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Le Rival Maitresse

Le Rival Maitresse, vaudeville, folie en un acte, 19 pluviôse an VI ([7 février 1798].

Théâtre du Vaudeville.

Titre

Rival Maîtresse (le)

Genre

vaudeville, folie

Nombre d'actes :

1

Vers / prose ?

prose, avec des couplets en vers

Musique :

vaudevilles

Date de création :

19 pluviôse an 6 (7 février 1798)

Théâtre :

Théâtre du Vaudeville

Auteur(s) des paroles :

 

Courrier des spectacles, n° 354 du 22 pluviôse an 6 [10 février 1798], p. 2 :

[Très médiocre succès donc pour la pièce nouvelle, qui raconte une histoire peu crédible, autour des malheurs d’un physionomiste facile à tromper. Le jeune homme qui le dupe réussit finalement à épouser sa fille, ce qui n’est pas vraiment une surprise. Du roman de Faublas, le jeune auteur (resté anonyme) a tiré une pièce « remplie de longueurs, d’invraisemblance et d’inconvenance », mais le critique revendique pour lui l’indulgence due aux débutants.]

Théâtre du Vaudeville.

On a donné le 19 de ce mois à ce théâtre la première représentation du Rival maîtresse, plaisanterie en un acte ; cette pièce n’a eu qu’un très-médiocre succès.

Monrose, jeune homme étourdi et léger, s’est mis en tête de jouer un plaisant tour à un Champenois, qui se pique d’être très-grand physionomiste. A tel effet il s est déguisé en femme, et au milieu des plaisirs d’un bal il est parvenu à se faire adorer de Sottival, ( c’est le nom du physionomiste.) Celui-ci est si enchanté de sa conquête, qu’il en est devenu presque fou. P[a]r malheur pour lui la Belle inconnue a di[s]paru ; et après bien des recherches vaines, Sottival s’est décidé, pour mettre fin à ses regrets, de fuir une ville où il ne pouvoit plus exister sans sa Belle inconnue. Il est venu fixer son séjour à Paris ; là il a fait la connoissance d’un nommé Floridor, qui, vu son grand bien, lui a promis sa fille Uranie en mariage, et qui même n’attend plus pour les unir, que 1’arrivée d’une nièce qu’il n’a pas vue depuis douze ans. De son côté, Monrose est aimé d’Uranie ; mais il ne peut l’obtenir, n’ayant pas autant de bien que son rival. Il faut parer à ce mariage : Monrose imagine de prendre le déguisement de la nièce que Floridor attend, et sous ce costume de faire renoncer Sottival à la main d’Uranie; il se présente ainsi travesti à notre physionomiste, qui croit reconnoître sa Belle inconnue du bal. Monrose lui repro[ch]e son infidélité, et après bien des emportemens et des menaces, il lui ordonne de renoncer à la main d’Uranie, et de l’épouser. Sottival consent à tout, et rend à Floridor la parole qu’il lui avoit donnée d’épouser sa fille. Nous passerons sous silence un duel que Monrose propose à Sottival pour éprouver sa valeur, cela ne tend aucunement à l’intrigue principale, qui se termine au refus que fait Sottival de la main d’Uranie ; Floridor accorde sa fille à Monrose, et ce n’est qu’en cet instant que le physionomiste reconnoit qu’il a été dupé.

Le roman de Faublas a fourni le sujet de cette pièce, qui est remplie de longueurs, d’invraisemblance et d’inconvenance ; mais c’est le coup d’essai de l’auteur, et il faut un peu d’indulgence pour les talens naissans ; il y a de la gaîté et quelques couplets assez piquans

Le Censeur dramatique, ou Journal des principaux théâtres de Paris et des départemens, tome troisième, n° 19 (10 ventôse an 6), p. 17-21 :

[Un article très riche, sur bien des plans : le fameux amateur de vaudeville qui sert de truchement aborde beaucoup de questions importantes : son récit de l’intrigue a le mérite de rnedre clair ce que d’autres ne sont pas arrivés à saisir avec autant d’acuité ; il ose dire tout le mal d’une pièce, et d’en critiquer le succès, à ses yeux injustifié ; il accorde enfin une large place au jeu des acteurs, pour donner des conseils sévères à plus d’un, mais toujours avec le souci de les faire progresser ; certains propos peuvent surprendre (sur la poitrine de Mlle Hélène, par exemple) ; mais on peut retenir des propos intéressants sur les emplois (en particulier pour Léger ;enfin, petite incursion dans les coulisses, à la recherche de l’auteur, en proposant un nom, qui n’est peut-être pas celui de l’auteur, mais qui a part pourtant aux dividendes...]

THÉÂTRE DU VAUDEVILLE*.

Pièce nouvelle.

« On a donné, le 19 pluviôse sur ce Théâtre, la première Représentation du Rival-Maîtresse, Vaudeville, en un acte. Voici le plan de cet Ouvrage.

» Sottival, Amant de Julie, a pour Rival un jeune homme nommé Monrose, qui l'a connu en Champagne à un bal masqué, dans lequel il s’est amusé à ses dépens, en se déguisant en femme, et le rendant amoureux. Il se sert encore de la même ruse pour rompre le mariage que Sottival étoit sur le point de conclure avec sa Maîtresse ; et en conséquence il prend des vêtemens de femme, avec lesquels il parvient à se faire reconnoître et à réenflammcr Sottival, à qui il promet sa main et une fortune considérable. On conçoit aisément le résultat de ce manège ; Sortival rompt avec le père de la Demoiselle ; et ce qu'il y a de mieux et de plus vraisemblable, c'est qu'il le prie d'accorder la main de sa fille à un certain Monrose qu’il ne connaît pas, mais qu’il vient d’apprendre être aimé d’elle depuis long-temps. Le père ne manque pas de répondre qu'il n'a pas besoin de ses conseils pour marier sa fille. Le dénouement s'opère ensuite par Monrose, qui, après avoir repris ses habits d'homme, propose à Sottival de disputer sa Maîtresse le pistolet à la main, ce que celui ci refuse d’abord, et finit ensuite par accepter. Cependant ce duel n'a pas lieu, et l'affaire se termine à-peu-près au contentement de tout le monde, surtout des jeunes gens qui sont mariés.

» Tel est le cadre mesquin de cette petite Pièce qu'on devroit beaucoup plutôt nommer une froide Parade, car elle réunit ces deux qualités. Du reste, le style n'est nullement capable de faire oublier les défauts de la Pièce. Quelques couplets un peu saillans ; mais quelques autres beaucoup trop libres, et dont le Public a fait justice en deux ou trois endroits. Les sifflets ont accueilli cet Ouvrage d'une manière assez distinguée ; mais comme le dernier couplet a été chanté, et qu'au total l'Ouvrage a été sifflé jusqu'au bout, les Auteurs n'ont pas cru devoir considérer la Pièce comme tombée, et nous nous sommes apperçus, sans aucune surprise, que la Pièce a été affichée deux jours après, et depuis ce tems, elle a constamment été jouée à la grande satisfaction des Spectateurs qui, par ignorance des usages administratifs de ce Théâtre, ne manquent pas de rendre grâces à la généreuse complaisance de leurs prédécesseurs de la première Représentation, à la tolérante patience desquels ils imputent le bonheur de connoître un tel chef-d'œuvre.

» Quant à la manière dont cette Pièce est jouée, nous donnerons d'abord le conseil à M. Léger, qui remplissoit le Personnage de Sottival, de ne jamais se charger de rôles habillés ; il est si bien dans les Gilles ! Quoique le caractère de ce Personnage soit un composé de ridicule et de fatuité, comme l'Auteur n'en a pas toujours fait un homme de mauvais ton, ce rôle exige une tenue, un aplomb, et surtout une diction auxquels M. Léger est absolument étranger. Les finales de ses périodes qui sont toujours uniformes, et qu'il prend toujours dans le fausset, produisent entre autres choses un effet tellement désagréable, que l'oreille la moins difficile ne peut s'y accoutumer. M. Henry a assez bien joué le rôle de Monrose; mais malgré sa très jolie figure, son travestissement en femme a paru mascarade, et a trop nui à la vraisemblance. Mlle Fleury a mis un peu trop de froideur dans son rôle. Nous renouvellons à cette jeune personne le conseil d'ouvrir les yeux sur l'état de foiblesse où se trouve sa poitrine ; il lui faudra peut-être un régime un peu sévère, mais son talent, et même sa conservation y sont vivement intéressés, et le Public qui lui accorde quelqu'attentlon lui en saura gré.

» Nous donnons quelques éloges à Mlle Hélène dans son rôle de Soubrette ; nous ne doutons pas que cette Artiste ne pût faire quelque plaisir en étudiant souvent, et surtout en soignant sa prononciation qui est un peu lourde, et qui a besoin d'être articulée. Nous lui reprocherons encore un peu trop de rapidité dans la diction ; elle a en général le défaut assez commun aux jeunes Artistes de croire que l'on dit avec plus de chaleur quand on dit plus vite, ce qui n'est nullement vrai. Nous engagerons encore Mlle Hélène à tirer de sa physionomie le parti dont elle est vraiment susceptible ; elle a les yeux fort beaux et du piquant dans les traits, ce qui est un très-grand avantage dans son emploi. Nous l'engageons enfin à donner un peu plus de tems à ses études, dans lesquelles elle ne doit pas compter ses répétitions, et surtout à se mettre sous les yeux les bons modèles.

» Le Public ne s'est pas avisé, le jour de la première Représentation, de demander les Auteurs, qui en conséquence sont restés inconnus; mais un instinct qui nous sert quelquefois merveilleusement, nous a fait soupçonner véhémentement que M. Légèr trempoit au-moins pour quelque chose dans cette Pièce. La crainte de faire quelque tort à cet Artiste, homme estimable d'ailleurs, nous a engagés de ne faire part de nos soupçons qu'à quelques amis sûrs, ou du moins que nous avons cru tels, et nous ignorons si c'est à leur indiscrétion que nous devons le bruit sourd qui s'est bientôt répandu dans les couloirs de la Salle, que M. Léger avoit droit pour moitié dans le dividende du produit de la Pièce, ce qui après tout ne prouveroit pas qu'il en fût l'Auteur. »

* Cet Article est de l'Amateur du Vaudeville.

Magasin encyclopédique, ou journal des sciences, des lettres et des arts, 3e année, 1798, tome VI, p. 115-116 :

Le Rival Maîtresse, folie en un acte, jouée sur le théâtre du Vaudeville, le 18 pluviôse, n’a eu qu’un faible succès, et n’en méritoit pas davantage. L’idée est tirée du roman de Faublas.

Sottival est prêt à épouser Uranie, jeune personne qui lui préfère le sémillant Mont-Rose. On n’attend plus pour célébrer l’hymen, qu’une cousine qui doit arriver incessamment. Mont-Rose, qui ne veut pas que Sottival lui enlève Uranie, prend un habit de femme et passe pour cette cousine. Il feint d’être épris de Sottival et le force à renoncer à la main d’Uranie : bientôt après il revient dans ses habits d’homme, et lui propose, on ne saut pas trop pourquoi, un duel que Sottival n’accepte qu’à regret. Enfin, par un dénouement prévu, mais mal amené, Mont-Rose épouse Uranie.

Cette bagatelle a été fort bien jouée ; le cit. Henri sur-toutà très-bien rendu la scène difficile, où il est habillé en femme, et le citoyen Leger a été très-applaudi dans le rôle de Sottival.

L’Esprit des journaux français et étrangers, vingt-septième année, tome IV, avril 1798, p. 202-203 :

THÉATRE DU VAUDEVILLE.

Le Rival Maîtresse, comédie en un acte.

Un trait de la Vie du chevalier Faublas a fourni le sujet de cette pièce.

C'étoit une idée très-heureuse que celle de mettre sur la scène quelques-unes des situations très-piquantes dont ce roman est rempli ; mais on ne peut se dissimuler que l'auteur n'a pas été aussi heureux dans les changemens nombreux que les convenances de la scène y rendoient nécessaires.

Les principaux personnages sont trop chargés ; celui du jeune amoureux, qui, déguisé en femme, passe, aux yeux de son rival, pour la cousine de sa maîtresse, est surtout entiérement manqué. Au lieu de lui donner les grâces de l'étourderie qui font le grand mérite du rôle de Faublas, l'auteur en a fait un jeune homme emporté, qui conserve sous son déguisement le ton de la menace ; cette inconvenance surtout très-marquée dans les dernières scènes, y a excité de violens murmures.

Nous croyons qu'il sera facile à l'auteur de corriger ce défaut, & de supprimer quelques détails, où le ridicule trop chargé manque entiérement son effet.

Cette petite comédie soutiendra alors le succès que les premières scènes avoient mérité. Plusieurs couplets sont très piquans, & annoncent beaucoup de talens dans l'auteur qui est encore jeune, & dont cette production en est le premier ouvrage.

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