Le Secrétaire mystérieux

Le Secrétaire mystérieux ; comédie en trois actes et en vers, de Patrat fils, 8 janvier 1807.

Théâtre de l'Impératrice.

Titre :

Secrétaire mystérieux (le)

Genre

comédie

Nombre d'actes :

3

Vers / prose

vers

Musique :

non

Date de création

8 janvier 1807

Théâtre :

Théâtre de l'Impératrice

Auteur(s) des paroles :

Patrat fils

Almanach des Muses 1808.

Une jeune personne a fui la maison paternelle pour se soustraire à un mariage qu'elle redoute. Elle se présente sous les habits et le titre de secrétaire chez Damis, homme plein de sagesse et d'indulgence. Il pénetre bientôt le secret de la jeune fugitive et se promet de la rendre à son pere. Il a auprès de lui un jeune ami, Dorval, dont la philosophie n'a pu tenir contre les charmes du rpétendus ecrétaire qu'il a vu au bal sous les habits de sons exe ; il se propose d'unir son sort au sien lorsque le pere de la jeune personne arrive. Il paraît consterné de la fuite de sa fille. Damis feint d'avoir une niece qui a commis une faute semblable, et l'exhorte à user ainsi que lui de toute l'autorité paternelle. Il espere que le tableau des rigueurs dont il l'invite à s'armer touchera le cœur de ce bon pere, qui en effet ne peut commander à son émotion. Il voit sa fille, lui pardonne, et l'unit à Dorval.

Ouvrage qui n'a ni l'intérêt d'un drame, ni la gaîté d'une comédie. Style très négligé. Peu de succès.

Courrier des spectacles, n° 3620 du 9 janvier 1807, p. 2 :

[Après un débat sur la qualité du titre, le sujet est défini, et n’a rien pour surprendre : « une jeune personne que son père veut forcer à un mariage qu’elle abhorre », qui fuit et s’habille en homme pour devenir secrétaire chez un homme à l’esprit ouvert, mais dont la femme est moins commode. Pour tester la capacité d’un homme à aimer, elle impose au secrétaire, femme habillée en homme, de s’habiller en femme pour le séduire. La fin du résumé de l’intrigue paraît bien confus, mais il montre bien que le père finit par pardonner à sa fille fugueuse, sans qu’on sache si elle séduit celui qu’on nous a présenté comme insensible à l’amour (mariage ou pas ?). Le jugement porté sur la pièce est assez sévère : on ne sait trop à quel genre elle appartient, entre comédie et drame ; après un premier acte « assez bien conduit », elle devient plus en plus faible d’acte en acte, au point que « les défauts du troisième ont failli compromettre le succès de la pièce ». Bien qu’écrite en vers, son style est négligé, rien de neuf dans les situations, en particulier les déguisements et reconnaissances, dont l’abus a fini par lasser le public. Le critique annonce la fin des « scènes larmoyantes » : il vaut mieux faire rire. Malgré tout, et quelques sifflets, l’auteur a été demandé et a été nommé.]

Théâtre de l’Impératrice.

Le Secrétaire mystérieux, comédie en trois actes, première représentation.

Il ne s’agit point ici d’un meuble à secret, comme l’imaginoient quelques parsonnes [sic] trompées par le titre de la pièce, qui lui-même est un peu mystérieux ; il ne s’agit que d’une jeune personne que son père veut forcer à un mariage qu’elle abhorre, qui fuit le toit paternel, qui se présente chez Damis en habits d’homme, et s’offre pour remplir chez lui les fonctions de secrétaire.

Damis est un homme plein de sagesse, de modération, un véritable philosophe dans la plus heureuse acception de ce mot ; il est indulgent pour les fautes de la jeunesse, toujours prêt à pardonner celles qui viennent de l’amour. Il prend un grand intérêt à son jeune secrétaire, qui se tient caché sous le nom de Victor. Bientôt il est instruit de tout ce qui le concerne, et forme le dessein de le réconcilier avec son père.

Madame Damis est loin d’avoir un caractère aussi heureux ; elle est dure, égoïste, impérieuse. Auprès d’eux est Dorval, jeune homme plein d’heureuses qualités, mais qui semble insensible à l’amour. Mad. Damis qui veut mettre à l’épreuve sa philosophie, fait prendre à Victor des habits de femme, et le conduit au bal sous le nom d’Adèle de Florville. Dorval la voit ; il déclare qu’il rend enfin les armes, et que son cœur est épris des charmes de la belle Adèle. Cependant, M. De Costille, père du prétendu Victor, arrive chez Damis son ami ; il est consterné de la fuite de sa fille. Damis feint de blâmer sa foiblesse ; il lui raconte qu’Adèle de Florville sa nièce a commis une faute semblable, et prétend qu’on doit, en pareil cas, user de toute l’autorité paternelle. De Costille blâme cette rigueur, et déclare qu’il est prêt à pardonner lui même à sa fille. En ce moment, elle paroit et se jette à ses pieds.

Cette comédie, qui tient beaucoup du drame, est écrite en vers. Le premier acte est assez bien conduit ; le second est plus foible que le premier ; et les défauts du troisième ont failli compromettre le succès de la pièce. Le style en est négligé : les situations n’ont rien de neuf ; le pathétique des voiles et des reconnoissances est un moyen si usé, que le public est très disposé à s’en amuser. Les scènes larmoyantes ne font plus pleurer personne. Il vaut mieux maintenant songer à faire rire. Malgré ces défauts et quelques coups de sifflets d’un caractère assez énergique, l’auteur a été demandé et nommé : c’est M. Patrat fils.

La Revue, philosophique, littéraire et politique, 1807, Ier trimestre, n° 3, 21 janvier 1807, p. 181-182 :

[On retrouve cet article dans l’Esprit des journaux français et étrangers, tome III, mars 1807, p. 280-282.

Des reproches faits à l'auteur, nous retenons qu'il ne faut pas mélanger les genres (drame ou comédie, il faut choisir), qu'il y a des règles à respecter (enchaînement de l'action, gradation des situations), et qu'il faut soigner l'écriture (sans incorrections ni barbarismes!).]

Théâtre de l'Impératrice, rue de Louvois.

Le Secrétaire mystérieux, en trois actes et en vers.

Ce mystérieux secrétaire est une jeune demoiselle qui, forcée de fuir le toit paternel par les rigueurs de son père, se déguise, entre en qualité de secrétaire chez une femme étourdie, inspire, sous ce déguisement, un tendre sentiment à la soubrette et un peu de jalousie au mari ; mais bientôt celui-ci, plus clairvoyant que tout ce qui l'entoure, surprend le secret, s'en amuse, et va trouver le père de la fugitive qui, bourrelé de remords et cherchant les occasions de réparer ses torts, est enchanté de retrouver sa fille et de mériter son pardon en l'accordant lui-même.

L'auteur de cette pièce, qui tient une place assez indéterminée entre le drame et la comédie, aurait besoin de méditer davantage ses sujets et les règles de l'art dramatique ; elles lui apprendraient à mieux enchaîner une action, à mieux coudre des scènes, à graduer les situations. Son ouvrage présentait un fond d'intérêt ; mais il semblait attendre une main plus exercée pour le faire valoir. L'auteur ne manque pourtant, à ce qu'il paraît, ni d'esprit, ni de facilité ; mais ce qu'il faut lui recommander sur-tout de soigner davantage, c'est le style ; de fréquentes incorrections et des barbarismes gâtent souvent une tirade qui paraîtrait d'abord assez facilement écrite. A travers toutes celles qui m'ont choqué dans sa pièce, je citerai un vers qui fera mieux sentir à quel point l'auteur est quelquefois éloigné d'exprimer ce qu'il veut dire. En parlant de son principal personnage et voulant annoncer qu'elle a fui le toit paternel, il s'exprime ainsi :

Elle a fui le séjour de la paternité.

C'est en lisant de pareils vers que Boileau s'écriait avec raison :

On se tue à rimer ; que n'écrit-on en prose ?

Je pourrais citer vingt exemples pareils : et voilà sans doute ce qui a fait entremêler les applaudissemens de murmures et de sifflets. Si l'auteur est jeune il peut y avoir encore de l'espérance. On le nomme Patrat ; c'est le fils d'un comédien qui de son vivant s'était acquis une espèce de célébrité sur les théâtres de province, et qui a donné lui-même avec succès quelques petits ouvrages.                         L. C.

Archives littéraires de l'Europe, Volume 13 (1807), Gazette littéraire, janvier 1807, p. xix :

[Le compte rendu assassine assez bien la pièce : elle n’est ni romanesque, ni gaie, le moyen de la « méprise de sexe » est bien mal employé. La tentative du fils d’imiter une pièce de son père est plus que maladroite : « nous conseillerons seulement au nouvel auteur de mieux étudier ceux qu'il voudra imiter à l'avenir ».]

Le Secrétaire mystérieux, comédie en trois actes et en vers, de M. Patrat fils.

Cette comédie n'est pas morte en naissant, mais elle n'a pas eu une longue vie ; nous n'oserions même pas assurer qu'elle ait eu deux représentations. L'auteur a prétendu faire un mélange de romanesque et de comique ; le romanesque n'a excité ni la curiosité ni l'intérêt, parce que tous les secrets de l'intrigue ont été dévoilés avant la fin du premier acte ; le comique n'a point fait rire parce que la méprise de sexe qui devoit le faire naître, n'existoit que pour les personnages accessoires, et n'en étoit point une pour les intéressés ni pour le public. Il sembleroit que M. Patrat fils a été séduit par le succès d'une jolie pièce de son père, intitulée : L'Heureuse erreur, où le comique est aussi fondé sur une méprise de sexe dont le public n'est pas dupe ; mais là elle est partagée par tous les acteurs, et ce qui rend la chose encore plus plaisante, c'est que celui qui en est l'objet ignore que cette méprise ait lieu. Il seroit ennuyeux pour nos lecteurs d'entrer ici dans la comparaison de ces deux ouvrages. Nous conseillerons seulement au nouvel auteur de mieux étudier ceux qu'il voudra imiter à l'avenir.

L’Heureuse erreur est une comédie en un acte et en prose, de Joseph Patrat, créée au Théâtre des Italiens le 22 juillet 1783.

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