Vadé chez lui

Vadé chez lui, comédie en un acte et en vaudeville, Mêlée de scènes du genre grivois, par le citoyen Demautort, 16 Thermidor an 8 [4 août 1800].

Théâtre de l’Opéra-Comique, rue Favart.

Titre :

Vadé chez lui

Genre

comédie en vaudeville, mêlée de scènes du genre grivois

Nombre d'actes :

1

Vers / prose

prose, couplets en vers

Musique :

vaudevilles

Date de création :

16 thermidor an 8 [4 août 1800]

Théâtre :

Théâtre de l’Opéra-Comique, rue Favart

Auteur(s) des paroles :

Demautort

Sur la page de titre de la brochure, à Paris chez Michel, an huit – 1800 :

Vadé chez lui, comédie en un acte et en vaudevilles, Mêlée de scènes du genre; grivois ;
Représentée pour la première fois sur le Théâtre de l'Opéra-Comique, rue Favart, le 16 Thermidor an 8. Par le citoyen Demautort.

Courrier des spectacles, n° 1249, an VIII de la République, 17 Thermidor, p. 2 :

[Autour du personnage de Vadé, des scènes épisodiques destinées à faire rire avec le genre poissard et qui ont obtenu un succès qui aurait pu être disputé (on a rangé les fameuses clefs forées, si faciles à utiliser comme sifflets). « Il y a peu de fonds, il est vrai, mais des détails charmans, un dialogue spirituel et serré, une infinité de couplets saillans, tout cela a mérité à cet ouvrage de longs applaudissemens ». La distribution est remarquable.]

Théâtre Favart.

Le père du genre poissard ; celui qui a légué son langage aux Forts de la Halle et aux Fruitières, Vadé n'a pas épuisé le genre qu'il a créé ; son nom est pour nos auteurs modernes une mine riche à exploiter. Déjà Vadé à la Grenouillère, Vadé dans Jean Monnet ont été justement applaudis, Vadé chez lui obtint hier le plus grand succès à ce théâtre.

Voici de quelle manière l'auteur a préparé le public à la bienveillance à la fin de la pièce le Locataire :

Couplet d’annonce.

Vadé chez nous reprend ses droits,
Et permettez qu'il se signale
En vous offrant, comme autrefois,
Le tableau des gens de la Halle.
Ce soir, comme chacun de vous
De logis est propriétaire,
Vadé, tremblant, est bien jaloux
De rester votre locataire.

Vadé a élevé près de lui Catherine, jeune orpheline qui est sa servante,et qu'il destine en mariage à Jérôme, passeur du bac des Invalides. Comme Vadé a contracté des dettes, Catherine craint à chaque instant les créanciers. Elle prend pour l'un d'eux un ami de son maître, et elle engage celui-ci à se tenir sous clef, lorsqu'il reviendra. L'Ecluse (c'est le nom de cet ami) , revient en effet ; il a rendez-vous ce jour-là même avec Vadé, pour lui lire un ouvrage. Vadé et Catherine s'enferment, l'un dans son cabinet, l'autre dans sa chambre. L'Ecluse qui voit la méprise feint réellement d'être huissier, et à travers la porte, il notifie à Vadé d'ouvrir à la justice et à ses gens. En même tems il contrefait la voix de gardes supposés qui se disposent à enfoncer la porte. Vadé de son côté, feint d'effrayer l'escorte prétendue, d'appeler les Forts de la Halle, ses voisins dont il imite les voix rauques et menaçantes ; il ouvre, il croit avoir à combattre une poignée de gens de justice, il ne voit rien, son ami l'Ecluse se découvre et veut s'amuser de sa peur, lorsqu'en examinant le cabinet de Vadé, il voit que lui-même l'Ecluse a été trompé en croyant qu'il y avoit dedans plusieurs bateliers réunis. Cette scène qui a fait le plus grand plaisir a été suivie d'une autre non moins gaie, celle de la jurande, ou réception de Catherine comme dame de la Halle. Cette cérémonie est indispensable si elle veut épouser Jérôme. Catherine d'abord refusée à cause de son ton bourgeois, prend soudain le ton poissard, prodigue mille injures aux femmes juges, et finit par leur jetter un tabouret. Cet acte de courage la fait recevoir. L'auteur a encore introduit ua personnage épisodique, un Abbé que Vadé mistifie à son aise et qu'il expose aux huées de ses femmes de Halle.

Quelques gens moroses auront peut-être voulu siffler. Vadé les faisoit rire, et soudain la clef forée préparée avant la pièce rentroit en poche.

Voici un couplet du vaudeville de la fin qui a. été redemandé :

Jérôme au Public.

Air: Tout le long de la rivière.

      On vous voit sans être passeurs
      Passer bien des chos' aux auteurs.
      Sur la scèn' qu'un auteur s'embarque,
      Quand il veut bien mener sa barque,
      Hélas ! vous êtes trop humains
      Pour lui r'fuser un coup de mains.
C'est qu' plus d'un' pièce iroit sans le parterre
Tout le long, le long, le long d' la riviére.

Les citoyens Gavaudan, Moreau, Bertin et St-Aubin, mesd. Gonthier, Philippe et Gavaudan remplissant les principaux rôles, on devoit compter sur un double succès. L'auteur est le cit. Demautort.

F. J. B. P. G***.

La Décade philosophique, littéraire et politique, an VIII, Ive trimestre, n° 33 (30 Thermidor), p. 361-363 :

[Article repris dans l’Esprit des journaux français et étrangers, trentième année, tome I, vendémiaire an IX [septembre-octobre 1800], p. 209-211.

[Le compte rendu s’ouvre par un rappel de la renaissance du Théâtre Italien, et aussi de qui était Vadé, inventeur du genre poissard, et tout-à-fait oublié en 1800. Le fond de la pièce nouvelle est jugé « fort simple », et nourrissant « la curiosité et l’intérêt ». Le résumé de l’intrigue précède un jugement plutôt négatif : des « scènes épisodiques », peu liées au sujet, mais comiques ; des quolibets de mauvais goût (ces quolibets sont à la mode).]

Théâtre de l’Opéra-Comique.

Vadé chez lui, vaudeville en un acte.

Le Théâtre Italien, qui dut sa prospérité passée au vaudeville, et qui ne. doit imputer peut-être l’embarras actuel de ses finances qu’au dédaigneux et ridicule abandon qu’il a fait de ce genre aimable, semble avoir pris la résolution plus sage de ramener chez lui le Public et l’abondance à l’aide des joyeux compagnons du Vaudeville. Déjà le Tableau des Sabines, une Nuit de Frédéric, ont été d’heureux essais de ce retour à la gaieté. Le succès que
vient d’obtenir Vadé chez lui, jolie production du C. Demautort, représentée le 16 de ce mois, fortifier doutesans a [sic] les acteurs de ce-théâtre dans la résolution qu'ils semblent
avoir prise.

Le genre poissard ou grivois est assurément le moins estimable de tous ; aussi Vadé était-il entièrement tombé dans l’oubli du Public et des gens de lettres, quand on a essayé de faire revivre sa personne et sa manière, aux Troubadours et au Vaudeville. Ces faibles essais et leur succès équivoque n'ont point découragé le C. Dcmautort, et il faut convenir qu’il a beaucoup dépassé ses concurrens, et peut-être égalé le petit mérite de son héros. Vadé chez lui est une petite parade fort gaie, fort spirituelle, dont le dialogue est fin, serré, piquant, et dont il est permis à tout homme d’esprit de s’amuser quelques instans.

Le fond de la pièce est fort simple, et cependant excite suffisamment la curiosité et l’intérêt ; en sorte que la simplicité du sujet est un mérite de plus dans cette bagatelle. Vadé a recueilli une jeune orpheline, qui depuis quelque tems lui sert de servante ; il a consigné cent écus pour la marier à Jérôme, marinier au bacq des Invalides. Mais pour que la famille de ce dernier consente au mariage, il faut que Catherine soit reçue Dame de la Halle. La jurande de ce redoutable corps se rend chez Vadé pour examiner l’aspirante ; mais, la peur saisissant Catherine, on la trouve trop douce et trop craintive ; en- conséquence, on la refuse. Son mariage ne peut donc avoir lieu, malgré son illustre origine, car dit-elle :

Fruitière était ma mère
Et ma grand’mère aussi ;
Ma bisaïeule, Dieu merci,
Était aussi fruitière :
Ainsi, de mère en mère,
Remontant jusqu’à la première,
Eve, puisqu'elle a vendu
A son époux le fruit défendu,
Était aussi fruitière.

Le désespoir du refus qu’elle vient de subir, rend à Catherine toute son énergie ; elle accable d’injures la jurande, et jette un ,tabouret à à la tête de l'une des Femmes qui la composent. On la condamne à faire des excuses ; elle s’y soumet ; mais ses excuses deviennent une nouvelle source d’injures plus piquantes que les premières ; elle est aussitôt agrégée d’une voix unanime;

Trois ou quatre scènes épisodique, et qui ne tiennent au sujet que par un léger fil, ajoutent au comique de cet ouvrage, qui est représenté avec beaucoup de naturel, de grâce et de vérité, mais dont il eût été convenable de faire disparaître quelques quolibets d’un genre qui, pour être aujourd’hui fort à la mode, n’en est pas moins de très-mauvais goût.

R. P. D.          

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