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Le Valet d'emprunt, ou le Sage de dix-huit ans

Le Valet d'emprunt, ou le Sage de dix-huit ans, comédie en un acte en prose, de Marc-Antoine Désaugiers et *** [Dumersan] ; 2 mars 1807.

Théâtre de l'Impératrice.

Titre :

Valet d’emprunt (le), ou le Sage de dix-huit ans

Genre

comédie en prose

Nombre d'actes :

1

Vers / prose

prose

Musique :

non

Date de création :

2 mars 1807

Théâtre :

Théâtre de l’Impératrice

Auteur(s) des paroles :

Desaugiers et *** [Dumersan]

Almanach des Muses 1808.

Ouvrage faible, et dans lequel on eût désiré retrouver plus souvent l'esprit et la gaieté que montre ordinairement l'auteur. Peu de succès.

Sur la page de titre de la brochure, à Paris, chez Madame Masson, 1807 :

Le Valet d’emprunt, ou le Sage de dix-huit ans. Comédie en un acte en prose. Par MM. Desaugiers et *** Représentée pour la première fois sur le Théâtre de l’Impératrice, par les comédiens de l’Odéon, le Lundi 2 mars, 1807.

Le catalogue général de la BNF donne le nom du coauteur : comme souvent, ***, c’est Dumersan.

Courrier des spectacles, n° 3672 du 3 mars 1807, p. 2 :

[Le sujet n’est pas original, mais on n’en connaîtra pas la source. On saura juste que la pièce ne comporte pas « des traits neufs, des scènes originales ». L’intrigue met aux prises deux personnages de caractère opposé, ayant chacun un enfant à marier, et un valet qui se charge de rende possible un mariage que les deux pères refusent. L'habileté du valet lui permet d’arriver à ses fins. A cette intrigue en effet peu originale s’ajoute « un personnage épisodique », amoureux d’une « maîtresse [qui] ressemble parfaitement à Desforges Maillard » (l’obscur poète du début du siècle précèdent, rendu brièvement célèbre pour avoir pris un pseudonyme féminin pour faire publier ses poèmes ?). il sert d’amuseur des deux familles en produisant les lettres qu’un des deux pères a rédigées pour lui.C'est « le sage de dix-huit ans »du sous-titre. Le public s’est peu amusé à voir une pièce « qui offre peu d'intérêt, peu de vraisemblance, et même peu de [...] traits saillans » : ce n’est pas du meilleur Désaugiers !]

Théâtre de l’Impératrice.

Le Valet d'emprunt ou le Sage de 18 ans, (Première représentation).

La pièce est elle-même une espèce d’emprunt ; quoique l’auteur soit assez riche pour vivre de ses propres fonds, il a mieux aimé dépenser ceux des autres. Il ne faut donc point s’attendre à trouver ici des traits neufs, des scènes originales ; c’est une sorte de pasticcio de situations connues que l’auteur a fondues dans un acte dont le public s’est contenté.

Ses deux principaux personnages sont deux espèces d originaux d’un caractère tout opposé ; l’un est un vieillard gai, étourdi, n’aimant que le plaisir ; l'autre est un pédant lourd et ennuyeux qui ne s’exprime qu’en latin , qui ne parle jamais sans faire quelques citation [sic]. Le premier s'appelle Fonrose, le second Noirville. Fonrose a un fils (St. Brice) et Noirville une fille (Caroline) ; or on conçoit que St. Brice est amoureux de Caroline, et Caroline de St. Brice : mais Fonrose ne veut point que sa fille ait pour beau-pere un pédant comme NoirviIle, et celui ci ne veut pas que sa fille épouse le fils d’un fat comme Fonrose. Un valet se charge de tout accommoder. Comme les deux pere- ne se connoissent point, il se présente auprès de Noirville sous le nom de Fonrose, et affecte un grand amour pour les sciences. Cette scène est fort ridicule, car le valet ne dit guères, en latin et en français, que des sottises, et il faut supposer que Noirville est un imbécille renforcé pour ne pas reconnoître l’artifice. Quand le valet a trompé le pere de Caroline, il se présente auprès de Fonrose pour le mystifier à son tour ; il se fait annoncer sous le nom de Noirville, et affecte le ton le plus jovial, les airs les plus évaporés. Mais on reconnoit la ruse, et les deux originaux également honteux de s’être laissé jouer, prennent le parti de se reconciler [sic] et de marier leurs enfans.

Au milieu de cette intrigue est un personnage épisodique qu’on appelle Eugène. Cet Eugène qui fait le Caton, est néanmoins très-amoureux, mais sa maîtresse ressemble parfaitement à Desforges Maillard. C’est Fonrose lui-même qui a conduit cette intrigue ; c'est lui qui a monté la tête de ce sage de dix-huit ans, lui qui a écrit des lettres d’amour, lui qui a reçu ses réponses et ses billets. Il produit toute la correspondance à la fin de la piece, ce qui amuse beaucoup les deux familles.

Le public s’est peu amusé à cette représentation, qui offre peu d'intérêt qui distinguent habituellement les agréables productions de M. Désaugiers.

Magasin encyclopédique, ou journal des sciences, des lettres et des arts, année 1807, tome II, p. 427-428 :

THEATRE DE L'IMPERATRICE.

Le Valet d'emprunt, ou le Sage de dix-huit ans, comédie en un acte.

Cette petite comédie a eu beaucoup de succès.

Deux pères de caractères absolument opposés, élèvent leurs enfans chacun à sa manière. M. de Noirville, homme fort triste, n'a fait du sien qu'un faux philosophe dont l'extérieur trompe tout le monde. Ce petit sage de 18 ans, conduit l'intrigue, sert les amours de sa cousine, se sert d'un valet d'emprunt pour représenter tour-à-tour chaque père devant l'autre : devient amoureux d'une femme qu'il n'a jamais vue, pour avoir entendu sa voix : enfin fait sottises sur sottises. Les apparences font croire à Noirville que toutes ces sottises ont été faites par le fils de M. de Fonrose : mais le dénouement amène une explication qui détruit toutes ses idées et lui prouve la fausseté de son plan d'éducation.

La gaîté, un dialogue comique ont fait le succès de ce petit ouvrage de M. Désaugiers. Picard jeune dans le rôle du valet d'emprunt, n'a pas peu contribué à son succès. Le jeune Firmin qui jouoit le sage de 18 ans, vêtu d'un habit sérieux, coîffé comme un père noble, en a fait une caricature très-plaisante. Les autres rôles ont été très-bien joués par Picard aîné, Bosset, Valcour, Valville et par Mlle Adeline.

Les Quatre Saisons du Parnasse, troisième année, printemps 1807, p. 321-324 :

LE VALET D'EMPRUNT, COMÉDIE EN UN ACTE ET EN PROSE.

On m'a assuré qu'un directeur du théâtre de Marseille, personnage renommé dans les coulisses, par un caractère de naïveté qui n'est pas du pays, ayant souvent remarqué que le premier bal qu'il donnoit en carnaval ne lui amenoit personne, tandis que le second étoit fort suivi, s'écria très sérieusement : Je les attraperai bien l'année prochaine, je commencerai par le second. Nos auteurs feroient bien d'imiter ce directeur, et d'esquiver les hasards des premières représentations : la plupart sont beaucoup plus heureux à la seconde.

Voilà d'abord la tragédie de Pyrrhus qui m'offre la preuve de ce que j'avance. Quelques coupures heureuses au cinquième acte, quelques vers faciles qui ont remplacé ceux qui avoient déplu, un peu plus d'ensemble dans la représentation, beaucoup plus de confiance dans les acteurs, tout a concouru au succès de l'ouvrage : il est déjà classé parmi ceux qui assurent à leurs auteurs un rang distingué dans les lettres comme dans le monde.

Vient ensuite, comparaison à part, M. Desaugiers, dont le Valet d'emprunt éprouve un sort à peu près semblable ; mais comme il s'agit ici d'un auteur de profession, il faut bien remarquer, en passant, que sa nouvelle comédie, si elle ne fait pas de tort à la petite réputation qu'il s'est acquise, ne contribuera pas non plus à l'augmenter beaucoup.

En effet, le sujet du Valet d'emprunt n'est ni bien neuf ni bien piquant. St.-Brice aime Caroline, et il en est aimé. Un amour sans obstacle, dont on pourroit fort bien s'accommoder dans la vie commune, ne sëroit pas supportable au théâtre. Aussi les auteurs de comédie ont-ils à leur usage particulier une foule de contrariétés et d'embarras, souvent fort peu vraisemblables, mais qui du moins les empêchent de nous présenter des personnages fades et languissants. On a observé que Molière ne mettoit ses amants en tête à tête que pour les faire quereller : mais nous voilà bien loin de M. Desaugiers ; hâtons-nous de revenir à sa pièce.

Caroline est fille d'un certain M. de Noirville, très pédant, très sot, et par conséquent très entêté. Il n'a point de reproche à faire à son gendre prétendu ; mais il déteste cordialement M. de Fontrose, et il ne pardonne point à St.-Brice d'en être le fils. Si l'opposition des caractères produit la haine, celle des deux vieillards doit être extrême. Fontrose aime les plaisirs autant que Noirville les déteste. Cette animosité entre les deux chefs de famille auroit pu produire un drame bien noir : il faut savoir gré à M. Desaugiers de n'y avoir cherché qu'un contraste amusant. Il a su faire rire; et le critique a dit comme M. Baliveau :'

.  .  .  .  .  .  .  .  Me voilà désarmé.

(Métromanie.)

Pour parvenir à ce résultat, M. Desaugiers a mis en scène un valet qui prend alternativement le costume et le nom des deux pères. Il est pédant et triste avec M. de Noirville, il est facile et gai avec M. de Fontrose. La ruse est bientôt découverte ; on la pardonne, parce qu'il faut bien pardonner dans une comédie. Mais l'auteur et le public avoient besoin de cette raison, et sur-tout que la pièce finît : le dénouement a satisfait tout le monde. L'auteur a été demandé, et nommé.

M. Desaugiers a de la gaieté dans l'esprit ; il tourne facilement un couplet ; il est membre de la joyeuse réunion du Rocher de Cancale, mais c'est à ses jolies chansons, autant qu'à son appétit, qu'il doit cet honneur, et il n'en est pas uniquement redevable, comme l'illustre M. G. D. L. R., à la capacité de son abdomen. Cependant, le succès des comédies de M. Desaugiers, ainsi que sa réputation littéraire, reposent encore sur des fondements assez fragiles : il faut qu'il observe davantage et qu'il étudie mieux l'art si difficile du théâtre, s'il veut y mériter des succès durables. Ceux qu'il a obtenus jusqu'à ce jour ne peuvent être regardés que comme des avances que le public aime à faire aux jeunes talents, dans l'espérance qu'ils le paieront comptant dans la maturité de l'âge.

[M. G. D L. R., c’est Grimod de la Reynière, aussi célèbre critique dramatique que gastronome émérite.]

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