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Le Rival par amitié

Le Rival par amitié, vaudeville, de Dumolard et Antoine Favart, 6 septembre 1809.

Théâtre du Vaudeville.

La pièce est du petit fils de Charles Favart, Antoine Favart (1784-1867).

Titre

Rival par Amitié (le)

Genre

comédie mêlée de vaudevilles

Nombre d'actes :

1

Vers / prose ?

prose, avec des couplets en vers

Musique :

vaudevilles

Date de création :

6 septembre 1809

Théâtre :

Théâtre du Vaudeville

Auteur(s) des paroles :

Dumolard et Antoine Favart

Sur la page de titre de la brochure, à Paris, chez Martinet, 1809 :

Le Rival par amitié, comédie en un acte et en prose, mêlée de vaudevilles, Représentée pour la première fois à Paris, sur le Théâtre du Vaudeville, le 6 septembre 1809. Par MM. Dumolard et Favart.

La pièce est précédée d’une brève préface :

PRÉFACE DES AUTEURS.

L' analyse que nous avons trouvée dans le dictionnaire des théâtres, d'un opéra-comique de Pannard, que sa modestie l'avait empêché de faire imprimer, nous a inspiré le desir de rebâtir sur le plan d'un si bon architecte, et plût à Dieu que nous l'eussions mieux suivi ! En refaisant à notre manière ce petit ouvrage, nous n'avons donc voulu qu'essayer de rendre aux plaisirs du public une production perdue pour lui, et nous devons à la vérité de faire hommage de notre petit succès à l'auteur modeste et désintéressé que les gens de goût, plus justes envers lui qu'il ne l'était lui-même, ont mis au rang des pères du Vaudeville.

COUPLET D' ANNONCE.

AIR : Pégase est un cheval qui porte.
(Chevilles de Maitre Adam.)

L'Auteur de cette comédie
Tremble, et je vous en fais l'aveu ;
Mais pour assurer sa partie
Il cherche à se donner beau jeu.
Cependant quelques épigrammes
Mettraient ses calculs en défaut ;
Avec son quatorze de dames,
N'allez pas le faire capot.

Magasin encyclopédique, ou journal des sciences, des lettres et des arts, 14e année, 1809, tome V, p. 134 :

Le Rival par Amitié, vaudeville joué le 6 septembre.

Panard avoit fait jouer à la foire S. Germain, en 1752, l’Intrigue sans Homme ou l’Infidélité punie. Il paraît que les auteurs du vaudeville nouveau ont refait Panard. Une jeune personne veut dégoûter son frère, de l'amour qu'il a conçu pour une coquette ; elle se déguise en homme, et prétend rendre Julie infidèle ; mais. Julie reconnoît, malgré leurs déguisemens, Hortense et la Soubrette déguisée en Frontin ; elle persiffle les mystificateurs, et tout s'arrange par un mariage qui se fera sans doute. Mademoiselle Minette a bien joué les rôles de Nérine et de Frontin.

On a nommé les auteurs, MM. Dumolard et Favard,

L’Esprit des journaux français et étrangers, tome XI, novembre 1809, p. 275-279 :

[Quand on n’a pas grand chose à dire d’une pièce, on peut toujours se lancer dans des généralités plus ou moins liées à la pièce qu’on est censé présenter. Ici, donc, on va parler longuement de ce que c’est que de se déguiser en homme ou en femme, du caractère séduisant ou non d’un tel travestissement (« une grande femme assez noire et passablement degingandée » que sa voix et ses attitudes risquent de trahir face à un camarade « d'une petite figure blanche, délicate, d'une petite voix grêle qui jure de si mauvaise grace »), du goût des femmes à être dominées, voire battues. Mais on finit par arriver à la pièce, dont on commence par dire qu’elle doit beaucoup à une vieille pièce de Panard, si ancienne qu’on ne parlera pas de vol, mais qu’il aurait fallu enrichir « d'un grand nombre d'accessoires » pour masquer la simplicité de son action et aussi son manque de naturel). Le critique raconte alors une histoire assez compliquée de portrait et de déguisements, avant que tout ne s’éclaire et que chacun retrouve son sexe. Suit un jugement rapide, sur des couplets qui ont de l’esprit, sur le dialogue un peu vif entre femmes, mais dont le parterre ne s’est pas offusqué. Quelques sifflets à la fin, mais les auteurs ont été nommés.]

Théâtre du Vaudeville.

Le Rival par Amitié.

Il y a deux ou trois choses convenues à la comédie, comme par exemple que deux jeunes gens élevés ensemble sous le nom de frère et sœur, s'ils ne le sont pas, pourront fort bien devenir amoureux l'un de l'autre, sans qu'aucune des raisons qui les en auraient empêchés, s'ils eussent été véritablement ce qu'ils paraissent, agisse sur eux et arrête leur imagination ; c'est la nature qui les avertit. Mais un autre cas où la nature, à la comédie, se garde bien de parler, c'est lorsqu'une femme s'avise de se déguiser en homme pour faire la cour à une autre femme ; il n'y en a pas une qui ne soit prise dans le piège. J'ai lu cependant je ne sais quelle mauvaise comédie, je crois de Boissy, où un homme déguisé en femme et une femme déguisée en homme se prennent de goût l'un pour l'autre sous ce bizarre travestissement, sans pouvoir se rendre compte du penchant qui les attire ; car ce n'est même pas une amie très-attrayante pour une femme qu'une grande femme assez noire et passablement degingandée, très-extraordinaire par certains tons un peu masculins qui lui échappent, et encore plus ridicule par les manières feminines qu'elle tâche d'y associer De l'autre côté, un jeune homme fera ordinairement peu de cas pour son camarade d'une petite figure blanche, délicate, d'une petite voix grêle qui jure de si mauvaise grace, à qui l'on voit bien que la plus légère débauche ferait mal à l'estomach, et dont les petits airs cavaliers ressemblent eux mutineries d'un enfant qui veut faire le grand garçon. Mais il me semble que cette tournure-là doit déplaire encore plus à une femme. C'est un hommage peu flatteur que celui d'un enfant ; et s'il n'est pas aussi généralement vrai que le prétend Lovelace, que les femmes aiment les mauvais sujets, parce que, se connaissant en femmes, ils font à celle qu'ils préfèrent plus d'honneur par leur choix, toujours est-il sur qu'une femme n'est pas bien touchée d'être aimée, parce qu'elle est la première venue Les femmes aiment à conquérir ; la difficulté est un plaisir, parce qu'elle est un honneur ; et d'un autre côté cependant elles aiment qu'on leur en impose. Je n'entends pas bien le goût qu'ont, dit-on, les femmes pour être battues ; mais les femmes de tous les pays aiment assez qu'on ait la force nécessaire pour les battre et qu'on n'en fasse rien ; elles veulent pouvoir trembler devant celui qu'elles soumettent, pouvoir s'effrayer du plus léger signe d'un mécontentement qu'elles sont bien sûres d'appaiser d'un regard ; elles aiment que la force de celui sur lequel elles régnent relève à leurs propres yeux la grandeur de leur empire ; elles aiment même qu'en reprenant de temps en temps son autorité, il leur rende plus doux le plaisir de se faire obéir quelquefois. Une femme sait trouver de quoi satisfaire son amour-propre et dans l'empire qu'elle prend sur son amant et dans celui qu'elle lui cède. Il lui semble qu'elle s'associe à la force qui l'a subjuguée, et qu'elle en partage l'honneur. J’ai entendu chanter dans un vaudeville :

Femme qui soumet un héros
Croit remporter une victoire ;

et cela est plus vrai qu'il n'appartient à un vaudeville. Mais celle qui aime un enfant doit s'associer à des enfantillages et en partager tout le ridicule ; il me semble pour moi que rien ne doit être plus désagréable pour une femme que d'entendre dire de son amant qu'on l'a trouvé grandi. Et c'est à quoi nécessairement croit s'exposer une femme en se prenant de goût pour un prétendu amoureux à qui la figure la plus masculine que puisse avoir une femme donnera tout au plus la tournure d'un amoureux de quinze ans. Il n'en est pas moins convenu sur le théâtre que, ces petits êtres-là doivent tourner la tête aux femmes sitôt qu'ils l'entreprennent ; et cette métamorphose paraît si séduisante aux auteurs de comédies, qu'elle est fort loin de fournir un sujet neuf. On assure même que la sujet de ce vaudeville est absolument celui d'un ancien opéra comique de Panard, intitulé la Comédie sans homme ou l'Infidélité punie. Mais peu importe, dans les ouvrages de ce genre le fonds ne fait pas richesse et peut se prendre sans qu'il y ait de quoi crier au voleur. Malheureusement celui-ci n'est pas augmenté d'un grand nombre d'accessoires. La marche en est singulièrement simple, ce qui ne veut pas dire qu'elle soit fort naturelle. La coquette Julie reçoit depuis six mois les hommages de Clitandre ; elle a même fait plus, car elle a reçu son portrait qu'elle garde, dit-on, comme un trophée de sa vanité ; il me sembla pourtant qu'il n'y a pas beaucoup de quoi se vanter. C'est aussi un singulier amant que ce Clitandre qui fait accepter son portrait à sa maîtresse avant de demander qu'elle lui donne le sien. Les choses cependant en sont là ; Julie se soucie fort peu du portrait : elle déclare à sa soubrette qu'elle n'a gardé que pour s'amuser ce Clitandre qui l'ennuie, et qu'elle préfère de beaucoup le jeune Eraste qu'elle connaît depuis trois jours. Ce jeune Eraste, comme il nous l'apprend bientôt lui-même, n'est autre qu'Hortense, sœur de Clitandre, qui veut, en tournant la tête à Julie, ravoir le portrait de son frère, et, par cette preuve de sou infidélité ou de son indifférence, comme on voudra, car la chose n'est pas bien claire, le détacher d'elle et le ramener à la jeune Céphise qu'il aimait avant de s'attacher à Julie et dont il est toujours aimé. C'est pour cela qu'elle s'est présentée à Julie sous le costume d'un officier de dragons, et il faut avouer que de tous les amoureux femelles que j'aie vus jusqu'à présent au théâtre, Mlle. Rivière qui joue ce rôle, quoique fort agréable en femme, est par sa taille et même par sa voix celle qui peut le plus faire illusion. Mlle. Minette, sa soubrette ou valet, très-gentille dans la rôle de Frontin qui est le plus gai de la pièce, serait cependant beaucoup plus propre a porter l'habit de jockey que celui de valet-de-chambre, et c'est un bien petit amoureux pour Lisette, la suivante de Julie, qui a deux ou trois pouces de plus que lui. La maîtresse craint aussi qu'elle ne sache pas très bien parler d'amour à une femme. Bon, dit Lissette [sic], il n'y a qu'à parler de charmes, de flammes, appeler cruelle une femme qui ne l'est pas du tout ;

                   Et mais, oui da,
Vingt fois par jour j'entends ces discours-là.

Quoiqu'il soit un peu différent de répéter ce qu'on a entendu ou de parler d'après nature, le prétendit Frontin fait de rapides progrès sur le cœur de Lisette ; la maîtresse paraissait avancer aussi grand train dans le cœur de Julie, quand celle-ci entend quelques mot qui lui font soupçonner que son officier de dragons est la sœur de Clitandre ; et comme ces choses-là sont toutes simples, elle devine tout de suite son projet, et tout de suite elle se détermine, on ne sait pas trop pourquoi, à donner à cette sœur le plaisir de lui rendre le portrait de son frère, quoique jusqu'alors, à ce qu'elle nous a dit, elle n'eût feint d'aimer Clitandre que pour faire enrager sa sœur qui voulait l'éloigner d'elle. Elle vient avec le portrait à son cou ; le prétendu Eraste, en voyant ce portrait, joue la jalousie, le désespoir ; Julie joue l'attendrissement et le lui sacrifie ; mais, ensuite elle veut qu'Eraste l'épouse, et l'on ne peut deviner pourquoi Eraste, qui tient le portrait et n'a plus rien à dissimuler, est si confondu, si troublé à cette proposition qu'il paraît prêt à en perdre la tête. Julie termine son trouble en lui faisant lire le billet qu'elle a renfermé dans la boîte du portrait, qui prouve qu'elle savait tout et qui en outre contient clairement le congé de Clitandre, et les deux amoureux deviennent les meilleures amies du monde.

Il y a de l'esprit dans plusieurs couplets de ce vaudeville ; on voit au ton un peu vif du dialogue qu'entre femmes on a cru ne pas devoir se gêner. Mais la parterre se fâche peu de cette liberté, et le commencement de la représentation promettait de la gaieté ; mais la fin n'a pas également réussi, et quelques sifflets se sont mêlés aux voix qui ont demandé les auteurs, MM. Favard et Dumolard.

Mémorial dramatique ou Almanach théâtral pour l’an 1810, quatrième année, p. 129 :

[Bel exemple d'indignation à propos du plagiat. Il n'est pas si fréquent de voir une condamnation aussi vigoureuse d'une reprise de certains éléments d'une pièce qui n'avait pas été représentée.]

LE RIVAL PAR AMITIÉ, vaudeville en un acte, par MM. Favart fils et Dumolard. (6 septembre.)

(Chez Martinet, libraire.)

Dans toute république bien constituée, on ne laisse point le vol impuni. Le Rival par amitié est un vol commis ouvertement dans la république des lettres, et qu'il faut dénoncer Cette petite pièce est toute entière de Pannard ; c'est une copie de la Comédie sans homme, ou l'Infidélité punie, jouée en 1732. Les auteurs n'ont pas même pris la peine de déguiser les noms ; leurs personnages s'appellent comme dans Pannard, Julie, Clitandre, Eraste, etc. ; le plan, la marche, les situations, les détails, le dénouement sont les mêmes ; on a reconnu jusqu'à des scènes entières prises à Pannard.

ll nous suffirait de transcrire l'analyse de la Comédie sans homme, qui se trouve dans le Dictionnaire dramatique, pour donner celle du vaudeville nouveau. Les changemens sont si peu de chose, qu'ils ne méritent pas d'être indiqués. Il est fâcheux que l’un des auteurs de ce plagiat porte le nom de Favart.

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