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Les Péruviens

Les Péruviens, mélodrame en trois actes, en vers, à spectacle, de Dumaniant, musique d’Alexandre Piccini, 15 floréal an 12 [5 mai 1804].

Théâtre de la Porte Saint-Martin.

Nouvelle version d'Alonse et Cora, tragédie de Dumaniant, transformée onze ans après sa création en mélodrame.

Titre :

Péruviens (les)

Genre

mélodrame à spectacle

Nombre d'actes :

3

Vers ou prose ,

en vers

Musique :

non

Date de création :

15 floréal an XII (5 mai 1804)

Théâtre :

Théâtre de la Porte Saint-Martin

Auteur(s) des paroles :

Dumaniant

Compositeur(s) :

Alexandre Piccini

Almanach des Muses 1805

Courrier des spectacles, n° 2626 du 16 floréal an 13 [6 mai 1804], p. 3 :

[La pièce n’est que partiellement nouvelle, puisqu’elle est la transformation d’une tragédie en mélodrame par son auteur. Le critique ne cache pas une certaine déception : le mélodrame exigerait plus de spectacle et de pompe. Le nom du musicien est donné sans commentaire.]

Théâtre de la Porte-St-Martin.

Première représentation des Péruviens.

Cette pièce fut jouée il y a onze ans, comme tragédie, au théâtre de la République, et y obtint dès lors du succès. Elle portoit le nom d'Alonze et Cora. M. Dumaniant l’a transportée au théâtre de la Porte St-Martin ; et en a fait un mélodrame ; et comme il est en vers, il a du moins le mérite d’être écrit d’une manière plus soignée que tous les ouvrages de ce genre que l’on joue aux Boulevards. Plusieurs passages ont été applaudis du public, mais on y eut désiré plus de spectacle, et la pompe qui fait ordinairement la majeure partie du succès des mélodrames. La musique est de M. Alexandre Piccini. Demain nous reviendrons sur cette première représentation.

Courrier des spectacles, n° 2627 du 17 floréal an 13 [7 mai 1804], p. 3 :

[Reprise de ce qui a été écrit la veille : la pièce est issue des Incas de Marmontel, qui a été source de nombreuses œuvres modernes, sans avoir produit de réussite, en particulier au théâtre. Elle avait été jouée avec un certain succès, grâce à un plan sage et un style soigné. Mais sa transformation en mélodrame n’est pas entièrement réussie : le mélodrame a ses exigences propres que la tragédie ne satisfait pas (la rapidité, l’intensité, la multiplication des événements). Dumaniant, à la fois auteur et directeur du théâtre, aurait préféré plus de recettes ! Le compte rendu se limite ensuite à un résumé de l’intrigue, sans commentaire, ni positif, ni négatif, et à l’évocation de l’interprétation, réduite à celle des deux principaux rôles, jugée satisfaisante.]

Théâtre de la Porte St.-Martin,

Les Péruviens.

Les Incas, de Marmontel, ont jusqu’ici été une mine féconde que les auteurs modernes ont exploitée à l’envi : les amours et les infortunes d’Alonzo et de Cora leur ont sur-tout paru propres à faire le sujet d’un drame intéressant ; mais peu ont réussi dans cette entreprise, et il n’est aucun ouvrage dramatique tiré de-là qui soit resté au théâtre. La tragédie d' Alonzo et Cora, que M. Dumaniant fit jouer il y a onze ans, n’eut que quelques représentations quoiqu’elle eût eu assez de succès. Le plan en est sage, et en général le style en est soigné. Mais ce qui fait le mérite d’une tragédie s’écarte souvent du genre du mélodrame, qui exige situations sur situations, et où l’on cherche les coups de théâtre plutôt qu’une belle et simple ordonnance, le désordre même des événemens que l’on veut y voir s’y succéder rapidement a quelque chose d’attrayant pour la multitude. C’est peut-être parce que la pièce des Péruviens n’offre pas ces défauts qu'elle a été reçue avec quelque froideur. M. Dumaniant doit s’en applaudir comme auteur et non comme directeur ; à ce dernier titre il aimeroit mieux avoir fait un ouvrage à recettes.

Cora, grande-prêtresse du Soleil, aime Alonze, fils d’Alvare, chef des Espagnols. Loin de partager les fureurs de son père, Alonze ne veut que gagner les Américains par la douceur, entraîné par le désir de revoir son amante, il est arrêté par les Péruviens au moment où le fils de leur chef, le frère de Cora vient d’être massacré par les soldats d’Alvare.

Condamné à périr par représailles, il doit expirer sur l’autel du Soleil, et de la main même de Cora. Celle ci se refuse à exécuter l’ordre de son père, et à l’instant où celui ci presse le sacrifice, les Espagnols fondent sur les Péruviens, et délivrent la victime.

Alonze sauve les jours du père de Cora, et se rend au camp des Espagnols, où il cherche vainement à fléchir Alvare.

Cependant le chef des Espagnols est tué, et ses soldats veulent venger sa mort en immolant les Péruviens et le père de Cora. Alonze accourt, épargne ses ennemis, et leur offrant la paix et son amitié, il reçoit la main de son amante.

Mad. Pelletier a eu de beaux momens dans le rôle de Cora, et M. Phillippe a rendu avec chaleur celui d ’Alonze.

Le nouvel Esprit des journaux français et étrangers, tome neuvième, prairial an 12, mai 1804, p. 260-263 :

[La première phrase du compte rendu dit l’essentiel : succès mérité, « versification […] facile et pure ». Puis l'intrigue est racontée acte par acte. Puis on donne le nom de l’auteur, qui a une belle carrière littéraire derrière lui, et celui des acteurs principaux, « vivement applaudis ». Une dernière remarque revient un peu sur le jugement positif du début : le public du mélodrame veut plus d’effets spectaculaires que ne lui en offre le Théâtre de la Porte Saint-Martin : il faudrait que la direction du théâtre en tienne compte.]

THÉATRE DE LA PORTE SAINT-MARTIN

Les Péruviens, drame en trois actes, en vers.

Cette pièce a obtenu un succès et le mérite. La versification en est facile et pure.

Premier acte. - Cora, fille du cacique, a vu périr sa mère sous les coups du farouche Alvar, mais elle est sauvée par Alonze, fils de ce vainqueur cruel. La reconnaissance fait maître dans le cœur de la sensible Péruvienne, autant d'amour qu'elle en inspire au jeune Espagnol, qui bientôt, dans un combat, prive son amante d'un frère, seul espoir du cacique. Tel est le récit que l'infortunée Cora fait à une amie, lorsque son père vient lui annoncer que le sort des armes l'a rendu maître d'un de ces étrangers qui, depuis si long-temps, ravagent le Pérou : c'est de la main de sa fille que ce prince irrité veut qu'il reçoive la mort. Il paraît cet étranger ; c'est Alonze ! Cora frémit d'horreur et dissimule. Le supplice d'Alonze est différé ; il est confié à une garde sûre.

Second acte. - Cora ordonne à son amie de délivrer Alonze. Un instant suffit à l'amitié pour réussir ; il est libre, tombe aux pieds de sa libératrice, avoue un amour jusqu'alors renfermé dans son sein, et refuse une liberté qui exposerait Cora à l'indignation de son père. Cora, touchée de tant de noblesse, est combattue par le devoir, la crainte ; et l'aveu des sentimens qui dévorent son ame, errant sur sa bouche, échappe enfin à la trop sensible Péruvienne, lorsque son père arrive à la tête de ses gardes. L'amour mutuel qui anime sa fille, et la victime que sa vengeance réclame, ne peuvent appaiser sa haine ; il arme la main de Cora du fer meurtrier ; elle le prend, mais pour s'en frapper, lorsqu'Alonze la désarme, et remet ce fer aux mains de l'insensible cacique, que tant de générosité ne peut fléchir : il attend tout de la bonté de son père.

Troisième acte. - Cora espère que la paix sera le fruit de la démarche de son amant. Le cacique, éclairé par les cruautés d'Alvar, ne peut se livrer à cet espoir ; il réfute même au jeune Espagnol ses vertus : sans son amour, dit-il, il serait aussi criminel que son père. Alonze, repoussé et maudit par l'auteur de ses jours, vient enlever à Cora son espérance, et rapporter sa tête aux pieds du cacique, qui cède à tant de générosité et approuve leur amour.

Le signal des combats se fait entendre ; c'est Alvar, ce sont ses féroces guerriers, Alonze et le prince volent à la tête de leur troupe ; Cora elle-même arme sa main d'un fer meurtrier qu'elle destine à frapper Alvar ; mais ses pas sont enchaînés par son amie. Le cacique est vaincu, sa troupe désarmée ; les Espagnols vont l'immoler : Cora sollicite en vain sa grace ; elle sert de rempart à son père, qui brave les menaces des soldats d'Alvar, et ose s'avouer pour son meurtrier. Il va périr, lorsqu'Alonze arrive, devient son défenseur, et déclare le père de Cora pour son sauveur. Les officiers espagnols, touchés du discours d'Alonze, émus par les charmes de Cora, et sensibles aux malheurs des Indiens, forment alliance avec le cacique, qui unit les deux amans.

L'auteur a été demandé ; c'est M. Dumaniant, avantageusement connu dans la carrière littéraire.

Mme. Lepelletier, MM. Philippe et Dugy ont été vivement applaudis. On doit observer, que ce genre d'ouvrage est trop froid et trop nu pour ce théâtre ; que le public, qui se porte habituellement aux spectacles consacrés au genre dit du Mélodrame , et qui verrait avec plaisir ce théâtre l'emporter sur d'autres, à cause de la beauté de son local, exige plus en effets dramatiques : mais on doit croire que cette administration naissante sentira cette vérité, d'autant plus qu'elle accueille bien les auteurs.

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