Le Paravent

Le Paravent, comédie en un acte et en vers, de Planard, 12 décembre 1807.

Théâtre Français.

Titre

Paravent (le)

Genre

comédie

Nombre d'actes :

1

Vers / prose ?

en vers

Musique :

non

Date de création :

12 décembre 1807

Théâtre :

Théâtre Français

Auteur(s) des paroles :

M. Planard

Sur la page de titre de la brochure, à Paris, chez Madame Masson, 1807 :

Le paravent, comédie en un acte et en vers, par M. E. Planard ; Représentée pour la première fois sur le Théâtre Français, par les Comédiens ordinaires de Sa Majesté l’Empereur et Roi, le 12 décembre 1807.

L’Ambigu, tome XX, n° CLXXII (10 janvier 1808), p. 27-29 :

(volume non accessible sur Hathi Trust’s digital library : je le cherche !)

L’Esprit des journaux français et étrangers, tome I, janvier 1808,p. 273-275 :

[Enfin une pièce trop courte, quand les critiques regrettent si souvent la longueur des spectacles froids ou languissants : ce sentiment de rapidité est bien sûr signe que la pièce a plu. Mais cette brièveté tient aussi au fait que le dénouement arrive alors qu’on s’attendait à voir l’action s’engager. Le résumé de l’intrigue, fondée sur la jalousie, en montre la minceur et le caractère convenu. Les acteurs sont moyennement appréciés (ils ont joué « agréablement », ce qui n’est pas si élogieux). Un des interprètes a même droit à une sorte d’encouragement montrant qu’il a des progrès à faire. L’auteur a été nommé.]

Le Paravent.

La représentation a été fort courte : un petit acte, quelques scènes, un petit nombre de vers assez corrects et en général facilement tournés, peu ou point de sujet, un dénouement qui arrive au moment où l'on croit que l'action va s'engager ; voilà la pièce, mot pour lequel il y avait un écho assez rapide entre les loges et le parterre, également étonnés de voir la fin de cette comédie si voisine de son exposition.

Ce n'est cependant pas une si mauvaise fortune pour un auteur que de s'entendre reprocher hautement que sa pièce est trop courte ; on dit si souvent le contraire : si on se plaint que l'ouvrage finit trop vite, il a donc plû, amusé, intéressé ; cela est vrai; et puisqu'il faut appliquer cette vérité à la pièce nouvelle, elle avait promis quelque chose, et l'auteur a trop .peu tenu. Son Paravent ne cache qu'un ressort comique bien faible, et ne sert de voile qu'un moment à une intrigue bien commune.

En effet voilà quel est son usage ; le favori d'un grand d'Espagne, Alonzo, est amoureux d'une jeune beauté qu'il veut soustraire aux regards curieux de son maître dont il craindrait les caprices et la rivalité : surpris avec elle par celui qu'il redoute, il la cache derrière un paravent. Un ordre le force à s'éloigner, tremblant autant que jaloux : un incident facile à prévoir découvre aux yeux du maître l'amante de son favori : ce dernier, en loyal Castillan, ne lui offre que de respectueux hommages ; mais pour s'amuser des transports jaloux d'Alonzo, il la presse de passer avec lui, sa camariste et son page dans son cabinet particulier. Alonzo voit bientôt sortir du cabinet son maître qui vante sa bonne fortune, et Léonore qui semble l'approuver : il éclate, il se désespère ; mais on lui montre que le tête-à-tête redouté était à quatre personnes, on le calme, on le marie... , et voilà la pièce... Nous n'en dirons pas davantage ; quelques lignes de plus, et l'ouvrage serait moins
long que l'analyse.

La pièce est agréablement jouée : Mlle. Mars a un rôle de petit page, où elle dit à-peu-près ce qu'elle avait appris pour jouer Chérubin :elle y est vive, piquante, pleine d'esprit et de graces : Mlle. Volnais est aussi intéressante qu'on peut l'être dans un rôle où l'on se taît quand on se cache, où l'on dit peu de mots quand on se montre ; Armand joue assez bien le favori jaloux : quant à Lafond , on s'apperçoit qu'il y a pour lui moins de distance entre la tragédie et la haute comédie qu'entre cette dernière et le genre de comédie où il faut sur-tout de la grace, de la légèreté, du brillant, un maintien noble mais aisé, un débit agréable et rapide : ses études en ce genre difficile, pour lequel on ne peut pas devoir tout à l'étude, ne font que commencer ; il a besoin d'y être encouragé et le mérite bien par son zèle et le rang qu'il occupe au Théâtre-Français parmi les sujets qui lui deviennent chaque jour les plus nécessaires.

L'auteur a été demandé, et Lafond a nommé M. Planard, auteur du Curieux, joué au théâtre de l'Impératrice.

Magasin encyclopédique, ou journal des sciences, des lettres et des arts, 12e année, 1807, tome VI, p. 415-416 :

[Compte rendu mitigé d’une pièce qui ne brille pas par l’originalité et dont le succès est jugé ambigu (l’ouvrage n’a « point éprouvé de défaveur »).]

THEATRE FRANÇAIS.

Le Paravent.

Le Page d'un Grand d'Espagne, amoureux comme un page, c'est-à-dire étourdiment, malgré toute la sensibilité possible, obtient un rendez-vous de celle qu'il aime. L'amour d'un page peut compromettre une femme ; un rendez-vous la compromet toujours, malgré la présence d'une confidente. On entend quelqu'un ; il faut donc cacher la Dame, et un paravent qui se trouve là, lui devient très-utile. Les paravents ont déjà joué de grands rôles au théâtre, entre autres dans le Lovelace français, au même théâtre. Le Duc, qui connaît la Dame, est assez étonné de la trouver derrière un paravent ; il la fait passer dans un appartement ; puis, pour donner au Page une leçon, il lui fait confidence qu'il est amoureux, et veut lui montrer sa maîtresse. Que devient le Page, quand il voit paraître la sienne. Tout s'explique et le Duc punit son page en le mariant. Armand joue le rôle du page amoureux. Mademoiselle Mars celui d'un autre page espiègle, qui ressemble un peu à celui de la pièce des Deux Pages. Lafond joue le Prince, et mademoiselle Volnais et Emilie Contât, les deux autres rôles.

Cette petite pièce, agréablement versifiée, n'a point éprouvé de défaveur ; elle est de M. Planard, jeune homme qui annonce du talent, et qui a déjà donné un petit acte au théâtre de l'Impératrice.

Geoffroy, Cours de littérature dramatique, tome quatrième (Paris, 1819), p. 231-235 :

[Pour tout savoir sur l’intrigue ! Le critique multiplie les détails... Jugement sans sévérité d’une pièce dont le fonds est jugé mince. Même indulgence envers les interprètes.]

LE PARAVENT.

C'est une bagatelle, mais fort jolie, dialoguée avec légèreté et avec grâce ; c'est le passe-temps d'un prince espagnol, qui s'amuse à mystifier son favori, le doyen de ses pages, jeune homme bien pensant sur l'article des femmes, et mieux qu'il n'appartient à un page. Il aime de bonne foi une charmante personne, nommée Eléonore : il veut l'épouser loyalement, et la posséder en légitime mariage ; mais, pour cela, il faut que le prince, en faveur d'une si belle union, donne à son favori quelque place honorable et lucrative. Pour l'obtenir, il faut que le jeune homme en parle au prince ; et c'est ce qu'il redoute plus que la mort : car dom Alonzo (c'est le nom de ce page vétéran) joint à toutes ces bonnes qualités celle d'être excessivement ombrageux et jaloux. Il craint les railleries du prince sur son mariage : les libertins regardent tous les maris comme des sots ; il craint bien plus encore le goût décidé de monseigneur pour les femmes d'autrui ; et toute sa politique consiste à lui dérober la connaissance d'Eléonore. On voit combien ce bon et honnête jeune homme est un sujet propre à être mystifié.

Eléonore vient elle-même au palais avec sa suivante, pour instruire dom Alonze qu'un nouvel amant se présente pour elle, et que son père est disposé à l'accepter pour gendre. Eléonore est cependant veuve et maîtresse d'elle-même ; mais, attendu sa grande jeunesse, elle ne veut d'époux que de la main de son père. L'inquiet dom Alonze est bien plus pétrifié de la visite qu'affligé de la nouvelle ; il tremble que monseigneur ne voie sa future, beaucoup plus qu'il ne craint qu'un autre ne l'épouse. Le prince, qui est alerte et qui a ses espions, sait déjà que dom Alonze a reçu la visite d'une jolie femme : il accourt pour la voir ; mais dom Alonze, encore plus alerte, au premier bruit de l'arrivée du prince, fait cacher sa maîtresse derrière un paravent, placé à propos sur le théâtre pour cet effet, et qui donne le nom à la pièce.

Le prince, désolé d'avoir manqué son coup, fatigue dom Alonze de questions sur Eléonore, sur sa figure, sur les motifs de sa visite. Le favori est sur les épines ; il fait passer Eléonore pour sa parente ; il parle plus que modestement de ses charmes, ce qui le rend suspect d'être amoureux et jaloux. Le prince le prêche sur cet article, et lui représente combien les temps sont durs pour les maris, et même pour les amans de bonne foi. Enfin, monseigneur ne termine son interrogatoire et sa morale que par un ordre qui, pour le favori, doit être un coup de foudre.

On l'envoie à la cour savoir si le roi est visible, pendant que sa maîtresse, qui n'est pas invisible derrière le paravent, court à chaque instant le danger d'être vue : il faut cependant obéir, quelque chose qu'il en puisse arriver. A peine est-il parti, que la suivante d'Eléonore, qui attendait dans l'antichambre, vient savoir si sa maîtresse veut s'en retourner : elle rencontre un petit page très-éveillé, et beaucoup plus égrillard qu'Alonze, quoiqu'il ne soit encore qu'un enfant. Cet espiègle l'arrête par des galanteries et des douceurs ; il s'empare de sa main, et ne veut point la rendre qu'on ne paie un baiser pour la rançon. Il s'élève une contestation sur le prix : Eléonore croit devoir paraître pour secourir sa femme de chambre ; de l'autre côté, le prince arrive, et voit avec étonnement une jeune et jolie personne : le petit page lui apprend que c'est celle qui a rendu visite à dom Alonze. Eléonore conte son aventure avec une noble franchise. Le prince, enchanté d'une pareille rencontre, veut profiter d'une si belle occasion de se venger de la discrétion et de la défiance de son favori, sauf à le rendre heureux après. Il promet à Eléonore tout ce qui dépend de lui, et l'invite à passer dans son cabinet, mais accompagnée de sa femme de chambre et du petit page, qui doivent en temps et lieu rendre un témoignage capable de calmer la plus terrible jalousie.

Le prince ainsi enfermé dans son cabinet avec Eléonore et deux témoins, dom Alonze arrive tout essouflé. Son premier soin est de regarder derrière le paravent : n'y voyant personne, il s'imagine que sa maîtresse est retournée chez elle, et se félicite beaucoup de l'avoir si ingénieusement dérobée aux regards curieux de monseigneur. Il s'agit ensuite de rendre compte de son message : il frappe à la porte du cabinet. Le prince ouvre lui-même avec toutes les apparences du mystère, et sortant du cabinet, régale son favori du récit d'une prétendue bonne fortune : il en paraît encore dans le ravissement. Il tient là, sous la clef, une jeune beauté qui est venue réclamer sa protection pour un homme qu'elle doit épouser. Quoiqu'il conte à dom Alonze à peu près sa propre histoire, le favori est bien éloigné de s'y reconnaître ; il s'égaye, au contraire, aux dépens du futur époux qui a rencontré un si zélé protecteur : il rit aux éclats du tour qu'on lui joue. Dans cet épanchement de gaieté, le prince, pour témoigner à son favori toute sa satisfaction, lui propose la place de capitaine de ses gardes. Alonze est charmé qu'on lui offre ce qu'il n'osait demander. Monseigneur, pour mettre le comble à ses bontés, veut faire voir à son favori l'objet charmant qu'il tient enfermé dans son cabinet ; il en fait sortir Eléonore seule ; et le malheureux Alonze est prêt à s'évanouir à cet aspect : il ne reprend ses sens que pour faire éclater sa jalousie. Il ne veut plus épouser, quoique le prince l'exhorte au mariage, en lui promettant de l'aller voir souvent chez lui pour jouir de son bonheur. Enfin, pour apaiser les vapeurs jalouses qui troublent le cerveau d'Alonze, les témoins sortent du cabinet, et lui prouvent qu'il n'y a point eu de tête-à-tête, et que le tout se réduit à un jeu fort innocent.

Cette apparition des témoins n'a pas produit un bon effet : un sifflet vigoureux s'est fait entendre, mais n'était point appuyé ; il s'est perdu dans les applaudissemens qui ont pris une grande supériorité. L'auteur a été demandé, et méritait de l'être ; car après qu'on s'était amusé pendant toute la pièce, il y avait de l'injustice et de l'ingratitude à oublier tout à coup ce qu'il y avait de piquant et d'agréable dans les scènes précédentes, parce que la dernière faisait moins de plaisir. Il serait difficile de dénouer autrement cette petite intrigue ; car Alonze, comblé des bontés du prince, n'a plus rien à désirer, sinon que le prince ne les ait pas poussé plus loin. Ce n'est pas qu'en choquant la nature et la vérité, on n'eût pu tronver aisément quelqu'incident bizarre et forcé pour retarder le dénouement. Le jeune auteur du Paraient n'est pas fait à ces manières-là : il a mieux aimé être naturel et raisonnable, et il a pensé lui en coûter cher ; on n'a pas impunément de la simplicité et du goût. Cependant son dialogue a été fort applaudi, quoiqu'il ne courre point après le mot, quoique la plaisanterie soit dans la chose, quoiqu'il y ait du véritable esprit. De jour en jour on s'entend moins sur ce mot esprit : pour moi, je ne connais point d'esprit où il n'y a point de sens commun.

Les acteurs ont beaucoup fait valoir cette petite pièce, dont le fond est extrêmement mince. Lafond joue le prince avec une aisance, une gaieté, un comique qu'on n'aurait pas attendu d'un héros tragique, si le même acteur n'eût déjà prouvé, dans Brueys, qu'il savait être enjoué et plaisant quand il le fallait. Armand a mis beaucoup de naturel, de vivacité et de feu dans le rôle d'Alonze. Mlle. Volnais a rempli le personnage d'Éléonore avec infiniment de décence, de grâce et d'intelligence. Le petit page était joué par Mlle. Mars; et l'on a regretté que le rôle de Mlle. Emilie Contat fût si court. (14 décembre 1087 [sic].)

D’après la base La Grange de la Comédie Française, la comédie de Planard, en un acte et en prose, créée le 12 décembre 1807, a été jouée 7 fois en 1807 et 1808.

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