait : elle veut se consacrer « au service de Dieu, et au soulagement de l'humanité ». Alors que le compte rendu était jusque là neutre, on sent que le critique regrette le choix d'un dénouement « où la religion triomphe de l'amour », ce que le public a de la peine à accepter : c'est un sentiment « mélancolique, que l'auteur a voulu sans doute exciter, car il lui était facile de rendre tout le monde heureux et content ». Sinon, « ouvrage bien monté et très-bien joué », et « grand succès ».]

La pauvre fille, ou la Victime de la Séduction , pantomime en 3 actes , par M. Cuvelier.

(9 mars.)          

Le palais du prince d'Istenbourg retentit du bruit des rejouissances ; il célèbre les fiançailles du comte Adolphe son fils, avec la brillante Isadora, fille et héritière du duc de Sorgau. Mais, hélas ! l'amour ne préside point à cet hyménée. Il a depuis long-tems uni les cœurs du jeune comte et de la sensible Nella, qui doit le jour à Gutberg, vieux militaire pauvre, mais irréprochable, Un enfant de quatre ou cinq ans est le fruit de leur tendresse. Le prince surprend son fils aux genoux de Nella, et l'orgueil et la vengeance le rendent cruel. Les tragiques aventures de la Pauvre fille sont le sujet de la pantomime. Gutberg est arreté, jeté dans un cachot et condamné comme un vil criminel.

Des bohémiens payés par le prince, enlèvent le fils de Nella, et la pauvre fille, qui voit défiler le cortège nuptial d'Adolphe et d'Isadora, n'écoute plus que son désespoir, et se précipite dans un fleuve, Des meûniers, lui sauvent la vie ; de bonnes sœurs hospitalieres, dont le couvent est voisin, lui prodiguent les plus tendres soins. Nella vit encore ? mais sa raison est égarée. En proie au délire le plus affreux, elle parcourt la forêt pendant une nuit orageuse, et repousse jusqu'à son fils, que les bohémiens ont abandonné, et qui retrouve et reconnaît sa mère. Gutberg a dû sa délivrance au généreux dévouement du comte Adolphe. Tous deux arrivent auprès de la malheureuse Nella, qui, entourée de tous les êtres qui lai sont chers, semble recouvrer la raison,

Le prince vient troubler cette scène de bonheur ; il menace, Adolphe supplie, le prince est inflexible, et il ordonne à ses gardes d'employer la violence pour séparer les deux amans. Adolphe tire deux pistolets, en dirige un contre le chef des gardes et appuie l'autre sur son front. La crainte de perdre un fils chéri, rend le cœur du prince aux sentimens de la nature ; il consent à nommer Nella sa fille ; la route du bonheur s'applanit pour elle, elle refuse d'y entrer et préfère le chemin douloureux de la pénitence. Elle s'échappe un instant, et reparait vétue du costume religieux des sœurs de la Miséricorde.

Sourde à la voix de son père, aux supplications de son amant, elle leur recommande son fils, et jure de consacrer le reste de ses jours au service de Dieu, et au soulagement de l'humanité. Ce dénouement, où la religion triomphe de l'amour, laisse dans l'ame du spectateur une sensation mélancolique, que l'auteur a voulu sans doute exciter, car il lui était facile de rendre tout le monde heureux et content,

Cet ouvrage bien monté et très-bien joué, a obtenu un grand succès.