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Sophie et Moncars

Sophie et Moncars, ou l’Intrigue portugaise, opéra en trois actes, de J. H. Guy, musique de Gaveaux, 9 vendémiaire an 6 [30 septembre 1797]

Théâtre de la rue Feydeau

Titre :

Sophie et Moncars, ou l’Intrigue portugaise

Genre

opéra

Nombre d'actes :

3

Vers / prose

en prose, avec des couplets en vers

Musique :

oui

Date de création :

9 vendémiaire an 6 [30 septembre 1797]

Théâtre :

Théâtre de la rue Feydeau

Auteur(s) des paroles :

J. H. Guy

Compositeur(s)

P. Gaveaux

Almanach des Muses 1799.

Moncars, riche Portugais, a laissé l'administration de ses biens et la surveillance d'une jeune fille à son intendant. On le croit mort. L'intendant convoite les biens et la pupille. Le fils de Moncars aime celle-ci ; l'intendant leur persuade qu'ils sont frère et sœur. Il met dans ses intérêts le prieur d'un couvent voisin, qui doit engager le jeune Moncars à prendre l'habit religieux. Cependant Moncars père arrive incognito, évente les projets de son intendant, se fait passer pour un moine envoyé par le prieur, et sous ce déguisement découvre la scélératesse de son intendant, se fait connaître, rentre dans ses biens et marie les deux amans.

Peu de situations neuves, mais des scènes comiques, des détails piquans, une musique très variée, du succès.

Sur la page de titre de la brochure, à Paris, chez Tiger, an VI (1797 v. st.) :

Sophie et Moncars, ou l’Intrigue portugaise ; comédie lyrique en trois actes et en prose, mêlée de chant: Représentée pour la première fois à Paris sur le Théâtre de la Rue Feydeau, le 9 Vendémiaire an VI de la République. (30 Septembre 1797.) Par J. H. Guy, Auteur d’Anacréon. Mise en Musique par P. Gaveaux.

Magasin encyclopédique, ou journal des sciences, des lettres et des arts, troisième année (an 5, 1797), tome troisième p. 426-428 :

[[Après avoir indiqué que la pièce a connu le succès, le critique entreprend d’en résumer l’intrigue, une histoire plutôt compliquée (même si le critique dira plus loin que « l’action est simple »), la sombre histoire d’un « homme d’affaires » qui espère s’emparer des biens de son maître dont on vient d'annoncer la mort, en éliminant son fils et en épousant celle qu’il traitait comme sa fille. Il les persuade d’abord qu’ils sont frère et sœur, et ils forment le projet d’entrer en religion. Heureusement, le père qu’on croyait mort revient et met à mal ce projet, avant de révéler la trahison de son « homme d’affaires » avec l’aide d’un fidèle serviteur. La pièce s’achève comme de juste par le mariage des deux jeunes gens. L’atmosphère de la pièce est allégée par la présence de scènes gaies qui y apportent « une agréable variété ». Elle a connu un beau succès, malgré quelques invraisemblances : elle le doit à une action simple, un sujet plein d’intérêt, fait pour « plaire aux ames douces et sensibles ». Les auteurs sont nommés, et la musique de Gaveaux fait l’objet d’un commentaire très positif. L'interprétation, enfin, est jugée très satisfaisante. Acteurs et actrices ont joué avec ensemble, la voix de certains est mise en avant, et même une débutante se voit féliciter pour ses progrès « dans l’art du chant et celui de la comédie ».]

On a donné le 9 vendémiaire, au théâtre de la rue Feydeau, la première représentation de Sophie et Moncars, ou l'Intrigue Portugaise. Cet ouvrage a eu beaucoup de succès.

Don Manuel , homme d'affaires de Don Moncars, prend soin, pendant l'absence de son maître, du jeune Moncars, son fils, et de Sophie, fille d'un ami de Moncars père, et qu'il a élevée comme la sienne propre. Les gazettes publient la mort de Moncars, tué dans un combat sur mer. Le traître Manuel conçoit le projet infernal de s'emparer des biens du jeune homme et d'épouser Sophie. Il fait croire aux jeunes gens qu'ils sont frères, et que l'amour qu'ils ont l'un pour l'autre est criminel. Tous deux veulent s'ensevelir dans un cloître. Le Père Jérôme, supérieur d'un couvent, a dû envoyer à Manuel deux religieux pour fortifier le jeune Moncars dans sa résolution, et dissuader Sophie de la sienne ; mais Moncars le père n'est pas mort ; il a appris l'affreux projet de Manuel, et par l'intrigue de son valet, homme brave et fidèle, ils ont enivré les deux religieux, et ils paroissent sous leurs habits. On sent bien que Moncars , sous le nom de Père Eugène , loin de servir le projet de Manuel, éloigne les deux jeunes gens de celui de se sacrifier à une vocation forcée ; cependant le Père Jérôme instruit Manuel du retour de ses religieux, et de la fraude qui a été commise. Il envoie une troupe de brigands, commandés par un faux Alcade, pour se saisir des prétendus religieux. Moncars se fait connoître ; mais Manuel ordonne à ses satellites de se jeter sur lui ; ils vont obéir, quand le faux Alcade lui-même présente deux pistolets à ces scélérats pour les contenir. Il en tire un, et à ce coup arrivent une troupe de soldats et un véritable Alcade qui les entraînent. Alors le faux Alcade, le sauveur de Don Moncars et de sa famille, se fait connoitre ;. c'est le brave valet de Moncars, ou plutôt son fidèle ami, qui, instruit du danger de son maître, a imaginé pour le sauver de se mettre à la tête des monstres qui alloient l'égorger. Moncars embrasse ses enfans, leur apprend le secret de leur naissance et les unit.

Quelques scènes fort gaies entre le valet de Moncars, époux de la Duègne, qui croyant son mari mort avec Moncars, va épouser un valet Galicien, jettent dans l'ouvrage une agréable variété.

Cette pièce a été très-applaudie et mérite son succès, quoiqu'on lui puisse reprocher quelques invraisemblances. L'action est simple, le sujet intéressant, et fait pour plaire aux ames douces et sensibles. Les paroles sont du citoyen Guy, auteur d'Anacréon , et la musique du citoyen Gavaux ; elle a fait le plus grand plaisir. Le chant est en général doux et facile ; les accompagnemens sont riches et harmonieux.

Tous les rôles sont bien remplis, et la pièce est jouée avec beaucoup d'ensemble : on voit avec plaisir le citoyen Narbonne chargé du rôle de Manuel. Le citoyen Vallière a donné au rôle de Moncars une expression qui entraîne l'ame. Le citoyen Jausserand annonce un talent vraiment distingué ; le son de sa voix est touchant, il la manie avec adresse, et sait donner à ce qu'il chante l'accent d'une véritable sensibilité. Les citoyens Juliet et Lesage, et la citoyenne Auvrai font toujours le même plaisir, et la citoyenne Augustine Lesage fait chaque jour des progrès plus marqués dans l'art du chant et celui de la comédie.

La Décade philosophique, littéraire et politique, sixième année de la République, Ier trimestre, n° 2 (20 Vendémiaire an VI, mercredi 11 Octobre 1797), p. 103-105 :

[Article repris dans l’Esprit des journaux français et étrangers, 1797, volume 5 (septembre-octobre 1797), p. 275-277.

Dès le résumé de l’intrigue, le critique montre son jugement : la pièce est faite de « clichés », qui respectent les « us dramatiques ». Même chose avec le personnage d’un valet de comédie. Absence d’originalité donc dans la pièce, obscure malgré des longueurs qui ne permettent pas de rendre l’intrigue plus claire. Défauts rachetés selon le critique grâce à des détails qui manquent pourtant de naturel. La musique de Gaveaux a beaucoup de mérite : son coloris est adapté aux situations, « son style est juste & vrai » ; mais sa vrai qualité, pour laquelle « nous lui avons une obligation infinie », c’est qu’il ne fait pas le « fracas bruyant, ce cliquetis d'accords bizarres qui paroît faire aujourd'hui le fonds du systême musical à la mode ». « L’auteur des paroles » est moins bien traité... Juste une phrase finale, qui rappelle surtout une œuvre antérieure.]

Théâtre lyrique de la rue Feydeau.

Sophie et Moncars.

On a donné le 9 de ce mois avec un grand succès la première représentation d'un opéra comique intitule: Sophie et Moncars ou l'Intrigue portugaise.

Moncars, riche Portugais, a laissé depuis douze ans entre les mains de son intendant l'administration de ses biens, son fils et une jeune fille, dont il avait cru devoir se charger après la mort d'un de ses amis. Il ne donne point de ses nouvelles : on le croit mort.

Cet intendant, suivant les us dramatiques , est un vieux coquin rusé qui pendant l'absence de son maître, et n'en recevant point de nouvelles, convoite ses biens et sa pupille.

Suivant les mêmes us Sophie déteste le tuteur, et préfère le jeune Moncars avec lequel elle a été élevée, et dont la tendresse répond à la sienne.

Le vieux intendant commence par persuader aux deux amans qu'ils sont frère et sœur ; ensuite pour mieux éloigner son rival, il met dans ses intérêts le prieur d'un couvent voisin, afin de forcer s'il se peut le jeune Monears à quitter le monde, et à se revêtir de l'habit monastique.

Moncars père arrive incognito, s'informe de tout avant de se faire connaître, saisit le fil de cette coupable intrigue, et la déjoue comiquement en se fesant lui-même passer pour moine envoyé par le prieur. Sous ce déguisement, il est bientôt à portée de connaître toute la scélératesse de son intendant ; il reçoit les confidences, se découvre, confond les intrigans, unit les deux amans, et rentre dans ses possessions.

Ajoutez à ce fonds un valet de retour avec son maître, que sa femme ne reconnaît point, qui se déguise pareillement en moine pour surprendre des secrets qu'il aimerait mieux ignorer, et vous aurez tout le canevas de l'ouvrage.

On voit que l'imbroglio, dans le genre espagnol, ne présente aucune situation neuve ; que l'auteur a compliqué son action au point de paraître nécessairement quelquefois long sans en être moins obscur ; mais il a racheté ces défauts par des détails variés et piquans auxquels il ne manque peut-être qu'un peu de naturel dans le dialogue, car l'esprit y sent trop la recherche ; cependant, au moment où nous sommes, cette pièce a fait et dû faire grand plaisir, et le meilleur service qu'on puisse nous rendre, est de nous distraire un peu par la gaieté.

On doit aussi rendre justice au C. Gaveaux ; le coloris de sa musique est varié suivant les situations qu'il avait à peindre; son style est juste et vrai sans cesser d'être agréable. Il a su se défendre, et c'est ce dont nous lui avons une obligation infinie, de ce fracas bruyant, de ce cliquetis d'accords bizarres qui parait faire aujourd'hui le fond du système musical à la mode ; ses finales sont dialoguées avec esprit.

L'auteur des paroles est le C. Guy, déjà connu fort avantageusement par le joli opéra d'Anacréon au théâtre des Arts.

D’après la base César, la pièce a été jouée 55 fois, principalement au Théâtre Feydeau à partir du 30 septembre 1797 (1797 :17 fois au Théâtre Feydeau, 3 fois au Théâtre Italien ; 1798 : 1 fois au Théâtre français de la rue de Richelieu, 16 fois au Théâtre Feydeau, 2 fois au Théâtre Italien ; 1799 : 16 fois au Théâtre Feydeau).

D’après Nicole Wild et David Charlton, Théâtre de l'Opéra-Comique Paris : répertoire 1762-1972, p. 410, la pièce, créée en 1797 sur le Théâtre Feydeau, est entré à l’Opéra Comique le 9 février 1802.

 

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